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était réservé à leur domination, et il devait entrer un jour dans la grande famille des nations civilisées.

Les années qui suivirent l'invasion de la GrandeBretagne se passèrent en expéditions pour réprimer sur différens points les soulèvemens des nations gauloises. Il fallut combattre les Nerviens, les Tréviriens : César tenta encore une excursion au-delà du Rhin , et il y fortifia une tête de pont, pour assurer aux Romains un facile passage dans la Germanie.

Cependant de nouveaux combats allaient se livrer dans la Gaule. Toutes les nations de cette contrée se révoltèrent à-la-fois : elles avaient profité de l'éloignement de César, qui était alors dans la Haute-Italie, où il passait ordinairement l’hiver; et leur ligue, formée par Vercingetorix, chef des Arverni, prit subitement les armes. Les Éduens même, ces anciens alliés des Romains, se joignirent ensuite à la coalition. Jamais César n'avait eu tant d'ennemis à combattre : il fut supérieur à tous. Sa campagne fut mémorable, par la rapidité de ses levées, de ses marches , de ses succès, par les siéges de Genabum, de Noviodunum, de Gergovie, d’Alesia, et par les défaites de Vercingetorix. L'année suivante vit éclater de nouveaux soulèvemens qui furent également comprimés : le siège d'Uxellodununi en fut l'opération la plus remarquable. César put alors appliquer tous ses soins à l'administration de la Gaule : il en consolida la conquête par sa clémence, par la modération des charges publiques , par l’union, l'ordre, les lois qu'il fit succéder à l'anarchie. Depuis neuf ans il commandait dans la Gaule, quand la guerre s'engageant entre lui et le parti de Pompée, le rappela en Italie et le conduisit successivement à Pharsale, en Égypte, dans

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les plaines d'Utique, à Munda , au Capitole, où il devait périr aux pieds de la statue de Pompée.

La Gaule avait eu des moeurs barbares, une langue informe, une religion cruelle, des lois aveugles et souvent impuissantes : elle dut à son administration nouvelle une longue suite d'ainéliorations. Des camps romains se changèrent en villes ; d'autres cités s'élevèrent sur la rive des fleuves ou dans les lieux les plus favorables au commerce : on fonda des colonies ; les routes, les canaux s'ouvrirent; les fleuves devinrent plus navi. gables : des monumens de la puissance romaine furent érigés dans les villes, dans les campagnes, et consacrérent partout la domination du grand peuple destiné à changer le sort du monde.

D'autres temps de barbarie pourront succéder à cette mémorable époque, mais quels qu'en puissent être les désastres et les bouleversemens, ils n'anéantiront pas tous les fruits de la conquête.

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NOTICE

SUR LE VOYAGE EN BOUKHARIE DE M. ALEX. BURNES(1),

Par M. EYRIÈS.

M. Alexandre Burnes a publié la relation de son voyage en Boukharie , et s'est empressé d'en envoyer un exemplaire à la Société de Géographie. Nous n'avons pu qu'être extrêmement flattés de recevoir cette marque

(1) Une traduction française de ce voyage est sous presse, ét paraîtra prochainement chez le libraire de la Société.

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d'attention de la part d'un homme qui vient de rendre un service éminent à la science dont nous nous vccupons.

La ligne que M. Burnes a suivie est très remarquable par son importance, car il a voyagé dans des pays qui ne sont pas connus, ou du moins ne le sont

que

très imparfaitement; il suffira de tracer brièvement son itinéraire pour faire apprécier l'intérêt extrême de sa longue pérégrination dans une partie de l'Asie centrale.

Le 2 janvier 1832, M. Burnes, accompagné de M. le docteur Gérard, d'un ingénieur hindou , d'un jeune Cachemirien et d'un domestique hindou, partit de Lodiana, ville de l'Hindoustan britannique, située sur un petit bras du Setledje , près de la frontière du territoire de Rendjit Sing, maharadjah des Seiks.

Après un séjour d'un mois à Lahor, capitale des états de ce prince, M. Burnes se dirigea vers les rives de l'Indus, et passa ce fleuve célèbre à gué, un peu au-dessus d'Attok. C'est là que les conquérans de l'Inde, depuis Alexandre-le-Grand jusqn'à Nadir-Châh, ont franchi la barrière naturelle que la nature a placée entre cette contrée et celles qui sont plus à l'ouest.

