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« de Ballezac sera receu dans ledit hospital, et inhumé <«< dans une fosse qui sera faite au devant la chapelle « d'iceluy et vis-à-vis la milieu (sic) du grand autel au << dessoubz la lampe d'iceluy, sans en tirer à conséquence « pour les parens dud' seigneur de Ballezac et autres qui « pourroient avoir le mesme désir que luy; lequel con<< sentement a esté presté par Messieurs du Bureau, en con« sidération du mérite dudit feu seigneur de Ballezac et des <«< notables légats et biens par luy faits audit hospital. >> Signé : « F. NORMAND, Maire d'Ange et Directeur;

« J. THOMAS, Directeur ecclésiastique et Aumos<«< nier; A. MORISCET, Directeur;

A. RAOUL, « Dir. eccl.; GENTILS, Syndic et Directeur; « GAULTIER, Secrétaire et Directeur. »

La date de cette délibération confirme donc ce que j'ai écrit tout-à-l'heure qu'il faut placer la date du décès au 8 février, et non au 18.

Moriscet, dans la Relation déjà citée, nous apprend que les funérailles de Balzac furent faites avec beaucoup de magnificence; et j'ajouterai que, malgré l'humilité de notre écrivain qui avait désiré estre enterré à l'hospital avec les pauvres, les membres du Bureau d'administration ne permirent pas que ses restes y reposassent sans honneur, et qu'ils s'empressèrent, dès le 22 du même mois, de prendre la délibération suivante :

« ............. A esté aussi arresté que, en recognoissance des <«< biens faits au présent Hostel-Dieu par monsieur de « Guez de Ballezac et de son mérite particulier, il sera «< fait une quarantaine solemnelle dans ledit Hostel-Dieu « pour le repos de son âme, et qu'il sera mis une tumbe « de pierre sur sa sépulture autour de laquelle sera gravé

« son nom et le jour de son déceps, avecq ses armes au <«< milieu, et qu'il sera appliqué à l'un des piliers, vis-à« vis de ladite tumbe, une lame de cuivre de raisonnable <«< grandeur, sur laquelle sera gravé un épitaphe en l'hon<< neur dudit sieur de Ballezac, aux despends dudit Hos<<< tel-Dieu. »

(Recto du feuillet 19 du même Registre.)

La tombe et l'épitaphe (1) ont disparu; mais il est pres

(1) Parmi les nombreuses épitaphes consacrées à la mémoire de Balzac par les beaux-esprits du temps, je n'indiquerai que les trois suivantes, dues à des poètes angoumoisins:

1o L'une, en dix vers latins, par Gabriel Gandillaud du Chambon, président au siége présidial d'Angoulême, petit-fils de ce Pierre Gandillaud qui donna le premier commentaire des Coutumes d'Angoumois; elle est imprimée dans l'Abrégé du troisième tome du Trésor chron. et hist. (Paris, 1660, in-12), de Pierre de SaintRomuald, à l'année 1654;

2o L'autre, en six vers latins, par Mile Marguerite Gandillaud du Chambon, fille du précédent, âgée seulement de douze ans. Je transcris cette épitaphe telle que l'a donnée Pierre de Saint-Romuald (loco cit.); le texte en est tout différent de celui qui est imprimé à la fin du tome II des OEuvres de Balzac :

Clauḍitur obscurâ illustris Balzacius urná,

Si qua potest tantum claudere terra virum;
Et modò qui fuerat famâ super æthera vectus,
Nunc, lector, pedibus subjacet ille tuis;
Quique suo totum ingenio compleverat orbem,
Illius exiguus continet ossa lapis.

3o La troisième, en vingt vers français, fut composée par maître Olivier Massias, orfèvre de notre ville, qui cultivait l'art de la gravure et surtout la poésie avec un tel succès que Pierre de SaintRomuald (loco cit.) ne craint pas de le comparer au fameux Adam

que certain que les restes mortels de Balzac se trouvent encore au lieu indiqué, dans la salle basse qui servait anciennement de chapelle, d'où ils attendent que la reconnaissance publique de nos concitoyens les transfère dans la nouvelle église de l'Hôtel-Dieu, et leur dresse un sépulcre digne de l'éclat répandu sur notre cité par le Restaurateur de la Langue française.

Avant de donner, comme je l'ai promis, quelques détails sur les différents legs de notre compatriote, je crois devoir reproduire un récit de ses derniers moments, en forme de Lettre, dont j'ai vu, sinon l'original, du moins une copie fort ancienne (1). Cette pièce, presque inconnue jusqu'ici, pourra servir de complément à la Relation de la mort de M2 de Balzac, par l'avocat Moriscet, imprimée à la fin du tome II des OEuvres (pag. 213-18 de la 2e partie).

