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explorer (1), dans toute sa longueur, le golfe profond qui la séparait du Nouveau-Mexique.

Peu de temps après cette époque, il parut entre l'Asie et l'Amérique un nouveau pavillon qui allait en envelopper toutes les extrémités nord-ouest. C'était celui d'une puissance qui sortait à peine de la barbarie, s'élevait comme un géant au nord de l'ancien monde, empruntait des nations policées les élémens d'une grandeur qui pouvait leur devenir redoutable, et atteignait par la vaste étendue de son territoire, les rivages de toutes les mers de l'Europe, et du nord de l'Asie.

La Russie était particulièrement intéressée à étendre ses navigations à l'orient de son vaste empire; Pierre le', qui fut le créateur de sa marine comme des autres élémens de sa puissance, voulut d'abord faire vérifier si le nord-est de l'Asie était séparé de l'Amérique, ou si les deux régions étaient contiguës. Ce prince fait construire deux navires vers la pointe méridionale du Kamtchatka, dans le port de Petropaulowski: on y transporte des chantiers de Saint-Pétersbourg, et à travers les immenses régions de la Sibérie, toutes les pièces de gréement et d'armement nécessaires à cette expédition; et Behring s'embarque en 1728, pour reconnaître les côtes nord-est de l'Asie. Il est le premier navigateur qui en ait dépassé la pointe la plus orientale, celle qui forme le rivage le plus avancé du détroit auquel on a donné son nom.

Behring ne découvrit pas la rive américaine dans ce premier voyage et dans celui de l'année suivante ; mais en 1741 une nouvelle expédition mit à la voile sous ses ordres et sous ceux de Tchirikoff; et la tempête ayant

(1) 1721.

séparé leurs navires, chacun d'eux fit sur différens points la reconnaissance d'une partie des côtes nord-ouest de l’Amérique. Behring les découvrit au nord du 58° degré: il en suivit la direction de l'est à l'ouest, depuis les parages du mont Saint-Élie jusqu'à la presqu'île d'Alaska ; il reconnut ensuite l'archipel des îles Aleutiennes , qui se pro. longe à l'ouest de cette péninsule, et il vint expirer dans une île encore plus occidentale qui a retenu son nom. Tchirikoff avait découvert les côtes d'Amérique un peu plus an midi, entre le 56° et le 58o parallèle : il perdit sur ce littoral quelques hommes de son équipage, et il revint au Kamtchatka.

Delisle de la Croyère, frère de notre célèbre géographe Guillaume Delisle, faisait partie de cette expédition, au succès de laquelle il contribua par les mémoires qu'il avait faits sur d'autres découvertes antérieures. Pierre. le-Grand l'avait honoré de sa bienveillance et de fréquentes visites dans le voyage qu'il fit à Paris en 1717 : La Croyère fut du nombre des savans que ce monarque législateur attira dans son empire; et Behring lui-même, né en Jutland, et distingué dans la narine danoise par ses connaissances et son intrépidité, fut associé par Pierre Ier à l'exécution de ses grandes vues : ce prince se connaissait en hommes; il adopta tous les étrangers qui pouvaient concourir à sa gloire.

La route ouverte vers les côtes nord-ouest d'Amérique par Behring et Tchirikoff fut suivie avec zèle et avec succès par les navigateurs russes qui explorèrent ces rivages. Notre dessein n'est

pas
de retracer tous les

progrès que leurs voyages ont fait faire à la géographie de ces contrées; et nous nous bornons à rappeler ici que les expéditions successivement entreprises, depuis celle de Tchirikoff en 1741 jusqu'à celle de Krenitzin et de

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Levasheff en 1769, expéditions que Muller et Villiam Coxe ont suffisamment fait connaître, donnèrent nais. sance à un commerce étendu sur la côte nord-ouest d'Amérique, et aux importans établissemens

que

le

gouvernement russe y a formés. La nouvelle de leur fondation détermina l'Espagne à chercher les moyens d'étendre et de protéger ses possessions occidentales : elle fit occuper en 1768 les forts de San Diego et de Monterey. Une seconde expédition fut bientôt confiée à Juan Perez, qui s'éleva jusqu'au 55e parallèle, et revint au 49° degré 30 minules, dans un mouillage auquel on a ensuite donné le nom de Nootka.

