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« des ouvrages de peinture sur verre de ce temps, dont furent garnis << non-seulement les palais de nos rois, les églises, les maisons des << grands, mais encore les lieux d'assemblées publiques dans toutes les «villes, les oratoires, les cloîtres des monastères, les salons des riches, « les appartements des simples particuliers, etc..... »

Ce fut effectivement au XVI. et à la fin du XV. siècle que la peinture sur verre fut communément employée pour les fenêtres des châteaux et des maisons opulentes.

Pierre Le Vieil est grand admirateur des vitraux de la dernière époque, et nous ne saurions nous ranger de son avis, quoique nous sachions apprécier tous les chefs-d'œuvre qu'elle a produits. « On vit, « au XVI. siècle, dit-il, la peinture sur verre devenir susceptible de ces sites gracieux, de ces lointains agréables qui jusque-là avaient été im⚫ praticables aux artistes et que l'étude de la perspective leur avait rendu • aussi faciles qu'à ceux qui s'exerçaient dans les autres genres de pein<< ture. Tel arbre, telle plante, qui, dans les siècles précédents, se • voyaient grossièrement chargés de leurs fleurs et de leurs fruits, exé« cutés, comme dans la mosaïque, par un lourd assemblage de pièces de ⚫ rapport presque innombrables, jointes avec du plomb, les montraient • réunies avec leurs troncs, leurs tiges et leurs feuillages peints sur un ⚫ ou plusieurs morceaux de verre blanc d'une juste étendue. »

Nous répondrons, avec M. Jules Renouvier, à l'opinion ainsi exprimée, que les ombres et les reflets du clair obscur, le goût de dessin plus pur, l'abandon des fonds mosaïques, l'observation de la perspective, l'admission des sites et des lointains agréables, les tons propres et naturels, la variété des costumes et des portraits, toutes ces modifications, qui rapprochent la peinture sur verre de la peinture ordinaire, ne furent introduites qu'au détriment des qualités qui lui étaient propres, et en opposition à sa destination qui est, comme peinture transparente et décorative, plutôt de frapper et d'éblouir par l'éclat et l'effet d'ensemble que d'attacher par la perfection des détails.

L'application des émaux colorants à la surface du verre devint un procédé ordinaire au commencement du XV. siècle; on voulait ainsi se rapprocher de plus en plus des effets de la peinture à l'huile; mais les émaux superficiels n'ont jamais produit le même effet que ceux qui sont incorporés au verre; ils manquent de transparence; ils ont toujours quelque chose de terne et de crasseux.

Peinture murale. La peinture murale et la peinture sur verre ont suivi une marche parallèle jusqu'à la fin du XVI. siècle.

Les personnages peints sur mur au XV. dénotent de grands progrès

dans le dessin; nous leur trouvons, comme dans les manuscrits du même siècle, des têtes remarquables de forme et d'expression.

Telles sont les figures d'anges récemment badigeonnées sur la voûte de la chapelle de la Vierge, dans la cathédrale du Mans; celles qui, à Bourges, tapissent les voûtes de l'hôtel de Jacques Cœur, et beaucoup d'autres. Mais en général l'effet est moins grand qu'aux XIII. et XIV. siècles.

Au XV. siècle, les figures tiennent souvent des banderolles ou phylactères portant des inscriptions explicatives des scènes peintes, et sous ce rapport elles offrent un double intérêt pour celui qui les observe. De même que les peintres verriers ont produit une quantité considérable d'ouvrages au XV. et au XVI. siècle, de même les peintres sur mur nous ont laissé une grande quantité de tableaux.

S'ils ont été le plus souvent recouverts d'un badigeon à la craie, on peut, avec certaines précautions, les dégager de cette croûte et les remettre au jour.

Que pensez-vous du style ogival de la troisième époque?

L'infériorité du style ogival tertiaire, comparé au primitif ou au secondaire, ne me paraît pas douteuse.

Cette profusion de découpures de feuillages, de crochets; ces feuilles frisées, déchiquetées, contournées, placées en guise de panaches autour des fenêtres, des portes, des frontons, contrastent par leur volume et leur complication, avec les maigres filets qui remplacent les colonnes élégantes des XIII. et XIV. siècles.

Les nervures prismatiques sont aussi moins agréables que les tores arrondis et séparés les uns des autres par des cannelures profondes.

Enfin, les églises du XV. sont presque toutes moins grandes et moins élevées que celles du XIV., et cette profusion de pinacles et de figures pyramidales qui les décorent ne peut dissimuler entièrement leur défaut d'élévation.

Je ne nie pas toutefois que le style ogival de la troisième époque n'offre de grandes beautés, et je connais des monuments d'une rare élégance et d'une exécution admirables, qui appartiennent tout entiers à ce style. Mais, je le répète, l'architecture du XIV. et surtout celle du XIII. est bien plus pure; elle me paraît bien préférable.

Qu'avez-vous à dire de la distribution géographique du style ogival de la troisième époque ?

L'observation que j'ai faite relativement à l'architecture du XIV. siècle s'applique, pour le midi de la France, à l'architecture du XV*.; elle n'a pas non plus, dans cette contrée, pris le même développement

que dans les régions plus au Nord. Cependant les édifices gothiques de cette époque y sont plus répandus que ceux du XIII. et du XIV. siècle. On cite à Lyon, comme église très-remarquable du XV. siècle, celle de St.-Nisier; elle ne manque pas d'une certaine élévation; mais si on la compare à St.-Wulfrand d'Abbeville, à St.-Ouen de Rouen, à la cathédrale de Troyes, à l'église de l'Abbaye de St.-Ricquier et à beaucoup d'autres de nos églises du XV. siècle, il faudra reconnaître qu'elle leur est de beaucoup inférieure. L'examen comparé des monuments de cette époque montre donc, de plus en plus, combien l'architecture ogivale a eu de peine à se naturaliser dans les provinces centrales et méridionales.

