a Caumont, votre illustre compatriote. Car il est comme vous jaloux de la gloire de notre cité; comme vous, il s'intéresse au progrès des connaissances humaines, comme vous, il se réjouit d'applaudir aux efforts désintéressés des hommes de bien qui en augmentent le précieux dépôt. M. de Caumont compte parmi les prêtres du diocèse des disciples et des coopérateurs distingrés. Des voix plus compétentes vous rappelleront tout à l'heure les titres de M. de Caumont aux honneurs extraordinaires que vous lui décernez. Nous ne voudrions commettre ni l'imprudence ni l'indiscrétion de prévenir leurs discours. Mais ne paraitrions-nous pas méconnaître, ou avoir oublié les services éminents que M. de Caumont a rendus aux édifices religieux du diocèse, à l'art chrétien et à la religion, si nous ne lui apportions dans cette circonstance un tribut spécial de notre gratitude ? Nous laisserons donc à vos orateurs la tâche qu'ils ont bien voulu accepter. Mieux que nous, ils vous diront la vive impulsion que M. de Caumont a donnée à l'étude de nos antiquités nationales, comment il sut rendre cette étude facile et attrayante, combien de disciples il anima de son esprit et forma par ses méthodes, combien son initiative fut hardie, sympathique et féconde, combien de richesses artistiques ignorées il révéla å ses concitoyens, comment il fit revivre nos vieux édifices religieux, avec quel zèle il les décrivait, comment il renouvela l'intelligence et le goût de l'art, comment il nous apprit à lire dans les détails de l'architecture la pensée de nos aseux, à la rétablir où le temps l'avait effacée et où l'ignorance l'avait altérée, à la reproduire dans des édifices nouveaux. Qu'ils nous permettent du moins de leur dire que nous nous associerons avec bonheur à ces éloges. Ils seront les interprètes de notre commune estime et de notre commune reconnaissance. La religion a des racines si profondes dans la nature de l'homme et dans l'histoire des sociétés que presque tout progrès scientifique atteste sa vérité ou fait mieux connaître ses bienfails. L'archéologie, si jeune encore et déjà si puissante, apporte son concours à cette universelle apologie. L'archéologue, en effet, ne se contente pas de décrire les caractères divers de nos monuments antiques, d'assigner à chacun l'ordre auquel il appartient, de reconstruire leur istoire, il nous découvre au-delà des pierres froides et inanimées qui frappent nos sens, un idéal qui captive notre esprit et un sentiment qui émeut notre âme. L'archéologie agrandit l'horizon de l'histoire, elle évoque devant nous des générations oubliées. Or, Messieurs, quel est le résultat le plus incontestable de ses patientes recherches? Partout elle rencontre les empreintes ineffaçables de la religion. La plupart de ces monuments qu'elle étudie et qu'elle admire, c'est la religion qui les a élevés; cette architecture si originale, cet art merveilleux qui donne à ces œuvres une sorte de consécration religieuse et les sépare de tout monument profane, c'est la religion qui l'a créé. Le plus grand nombre de ses découvertes rendent un témoignage éclatant à la foi de nos pères et à la puissante influence de la religion. Vous tous, Messieurs, disciples, coopérateurs et amis de M. de Caumont, vous continuerez son œuvre, vous poursuivrez cette glorieuse apologie de la religion. Plus que jamais elle est opportune. Le vieux christianisme de nos aïeux, qui a veillé sur leur berceau, qui a présidé à leur éducation, qui a donné à leur génie leurs plus sublimes inspirations, n'est plus seulement attaqué dans l'enceinte de quelques écoles, il est signalé chaque jour par mille organes de la presse et jusque dans la tribune de nos assemblées politiques, tantôt ouvertement et avec violence, tantôt avec une modération plus habile et sous des noms divers comme l'ennemi public de la civilisation moderne et de la patrie. Vous donnerez par vos découvertes un démenti formel à ces bruyantes accusations. Vous affermirez les esprits pusillanimes contre des terreurs puériles, vous maintiendrez parmi nous le respect des traditions religieuses qui ont fait l'honneur et la prospérité de nos ancêtres, bien convaincus qu'un peuple sans croyance ne tarde pas à devenir un peuple sans force morale et sans vertu, condamné à une irrémédiable dissolution sociale. Discours de M. le comte de Perthuis, préfet du Calvados. MONSEIGNEUR, MESSIEURS, car ils Il est peu d'hommes dont la vie ait été plus complétement, plus utilement remplie que celle de M. Arcisse de Caumont. Il en est peu dont l'action personnelle, circonscrite dans le domaine de la science, de l'agriculture et des arts, ait exercé anssi loin la bienfaisante influence de ses enseignements, de ses exemples, et j'oserai dire de ses entraînements ; elle s'est étendue de son pays natal, cette belle et riche Normandie, à la France tout entière et au-delà. Doué d'une prodigieuse activité, d'une persévérance à toute épreuve, véritable initiateur, progressiste ardent, il avait la foi qui s'impose, et ce feu sacré, cette étincelle