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I. Dans le bas, on voit saint Denis portant sa tête dans ses mains, et saint Lorant (sic) tenant son gril: ces deux figures sont du XIVe siècle. Le reste de la fenêtre date du XVe siècle. Je mentionne pour mémoire un fragment de saint Gilles avec sa biche. Les trois quatre-feuilles du tympan offrent : 1° La Géométrie avec équerre et compas; puis quatre anges qui chantent O Gloriosa excelsa, etc., etc. 2° La Dialectique qui tient deux serpents, l'Arithmétique qui pose des chiffres sur une tablette, la Rhétorique qui écrit dans un livre, la Philosophie figurée par un philosophe qui enseigne; ce quatre-feuille montre aussi le donateur. 3° La très-sainte Vierge enlevée au ciel par deux anges.

II. Cette fenêtre a perdu presque toute sa vitrerie peinte : il ne reste qu'un seul panneau de grisailles, une Annonciation, et deux anges thuriféraires, placés dans les quatre-feuilles.

III. Cette verrière figurait le martyr de saint Etienne; on ne voit plus que les deux juifs qui jettent des pierres.

IV. C'est la fenêtre absidale; dans chacun des six compartiments inférieurs, il y a la figure d'un saint ou d'une sainte placée dans une niche peinte et enrichie de toute l'ornementation architecturale de l'époque : 1° Saint Turiaf en costume épiscopal et bénissant; 2° Sainte Cécile tenant un livre; 3° Saint Piat en costume sacerdotal, portant un livre dans sa main gauche et bénissant de la droite; 4° Un saint Pape en habits pontificaux; il a perdu son nom; 5o Un saint Évêque bénissant ; 6° Un autre saint Évêque.

Le tympan de la fenêtre offre la scène du Jugement dernier. Jésus est assis sur un arc-en-ciel, au centre de la rose; autour du Juge suprême, on voit sept anges, dont cinq portent les instruments de la passion et les deux autres sonnent de la trompette, qui doit éveiller les morts. A la droite de son Fils, Marie demande humblement grâce pour les pécheurs; à la gauche de Jésus, le disciple bien-aimé unit ses prières à celles de Marie. Plus bas, dans les quatre trèfles, les morts sortent de leurs tombeaux; enfin dans le quatre-feuilles inscrit, saint Michel pèse les âmes dans la balance du Jugement.

V. Dans le bas, on voit Marie tenant son fils, et un ange thuriféraire. Dans la rose supérieure, une trinité, le Père éternel tient la croix où pend son Fils unique, une colombe est entre les deux.

VI. Il y a deux panneaux de grisailles. Dans les quatre-feuilles inférieurs du tympan, on voit Goliath armé de sa lance et David avec sa fronde.

VII. Trois panneaux de grisailles, et les armes du Chapitre sont les seuls fragments qui restent en verres peints.

$10. La Sacristie.

La sacristie n'est pas indigne de la cathédrale; c'est une élégante construction des dernières années du XIIIe siècle. Voici ses dimensions dans œuvre : 11 mètres 30 centimètres de longueur; 8 mètres 20 centimètres de largeur; 15 mètres 20 centimètres de hauteur. Elle est voûtée de deux croisées d'arêtes à nervures toriques en dos de carpe; ces nervures s'appuient sur des faisceaux de colonnettes. Les bases des colonnettes sont carrées avec des moulures circulaires et des scoties peu profondes; les chapiteaux manquent de tailloir et sont ornés de feuilles qui n'y semblent que piquées et comme attachées seulement par leurs pétioles: ils sont peu gracieux. Les deux clefs de voûte sont simples, ornées seulement de feuilles lancéolées.

Quatre belles et larges fenêtres ogivales d'une courbe élégante et d'un heureux dessin occupent tout l'espace compris entre les contreforts. Elles sont divisées en plusieurs compartiments par de légères colonnettes, et leurs tympans sont coupés par des meneaux toriques qui se courbent en trèfles, en quatre-feuilles, en roses de cinq ou huit pétales. Ces belles fenêtres, nos pères les avaient garnies de grisailles; mais les vandales du XVIIIe siècle ont défoncé, les grisailles pour les remplacer d'un côté par du verre blanc, et de l'autre par un mur en plâtre! Les mêmes vandales ont recouvert toutes les surfaces d'une épaisse couche de badigeon.

La partie inférieure du mur oriental était ornée d'une série d'arcades aveugles dont les retombées reposaient sur d'élégantes. colonnettes, et dont le tympan était décoré de meneaux à moulures : tout cela a été détruit pour y établir de méchantes armoires.

Nous n'avons rien à dire sur les onze tableaux peints sur bois ou sur toile qui sont appendus dans la sacristie: aucun d'eux ne

mérite une mention honorable. Nous nous taisons aussi sur les meubles en bois : tout est l'œuvre d'un froid menuisier du XIXe siècle.

La sacristie n'offre plus aujourd'hui, comme avant l'orage révolutionnaire, un vaste musée de chefs-d'œuvre d'orfèvrerie sacrée en or et en argent enrichis de pierreries et dus à la pieuse munificence des rois, des évêques, des chanoines ou de quelques riches particuliers: croix, livres, chandeliers, encensoirs, joyaux, châsses, reliquaires, ostensoirs, calices, ciboires, vêtements sacerdotaux, tableaux en broderie, etc., tout a été pillé ou jeté dans le creuset sacrilège de 1793. Ces chefs-d'œuvre attiraient de nombreux visiteurs, dont les offrandes formaient un des revenus de l'œuvre. Aujourd'hui la sacristie ne renferme rien qui mérite d'attirer les regards du pèlerin ou de l'archéologue.

