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de M. Darcy que les travaux qu'il a prescrits n'engagent point la solution de la question.

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Les parties hautes de la nef, construites dans les premières années du XIIIe siècle, présentent le plus haut intérêt pour l'histoire de l'art. Erreurs prodigieuses de M. Viollet-le-Duc, qui reporte la construction de la nef à la fin du XIIe siècle et celle des chapelles au xve siècle. (Voir au dossier la notice sur la cathédrale.)

D'après les principes longtemps enseignés et propagés par l'ancienne Commission des monuments historiques et les instructions ministérielles qu'elle inspirait, un monument historique doit être conservé, à moins qu'il ne soit. absolument irréparable. Toute réfection des parties mauvaises doit être faite dans les mêmes formes, sans quoi l'architecte moderne substitue sa conception à celle de l'auteur primitif, dénature l'œuvre qu'il est chargé de conserver, et lui enlève son caractère historique.

Les parties hautes de la nef d'Évreux encore subsistantes sont, non-seulement réparables, mais très-solides, arcsdoubleaux et ogives en parfait état, fissures insigni

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fiantes dans les moellons qui ferment les triangles, écartement fort ancien des murs, arrêté depuis la fin du XVe siècle ou le commencement du xvio par un renfort qui est encore aujourd'hui parfaitement d'aplomb. La travée du milieu était plus mauvaise, mais nous n'avons pas à nous en occuper, puisque M. Darcy l'a détruite avec deux autres, malgré les instructions de M. le Ministre.

A l'appui de notre opinion, nous présentons celle de MM. Modeste le Roy et Guersent, chargés de l'entretien de la cathédrale depuis plus de quarante ans; celle de plusieurs hommes compétents: architectes, conducteurs des ponts et chaussées, entrepreneurs, etc..., qui ont signé la pétition de cinq cents habitants d'Évreux; celle de M. Sa

bine, chargé par nous d'un examen approfondi de la question; celle de huit architectes de Paris qui ont approuvé le rapport de M. Sabine par une délibération motivée; celle de cinquante architectes de Londres qui sont venus, le 21 août dernier, examiner notre cathédrale, sous la direction de M. Scharpe, membre de l'Institut royal des architectes britanniques et concessionnaire du chemin de fer de Perpignan.

Ces Messieurs doivent publier sur la cathédrale d'Évreux un article entièrement conforme à nos idées dans leur magnifique revue: The Builder.

D'autres revues spéciales ont déjà publié des articles dans le même sens : La Revue de l'art chrétien, dans son numéro du mois de juillet dernier, et le Bulletin monumental dans le n° 5 de cette année. L'auteur de ce dernier article, M. Léon Palustre, principal rédacteur du Bulletin, est venu à Évreux pour examiner par lui-même les travaux de la cathédrale.

La question a été soumise à la Société des Antiquaires de France, dans une séance du mois de juin, où se trouvaient, avec d'autres savants archéologues, MM. Quicherat et de Montaiglon, qui sont venus plusieurs fois à Évreux étudier notre cathédrale. Tous les membres présents ont donné leur assentiment aux opinions émises par M. Raymond Bordeaux.

Nous soumettrons prochainement la question à la Société des Antiquaires de Normandie, dont beaucoup de membres nous ont déjà fait connaitre leur avis conforme au nôtre.

Jusqu'à présent nous n'avons rencontré, en dehors de MM. les inspecteurs généraux, aucun architecte, aucun archéologue qui n'ait partagé notre manière de voir.

En résumé, nous demandons à MM. les commissaires de se prononcer :

1° Pour le maintien du comble dont la charpente est en parfait état, sauf une faible partie qui est moderne.

2o Pour le maintien des voûtes, contre-forts et arcs-boutants encore subsistants, en y faisant les réparations nécessaires et urgentes.

3o Pour la réfection, dans les mêmes formes, des parties si malheureusement détruites.

4o Pour le maintien du dallage qui recouvre les bascôtés.

De cette manière, un crime contre l'art sera évité, d'importantes économies seront réalisées, et les fonds alloués pourront être appliqués à la restauration des autres parties de notre cathédrale, dont le chœur, en particulier, est beaucoup plus malade que la nef.

