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de la nature son libre et naturel développement, il tient conseil avec lui, même quand il s'agit de créer l'homme. Comme dans une affaire de première et capitale importance, il s'écrie: «Faisons l'homme à notre image et à notre ressemblance! » Et à ce corps de l'homme qui est le résumé, l'abrégé de toutes les merveilles de la terre, qui a l'être comme le minéral, la vie végétative comme la plante, la vie animée et susceptible de libre mouvement comme les animaux, il donne la beauté, la beauté qui subjugue et entraîne, la beauté, reflet de Dieu lui-même, qui est le beau par essence:

Os homini sublime dedit, cœlumque tueri
Et erectos ad sidera tollere vultus.

L'homme n'est point une statue inerte et froide; dans ses yeux brille un rayon divin; sur son visage règne une expression céleste qu'on n'avait point vue jusque-là. C'est que Dieu l'a fait à son image et lui a donné une âme qui renferme en elle, comme Dieu, mais seulement dans le degré que peut comporter sa nature finie et imparfaite, la puissance, l'intelligence et l'amour. C'est une trinité créée, dit Bossuet, faite à l'image de la trinité incréée. Il n'y a point de déshonneur à reconnaître une si noble origine, elle ne limite point la puissance de Dieu et nous apprend à connaître la plus adorable de ses perfections, l'amour d'un père pour sa créature.

A. DUCROST.

UN MOT SUR LA CONSERVATION DES HERBIERS

MESSIEURS.

J'ai l'honneur de vous présenter les résultats de quelques expériences entreprises depuis longtemps déjà.

Je n'ai pas envisagé tous les côtés de la question; mais je craindrais, en voulant prendre le temps d'une étude plus approfondie, de repousser encore ma communication.

Ceux d'entre vous, Messieurs, qui s'occupent de botanique savent combien il est difficile de conserver intacts les échantillons de certains végétaux. Ils connaissent les déceptions amères que l'on éprouve, lorsqu'en révisant un herbier laissé pendant quelques mois ou quelques années, on se trouve en face de ravages parfois irréparables. Des échantillons précieux par leur rareté ou leur lieu d'origine, par le souvenir qui s'y rattache ou leur caractères spéciaux, se présentent aux yeux consternés de l'amateur dans le plus piteux état de délabrement, de désarticulation. J'ai été victime moi-même de pareils déboires et j'ai voulu chercher s'il n'était pas possible de faire absorber aux végétaux, par aspiration ou par immersion, un liquide dont la propriété spéciale serait d'en conserver la souplesse naturelle. Car c'est par suite d'une dessi

cation trop absolue, peut-être aussi trop rapide, qui rend les parties grêles des végétaux trop friables, qu'arrive ce genre d'accidents.

Depuis longtemps cette idée préoccupe l'esprit des amateurs et des savants. Plusieurs procédés ont été successivement proposés : je ne sais si chacun d'eux a bien tenu les promesses dont on avait entouré sa naissance.

Notre regretté collègue et ancien président, M. le baron de Beer, m'avait plusieurs fois entretenu d'expériences qu'il avait faites pour conserver, en particulier, les espèces du genre abies, qui, toutes, en se desséchant, dans un herbier ou à l'air libre, tombent en débris. C'était au moment où il rassemblait les matériaux de ce magnifique herbier forestier qui lui valut à l'Exposition de 1878 une mention toute spéciale, et que, grâce à son obligeance bien connue, plusieurs d'entre nous ont pu voir chez lui pendant qu'il travaillait à son achèvement. M. le baron de Beer avait tour à tour employé, et sans succès bien assuré, l'eau bouillante, l'eau alunée, l'eau salée, le vinaigre. C'est l'eau bouillante pure qui sembla lui donner les meilleurs résultats. Encore étaient-ils inconstants.

Mes premières expériences remontent au printemps de 1877, et ont été en partie inspirées par M. Merget, aujourd'hui professeur de physique à la Faculté de médecine de Bordeaux.