La relation du voyage qui fut entrepris en 1775, sous la direction de Ayala, a été écrite par le capitaine Maurelle sou pilote. Les navigateurs cherchaient à reconnaître le détroit désigné dans les cartes sous le nom de l'amiral de Fonte: ils examinèrent sans le découvrir, toutes les sinuosités de la côte jusqu'au 58e parallèle, et revinrent, en touchant plusieurs points du littoral, à Monterey et à San-Blas.

Les Anglais cherchaient eux-mêmes à étendre sur ces côtes leurs découvertes et à les prolonger vers le nord. Le plus remarquable de ces navigateurs est le capitaine Cook; il avait été chargé de reconnaître dans son troisième voyage (car nous n'avons pas à nous occuper ici des deux premiers) toutes les côtes nord-ouest de l'Amérique, et de pénétrer aussi loin qu'il le pourrait le long de ses côtes septentrionales : il commença son exploration (1) au pord du cap Mendocin dans la nouvelle Californie, visita successivement l'entrée de Nootka et celle du prince Guillaume, pénétra dans la rivière qui

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(1) Mars 1978

reçut le nom de Cook, longea la presqu'île d'Alaska, en suivit la côte septentrionale jusqu'à la rivière de Bristol, gagna le détroit de Behring, s'éleva vers le nord et le long des plages d'Amérique, jusqu'au cap glacé qu'il atteignit le 18 août 1778, et fut forcé par une barrière de glace qui était alors impénétrable, de borner sur ce point ses découvertes. Il gagna ensuite, en se dirigeant vers l'ouest, les côtes orientales de l'Asie, jusqu'au 68° degré, où il fut également arrêté par les glaces, et il revint par le détroit de Behring dans la mer Pacifique. L'année suivante Cook recommença ses explorations; mais il rencontra la barrière de glaces un mois plus tôt, et il ne put pas même atteindre les points qu'il avait observés précédemment.

Nous n'omettrons point ici que la France et la GrandeBretagne étaient alors en guerre, et que le gouvernement français prescrivit à tous ses commandans de vaisseau de traiter le capitaine Cook comme appartenant à une puissance neutre et alliée: salutaire exemple de cette bienveillante protection que méritent tous les amis de la science et tous les bienfaiteurs de l'humanité!

Une vive et noble émulation, excitée par le desir des découvertes, s'établissait alors entre les nations. Arteaga et Quadra partirent de San-Blas en 1779, et s'élevèrent au nord-ouest jusqu'au port Bucarelli, au mont SaintÉlie et à la rivière de Cook. La France prit une part plus active à ces expéditions après la paix glorieuse de 1783. La Pérouse, parti de Brest en 1785, arriva le 23 juin de l'année suivante sur la côte nord-ouest d'Amérique, à la hauteur du mont Saint-Élie, et il parcourut et releva cette côte, depuis le 60o degré jusqu'au 36o : Cook ne l'avait reconnue que de distance en distance, et il n'avait attéri qu'au 44° degré, pour remonter ensuite vers le

nord. Cette partie du voyage de La Pérouse donna la preuve qu'il n'existait entre les deux mers aucune communication, vers les points où l'on supposait que l'amiral de Fonte avait navigué.

Dans l'année 1788, une flottille espagnole, commandée

par

Esteban Martinez et Lopez de Haro, reconnut jusqu'à Unalaska les côtes où les Russes avaient formé des établissemens.

Deux expéditions furent dirigées en 1789, vers la baie de Nootka; l'une était sous les ordres du même officier espagnol Esteban Martinez, l'autre était envoyée par la compagnie anglaise de Macao, Au milieu des discussions politiques qui s'élevèrent à cette occasion et qui sont étrangères à l'objet de ce mémoire, on reconnut avec plus d'exactitude toute cette partie des côtes d'Amé. rique. Elle fut encore visitée en 1791 par Salvador Fidalgo qui étendit ses explorations vers le nord jusqu'à la rivière de Cook:'on releva le port Mulgrave, le mont Saint-Élie, l'entrée du prince Guillaume, et l'on vérifia que le passage indiqué par Ferrer Maldonado n'existait pas.

. Jacinte Caamano fit, l'année suivante (1), les mêmes observations sur le prétendu passage de l'amiral de Fonte. On supposait cette communication établie par le détroit placé au sud-est de la pointe de Bucarelli, et Cuamano donna à cette entrée le nom de Bocca y Brazos de Monino.

Les goëlettes espagnoles la Subtile et la Mexicaine, étaient-chargées à la même époque de reconnaître l'entrée de Juan de Fuca : Gagliano et Valdez qui commandaient les deux navires reconnurent que ce passage n'ouvrait aucune communication avec l'Atlantique.

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