Billaut, menuisier de Nevers. Voici les quatre premiers vers de cette épitaphe :

Ce marbre que l'on voit n'est pas ce que l'on pense,

Il ressemble un tombeau, plusieurs l'estiment tel;

Mais c'est un magnifique autel,

Que la justice érige au Dieu de l'Eloquence.

(1) Cette ancienne copie est entre les mains de M. James-CadetPaul Thomas de Lacroisade, de la même famille que Paul Thomas de Girac, célèbre antagoniste de Costar dans la querelle relative aux ouvrages de Voiture et de Balzac. M. A. Corbin, ancien chef d'institution à Angoulême, avait déjà publié cette Lettre dans le Courrier Charentais du 22 décembre 1842 (no 9, 1r année), en faisant remarquer avec justesse qu'elle avait probablement pour auteur le P. Simon, jésuite, confesseur du défunt, dont il est fait mention dans la Relation de Moriscet, et auquel Balzac avait adressé quatre Lettres du Livre XXVII.

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Copie d'une Lettre écrite sur la mort de Monsieur de

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« MONSIEUR, je ne doubte point que desjà vous n'ayez «< ̄appris, ne fust-ce que par le bruit commun, la mort <«< d'une personne si célèbre comme a esté M. de Balzac «< durant sa vie; néantmoins, comme vous l'avez toujours <«< honoré des tesmoignages d'une bienveillance toute par«< ticulière, j'ai cru que vous seriez bien ayse d'en savoir <«<les particularités qui sont ordinairement ignorées du «< commun, et qui ont esté très remarquables et dignes « de votre connoissance; encore pense-je que vous atten« dez cela de moy plus que de tout aultre, puisque j'ay eu <«< la consolation d'en estre tesmoing, non seulement à sa << mort, mais encore durant toute sa maladie où j'ay esté «< avec beaucoup d'assiduité. Aussy comme je vous honore « très particulièrement, je serois fort désireux de pouvoir « contribuer quelque chose à votre satisfaction, et à la «<louable curiosité que vous pouvez avoir. Je vous diray « done, monsieur, que M. de Balzac se disposoit de lon« gue main à cette belle mort qu'il a fait. J'entens qu'il « se disposoit à bien mourir, non seulement par des sen<«< timens extraordinaires de dévotion, mais aussy par des « effets réels et des solides tesmoignages d'une piété et « vertu vrayment chrestiennes. Il y avoit desjà longtemps qu'il s'estoit retiré du commerce du monde, en se reti« rant, comme vous savez, dans une chambre, ou plus<«< tost dans une espèce de cellule qu'il s'estoit fait bastir <«<luy-mesme au dedans de l'enclos, et tout joignant l'es« glise des R. P. Capucins. Si est-ce pourtant que, de

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« puis 6 ou 7 mois en ça, il a mené une vie encore plus « retirée et séparée du monde, en ce qu'il a rompu tous «< les liens qui le pouvoient en apparence attacher aux cho«< ses créées. Je veux dire qu'il s'est entièrement des<«< pouillé de ce qu'il lui restoit en cela, particulièment en << faveur des pauvres ; c'est ce qu'il me protesta de vou« loir faire, il y a bien 6 mois, adjoutant qu'il souhaitoit « de mourir pauvre et d'estre enterré parmi les pauvres, « avec cette belle pensée qu'il avoit encore plus au cœur « qu'à la bouche, Christus et pauperes mihi hæredes « sunto. Son dessein, comme il disoit, estoit de racheter «< ses péchés par aumosnes, et se disposoit ainsy à une par« faite et sincère réconciliation avec Dieu, lequel semble « avoir accepté l'offrande d'un humble et véritable pénitent, <«< luy donnant en eschange à la mort des preuves vrayes << d'une miséricorde extraordinaire. Certainement, à voir « M. de Balzac à ses derniers jours de sa vie, on eut dit <«< que c'estoit tout un autre homme; en ce qu'il avoit un <«< naturel délicat, et pourtant il parut à tous comme in<<< sensible au mal, bien qu'il fust travaillé d'une oppres« sion de poitrine, d'une pointe (sic) de costé, d'une fiè« vre continue avec redoublement, d'une hydropisie à demy formée, et d'une fluxion mortelle sur le poulmon ; « et tout cela dans un corps autant usé des veilles et des <«< travaux de l'estude que des longues et ordinaires mala« dies. Nostre malade néantmoins ne s'est jamais plaint «< pour cela; jamais il n'a tesmoigné ny de parole, ny par «< actions, aucune inquiétude ou fascherie d'esprit. J'ay << remarqué que sa conduite intérieure rouloit particuliè« rement sur ces 4 vertus : la douleur de ses péchés qu'il pleuroit à grosses larmes, le détachement de toutes les «< choses créées, une parfaite résignation à la volonté de

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