table romain, en y faisant établir une maison dans le goût et le luxe de Rome. On ne peut révoquer en doute la présence des légions de César dans le Val de la Loire ; Sancerre était en effet un point militaire trop important pour être négligé. Entre la hauteur de Sancerre qui protégeait le campement de la légion, des avant-postes bordaient le littoral de la Loire et de ce nombre devaient être Château-Gordien, et probablement la maison du Pezeau; ces deux postes étaient sur le bord de la Loire et devaient servir à empêcher toute surprise de la part des Gaulois qui, de l'autre rive, pouvaient tenter un coup de main. La Loire alors ne passait pas dans le lit qu'elle suit aujourd'hui elle coulait plus au midi, entre St.-Satur, et St.Thibault; tout le terrain occupé aujourd'hui par St.-Thibault est un terrain d'alluvion comme dans tout le Val de la Loire, depuis Heny jusqu'à Liré et au-delà. La preuve incontestable de ce fait résulte de la présence d'un ancien quai, près des ruines du château des Aubelles, à demi-lieue en amont de St.-Satur, quai fort reconnaissable à la bordure de pierre de taille encore garnie d'anneaux de fer destinés à l'amarre des bateaux, et à l'inclinaison du terrain qui s'est fait en talus. Loire passait donc là évidemment, c'est-à-dire à plus d'un kilomètre du lit actuel. Quant au château des Aubelles, il existait vers 1200, car on lit dans une vieille charte dont la date m'échappe en ce moment: Datum in nostro Castello Aubellarum trans Ligerim. Dans la commune d'Heny, à trois lieues environ de St.Thibault, on trouve le sable pur de la Loire en fouillant seulement à un mètre dans les terrains arables et dans les prairies qui sont peu distantes de la Loire. Le terrain alluvionnaire du Val ne peut donc être mis en doute. Pour en revenir au Castrum Gordianum, on peut dire que la présence de tuiles romaines dans une localité ne suffit pas pour emporter l'établissement d'une station romaine en cet endroit. D'accord; mais elle est au moins l'indice que là a existé une construction romaine, et une habitation isolée ne se construisait guère par les Romains en pays étranger sans qu'elle fût protégée par une garnison voisine. En admettant que l'emplacement de la Folie ne soit pas précisément celui de Château-Gordien, il devait au moins être très-voisin; et s'il m'eût été permis de faire des fouilles plus nombreuses sur différents terrains limitrophes, peut-être eussé-je retrouvé des preuves irrécusables de la situation du camp ou castrum romain. Mais il y avait là une route départementale, chose sacrée à laquelle il n'est pas permis de toucher impunément; et puis les propriétaires, simples laboureurs, peu archéologues, ne se souciaient pas de laisser fouiller leurs héritages pour ne trouver que des briques, des tuiles et des débris de murailles. Mais je dois ajouter que dans un temps trèsvoisin de la fouille que je fis exécuter, on trouva dans un pré peu distant un fort beau médaillon de Marc-Aurèle qui fut apporté à M. le président Matter. Alors je ne m'occupais pas de numismatique et fort peu d'archéologie; de là le peu d'importance que je mis à explorer les environs. Ici s'engage une discussion au sujet des briques à rebords; M. Thévenot prétend que ces briques seules ne doivent pas toujours être considérées comme monuments de l'époque galloromaine, que ce genre a pu être conservé dans certaines localités jusqu'au XIV. siècle, et de là il conclut que si ces briques ne sont pas accompagnées d'autres vestiges d'antiquité, on doit suspendre tout jugement pour ne pas s'exposer à errer. M. Durand fait remarquer qu'il a trouvé aussi de semblables briques dans les constructions d'une église de Champagne, mais il ajoute que cette église avait été construite avec les débris d'un aquéduc romain, et que la même chose aurait pu avoir lieu dans les édifices cités par M. Thévenot. Enfin, M. Boucher de Perthes déclare avoir vu plusieurs briques à rebords d'une époque plus rapprochée, et en cite en particulier une portant en relief le chiffre 1520 que les amateurs peuvent voir au musée céramique de Sèvres. M. de Caumont rentre dans l'esprit des questions posées au programme et en explique l'importance pour le complément des connaissances relatives à la géographie ancienne ; il cite les travaux importants de M. de La Saussaye sur les voies romaines, les cimetières et les établissements gallo-romains de la Sologne ; il rappelle ce que lui-même a pu faire dans son Cours d'antiquités pour l'étude des voies et des localités indiquées dans l'itinéraire et marquées sur la carte de Peutinger; abordant plus spécialement la question relative aux