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de la Sainte-Chapelle», comme nos lecteurs le savent. « Les Chants de la SainteChapelle» ont été accueillis avec une grande faveur, et les nombreux exemplaires qu'on en a vendus en France et à l'étranger sont la meilleure preuve de la sympathie qu'ils ont provoquée. Nous avons lieu de croire que « l'Office du xir siècle » sera mieux reçu encore, parce que la publication est bien plus importante et sera bien plus utile. L'année liturgique y étant donnée par l'ordinaire de la messe et par les principales fêtes, on pourra, ainsi que M. l'abbé Gueyton l'a fait avec un plein succès dans son église paroissiale de Bercy, faire exécuter ces chants dans toute leur pureté, comme nous les publions aujourd'hui.

Nous ne savons pas ce que l'avenir nous réserve; mais, quand le moment. sera venu de quitter ce monde, nous pourrons nous rendre le témoignage d'avoir servi avec constance et avec zèle la cause de l'art chrétien, de l'art du moyen âge partagé dans toutes ses divisions; un mot donc sur la musique religieuse actuelle qui n'est pas assez chrétienne. Au mariage de l'empereur Napoléon III, le 30 janvier 1853, M. Auber, un musicien illustre, a fait exécuter en musique, sous les voûtes de Notre-Dame de Paris, une messe dont voici la composition. L'entrée de l'Empereur et de l'Impératrice s'est faite avec la marche du ballet des « Filets de Vulcain », composé par Schneitzoeffer. L' «Offertoire » et l'«O salutaris » ont été empruntés, les uns disent à Lesueur, les autres à la messe du sacre de Chérubini. Le « Sanctus» appartenait à M. Adam, l'auteur du « Postillon de Longjumeau ». L'« Agnus Dei» a été extrait, par M. Auber, de son opéra de la « Muette de Portici ». Le « Domine salvum » avait été « rajeuni», ont dit tous les journaux, par une orchestration nouvelle inventée par M. Auber lui-même. Enfin le « Te Deum » n'était pas celui de saint Augustin et de saint Ambroise, mais de Chérubini; c'était ce « Te Deum», si pauvre quoique si ronflant, que j'ai entendu, enfant, dans la cathédrale de Reims, au sacre de Charles X. Le tout fut exécuté par six cents acteurs et choristes des théâtres, conduits par MM. Girard et Battu, chefs d'orchestre de l'Opéra-Impérial, par M. Tilmant, chef d'orchestre de l'Opéra-Comique, par MM. Potier, Dietsch, de Garaudé et Cornette, chefs des choeurs du grand Opéra et de l'Opéra-Comique. On était si pressé ! répondent tous ceux auxquels on se plaint d'une pareille musique. Mais, quand on est si harcelé par le temps, on ne prend pas la marche des « Filets de Vulcain », ni « l'Agnus » de la Muette de Portici »; on ouvre le premier « Graduel» venu, et on y trouve tout faits : « Processions », « Offertoires », « Sanctus », « O salutaris Agnus», de tous les tons et de tous les degrés hiérarchiques, et l'on n'a pas besoin de perdre son temps et sa peine à « rajeunir » le « Domine salvum ». On y 6

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trouve, dans ces vieux livres, le « Te Deum » de deux poëtes et musiciens d'un certain génie, qui se nomment saint Ambroise et saint Augustin, et ce «Te Deum », on l'a chanté au mariage ou au sacre de Clovis, de Charlemagne, de Hugues-Capet, de Philippe-Auguste et de saint Louis. Qu'on fasse, au théâtre et à la chambre de l'Empereur la musique qu'on voudra, il ne nous appartient pas d'y rien voir; qu'on chante n'importe quoi et en n'importe quelle musique à l'Opéra-Comique et à l'Opéra sérieux, cela ne nous regarde pas et nous touche encore moins. Mais, pour Dieu, pour la religion, pour l'Empereur, pour les convenances, pour la cathédrale de Paris, pour l'art du moyen age et même pour l'art moderne, qu'on n'exécute pas, au mariage du chef de l'Empire français, sous les voûtes d'une église qui a vu saint Louis, la marche des Filets de Vulcain »>!

