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encore intactes, renfermant des ossements calcinés, mêlés à des cendres et à de la terre. Au fond du caveau se trouvait un petit lion, en terre blanche, rappelant les figures de Béotie et une belle inscription découpée dans un lame de bronze dont vous avez pu voir un exemplaire identique lors de votre excursion à Avenches.

<< D'un autre côté, en voyant avec vous l'état où se trouvaient les derniers restes du théâtre de Mandeure et l'envahissement de la forêt sous laquelle ils sont près de disparaître, nous avons songé à dégager tout au moins les points essentiels et les plus menacés. A cet effet la Société d'Émulation de Montbéliard a voté une petite somme et nous allons commencer le travail, malheureusement les fonds, d'ailleurs très modiques dont nous disposons, se trouvent pour le moment absorbés par l'aménagement de deux nouvelles salles joignant notre musée que la ville vient de nous concéder. »>

Nous sommes toujours heureux, lorsque nous pouvons constater que, comme à Mandeure et à Montbéliard, notre visite a pu réchauffer le zèle des habitants du pays en faveur de leurs antiquités.

M.

NOTA. Le compte-rendu de l'excursion en Suisse prendra place à la suite des Mémoires.

MÉMOIRES

I.

LA CITÉ DES SÉQUANES

D'APRÈS LES TEXTES DES HISTORIENS OU DES GÉOGRAPHES ET LES INSCRIPTIONS ROMAINES

Par Auguste CASTAN,

Conservateur de la Bibliothèque de Besançon,

Correspondant de l'Institut (Académie des Inscriptions et Belles-Lettres).

Note préliminaire.

Ce travail sur la cité des Séquanes a été lu par M. Auguste Castan dans le Congrès archéologique de France, lors de la session tenue à Besançon au mois de juillet 1891. La partie d'exposition en était complètement terminée, et c'est elle qui constitue la présente publication; l'auteur n'avait plus qu'à disposer ses notes. justificatives, lorsque malheureusement il est mort le 28 juin 1892. Tous ceux qui connaissent les travaux de M. Castan savent combien son érudition était exacte et scrupuleuse; ils ne douteront pas un moment que cette étude sur la cité des Séquanes, publiée ici sans citations de textes, sans références d'aucune sorte, ait été le fruit de longues et minutieuses recherches. M. Castan a laissé en effet deux blocs considérables de notes dont l'un porte

sur la couverture ce titre: La cité des Séquanes et l'autre Épigraphie; tous deux se composent de morceaux très divers, mais qui se rapportent presque tous sans exception à l'histoire de la cité des Séquanes. Ce sont ou des idées personnelles que l'auteur jetait rapidement sur le premier morceau de papier qu'il trouvait sous sa main, ou des extraits de textes anciens, des analyses plus ou moins détaillées d'ouvrages modernes, des copies d'inscriptions déjà connues ou nouvellement découvertes, des documents coordonnés sur diverses parties du sujet général; ainsi dans le bloc Cité des Séquanes se trouvent des cahiers particuliers avec ces titres: Vesontio, Epamanduodurum, Séquanais dans divers pays. Le bloc Epigraphie a une composition particulière sur laquelle il faut donner quelques renseignements. La Commission de géographie historique de la Gaule avait jadis demandé à M. Castan de rassembler pour le Corpus des inscriptions de la France les inscriptions de la province des Séquanes. L'idée de ce travail avait souri à M. Castan, il s'était mis à la tâche et l'avait fort avancée; c'est ainsi que dans le bloc dont il est question se trouvent des cahiers séparés, de rédaction en apparence définitive, où sont transcrites, discutées, expliquées les inscriptions romaines de Besançon, de Mandeure, de Luxeuil et d'autres lieux.