Un large couloir voûté conduit de la sacristie à la Cathédrale; une grande fenêtre éclaire ce couloir; elle est garnie d'une assez belle grisaille datant du XIVe siècle.

A l'extérieur, la construction est simple, unie. La corniche seule a quelques ornements sculptés; ils se composent d'un double rang de feuilles recourbées en crosse, motif qui est presUne que toujours employé dans tout le cours du XIIIe siècle. tourelle carrée qui renferme un escalier à vis, flanque l'angle sud-ouest de la sacristie.

CHAPITRE IV.

DESCRIPTION DES VITRAUX.

La vitrerie peinte de la Cathédrale de Chartres est sans contredit la première du monde. La peinture sur verre garnit 125 grandes fenêtres, 3 roses immenses, 35 roses moyennes et 12 petites roses; presque toute cette peinture date du XIII siècle; toutefois on compte 6 fenêtres et 2 roses moyennes en verres du XIV siècle, une fenêtre en verres du XV, et 2 petites

roses en verres du XVI siècle-Renaissance. Il y a aussi 5 grandes fenêtres peintes au XIIe siècle; elles sont placées sous la grande rose occidentale; c'est d'elles que M. Lassus a dit : « Chartres possède trois magnifiques verrières qui font pâlir tous les vitraux

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» dont le XIIIe siècle a enrichi cette admirable cathédrale 1.

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<< La cathédrale de Chartres, dit M. de Lasteyrie, offre au peintre-verrier un des plus parfaits modèles qu'il puisse étudier,

» et si, comme exécution de détail, on a été beaucoup plus loin, » il n'existe, j'ose le dire, rien de plus complet, rien de plus ad>> mirable comme décoration et entente des effets. Chartres est » un type, et un type parfait, et comme tel nous devons en faire l'objet d'une étude minutieuse et approfondie. Et d'abord jetons » un coup-d'œil sur l'effet général de la vitrerie. Cet effet n'est » pas le simple résultat du jeu de la lumière à travers l'assemblage fortuit des verres colorés. C'est un effet produit sciem» ment et savamment cherché par l'artiste : tout est rationnel et » symbolique. Voyez l'obscurité pieuse qui règne au seuil du temple; elle se dissipe légèrement en approchant du centre de la >> croix, emprunte des couleurs plus vives à la palette du peintre en >> tournant autour du chœur; puis enfin, fait place, dans le sanc>> tuaire, aux tons vifs et brillants qui s'échappent de la voûte. >> Que de poésie dans cette immense gamme de tons si habilement ménagés, admirable symbole de la lumière chrétienne, qui s'échappe à grands flots du sommet de la croix, et jette encore une lumière amoindrie sur ceux qui s'en éloignent!

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» Pour produire ces effets qui nous frappent, l'artiste ne s'est » servi que de moyens fort simples. Dans les nefs latérales, » des verrières aux tons froids sont chargées de nombreux sujets >> dont les personnages se pressent en foule dans des cadres fort >> rétrécis. Les fonds eux-mêmes, couverts de divers ornements, >> sont formés d'un nombre infini de morceaux de verre, dont les joints rapprochés ajoutent encore à l'obscurité de la teinte gé»nérale. C'est une habile application du style légendaire, et le >> choix même des sujets se trouve ici d'accord avec la place qu'ils occupent. Les mêmes tons dominent dans les hautes fenêtres

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1 Annales archéologiques, tome Ier, page 82.

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» de la nef centrale; mais là les figures plus grandes et les fonds

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plus unis livrent au jour plus d'accès, et laissent une lumière » vague circuler sous la voûte.

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» Lorsqu'on arrive au centre de la croix, le bas des ailes laté>> rales est également plongé dans une obscurité que la masse des portails rend plus complète. Mais des roses placées au sommet des transepts, une lumière harmonieuse et irisée descend obliquement jusqu'à l'entrée du chœur, pour s'y confondre avec les teintes mystérieuses de la nef; et la galerie qui règne au» dessous de ces roses semble elle-même distinée à établir une >> transition entre leurs parties diaphanes et les masses opaques qui les supportent.

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» Autour du chœur sont les chapelles. Là règne encore une >> lumineuse obscurité. Là nous trouvons encore les vitres légen>> daires aux fonds si richement ornés; mais le ton général du » tableau n'est déjà plus le même; il se colore de teintes plus » chaudes, et là, le peintre a répandu à profusion la topaze, » l'émeraude et le rubis, immortelle couronne destinée à briller » au front du roi des Cieux, représenté par son Eglise. Au milieu » de l'auréole de ces saintes chapelles, s'élève le sanctuaire » éblouissant de clarté, comme Jésus radieux au milieu des » apôtres, et des torrents de lumière chaudement colorée descendent dans le choeur, à travers les figures gigantesques qui >> couvrent ses verrières. Il semble ici que l'artiste ait dérobé » un rayon de lumière divine pour animer son œuvre; rayon » éblouissant d'abord, et dont l'harmonie décroissante vient >> mourir à l'entrée du sanctuaire, comme pour indiquer la place » où le chrétien entre en communication avec son Dieu.

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» Mais de si simples paroles ont peine à rendre les prodigieux » effets dont l'œil est frappé sous les voûtes de Chartres, comment pourraient-elles rendre la pieuse impression que l'âme éprouve

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» à cette vue? Comment pourraient-elles rendre les nuances toujours nouvelles d'un tableau qui varie à toutes les heures du jour, selon toutes les circonstances de lumière et de saisons? » Nous n'ajouterons rien à ces brillantes paroles sur les effets généraux que produisent nos incomparables verrières.

Nous pouvons dire ici ce qu'un vieil historien de la cathédrale de Tournay disait des vitraux de son église : « La plupart des ver

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