Nous espérons que notre publication facilitera la réforme du plain-chant; un résultat pareil nous récompenserait largement de nos efforts et de nos lourdes. dépenses. Fait curieux dans le mouvement archéologique de notre époque, c'est que les ignares sont ceux qui ont établi et qui dirigent le courant. Ce n'est pas aux architectes, ni aux sculpteurs, ni aux peintres qu'on doit la renaissance de l'art, mais à de purs archéologues qui seraient fort empêchés si on leur donnait n'importe quoi à peindre, sculpter ou bâtir. Ce n'est pas aux musiciens qu'on doit le rappel aux beautés sévères de l'art ancien, mais bien à de pauvres gosiers qui n'ont jamais chanté ou qui chantent faux. Les musiciens, les artistes proprement dits, les architectes, les peintres et les sculpteurs officiels, membres de toutes les écoles et de toutes les académies, sont les ennemis de toute réforme, de tout mouvement qui ramène à l'art des siècles les plus resplendissants. Mais, qu'importe, le mouvement n'en est ni moins vif ni moins décidé. Qu'une douzaine d'ignorants comme nous publient, par exemple, les monuments authentiques de la musique ancienne, c'est-à-dire le plainchant du moyen âge, et nous ne donnons pas dix ans pour que la musique moderne de la «< Muette » ou du « Postillon » ne se chante plus jamais dans aucune église, même au mariage du plus petit bourgeois de France.

DIDRON aîné.

Par Didron aine à Paris

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Dessiné et que par A Varin

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MÉLANGES ET NOUVELLES

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Un gaufrier du XIe siècle. · Une urne de Cana. Le paganisme aux observatoires. - Congrès des sociétés savantes. L'art et l'archéologie en Prusse. Les anciens artistes de Béthune.

UN GAUFRIER DU XIII SIÈCLE. Le musée de Cluny possède, depuis l'année dernière, un objet qui nous a paru digne d'un très-grand intérêt : c'est un instrument de cuisine, un fer à mouler et cuire des gaufres. Comme cette petite machine culinaire est, à peu près certainement, du xe siècle, elle sert à prouver que nos grands ancêtres, dont nous sommes les assez minimes descendants, ne connaissaient pas seulement le secret de bâtir des cathédrales et des châteaux, de sculpter et peindre des légions de statues et de figures, de marteler et ciseler les métaux précieux, mais qu'ils savaient encore imprimer, à un assez vulgaire instrument de cuisine, un caractère particulier, une certaine beauté que nous ne connaissons guère. Si le temps ne nous avait fait défaut, nous aurions composé quelques articles sur les « Repas religieux et civils du moyen âge », et nous aurious facilement montré que nos festins à trois services ne valaient pas mieux, j'allais dire ne valaient pas autant, que ceux du XIIIe siècle. Nous l'avons déjà dit, quand un homme et un siècle ont de l'esprit, ils en ont même quand ils marchent, quand ils s'habillent, quand ils mangent; l'esprit et le talent accompagnent partout l'individu, comme l'ombre suit le corps. Sublime dans ses grandes œuvres d'art, le moyen âge ne pouvait être médiocre dans les choses ordinaires de la vie. Comparez ce gaufrier du XIIIe siècle aux gaufriers de notre temps, et vous verrez que notre époque, si adulée de ses enfants dont l'humilité n'est pas le vice principal, ne sait pas faire de belles gaufres; j'irai même jusqu'à dire qu'elle n'en sait pas faire de bonnes. Faute de temps, je ne pourrai écrire sur le « Repas chrétien » le mémoire que j'ai rêvé; mais j'ai le bonheur d'avoir encore des amis dévoués et savants, et M. Alfred Darcel m'a promis de faire ce curieux travail, pour lequel il a déjà recueilli plusieurs documents. Aujourd'hui donc, je puis me contenter d'annoncer ce travail, qui paraîtra dans quelques-unes des livraisons prochaines des « Annales Archéologiques ». Avec ces articles de M. Darcel seront donnés le dessin général du gaufrier et la seconde face dont nous présentons aujourd'hui la première. Grâce à l'obligeance empressée de M. Edmond Dusommerard, conservateur du musée de l'hôtel Cluny, nous avons obtenu un plâtre reproduisant les deux disques ou palettes du gaufrier. Sur ce moulage, contrôlé par l'objet même, M. Adolphe Varin a dessiné et gravé les planches que nous donnons. Celle d'aujourd'hui offre en relief les sujets creusés dans l'un des disques, c'est ainsi que la gaufre elle-même se produirait. L'autre disque offrira les sujets en creux, afin de montrer la palette telle qu'on la voit dans l'objet même. Comme les gaufriers d'aujourd'hui, cet objet est en fer battu et ciselé. Nous laisserons également le soin à M. Darcel de décrire

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