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tre, lorsqu'il s'agit pour nous d'étudier dans les cur sacrés de notre pays, les fragments d'anciennes verrières qui ont pu résister aux outrages du temps, aux caprices des destructeurs, et de faire des vœux pour la restauration intelligente des monuments qui nous restent.

L'analyse de l'ouvrage que nous avons l'honneur de de vous soumettre en ce moment, n'occupera que peu pages; elle formera, si vous jugez convenable de l'insérer dans l'un de nos Bulletins, une sorte de manuel à l'usage de chaque membre de la Société. Le texte est religieusement conservé en plus d'un passage; cette précaution, dont on nous saura gré, est de notre part un hommage rendu au talent de l'auteur d'un ouvrage digne d'attention. Nous avons dû omettre tout ce qui se rattache aux procédés usités pour la confectien de ces ouvrages d'art, parce que les savantes recherches de M. le directeur de la fabrique des vitraux ne sont pas à notre usage.

La réaction en faveur des anciens monuments de notre art national, commence, d'après l'opinion de M. Bontemps, à porter ses fruits: les dévastations s'arrêtent; de jeunes architectes, pleins d'enthousiasme, commencent de savantes réparations, et sur plusieurs points même élèvent des constructions nouvelles; des peintres, des sculpteurs s'élancent dans cette voie féconde; de nombreux ateliers de peinture sur verre s'établissent pour rendre la vie à cet art si longtemps en léthargie.

Mais l'art de la peinture sur verre ne réside pas seulement dans la partie technique, c'est-à-dire dans la préparation des matières premières et leur emploi; on doit placer au premier rang l'inspiration créatrice qui conçoit et fait exécuter, parce que de cette conception dépend l'effet produit, la réussite. C'est de ce point de vue élevé

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al qu'il s'agit de considérer la peinture sur verre, pour apprécier d'une manière plus complète le passé et le présent de cet art.

En recherchant quels ont dû être les commencements de la peinture sur verre, à quelle époque elle a pu prendre naissance, quelques-uns ont cru que cette époque était peu antérieure au 12° siècle; et au fait, quand on regardait les vitraux qui nous restent de ce temps comme des produits barbares, on pouvait croire que cet art était alors pour ainsi dire à l'état d'enfance; mais aujourd'hui qu'il est plus généralement reconnu que ces vitraux du 12° siècle étaient des chefs-d'œuvre, on ne peut se dispenser d'assigner à la peinture sur verre une origine beaucoup plus ancienne. On sait d'ailleurs que saint Jean-Chrysostôme, au commencement du 4° siècle, parle de hautes fenêtres ornées de diverses couleurs; que l'église de Sainte-Sophie, reconstruite au commencement du 7° siècle, avait des fenêtres ornées de vitraux; déjà, selon le témoignage de Grégoire de Tours, nos églises d'occident commençaient aussi à se garnir de vitraux, puisque cet historien raconte le sacrilége commis par un soldat qui pénétra dans l'église de Brioude par une fenêtre dont il brisa le vitrage.

Les vitraux ont dû être une application de l'art des mosaïques. Quand on a commencé à vitrer les baies des églises, on n'a pas dû tarder à y intercaler des morceaux de verres de couleurs, et à les combiner de manière à former un ornement, en les réunissant, soit par un ciment quelconque, soit par un châssis en fer. Le goût d'une décoration aussi riche, d'un effet aussi magique, se sera rapidement répandu dans les Gaules; il est d'ailleurs rationel que cet art se soit principalement perfectionné dans

ce pays, où s'élançait avec le plus d'éclat le style architectural que l'on appelle gothique et ogival.

Ce n'est pourtant qu'à partir du 12 siècle que nous pouvons porter notre examen sur l'art des vitraux, parce qu'il ne nous en reste aucuns qui soient antérieurs à cette époque; mais nous le voyons dès lors marcher de front et progresser avec l'art architectural, dont il fait essentiellement partie; plus tard nous le verrons s'altérer avec lui.