Que deviendront ces matériaux laborieusement amassés ? Ou bien un ami compétent de l'auteur se chargera de dépouiller les deux dossiers et d'en publier ce qui lui paraîtra en état d'être publié, ou bien la veuve de l'auteur les donnera à la bibliothèque de la ville de Besançon où M Castan a volontairement confiné sa vie et sa carrière. Dans ce cas elle prendra les soins les plus attentifs et les plus pieux pour qu'aucune de ces feuilles volantes ne puisse s'égarer. En attendant elle espère avoir justifié par la présente note si besoin en était, le titre que M. Castan avait donné à son travail : La Cité des Séquanes, d'après les textes des historiens ou des géographes et les inscriptions romaines. Marie CASTAN.

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Au temps de la Gaule indépendante, les Séquanes constituaient, à l'est du territoire gaulois, dans la région spécialement appelée celtique, une peuplade, civitas, comme disaient les Romains, sans cesse en hostilité avec ses voisines et ayant l'habitude d'associer les Germains à ses entreprises belliqueuses.

Avec la mobilité d'esprit qui caractérise la race gauloise, les Séquanes se gouvernaient tantôt suivant la formule monarchique, tantôt selon le système de l'oligarchie. Catamantalède, qui avait longtemps régné sur les Séquanes, s'était vu mettre au rang des amis du peuple romain, par un décret du sénat de Rome. Son fils Casticus travaillait à ressaisir cette situation, quand César intervint dans les affaires de la Gaule.

Deux factions rivales étaient depuis longtemps en lutte dans ce grand pays : l'une avait à sa tête les Édues, l'autre les Séquanes. Ceux-ci, menacés par la clientèle considérable de leurs rivaux, s'étaient alliés aux Germains que commandait Arioviste, avaient défait les Édues et étaient ainsi devenus prépondérants dans la Gaule. Mais Arioviste, séduit par la richesse du sol de la Séquanie, « le meilleur terroir de toute la Gaule », au dire de César, avait confisqué le tiers de ce sol au profit des siens et exigeait qu'un autre tiers fût délivré à vingt-quatre mille Harudes venus à sa suite. Les Séquanes, consternés, appelèrent César comme libérateur. La Gaule entière et l'Helvétie devaient perdre à ce jeu leur indépendance. Les Séquanes

essayèrent de réparer leur faute en fournissant 12,000 hommes à l'armée, qui tenta vainement de débloquer Alésia pour rendre à Vercingétorix la possibilité de faire reculer les légions romaines.

En raison de son voisinage des Germains. la Séquanie fut regardée par les vainqueurs comme un territoire militaire dont l'occupation absolue importait à la sécurité du territoire de la Gaule devenue romaine : aussi malgré les souvenirs de son ancienne amitié avec Rome, n'obtint-elle pas cette demi-indépendance dont César favorisa ses voisines, les cités des Édues et des Lingons, à titre « d'alliées ou amies » elle dut, au contraire, subir dans toute sa rigueur l'imperium du gouverneur romain.

Dans le remaniement des subdivisions de la Gaule. opéré par Auguste, en l'an 27 de notre Ère, la Séquanie fut rattachée à la Belgique. Il n'y eut toutefois pour elle aucun des adoucissements qui étaient le partage des cités fédérées ou libres; sa situation fut celle des cités tributaires, stipendiariæ.

Vesontio, sa capitale, refusa en l'an 68 d'ouvrir ses portes et de prêter ses remparts aux légionnaires armés par Virginius Rufus pour combattre le soulèvement qu'avait organisé Vindex contre les monstruosités résultant de la folie furieuse de Néron. Galba, en arrivant au trône, fit remise d'un quart de leur tribut aux cités qui avaient été propices à la levée de boucliers de Vindex: les Séquanes et les Édues bénéficièrent de cette faveur, mais Vitellius la leur fit bientôt expier en livrant leurs terres en pâture aux légions du Rhin.

Durant la guerre civile qui aboutit au renversement de Vitellius, le Batave Civilis et le Lingon Sabinus ex

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