qui éclaire et qui donne la vie. Je laisse à d'autres plus autorisés, plus compétents, ont été ses collègues ou ses amis, ses collaborateurs ou ses disciples, ils ont eu l'insigne honneur de le connaître, la bonne fortune de l'approcher, le regret de le perdre, - je laisse à d'autres le soin de raconter la vie de l'éminent archéologue, de vous dire tout ce qu'il a fait et créé, de vous parler de ces associations fécondes dont il a été le fondateur. Je ne puis cependant nommer M. de Caumont sans rappeler en quelques mots, les services rendus par la Société des Antiquaires de Normandie et par l'Association normande. Peu de pays possèdent un aussi grand nombre de monuments que la France; aucun n'en a de plus variés de style et de caractère. Les efforts du gouvernement, les savants travaux de la Commission des Monuments historiques, l'action administrative n'auraient pas suffi à les préserver en grand nombre de la mutilation et de la ruine. Il fallait aussi le concours d'associalions libres, puissantes par leur organisation, par le nombre et la valeur de leurs membres, par leurs ramifications et leurs altaches, pour vulgariser le goût de l'art et l'amour du beau, pour répandre dans le public des notions vraies sur la valeur des constructions antiques. Les Sociétés des Antiquaires de Normandie, dont M. de Caumont a été, comme secrétaire, un des membres les plus utiles et le véritable fondateur en 1823, figure au premier rang de celles qui se sont formées, tant par son ancienneté que par l'importance qu'elle a su promptement acquérir. Dès 1830, le ministre de l'intérieur, c'était alors M. Guizot, reconnaissant l'efficacité de son concours, recommandait aux préfets de favoriser, dans leurs départements, la formation de réunions analogues. A d'autres titres, l'Association normande a des mérites égaux, les mêmes droits à la reconnaissance de tous. Créée dans le but d'encourager l'industrie agricole, manufacturière et commerciale, les beaux-arts, les sciences et les belles lettres, etc., elle n'a cessé, depuis quarante-quatre ans, de poursuivre son @uvre de moralisation et de progrès. Par ses enseignements et par ses conseils, comme par les récompenses qu'elle a distribuées annuellement dans ses concours provinciaux, avec tant de largesse et de discernement, et qu'elle va distribuer encore aujourd'hui, elle a contribué à améliorer le bien-être général, à développer le goût de l'étude, à conserver et à augmenter aussi les richesses de notre pays. La première part de ces succès revient encore à M. de Caumont, dont M. de Montalembert a dit au Congrès archéologique de 1844: « Le premier, lorsque nous étions tous, les uns dans l'enfance, les autres dans l'ignorance, il a rappelé, en quelque sorte, à la vie l'art du moyen âge, a tout vu, tout étudié, tout décrit. Il a plus d'une fois parcouru la France entière pour sauver ce qui pouvait être sauvé, el pour découvrir, non-seulement les monuments, mais, ce qui était plus rare encore, les hommes qui pouvaient les aimer et les comprendre; il nous a tous éclairés, encouragés, instruits el rapprochés les uns des autres. Qui pourrait dire les obstacles, les dégoûts de tous genres contre lesquels il a dû lutter pendant cetto laborieuse croi sade de vingt-cinq années ?... Sachons lui en tenir compte par notre affection, notre respect et notre reconnaissance !... » L'affection des collaborateurs de M. Arcisse de Caumont, la reconnaissance de ses concitoyens et le concours du gouvernement de la République ont permis, Messieurs, de réaliser enfin ce vau. On vient de découvrir devant vous, au milieu de sa ville natale, la statue de l'illustre archéologue, hommage bien da à la mémoire de celui dont l'initiative puissante et l'infatigable apostolat ont doté notre pays de tant d'ouvres qui survivent à leur fondateur, - hommage aussi, permettez-moi de le dire, à lous ceux, si nombreux dans celte enceinte, qui l'ont aidé dans l'accomplissement de sa grande et laborieuse lâche. Discours de M. Pilet des Jardins, député de Bayeux. MESSIEURS, Autour de cette statue, les voix les plus autorisées et les plus compétentes viennent de dire, pour la postérité, ce que fut le grand euvre accompli, pendant un deini-siècle, par Arcisse de Caumont. Qu'il soit permis à l'arrondissement qui a vu naître ce savant éminent, d'exprimer, lui aussi, les sentiments d'admiration qu'il éprouve pour l'un de ses plus illustres, et, en même temps, l'un de ses plus modestes enfants ! Et ces sentiments n'éclatent-ils pas, de la manière la plus éloquente, par l'enthousiasme que montrent en ce moment nos populations, d'ordinaire si calmes et si paisibles ! C'est qu'en effet, Arcisse de Caumont a grandement honoré son pays d'origine par l'influence si légitime et si efficace qu'il a exercée sur ses contemporains, non-seulement dans notre Normandie, mais encore dans la France entière et à l'étranger. Le premier en France, il a démontré, par sa vie tout entière, ce que peut produire l'initiative privée quand elle est soutenue XLII° SESSION. 34 |