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large d'un mètre et demi, permet de la parcourir intérieurement dans toutes ses dimensions. Une inscription placée sous le grand comble, au pignon occidental, est destinée à conserver les noms de toutes les personnes qui ont contribué, à divers titres, à la restauration de la charpente et de la toiture. Cette inscription est coulée en relief sur deux grandes plaques de fonte en forme d'écusson; elle est ainsi conçue :

CETTE CHARPENTE EN FER ET FONTE
REMPLACE LA CHARPENTE EN BOIS
INCENDIÉE LE 4 JUIN, 1836.

LES TRAVAUX COMMENCÉS EN 1836, sous
LE MINISTÈRE DE MR SAUZET, GARDE DES
SCEAUX, CONTINUÉS SOUS LE MINISTÈRE
DE MMRS PERSIL, BARTHE, GIROD (DE L'AIN), Teste,
VIVIEN, MARTIN (DU NORD), SES SUCCESSEURS,
ONT ÉTÉ ACHEVÉS EN 1841.

LOUIS PHILIPPE [er

ÉTANT ROI DES FRANÇAIS.

LE BON DE VILLENEUVE, PRÉFET D'EURE ET LOIR.

MGR CLAUSEL DE MONTALS, EVÊQUE DE CHARTRES.

ADELPHE CHASLES, DÉPUTÉ, MAIRE DE CHARTRES.

ACCARY-BARON, ARCHITECTE.

MIGNON, CONSTRUCTEUR DE LA CHARPENTE EN FER ET FONTE.
EMILE MARTIN, FONDEUR A FOURCHAMBAULT.
QUÉNÉHEN, CONSTRUCTEUR DE LA COUVERTURE EN CUIVRE.
PIÉBOURG, CONSTRUCTEUR DE LA MAÇONNERIE.

Au sommet du rond-point, un ange-girouette tourne sur un pivot. Cet Ange-Gardien, comme le peuple l'appelle, est debout, les ailes déployées; il est vêtu d'une longue robe à manches étroites, et d'une espèce de surtout serré autour des reins par une ceinture; il a la tête découverte, les cheveux bouclés, le visage imberbe et riant, les pieds nus; de sa main droite il indique le

côté d'où souffle le vent ; et dans sa gauche, il tient une croix longuement hastée. Le piédestal qui le porte, est très-élégant : dans quatre petites niches sont placés de gracieuses statuettes représentant les quatre évangélistes avec leurs animaux symboliques. Les évangélistes indiquent les quatre points cardinaux saint Mathieu regarde l'orient; saint Luc, le nord; saint Jean, l'occident; et saint Marc, le sud. L'ange et le piédestal sont entièrement dorés 2. « Cet emblême religieux, dit M. Lejeune, en indiquant à tous les >> instants du jour le point d'où le vent souffle, semble annoncer en même temps qu'il n'existe sur la terre aucune contrée qui >> soit inaccessible au salut du monde, que l'image du Christ placée en avant sur la pointe du pignon de la porte Royale, enseigne aux peuples de la terre 3. »

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Avant la révolution de 1793, il existait sur le faîte du grand comble deux petits clochers. Le premier était construit au centre du transept; il était percé à jours; on l'appelait la Grue, parce qu'étant au-dessus du grand œillard, il renfermait un instrument au moyen duquel on montait les bois, le plomb et autres matériaux nécessaires pour les réparations du comble et des clochers. On y avait aussi placé une crecelle pour annoncer les offices des trois derniers jours de la Semaine-Sainte. Le second clocher placé entre le premier et l'ange, s'élevait perpendiculairement au-dessus du lutrin. Il était d'un travail et d'une symétrie admirables, disent les anciens historiens; on l'appelait le clocher des Nones ou des Babillardes, parce qu'on y avait placé les six Commandes. C'étaient des clochettes destinées à avertir les sonneurs, du moment où

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1 Le nouvel ange placé au chevet de la Cathédrale, dit M. Didron, bénit la ville assise à ses pieds. C'est là une faute contre la liturgie et » contre l'iconographie. Dieu et les hommes qui le représentent sur la terre, le pape et les évêques principalement, peuvent seuls bénir. Nous nous permettrons de faire remarquer au savant directeur des Annales archéologiques que l'ange-girouette ne bénit pas, et que s'il bénissait, on trouverait dans nos livres saints de quoi le justifier: en effet un ange n'a-t-il pas béni Jacob? (GÉNÈSE, XXXII, 26.)

2 Cet ange-girouette, qui a remplacé, en 1840, un autre ange posé au XIVe siècle et détruit par l'incendie de 1836, a coûté 12,230 fr. 3 Sinistres de la Cathédrale, page 7.

ils devaient mettre en branle les grandes cloches durant le service divin; elles servaient aussi à appeler aux offices les chantres et les enfants de chœur.

Au Moyen-Age, on plaçait souvent, sur le sommet du grand comble, une découpure en métal, formant une crète, et qui donnait de la légèreté et de la grâce à l'ensemble du toit. Cette crête, qui n'existe pas encore sur notre Cathédrale, a été cependant figurée sur les planches de la Monographie, et nous l'avons figurée nous-même sur la lithographie du frontispice de notre livre.

Les combles des bas-côtés de la Cathédrale méritent aussi d'être visités; ils conservent encore leur charpente du XIIIe siècle, et sont recouverts en plomb. Les seconds bas-côtés du chœur et du sanctuaire sont couverts en ardoises et en tuiles rouges, ou voûtés en pierres de taille.