Peichawer, que les voyageurs virent ensuite , est bâti sur un rameau de l'Hindou Kousch, le Paropamisus des anciens. M. Burnes a traversé entièrement cette fameuse chaîne de montagnes : il a d'abord suivi les vallées où coulent le Hezareh ou la rivière de Caboul et ses afflens; au-delà de Caboul, il a continué pendant quelque temps à marcher à l'ouest; ensuite, tournant au nord, il s'est engagé dans le défilé de Kalou, dont le col est à 13,000 pieds anglais au-dessus du niveau de la mer, et qui forme le point de partage des eaux entre l'Indus et Oxus. Dans une haute vallée où coule le Serkah, il fit

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halte à Bamian, ville fort singulière, car une partie des habitations consiste en cavernes creusées dans le roc à toutes les hauteurs. Il y contempla ces idoles gigantesques dont les livres orientaux font mention, et aux quelles ils attribuent une antiquité fabuleuse, mais qui sont certainement postérieures au siècle de Mahomet.

Au village de Heibek, situé sur le Khouloum, M. Burnes quitta entièrement les montagnes , et entra dans ces plaines immenses, généralement sablonneuses et entrecoupées de quelques oasis, qui se prolongent au nord jusqu'au dos du pays peu

élevé du

step

des Kirghiz. Obligé de s'écarter de sa route pour obéir à une sommation du chef de Khoundouz, M. Burnes rejoignit bientôt ses compagnons restés à Khouloum, et ne tarda pas à arriver à Balkh, ville qui jadis mérita le titre pompeux de Mère des cités, et qui, de même que tant d'autres métropoles anciennes de l'Orient, n'est plus que l'ombre de ce qu'elle fut aux jours de sa splendeur.

On traversa le désert des Turkomans, on passa l'Oxus, et bientôt on se trouva dans les murs de Bokhara, la Bactra des historiens d'Alexandre, et encore aujourd'hui capitale d'un royaume puissant. Le 2 juillet, M. Burnes en partit, et cessant de voyager dans la direction du nord, il prit celle du sud. La caravane avec laquelle il marchait fut obligée de s'arrêter pendant plus d'un mois près de Karakoul, ville du Turkestan; quand elle se fut remise en route,

elle traversa de nouveau l'Oxus et séjourna quatre jours à Tchaourdji, ville qui est au sud du fleuve, et que nos cartes placent sur sa rive septentrionale. C'est le dernier lieu habité par des hommes civilisés entre la Boukharie et la Perse. Au-delà, on voyagea une seconde fois dans le grand désert qui est le théâtre des excursions des Turkomans nomades. Le jer sep

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tembre, on aperçut les montagnes du Khorasan, qui sont le prolongement occidental de l'Hindou-Kousch; onze jours après, on entra dans les défilés qui les traversent, et on toucha le territoire persan, après avoir couru plus d'un danger de la part des farouches habitans du désert.

A Meched, M. Gérard se separa de M. Burnes; il voulait retourner vers Caboul et l'Hindus en passant par Hérat et Candahar. M. Burnes gagna, en se dirigeant à l'ouest, les rivages de la mer Caspienne, en longeant la partie du Khorasan où sont établis des Turkomans et des Curdes soumis à la domination de la Perse. Il vit successivement, dans les plaines basses et humides du Mazanderan, Astrabad et Aschraf; ensuite il voyagea vers le sud, dans la belle vallée où coule le Tilar, et dont la longueur est de 60 milles. Avant de quitter le pays inférieur, M. Burnes avait aperçu la haute chaîne du Demavend, couverte de neiges perpétuelles. Après avoir parcouru la moitié de la vallée, on n'aperçoit plus la riche verdure du Mazanderan, et, à son extrémité supérieure, on a monté graduellement jusqu'à une hauteur absolue de 6,000 pieds : on est sur le plateau de la Perse, où l'on parvient par le col de Gadouk; il correspond aux Portes caspiennes , par lesquelles Alexandre passa quand il poursuivit Darius vaincu. Firouzkoh, village à peu de distance, a des maisons qui rappellent

à les habitations souterraines de Bamian.

Le 21 octobre, M. Burnes eut la satisfaction d'être accueilli à Teheran par l'envoyé de la Grande-Bretagne. Il fut ensuite présenté au souverain de la Perse. Déjà il avait vu, près de Meched, Abbas Mirza , que ce monarque reconnaissait depuis long-temps pour son héritier présomptif, et que depuis un an la mort a enlevé.

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