localités antiques non mentionnées dans les itinéraires, il s'exprime ainsi qu'il suit : << Les savants ont déterminé avec une grande sagacité l'emplacement des villes et des stations mentionnées par l'itiné<«<raire d'Antonin et la carte de Peutinger, mais les localités « non mentionnées dans ces tableaux géographiques et dont << le nom est inconnu, n'ont point été décrites ni indiquées sur « des cartes. On n'a pas non plus recherché la position des « villæ et des édifices publics ou privés qui existaient çà et là << dans les campagnes; on a négligé le plus souvent de noter « les découvertes qui peuvent fournir des renseignements « pour ce dénombrement. Bref, la géographie des localités d'origine gallo-romaine que les géographes anciens qui nous <<< sont parvenus n'ont pas citées est encore à faire. « C'est cette étude des localités dont le nom est complè«tement ignoré, mais dont les vestiges sont plus ou moins importants, que je voudrais recommander, et que pour ma « part j'ai commencée partout où j'ai pu explorer le sol << français, ou me mettre en rapport avec ceux qui l'avaient « étudié, dans leurs contrées respectives. << Mais on dira peut-être, à quoi bon replacer sur la carte <«< ancienne ces vestiges sans nom, ces villa que de riches «< colons avaient élevées et qui ont péri comme les posses«seurs, sans que l'histoire ait eu à s'en occuper ? Celte sta<< tistique qui sera toujours incomplète est-elle donc digne d'occuper des esprits sérieux ? « A cette objection je réponds que les recherches dont je << viens d'indiquer l'objet, sans avoir une importance compa<< rable à celle des travaux des savants commentateurs des <«< itinéraires et de la table Théodosienne, s'y rattachent pour<< tant d'une manière directe en indiquant sur quels points des <<< Gaules la population a laissé le plus de traces de richesse et << d'intensité, en procurant de nouveaux renseignements sur << la distribution des édifices. Peut-être même rectifieront-elles quelques idées sur la position de certaines localités men<«<tionnées par les documents anciens et qui n'a été fixée, là « où on croit les reconnaître, que faute de renseignements plus complets ou d'indices plus concluants. << D'ailleurs, en fait d'études, il ne faut pas toujours se « poser la question d'utilité; il faut s'efforcer de connaître le plus possible, ne fût-ce même que pour satisfaire la cu«riosité : les résultats utiles viendront certainement, qu'ils «< aient été prévus ou non. « Quoi qu'il en soit, je peux annoncer que depuis dix<< sept ans, j'ai constaté la présence sur le sol Français, de plus de 80 villa ou établissements gallo-romains: la plupart «< complètement inconnus du monde savant, quelques-uns «< cités dans des mémoires à peine connus dans les contrées « où ils avaient été imprimés. << Et que l'on ne croie pas qu'il soit ici question de vestiges « de peu d'importance; je ne parle que de constructions assez << considérables et dont presque toutes étaient décorées de << marbres et de peintures. Les vestiges d'un ordre inférieur << doivent sans doute être indiqués dans la statistique monu<< mentale d'un canton ou d'un département, mais elles ne << sauraient trouver place sur la carte générale de la Gaule, et je n'en tiens ici aucun compte. » M. Lancelot a demandé à lire quelques fragments d'un mémoire sur les Gaules. Le bureau consulté acquiesce à cette demande. La première séance s'est terminée par un hommage fait au congrès de différents ouvrages offerts par les auteurs : Par M. de Caumont, un article intitulé: de la Réforme académique en France; Promenade archéologiqne dans les communes de l'arrondissement de Caen ; Instruction et amé; lioration du peuple, in-8°. ; Annuaire de l'Institut des provinces, 1 vol.; Travaux de la Société française, in-8°. Par M. Lambron de Lignim, Compte-rendu du Congrès scientifique tenu à Tours, 2 vol.; Souvenir du Congrès scientifique de France tenu à Tours, in-8°.; Recherches historiques sur l'origine et les ouvrages de Michel Colombe, tailleur d'ymaiges du Roi, in-8°. Par M. Boucher de Perthes, Sur les antiquités celtiques et antédiluviennes, 1 vol. grand in-8°. Par MM. Durand et de Girardot, Description de la cathédrale de Bourges, 1 vol. Par M. Bouillet, Promenade archéologique de Clermont à Bourges, 1 vol. avec planches; Statistique monumentale du Puy-de-Dôme, 1 vol. et atlas. Par M. l'abbé Crosnier, Iconographie chrétienne ou étude des sculptures, peintures, etc., qu'on rencontre sur les monuments du moyen-âge, 1 vol. Par M. Richelet, brochure intitulée Actualités politiques. Par M. d'Haussez, Mémoire sur l'amélioration des bois-taillis. |