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Eftevan de Gamarre, avec lequel il fut battu à CHAP. Rétel par le Maréchal du Pleffis-Pralin. On conIV. naît ce billet du Maréchal d'Hocquincourt à la Ducheffe de Montbazon, Peronne eft à la belle des belles. On fait fes vers du Duc de la Rochefoucault pour la Ducheffe de Longueville, lorfqu'il reçut au combat de St. Antoine un coup de moufquet, qui lui fit perdre quelque tems la vuë.

la guerre.

Pour mériter fon coeur, pour plaire à fes beaux yeux,
J'ai fait la guerre aux Rois; je l'aurais faite aux Dieux.

On voit dans les mémoires de Mademoiselle une lettre de Gafton Duc d'Orléans fon pére, dont l'adreffe eft, à Mefdames les Comteffes Maréchales de camp dans l'armée de ma fille contre le Mazarin.

Factions La guerre finit & recommença à plufieurs reaufiridi- prifes; il n'y eut perfonne qui ne changeât soucules que vent de parti. Le Prince de Condé, ayant ramené dans Paris la Cour triomphante, fe livra au plaifir de la mépriser après l'avoir défendue; & ne trouvant pas qu'on lui donnât des récompenfes proportionnées à fa gloire & à fes fervices, il fut le premier à tourner Mazarin en ridicule, à braver la Reine, & à infulter le gouvernement qu'il dédaignait. Il écrivit, à ce qu'on prétend, au Cardinal, all'illuftriffimo Signor Faquino. Il lui dit un jour, Adieu Mars. Il encouragea un Marquis de Jarfai à faire une déclaration d'amour à la Reine, & trouva mauvais qu'elle ofât s'en offenfer. Il fe ligua avec le Prince de Conti fon frère, & le Duc de Longueville, qui abandonnèrent le parti de la Fronde. On avait appellé la cabale du Duc de Beaufort au commencement de la régence, celle des importans; on appellait celle de Condé, le parti des petitsmaîtres 2 parce qu'ils voulaient être les maîtres de l'Etat. Il n'eft refté de tous ces troubles d'autres traces que ce nom de petit-maitre, qu'on applique aujourd'hui à la jeuneffe avantageufe & mal élevée, & le nom de Fron

deurs qu'on donne aux cenfeurs du gouverne

ment.

CHAP,

On employe de tous côtés des moyens auffi IV. bas qu'odieux. Joly Confeiller au Châtelet, depuis fecrétaire du Cardinal de Retz, imagina de fe faire une incifion au bras, & de fe faire tirer un coup de piftolet dans fon caroffe, pour faire accroire que la Cour avait voulu l'affaffiner.

Quelques jours après, pour divifer le parti du Prince de Condé & les Frondeurs, & pour les rendre irréconciliables, on tire des coups de fufil dans les caroffes du grand Condé, & on tue un de fes valets de pied, ce qui s'appellait une Joliade renforcée. Qui fit cette étrange entreprise? eft-ce le parti du Cardinal Mazarin? Il en fut très foupçonné. On en accufa le Cardinal de Retz, le Duc de Beaufort & le vieux Brouffel en plein Parlement, & ils furent juftifiés.

Tous les partis fe choquaient, négociaient, fe trahiffaient tour-à-tour. Chaque homme important, ou qui voulait l'être, prétendait établir fa fortune fur la ruine publique, & le bien public était dans la bouche de tout le monde. Gafton était jaloux de la gloire du grand Condé & du crédit de Mazarin. Condé ne les aimait ni ne les eftimait. Le Coadjuteur de l'Archevêché de Paris, voulait être Cardinal par la nomination de la Reine, & il se dévouait alors à elle pour obtenir cette dignité étrangère qui ne donnait aucune autorité, mais un grand relief. Telle était alors la force du préjugé, que le Prince de Conti frère du grand Condé voulait auffi couvrir fa couronne de Prince d'un chapeau rouge. Ettel était en même tems le pouvoir des intrigues qu'un Abbé fans naiffance & fans mérite nommé La Rivière difputait ce chapeau Romain au Prince ils ne l'eurent ni l'un ni l'autre, le Prince parce qu'enfin il fut le méprifer, La Rivière parce qu'on fe moqua de fon ambition: mais le Coadjuteur l'obtint pour avoir abandonné le Prince de Condé aux reffentimens de la Reine.

;

Ces reffentimens n'avaient d'autre fondement

IV.

ces de

que de petites querelles d'intérêt entre le grand CHAP. Condé & Mazarin. Nul crime d'Etat ne pouvait être imputé à Condé; cependant on l'arrêta dans Les Prin le Louvre, lui, fon frère de Conti & fon beauCondé & frère de Longueville, fans aucune formalité, & de Conti uniquement parce que Mazarin le craignait. Cette & le Duc démarche était à la vérité contre toutes les loix, de Lon- mais on ne connoiffait les loix dans aucun des gueville,

arrêtés le partis.

18 jan- Le Cardinal pour se rendre maître de ces Prinvier 1650. ces ufa d'une fourberie qu'on appella politique. Les Frondeurs étaient accufés d'avoir tenté d'affaffiner le Prince de Condé; Mazarin lui fait accroire qu'il s'agit d'arrêter un des conjurés & de tromper les Frondeurs ; que c'est à fon Alteffe à figner l'ordre aux gens-d'armes de la garde de fe tenir prêts au Louvre. Le grand Condé figne lui-même l'ordre de fa détention. On ne vit jamais mieux que la politique confifte fouvent dans le menfonge, & que l'habileté eft de pénétrer le menteur.

