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une ville de ce nom? C'est une question fort controversée, mais qui le serait beaucoup moins si l'on réfléchissait que les Arabes donnent fréquemment au chef-lieu d'un pays le nom du pays lui-même, quelque nom particulier qu'ait d'ailleurs ce chef-lieu; cela revient à retourner ainsi la question : Quel est le chef-lieu reconnu du. canton de Tàfilèlt? Quoi qu'il en soit, M. Walckenaer place Tàfilêit à 191 milles géographiques de Fês, et en conclut une position de 30 10' N. et 4° 55' O. Il y a évidemment là quelque méprise, car Fês étant par 34° 6 N., la distance serait de 264 milles, chiffre qui suppose la journée de 24 milles au lieu de 17 173 qu'il a pris pour base. Dans ma construction, il faut s'arrêter vers 31 N. et 4° 30' O. C'est aussi là que mènent les huit journées qu'un itinéraire recueilli par M. Cochelet donne entre Têdlâ et Tàfilêlt.

J'aurais voulu déterminer avec quelque précision l'emplacement de la célèbre Segelmêsah; en m'attachant à une étude comparée des détails, chorographiques de Léon et d'Ahhmed, j'en conclurais, par des rapprochemens qui n'ont point échappé à M. Walckenaer, que le territoire particulier de Segelmêsah, presque identique à celui qui porte aujourd'hui le nom de Tâfilêlt, était compris entre 31° et 31° 20′ N. Mais cette position est loin de cadrer avec les distances itinéraires données par Léon, savoir, 120 milles depuis Gherseluyn, 150 milles depuis Fighig et 100 milles depuis Tebelbelt.

Fighig est fourni par Shaw à 5 jours S. S. O. des BeniSmeal (sans doute Bény Isma'yl, lesquels sont à 6 lieues sud des montagnes de Karkar, placées elles-mêmes à 6 lieues S. de Sinan. En tenant compte de la correction afférente à l'estime de Shaw pour la province d'Oran, j'aurai Fighig vers 33° 2′ N. et 4° 8' 0.

Tebebelt se trouve, d'après Caillé, à 6 journées dans l'est de Mimcina et à 8 journées de Touât; or Touât lui-même, ou Aghably (Ekably d'Einsiedel), n'est indiqué que par 2 journées sur le prolongement de la route de Ghadâmes à A'yn el-Ssalâhh, ce qui lui vaudrait une position conjecturale de 26' 53' N. et 1° 9' O. Tebelbelt tomberait alors vers 28° 49′ N. et 3° 15′ O. De là à Fighig il y a 255 milles qu'il serait à la vérité facile de réduire à 250 milles, somme des distances données par Léon entre ces deux points et Segelmêsah; mais Segelmêsah elle-même se trouverait, par ces distances, à plus de 50 milles au sud du Qassr Mouley Mâmoun, qui cependant était peu éloigné de l'ancienne capitale des Médrârytes.

Il est à desirer que les officiers employés dans la province d'Oran, et qui ont pu s'y procurer des itinéraires tels que celui qui conduit, par Fês et Marok, jusqu'à Taroudânt, mettent leurs soins à en recueillir qui aillent à A'yn el Ssalâhh ou à Aghably par Fighig, Tâfilêlt et Tebelbelt; à Marok par Tâfilêlt; du Quâdy-Mozâb à Fês par Tâfilêlt; dans toutes les directions, en un mot, où de nouvelles lignes peuvent vérifier ou compléter la triangulation grossière sur laquelle est basé le canevas de nos cartes de l'Afrique septentrionale. Qu'à Alger ainsi qu'à Bone, que dans tous les lieux où se rencontreront des indigènes ayant voyagé dans l'intérieur, on ait soin de recueillir leurs itinéraires avec tous les renseignemens accessoires qui s'y rattachent; que d'intelligentes questions amènent les éclaircissemens qu'il est le plus utile d'obtenir; que les lignes douteuses soient confirmées ou rectifiées par la réunion de nouveaux témoignages; que des lignes transversales assurent la situation relative de celles qui sont connues, en les reliant au

moyen de repères bien déterminés. Que chaque station principale soit un centre autour duquel on se fasse indiquer, en suivant les points cardinaux et leurs intermédiaires, les distances à d'autres stations plus ou moins éloignées. Le champ ouvert à de telles investigations est immense : qu'il soit, à force de questions et de recher. ches, sillonné dans tous les sens par des renseignemens itinéraires sans nombre : là seront les meilleurs élémens d'une carte du Maghreb, jusqu'à ce que l'ail européen y puisse pénétrer assez avant pour y planter les jalons d'un relèvement plus exact. Sachons préparer les voies d'une exploration si desirable, mais encore si loin dans l'avenir !...