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L'architecte de la Cathédrale, pour orner l'extérieur de son église, pour lui donner un aspect plus imposant par sa masse, a flanqué de tours carrées les extrêmités du transept et la courbure de l'abside. Ces six tours sont formées d'un étage voûté en pierre, et percées de six ou huit baies ogivales, sans vîtres, très-élevées et ornées de colonnettes et d'archivoltes avec des têtes monstrueuses et grimaçantes. Ces tours ne sont pas achevées; elles devaient recevoir encore un étage octogone et une pyramide à peu près semblable à celle du Clocher-Vieux.

«En construisant ce vaste édifice, dit M. Lejeune, au milieu des guerres et d'une tourmente incessante, l'architecte ne pou» vait négliger les moyens d'une surveillance indispensable pour » prévenir toute surprise et toute attaque de la part des ennemis, » et ce fut dans ce but que les deux portiques du nord et du sud >> furent flanqués de deux tours carrées 2. » Il va sans dire que nous laissons au savant historien des sinistres de notre Cathédrale la responsabilité de ses assertions.

1 Monographie de la Cathédrale de Chartres, planches IV et v.

2 Sinistres de la Cathédrale, page 8.

Chacune de ces tours possède un beau et solide escalier à vis; ils sont adossés à un de leurs angles; deux seulement sont entièrement achevés; ce sont ceux des tours qui flanquent le portail du midi. Ils s'élèvent jusqu'à la hauteur du pignon et forment deux petites tourelles octogonales à pyramide en pierres imbriquées. On admirera la force et la puissance de ces escaliers tournants; il n'en existe peut-être pas en France qui puissent rivaliser avec eux. Les deux clochers ont aussi des escaliers à vis d'une égale puissance.

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La cathédrale de Chartres est célèbre dans tout l'univers par ses deux clochers. Nous avons déjà dit qu'ils étaient commencés en 1145, et que l'un était terminé avant l'incendie de 1194; le second ne fut achevé qu'en 1513. Les architectes de notre Cathédrale ont donné un soin tout particulier à la construction de ces deux pyramides aiguës jetées dans les airs comme le symbole distinctif et mystique d'une religion céleste et infinie, et prenant leur essor vers le trône de Dieu pour y porter les vœux et les prières des fidèles. Objet d'étonnement pour les siècles qui les ont vus naître, ces clochers feront l'admiration de tous ceux qui seront témoins de leur durée.

CLOCHER-VIEUX.

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Le Clocher-Vieux occupe le sud de la façade principale. Rien de plus admirable que ce clocher. Ecoutons ce qu'en dit un de nos plus savants architectes, M. Viollet-Leduc : « Si l'on veut se rendre compte de la conception de ce clocher, » on verra qu'elle est aussi franche que l'exécution en est simple » et savante. En effet, l'on est d'abord frappé de l'unité, de la » grandeur qui règnent dans l'ensemble. Partant du soubassement >> on arrive au sommet de la flèche sans brusque arrêt, sans que » rien vienne interrompre la forme générale de l'édifice. Ce clo» cher, dont la base est pleine, massive et sans ornement, se » transforme, à mesure qu'il s'élance, en une flêche aiguë à huit » pans, percées de lucarnes, sans qu'il soit possible de dire où » cesse la construction massive et où commence la construction légère. C'est qu'en effet elles se prêtent mutuellement secours,

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>> et la transition est insensible. Là où la tour cesse d'être carrée » et où la flêche commence, les lucarnes viennent, dans les angles >> et sur les faces, épauler cette grande pyramide octogonale, dont >> les parois n'ont guère que 30 centimètres d'épaisseur à la base, » et dont la hauteur est de 45 mètres. C'est par des retraites › habilement pratiquées, et par de petites trompes construites » dans les angles intérieurs de la tour carrée, que cette flèche en pierre vient reporter tout son poids sur la partie inférieure. Si, après avoir admiré cet ensemble, nous étudions les détails de » la construction, nous verrons une exécution parfaite : partout » des joints larges et égaux, des matériaux de choix et que ni les temps ni les incendies n'ont pu entamer, des parements dressés » avec une rare perfection, l'écoulement des eaux ménagé avec » un grand soin. Au point où la pente des huit faces de la flèche » commence, l'on ne voit ni tirants en fer, ni enrayure, ni chaî»nage pour maintenir la base de cette pyramide, dont les parois » sont si minces. Les lits des assises qui composent les parties >> inclinées étant horizontaux, il ne peut y avoir de poussée ni » d'écartement à la base des flêches gothiques. Sûrs de leurs moyens, forts de leur expérience, les constructeurs du vieux » clocher de Chartres ont apporté le soin le plus minutieux dans » l'exécution des détails de la construction; mais ils ont dédaigné » toutes ces précautions inutiles, tous ces doubles emplois, qui indiquent plus souvent l'ignorance de l'architecte que sa pru>>dence. Dans une œuvre aussi importante, il y avait deux graves » inconvénients à employer plus de matériaux qu'il n'était néces»saire la dépense inutile d'abord, et le danger de charger les fondations d'un tel poids qu'elles ne pussent résister à la pression. Il n'y a ici que ce qu'il faut; aussi depuis 700 ans que ce >> clocher existe, on n'y voit pas une lézarde, pas une échan» crure, quoiqu'il ait été calciné intérieurement par deux terribles » incendies 1. » — Les chapiteaux, les gargouilles et les modillons sont dignes d'attirer l'attention particulière de l'archéologue : nous ne pouvons les décrire ici.

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1 Annales archéologiques, tome II, pages 343 et 344. — Voyez l'élévation, les plans et les détails du Vieux-Clocher dans la Monographie, planches IV, XLVI, XLVII, XLVIII, XLIX, L el LI.

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