N° 13.

OCTOBRE 1874.

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NOTE SUR L'ÉTAT DE LA QUESTION DE LA CATHÉDRALE D'ÉVREUX.

Plusieurs lettres des députés de l'Eure et d'autres personnes annoncent, dans la première quinzaine de juillet, que, sur leurs vives instances, M. le Ministre a conçu le projet de nommer une nouvelle commission, et a donné l'ordre de suspendre tout travail de démolition.

11 juillet. Une lettre ministérielle annonce à M. le Préfet de l'Eure que des instructions sont données à l'architecte « pour diriger les travaux de manière à laisser intacts les points sur lesquels portent les réclamations. »

5 août. M. de Broglie, venu à Évreux pour présider la distribution des prix du Lycée, annonce tout haut, au diner de la Préfecture, qu'une commission va tire orga

nisée pour un nouvel examen de la question, et qu'elle viendra prochainement à Évreux.

10 août. - M. le Préfet de l'Eure donne la même assurance à M. de Salvandy.

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11 août. Vers deux heures, on commence à démolir les contre-forts avec leurs arcs-boutants du côté nord, et près de la moitié de la voûte. L'un des membres du Comité écrit aussitôt à M. Passy, qui répond qu'il n'y comprend rien; qu'on s'occupe toujours de nommer une commission; qu'il va prévenir le ministère.

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19 août. Le Ministre donne aux trois commissaires des instructions que ces Messieurs nous ont communiquées, où il leur pose deux questions: 1° Peut-on ne point démolir la voûte de la nef? 2o Peut-on conserver les contreforts avec leurs deux arcs-boutants?

30 août. Le Ministre, après avoir demandé des explications à l'architecte, répond à M. Passy : « Les travaux en cours d'exécution n'engagent en rien la solution de la question. » Il annonce la venue, à Évreux, des trois commissaires.

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7 septembre. Visite des trois commissaires. Le Comité d'Évreux leur remet la note ci-jointe.

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10 septembre. M. Raymond Bordeaux, secrétaire du Comité, demande à M. le Ministre qu'il veuille bien nous communiquer le rapport des commissaires et recevoir, s'il y a lieu, nos observations avant de prendre une décision définitive.

Depuis cette époque, nous n'avons reçu aucune communication officielle; mais nous savons que le rapport des trois commissaires est déposé. Sur le premier point, ils répondent que la voûte était démolie avant leur arrivée; sur le second, qu'on pourrait peut-être refaire les deux arcs-boutants, mais qu'il vaut mieux ne pas les refaire.

Par là, ces Messieurs essaient de se dégager, en ne touchant pas la principale question qu'il y avait à résoudre et que nous avons précisée dans notre note: Les trois travées encore debout et laissées au culte peuvent-elles être réparées ?

Nous devons ajouter que, depuis le départ des commissaires, M. Darcy a continué les démolitions sans attendre. la décision ministérielle, et a fait détruire les trois contreforts du midi avec leurs arcs-boutants.

Comité pour la conservation de la cathédrale d'Évreux.

MM.

Le baron de Sepmanville.

David, juge au tribunal civil, conseiller municipal.
Izarn, vice-président de la Société d'Agriculture, Sciences,
Arts et Belles-Lettres de l'Eure.

De Burey, officier de la Légion d'honneur, conseiller municipal.

Chauvel, manufacturier, conseiller municipal, ancien président du tribunal de commerce.

Jules Delhomme, propriétaire.

Lebeurier, chanoine titulaire, ancien élève de l'école des
Chartes, membre de la Société des Antiquaires de France
et de la Société des Antiquaires de Normandie.
Sabine, architecte, membre de la Société des Antiquaires
de Normandie.

Raymond Bordeaux, docteur en droit, membre de la
Société des Antiquaires de France, et de la Société des
Antiquaires de Normandie, secrétaire du Normand.
Le Comité se propose de faire, auprès des autorités com-
pétentes, toutes les démarches nécessaires pour obtenir

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