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au musée de Saint Germain, où le simple jupon du dieu est retenu par une haute bande, galonnée dans la partie supérieure et ornée de trois rangées de petits ronds ponctués. A une date postérieure, on a dû mettre à profit les tissus brochés d'or et de soie que fabriquaient les barbaricaires de Lugdunum.

Le costume incomplet des figurines aux pieds nus, les raffinements de la coiffure ainsi que les variantes dues aux caprices de la mode ne viennent-ils pas à l'appui de notre hypothèse?

Ajoutons qu'une formule d'inspiration si humble aurait été si favorablement accueillie que des artistes de talent trouvèrent leur compte à l'interpréter avec finesse et distinction.

Tandis que les images changent avec les croyances

et que les expressions de l'art se succèdent sans se ressembler, même dans leurs renaissances, au contraire, les manifestations des goûts populaires demeurent toujours les mêmes.

Les deux ou trois siècles qui suivirent la conquête romaine créèrent en Gaule une situation singulièrement propice à ces naïves manifestations.

Mises à l'abri des convoitises qui surgissaient de la souche barbare dont elles avaient été détachées, les peuplades ignorantes et pauvres de la Gaule, associées à la défense de l'empire, passèrent de leur état d'anarchie sous la tutelle de la puissance la plus savamment organisatrice du monde ancien. Les difficultés de l'agglomération dans un moule nouveau s'aplanirent, grâce, aussi bien à la nature complaisante du sujet, qu'à l'habileté et à la tolérance du maître. La race gauloise, puissamment éduquée dans cette prolongation d'enfance, en conserva, comme un ineffaçable.

souvenir, ce mélange de docilité et d'indépendance, dont l'inoffensive protestation des statuettes costumées de Dis Pater fut un curieux exemple.

Les invasions barbares, avec leurs apports nouveaux, retardèrent encore la pénible formation de la grande nation, qui ne donna que six ou sept siècles après la mesure de son génie propre, en transformant enfin son premier fond de facultés natives pour l'imitation, remarqué par César, en cette faculté éminemment supérieure d'assimilation où elle se renouvelle. sans cesse, toujours alerte et toujours jeune.

VIII.

MAISONS ANCIENNES

DANS L'ARIÈGE ET DANS L'AUDE

Par M. J. de LAHONDÈS.

Le plan d'une ville résume parfois son histoire. Ainsi, les bastides, élevées au moyen âge dans les provinces méridionales, révèlent par leurs rues alignées au cordeau et se coupant à angle droit pour laisser à leur centre la place avec l'église au milieu, la volonté du seigneur qui les faisait surgir du sol d'un seul coup pour devenir aussitôt l'asile assuré d'une population nouvelle, ainsi qu'un foyer de civilisation et de culture. D'autres villes indiquent par leur mode de développement les circonstances au milieu desquelles leur importance s'accrut.

Le premier groupe d'habitations de Frédelas, noyau de la ville qui devait plus tard s'appeler Pamiers, s'abrita, au levant du monticule qui dut porter dès les premiers temps un poste de défense, sur le plateau légèrement élevé au-dessus de la plaine, où se trouve l'église de Notre-Dame-du-Marcadal, devenue la cathédrale à la fin du XVe siècle. C'était la cité entourée de murailles dont une porte subsiste encore. Des maisons éparses ne tardèrent pas à s'assembler sur des rues

irrégulières, hors des murailles, mais encore sous les pentes protectrices de la butte et sur les bords des bras de la rivière qui la contournaient. Ce fut le quartier des trois faubourgs, les trois barris de Coserans, de la Caussade et de Piconnières.

Mais après que l'acte de paréage de juin 1111, conclu entre l'abbé de Saint-Antonin Izarn et le comte de Foix Roger II, eut uni les deux pouvoirs rivaux, leur action commune développa rapidement l'étendue de la ville et sa richesse. Déjà le nouveau paréage du 2 novembre 1146, entre l'abbé Raymond de Lautrec et le comte Roger Bernard qui venait de succéder à son père, mentionne la ville de Frédelas, la ville primitive, la cité fortifiée au-dessous du château, puis deux autres villes la ville ancienne, c'est-à-dire les trois faubourgs, et la ville nouvelle, qui s'était étendue vers le nord sur des rues droites s'ouvrant directement vers une rue centrale et rectiligne qui a porté longtemps le nom indicateur de rue Villeneuve (1); totam villam Fredelaci et castrum Apamie et totam villam tam veterem quam novam adjacentem ipso castro Apamie.

:

Cette nouvelle ville fut entourée aussi d'une enceinte qu'indique la forme circulaire d'une des rues extérieures; une porte en demeura jusque vers 1830, à l'entrée de la rue Villeneuve.

Mais elle s'étendit bientôt encore dans la même direction, au point de doubler en peu d'années son étendue, sur un plan en damier qui reproduit exactement celui des bastides et qui montre sa construction improvisée aussi comme d'un seul jet. Un acte de 1226

(1) Plus tard rue des Nobles.

mentionne en effet ce nouveau quartier du Camp, pour lequel une seconde église avait dû être construite aussitôt sur le terrain encore libre, l'église NotreDame-des-Champs; campi. Il eut aussi sa longue rue directrice alignée au cordeau qui porte encore le nom de rue Major (1).

La prospérité de la ville, centre naturel d'échange entre la montagne et la plaine, s'accrut avec rapidité aux deux siècles suivants. Les produits agricoles, ceux de la vigne surtout, et le commerce des draps furent les principaux éléments de sa richesse. Des règlements très protecteurs en conservaient le bénéfice aux producteurs et aux fabricants. La vie municipale se développait librement grâce à la charte de coutumes de l'abbé Maurin, l'une des plus libérales du moyen âge. La culture et le commerce prenaient une extension féconde sous la protection des pouvoirs rivaux de l'abbé et du comte, empressés à se ménager l'appui des habitants.

Les portails romans des deux églises seraient les seuls témoins de cet essor du XIIe siècle, s'il ne restait aussi un fragment de muraille percée de trois fenêtres géminées de la maison que posséda à Pamiers, dès les premiers temps de sa fondation, l'abbaye voisine de Boulbonne. Elle est construite en grandes briques séparées par un lit épais de mortier.

Le comte Raymond Roger, rentrant à Foix, le 30 novembre 1188, au retour de Mazères, où il venait d'ensevelir son père, le pieux Roger Bernard, s'arrêta à la chapelle du cimetière Saint-Jean, s'ouvrant sur le

(1) Voir, pour plus de développements, Annales de Pumiers, t.1, chap. III et IV.

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