Il n'en était point ainsi sur les bords du Rhin et en Allemagne; l'architecture a pris, dans ces pays, au XV. siècle, un admirable développement. Les nervures prismatiques, les colonnettes effilées et les autres caractères de l'époque se montrent dans l'architecture ogivale tertiaire des bords du Rhin, comme chez nous. Seulement, on trouve, dans les fenêtres subdivisées en meneaux, des dessins ou compartiments arrondis plus souvent que les dessins flamboyants. Les feuillages frisés et plusieurs moulures employées à profusion dans l'ouest de la France ne se trouvent pas aussi habituellement et sont traités un peu différemment en Alsace et en Allemagne, et, je crois aussi, dans les départements du Midi.

Les panneaux, soit en application, soit détachés, et les autres détails qui constituent le style perpendiculaire anglais, prédominent dans l'ornementation des monuments du XVe siècle. Cette observation est applicable en partie aux églises de Belgique et des Pays-Bas,

Les tours offrirent, surtout à cette époque, dans ce pays, une légèreté et une élégance supérieures. Rien de plus remarquable en effet que la tour de Strasbourg, celle de Fribourg en Brisgaw, et celle de Thann en Alsace, qui paraît une imitation des deux premières.

La Belgique montre aussi, dans l'admirable tour du beffroi de Bruxelles, l'habileté et le goût de ses architectes.

Que sait-on de l'état des architectes au XVe siècle?

Les artistes étaient nombreux et habiles au XV. siècle; mais au zèle religieux qui les animait, au XIII, et au XIV., vint se substituer un autre sentiment, l'amour-propre, et le désir de briller. S'ils travaillaient pour l'amour de l'art et pour la gloire de Dieu, ils pensaient aussi à leur propre gloire, à leur réputation.

Ce fut au XV, siècle que les architectes formèrent, en Alsace et

en Allemagne, des sociétés différentes de celles qui avaient existé, et qu'ils voulurent se distinguer des autres, en créant des loges maçonniques. Ces réunions étaient pour le temps des espèces d'académies de sculpture et d'architecture; je ne sache pas qu'il ait existé dans les autres parties de la France des sociétés d'artistes établies sur les mêmes bases. Les tailleurs de pierre de Strasbourg jouissaient depuis long-temps d'une haute considération à cause des travaux exécutés pour l'érection de leur cathédrale, lorsque Dotzinger, qui répara le chœur de cette basilique, profita de son ascendant pour réunir en un seul corps toutes les corporations éparses, et pour former une vaste association qui comprenait la plus grande partie de l'Allemagne. Cette compagnie, formée en 1452, fut consolidée, en 1459, par une assemblée générale des maîtres des ateliers ou loges, tenue à Ratisbonne : elle fit des réglements pour la réception des apprentis, des compagnons et des maîtres, établit des signes secrets par lesquels ses membres pouvaient se reconnaître, et adopta pour grands maîtres de toute la confraternité les architectes de la cathédrale de Strasbourg. Cette association fut confirmée dans la suite par les empereurs d'Allemagne. Le magistrat de Strasbourg confia pendant quelque temps la décision de toutes les affaires litigieuses, en fait de bâtiments, au chef de son atelier des tailleurs de pierre et le duc de Milan demanda, en 1481, à ce magistrat, un architecte capable de diriger la construction de la superbe église métropolitaine de sa capitale.

La suprématie du grand maître de l'atelier de Strasbourg sur les loges d'une grande partie de l'Allemagne, ne cessa qu'après la réunion de cette ville à la France.

AUTELS.-FONTS BAPTISMAUX.— JUBÉS ET CHAIRES.TOMBEAUX.-STALLES ET BOISERIES.-VASES SACRÉS.-PALÉOGRAPHIE MURALE

DURANT LA 3o. PÉRIODE de l'ère ogivale.

Autels.

Quel est le style des autels du XVe siècle?

Quelques-uns sont extrêmement riches, et il nous en reste encore une certaine quantité de cette époque je n'en connais pas de plus

beaux que ceux de l'église du Folgoat (Finistère); ils sont en pierre Hite de Kersanton, de couleur verdâtre et fort dure, dont on a su sirer, en Bretagne, un très-grand parti.

L'autel majeur de la collégiale du Folgoat occupe toute la largeur d'une énorme fenêtre qui s'élève depuis le rétable jusqu'au sommet de sa voûte dix arcatures et des guirlandes de feuilles de vigne, admirablement découpées, décorent la façade de cet autel qui a 3 mètres 12 de longueur, 1 mètre 27 de profondeur, 1 mètre 10 de auteur.

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Un autre autel montre, autour de la table, une magnifique guirlande de feuilles de vigne et de chardons et des arcatures garnies de statuettes; douze arcatures occupent le devant de l'autel, et trois chacune des extrémités.

Dans la chapelle ducale qui communique avec le chœur sont deux autres autels placés devant des fenêtres : l'un de ces autels, moins long que le précédent, est cependant orné, sur le devant, d'un pareil nombre d'arcatures.

L'autre autel, dont voici l'esquisse, n'a que 2 mètres 40 de long sur

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90 cent. de profondeur et 1 mètre 8 de hauteur; trois colonnettes en supportent, en avant, la décoration qui se compose de quatre arcatures séparées alternativement par une colonne et par un pendentif.

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