Page images
PDF
EPUB

Le peu de temps dont les congressistes pouvaient disposer dans cet après-midi du 18 ne leur a pas permis de visiter le magasin de M. Bidot, carrossier, nouvelle maison qui prend chaque jour de l'essor, non plus que diverses autres industries, dignes d'un très vif intérêt.

Nous voulons dire: les importants ateliers de ferronnerie de M. Marie, si avantageusement connu pour ses créations artistiques; l'usine de M. Lemière, où se font et la menuiserie d'art et celle du commerce; l'installation typographique de M. Colas; les sculptures sur bois si délicatement exécutées par le modeste professeur de stéréotomie de l'école municipale de dessin, M. Hamel, un artiste dignement apprécié.

E. A.

1re JOURNÉE, MERCREDI 18 JUILLET

SÉANCE DU SOIR

Enquête Agricole

La séance du soir eut lieu à l'hôtel de ville, dans le salon des délibérations du Conseil municipal, en présence d'une nombreuse assistance, à laquelle n'avaient pas craint de se mêler quelques dames, désireuses d'entendre débattre les questions du programme.

M. de Longuemare, directeur, prie M. Joret-Desclosières, président de la Société des Sciences, Arts et Belles-Lettres de Bayeux, de prendre la présidence. Au bureau prennent place: MM. Delmas, maire de Bayeux; Joret, membre de l'Institut; de Courson, adjoint.

M. le Président donne la parole à M. Warcollier, directeur de la Station Pomologique du Calvados, qui fait la communication suivante :

Production d'un Cidre

se conservant doux

Par M. G. WARCOLLIER.

Tant que le cidre n'a été consommé que dans les régions cidrières de France, le producteur l'a fabriqué à son goût, ou plutôt il a fait son goût à celui de la boisson qu'il obtenait naturellement dans les conditions habituelles de la pratique courante; si bien que partout où l'on fabrique couramment le cidre, c'est-àdire dans tout l'Ouest de la France, on l'aime généralement sec, plus ou moins limpide, plus ou moins amer et même parfois plus ou moins dur ou acétique.

Mais aujourd'hui où de nouveaux vergers ont été constitués de tous côtés, où la production des pommes va en augmentant tous les ans, où les contrées de l'Ouest de la France sont incapables de consommer toute leur récolte, il faut que le cidre trouve d'autres débouchés et pour cela qu'il soit préparé au goût du

consommateur nouveau.

Or, toutes les fois que l'on présente à celui-ci divers échantillons de cidres, il préfère le cidre doux, peu ou pas amer, limpide et légèrement mousseux. C'est donc vers la production d'une telle boisson que doit tendre le fabricant, en s'efforçant de la livrer à

un prix modéré et autant que possible sensiblement le même tous les ans.

Ceci établi, voyons si le producteur de cidre est placé dans de bonnes conditions économiques pour fournir une boisson répondant à ces desiderata.

La première des conditions nécessaires pour y arriver facilement serait tout d'abord de posséder une matière première d'un prix relativement stable, et de pouvoir la travailler ensuite avec tout le soin et le temps utiles.

Or, la production cidricole subit annuellement des variations considérables, qu'on ne rencontre même jamais avec une telle intensité dans aucune autre grande industrie agricole.

Pour en donner une idée, disons que la production du cidre, qui était de plus de 36 millions d'hectolitres en 1904, est tombée à 4 millions en 1905, soit des variations dans le rapport de 1 à 9. De telles fluctuations ont leur répercussion immédiate sur les prix des pommes et des cidres.

C'est ainsi que l'on voit les pommes valoir tantôt 25 fr., tantôt 200 fr. les 1.000 kilogrammes. Heureusement, les prix des cidres ne présentent pas de tels écarts les cidres marchands, par exemple, oscillent entre 8 et 20 fr. l'hectolitre et ne présentent ainsi que des variations du simple au double.

Ces prix, relativement stables en comparaison de ceux des pommes, sont obtenus grâce à un sucrage et un mouillage déterminés.

La qualité des boissons obtenues dans de telles conditions ne peut être constante et il ne faut pas s'étonner si, ayant à compter chaque année avec des cidres de

prix et de qualité variables, la clientèle se tourne volon tiers vers le vin et la bière. Même dans les pays de production, où l'on est habitué aux variations diverses que nous venons de signaler, le marché au cidre ne parvient pas, malgré le mouillage et le sucrage, à trouver une stabilité désirable.

Lorsque la production est faible, les cultivateurs n'ayant que de maigres récoltes de fruits à porter sur le marché, ne peuvent profiter des prix de vente élevés et fabriquent pour eux et leur personnel des petits cidres d'une durée de conservation très limitée.

Les cidreries, obligées d'acheter une matière première hors de prix, risquent de ne pouvoir vendre à un taux rémunérateur les cidres qu'elles ont fabriqués; de plus, si elles ne peuvent tout écouler, elles ont des réserves pour l'année suivante, qui peut être une année d'abondance, et sont alors obligées de vendre à perte.

Si plusieurs années de disette se suivent, les réserves s'épuisent, le cidre devient rare et atteint des prix hors de proportion avec sa valeur; la clientèle habituelle l'abandonne et est condamnée à accepter les boissons de fantaisie que des industriels fabriquent de toutes pièces, vendent sous des appellations les plus diverses et souvent mensongères, faites pour tromper l'acheteur sur leur origine et leur valeur.

En année de grosse production, les pommes atteignent des prix si faibles que les cultivateurs n'en retirent pas un bénéfice en rapport avec la production de leur récolte; les cidreries peuvent fabriquer à bon marché, mais comme il leur est impossible de maintenir ce prix de vente pendant plusieurs années, la

« PreviousContinue »