* A.....

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LETTRE

DU CURÉ DE SANTIAGO TEPEHUACAN A SON ÉVÊQUB ,

Sur les inocurs et coutumes des Indiens

soumis à ses soins;

Traduite

par

Henri TERNAUX, sur le manuscrit original qui se trouve dans sa bibliothèque.

Les détails que l'on va lire sont contenus dans une lettre du curé de Santiago Tepehuacan, adressée à son évêque. Le but du pasteur, en faisant connaître les meurs des Indiens, est d'apprendre à ses successeurs quels obstacles ils auront à vaincre dans l'exercice de leurs fonctions, et en même temps d'appeler l'attention de l'évêque sur les moyens de faire disparaître les idées superstitieuses qui rèn gnent encore chez les Indiens.

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Chez les Indiens Haastecas, quand une femme accouche, on fait une offrande de comestibles dans l'en

droit même où elle est accouchée, afin que les teornames,

, ou femmes des dieux, ne fassent aucun mal au nouveau · né ou à la mère, et dans les premiers huit jours qui suivent l'accouchement, on fait un grand festin. A ce festin, il doit y avoir, sans aucune exception, de toutes les choses dont on a mangé dans la maison de l'accouchée, car s'il y nianque quelque chose, les teornames font mourir l'enfant. La sage-femme prend en paiement le maïs, les fèves et la viande que possède l'accouchée, et si on ne les lui donne pas, l'accouchée doit mourir. La sage-femme prend l'enfant, et si c'est un garçon, elle lui met le machette à la main, allume quelques rameaux de pins avec lesquels elle fait des fumigations dans toute la maison et autour de l'enfant. Elle le promène ensuite par toute la maison, et lui montrant chaque chose avec la main, elle lui dit : « C'est là que se lève le soleil et c'est là qu'il se couche; c'est ici le chemin du champ cultivé, c'est là le chemin de la forêt, c'est ici que tu iras labourer, c'est là que tu iras couper du bois. Tu ne resteras pas dans la forêt, mais tu reviendras par le même chemin. C'est ici qu'est ta maison, c'est ici que tu vivras ». Si c'est une fille, elle lui met dans la main un fuseau et une navette, et lui dit: « C'est ici ta maison, c'est ici que tu vivras, c'est ici que tu fileras et que ti tisseras des étoffes pour t'habiller»; puis elle ajoute les autres choses telles qu'elle les a dites au garçon. Les Indiens sont persuadés que les enfans ne savent, quand ils sont devenus grands, que ce dont on leur a parlé au moment de leur naissance.

Lorsqu'une femme meurt en couches, on porte tous ses effets dans les bois, et on place à l'envers le plat dans lequel elle mangeait; car l'esprit de la défunte viendra chercher ses vêtemens, et si on ne les porte pas

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dans les bois, et si on ne place pas à l'envers le plat dans lequel elle mangeait, la femme avec laquelle le veuf se remariera mourra dans sa première couche. Quand ces Indiens font baptiser leur enfant, ils font cuire des gâteaux au chile et des oeufs et les distribuent aux en fans, et ils croient que s'ils ne le faisaient pas,

l'enfant resterait seul et sans compagnie dans sa maison,

Après le baptêine d'un enfant, les parrains le remettent au père et à la mère, qui lui disent : « Viens avec nous à notre maison, ne reste pas ici », et ils disent la même chose dans tous les endroits où ils se reposent sur la route, tournant la figure de l'enfant vers le lieu de leur habitation, et ils croient

,

que s'ils négligent cette précaution, l'esprit de l'enfant restera dans l'église ou dans l'endroit où ils se sont reposés.

Quand ils s'en retournent avec l'enfant qui vient d'être baptisé, ils jettent de la cendre et de la chaux dans tous les chemins qui traversent celui qu'ils suivent; ils agissent ainsi afin que l'enfant, quand il sera grand, ne s'égare pas dans ces chemins.

Un enfant est-il tombé des bras de celui qui le portait, et une maladie a-t-elle suivi cette chute, les parens prennent la chemise de l'enfant, l'étendent à l'endroit où il est tombé, et disent; « Viens, viens, viens rejoindre l'enfant

emportent
ensuite un peu

de terre enveloppée dans la chemise et la lui remettent; ils disent que de cette manière l'esprit est rappelé dans le corps. du malade, et qu'il guérit.

Quand les femmes en mal d'enfant ont de la peine à accoucher, ils balaient la maison et disposent des sièges, afin que les dieux puissent s'asseoir quand ils viennent visiter la malade, et ils croient que s'ils négligeaient cette précaution elle périrait.

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v. Ils

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