Les échantillons que je vous présente ont été obtenus en 1878-79-80.

Voici en quelques mots à quel procédé je me suis arrêté. Peut-être en existe-t-il ou en trouvera-t-on de meilleurs. En tout cas, celui-ci pourra toujours, sans aucun danger et à peu de frais, être employé par toutes les mains, même celles des enfants; tandis qu'il en est d'autres dont l'emploi, fort dangereux, ne peut être impunément con

seillé. Quant au succès, les échantillons que j'ai l'honneur de vous présenter ici en sont le meilleur garant.

Je fais d'abord une solution aqueuse, presque saturée de chlorure de calcium. Inutile de recourir à un sel bien pur; celui du commerce peut parfaitement suffire. Il faut simplement avoir la précaution de filtrer la solution, après refroidissement, pour enlever toutes les poussières étrangères qu'elle peut contenir. J'ai dit, après refroidissement: ce n'est pas qu'il faille, pour dissoudre le chlorure de calcium, sel excessivement soluble, employer de l'eau chaude; mais le fait même de cette dissolution élève considérablement la température du liquide. C'est un phénomène de combinaison chimique, identique à celui qui se produit lorsqu'on mélange de l'eau à l'acide sulfurique. A cette solution froide et filtrée, j'ajoute alors une certaine quantité de glycérine, à raison d'une partie de glycérine, en volume, pour quatre parties de solution. Ce liquide est d'une conservation qu'on peut dire indéfinie. La seule précaution à prendre est de le maintenir assez exactement bouché, pour en éviter l'affaiblissement. Car les deux substances dont il se compose étant très avides d'eau, la vapeur d'eau contenue dans l'atmosphère est facilement absorbée, et en se concentrant dans le liquide, en abaisse le degré.

Quant au mode d'emploi, il varie suivant la nature et le volume des échantillons à préparer.

Si l'échantillon est petit, que la tige en soit plus ou moins fistuleuse, je me contente de plonger cette tige dans un verre contenant le liquide conservateur. Par suite de la capillarité et de l'appel incessant que l'évaporation par la surface des feuilles produit dans les points élevés, la solution arrive jusqu'aux ramifications les plus fines des trachées-artères, dans les feuilles et les fleurs.

Si, au contraire, l'échantillon est volumineux, si la tige est ligneuse, j'adapte à son extrémité un petit tube de caoutchouc l'enserrant exactement. Remplissant ce tube avec la solution, j'en plonge l'extrémité libre dans le réservoir, tandis que j'abaisse le végétal au dessous. En un mot, je forme un siphon. Mais je dois prévenir que ce siphon est parfois difficile à amorcer. Cela provient du petit calibre des tubes généralement employés, et de la viscocité du liquide qui y descend difficilement. C'est affaire de pratique, et chacun, pour arriver au résultat, emploiera le procédé qui lui semblera le plus facile; aspiration, injection, etc.

Que se passe-t-il alors?

Dans l'un et l'autre cas, le liquide pénètre peu à peu par les trachées et les vaisseaux laticifères jusqu'aux points les plus éloignés de la tige. Et à un moment donné, la plante est absolument gorgée de la solution que l'on peut même voir suinter à travers les ouvertures accidentelles qui existent sur le limbe des feuilles ou le long de la tige. De sorte que toutes les parties, même les plus grêles, contenant du chlorure de calcium et de la glycérine, conservent, malgré la dessication, une souplesse parfaite due à un certain degré d'hygrométricité.

Jamais je n'ai vu apparaître la moindre moisissure ni à la surface du réservoir ni sur un point quelconque de l'échantillon.

La durée de cette opération varie, suivant le volume et la nature des végétaux, entre 1 et 5 ou 6 jours.

Le seul inconvénient que l'on puisse reprocher à ce procédé, — je le signale moi-même pour éviter tout reproche de népotisme, c'est que la teinte des feuilles, au lieu de verte qu'elle était, devient généralement brunâtre ou d'un jaune plus ou moins foncé.

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