Le Prince de Condé eût pû gouverner l'Etat, s'il avait feulement voulu plaire; mais il fe contentait d'être admiré. Le peuple de Paris, qui avait fait des barricades pour un Confeiller-Clerc prefque imbécille, fit des feux de joye lorfqu'on mena au donjon de Vincennes le défenfeur & le héros de la France.

Ce qui montre encor combien les événemens trompent les hommes, c'eft que cette prifon des trois Princes, qui femblait devoir affoupir les fa&tions, fut ce qui les releva. La Princeffe de Condé la mère exilée refta dans Paris malgré la 1649. Cour, & porta fa requête au Parlement. Sa femme après mille périls fe réfugia dans la ville de Bordeaux, aidée des Ducs de Bouillon & de la Rochefoucault; elle fouleva cette ville & arma l'Espagne.

Toute la France redemandait le grand Condé. S'il avait paru alors, la Cour était perdue. Gourville qui de fimple valet de chambre du Duc de la Rochefoucault, était devenu un homme con

fidérable par fon caractère hardi & prudent, imagina un moyen fûr de délivrer les Princes CHA P. enfermés alors à Vincennes. Un des conjurés eut IV. la bêtise de se confeffer à un prêtre de la Fronde. Ce malheureux prêtre avertit le Coadjuteur, perfécuteur en ce tems-là du grand Condé. L'entreprise échoua par la révélation de la confeffion fi ordinaire dans les guerres civiles.

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On voit par les mémoires du Confeiller d'Etat Lenet, plus curieux que connus combien dans ces tems de licence effrénée, de troubles d'iniquités, & même d'impietés les prêtres avaient encor de pouvoir fur les efprits. Il rapporte qu'en Bourgogne le Doyen de la fainte chapelle attaché au Prince de Condé, offrit pour tout fecours de faire parler en fa faveur tous les prédicateurs en chaire, & de faire manoeuvrer tous les prêtres dans la confeffion.

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Pour mieux faire connaître encor les mœurs du tems il dit que lorfque la femme du grand Condé alla fe réfugier dans Bordeaux, les Ducs de Bouillon & de la Rochefoucault allèrent au devant d'elle à la tête d'une foule de jeunes Gentilshommes, qui crièrent à fes oreilles, Vive Condé, ajoutant un mot obfcène pour le Mazarin, & la priant de joindre fa voix aux leurs.

Un an après, les mêmes Frondeurs qui avaient vendu le grand Condé & les Princes à la vengeance timide de Mazarin, forcèrent la Reine a ouvrir leurs prifons & à chaffer du Royaume fon premier Miniftre. Mazarin alla lui-même au 13 Fevr Havre où ils étaient détenus; il leur rendit leur 1651. liberté, & ne fut reçu d'eux qu'avec le mépris qu'il en devait attendre ; après quoi il fe retira à Liége. Condé revint dans Paris aux acclamations de ce même peuple qui l'avait tant hai. Sa préfence renouvella les cabales, les diffenfions, & les meurtres.

Le Royaume refta dans cette combuftion encor quelques années. Le Gouvernement ne prit prefque jamais que des partis faibles & incertains: il semblait devoir fuccomber : mais les ré

voltés furent toujours défunis,& c'eft ce qui fauva“ CHAP. la Cour. Le Coadjuteur, tantôt ami, tantôt enIV. nemi du Prince de Condé, fufcita contre lui une partie du Parlement & du peuple: il ofa en même tems fervir la Reine en tenant tête à ce Prince, & l'outrager en la forçant d'éloigner le Cardinal Mazarin, qui fe retira à Cologne. La Reine, par une contradiction trop ordinaire aux gouvernemens faibles, fut obligée de recevoir à la fois fes fervices & fes offenfes, & de nommer au Cardinalat ce même Coadjuteur l'auteur des barricades, qui avait contraint la famille Royale à fortir de la capitale & à l'affiéger.

CHAPITRE CINQUIEME. Suite de la guerre civile, jufqu'à la fin de la rébellion en 1654.

Enfin le Prince de Condé fe réfolut à une guer

Le grand Core, qu'il eût dû commencer du tems de la Fronfait la de, s'il avait voulu être le maître de l'Etat, ou guerre qu'il n'aurait dû jamais faire, s'il avait été cicivile. toyen. Il part de Paris; il va foulever la Guienne, le Poitou & l'Anjou, & mendier contre la France le fecours des Efpagnols, dont il avait été le fléau le plus terrible.

Rien ne marque mieux la manie de ce tems & le déréglement qui déterminait toutes les démarches, que ce qui arriva alors à ce Prince.. La Reine lui envoya un courier de Paris, avec des propofitions qui devaient l'engager au retour. & à la paix. Le courier fe trompa; & au lieu d'aller à Angerville, où était le Prince, il alla à Augerville. La lettre vint trop tard. Condé dit que s'il l'avait reçue plus tôt, il aurait accepté les propofitions de paix; mais que puisqu'il était déja affez loin de Paris, ce n'était pas la peine d'y retourner. Ainfi la méprise d'un courier, & le pur

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