Au 12 siècle, l'architecte présidant à l'ensemble et aux détails de son édifice, déterminait la forme générale du vitrail, traçait les divisions qui formaient elles-mêmes une décoration résultant de formes géométriques, dont l'aspect n'est pas moins remarquable à l'extérieur qu'à l'intérieur. Le ciment ou les petites divisions en fer qui avaient dans le principe uni les verres de couleurs différentes, étaient déjà remplacés par des plombs coulés dans des moules et creusés au rabot. C'était là un immense perfectionnement, qui avait permis une bien plus grande variété d'ornementation. C'est à ces plombs que nous devons ces bordures si riches, ces médaillons si harmonieux des vitraux qui nous restent du 12° siècle. Quant au verre, on le coupait alors et on le coupa encore bien longtemps avec un fer chaud; ce ne fut qu'au 16° siècle qu'on commença à employer le diamant pour cette opération. Dans la plus grande partie des vitraux du 13° siècle, l'art semble continuer, à peu de chose près, l'inspiration qui a guidé les artistes du 12°. Ce qui caractérise plus particulièrement les vitraux de ces deux époques, c'est l'harmonie qui existe entre cet ornement et l'ensemble de l'édifice; à quelque distance que vous les considériez, vous êtes frappé d'admiration pour l'élégance de la forme et le

prestige de la couleur. A mesure que vous avancez, de nouvelles beautés apparaissent dans ces bordures de dessins si gracieux, si variés, dans ces riches mosaïques qui composent les fonds et entourent des cadres de formes diverses. Cet ensemble se lie harmonieusement à la décoration générale des traits, et quelques demi-teintes suffisent pour donner la vie, le mouvement à ces tableaux, dont les intentions sont bien senties, dont l'action est claire. Ces poèmes divins, ces légendes des saints propagent parmi les fidèles peu lettrés de ce temps la foi qui les inspira.

On voit aussi de grandes figures dans des verrières de la haute nef au 13° siècle; mais ce n'est pas là le caractère propre des vitraux de cette époque, et nous devons dire que dans cette direction le siècle suivant fut généralement supérieur. On peut citer, comme exemple des vitraux à médaillons où légendaires du 13° siècle, les trois grandes roses de Notre-Dame de Paris.

· Au 14° siècle, l'artiste commence à se préoccuper moins de l'ensemble du vitrail : le verre et la pierre ne forment plus un tout aussi harmonieux. Le peintre sur verre ne dépend plus autant de l'architecte ; il cherche une imitation plus parfaite de la nature; il n'a pas encore la prétention de représenter toute une scène en grandes figures suivant les lois de la perspective; mais il compose des figures isolées de saints d'un beau dessin, dont le modelé est plus finement accusé par des ombres. Ce siècle est une époque de transition où l'architecture conserve encore une partie de la sévérité grandiose qui caractérisait le siècle précédent; mais l'anarchie a commencé.

Vienne le 15° siècle, et cet architecte ne sera plus qu'un constructeur, composant pour le sculpteur l'élément de

ses charmantes dentelles de pierre, pour le peintre sur verre les cadres où il tracera des peintures d'un fini délicieux, mais sans effet à distance.

Dans les compartiments multipliés des têtes de fenêtres de cette architecture flamboyante, le peintre encadre ses légions d'anges surmontant des tableaux d'une composition savante, et cependant tant d'habileté de main, des matériaux si variés, ne produisent que des vitraux d'un effet inférieur à ceux des siècles précédents.

Telle est la direction que le 15° siècle a donnée à l'art de la peinture sur verre, et qui est suivie par le 16 siècle, où de plus grands artistes encore, au point de vue du dessin des figures, appliquent directement leurs talents à cette peinture.

Il est à remarquer que les vitraux du 13° siècle durent exiger un nombre prodigieux de peintres dans l'ornementation d'une seule de nos immenses cathédrales, telles que Notre-Dame de Paris et de Chartres.

Au 16 siècle, les œuvres religieuses deviennent plus rares; une foi moins vive, le grand mouvement de la réforme éloignent des églises l'art qui se met au service des grands, et s'emploie à orner leurs édifices; à cette époque, la sculpture, la peinture murale et sur toile ne laissent guère place à la peinture sur verre, qui jette cependant encore un brillant éclat dans les œuvres de quelques grands artistes, tels que les Pinaigrier, les J. Cousin, les Bernard de Palissy. Depuis que l'architecture va s'inspirer à Athènes, à Rome, l'art des vitraux est mis en oubli; le Parthénon n'a pas de vitraux. Depuis quelque temps d'ailleurs, on pense que les secrets de cet art sont perdus. On se confond en regrets sur cette perte; c'est là le résultat d'un sentiment intime, quoique mal compris, des beau

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