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Bourgogne il doit donc y avoir analogie entre l'état de l'architecture en Belgique et en Picardie.

Quels sont les mélanges survenus dans le style ogival lors du retour aux formes anciennes?

Une richesse excessive dans l'ornementation est, suivant M. Dusevel, le signe distinctif de cette transition en Picardie, Quels sont les derniers exemples de l'architecture ogivale en Picardie?

MM. Cheussey et Dusevel font observer combien cette question est difficile à résoudre. Il est à peu près impossible d'établir une démarcation précise, l'ogive ayant survécu assez long-temps dans quelques localités à sa destruction sur d'autres points.

M. Duthoit fait à cette occasion une communication relative à l'église de Tilloloy, et produit le dessin de cette église où règne encore l'ogive, et dont la fondation ne remonte cependant qu'à 1534. Il communique également un dessin de l'église de Folleville, un peu antérieure à celle de Tilloloy. M. de Caumont présente ensuite les questions suivantes sur les anciens autels et les fonts baptismaux.

Quels sont les plus anciens autels observés en Picardie? M. Dusevel a remarqué un autel en bois, en forme de coffre, et recouvert de peintures, que l'on conserve dans la sacristie de St.-Vulfrand.

Quels sont les plus anciens fonts conservés dans les églises? Les plus anciens fonts connus en Picardie sont ceux de la cathédrale, dont la forme est celle d'un carré long; cenx d'Airaines, qui affectent à peu près la même forme quoiqu'ils aient moins de longueur; ceux de La Neuville, près Corbie; et ceux de Monididier. Ces derniers sont de forme carrée. M. Dusevel a donné le dessin de cenx d'Airaines dans le 2o. vol. de sa description historique et pittoresque du département de la Somme.

M. de Caumont expose le système de classification chronologique qu'il a établi dans la sixième partie de son Cours pour les fonts baptismaux : il continue ensuite de poser ses questions.

A quelle époque les a-t-on divisés intérieurement en deux parties égales?

M. de Caumont n'a pas vu cette division avoir lieu avant le XV. siècle. M. l'abbé Leguennec pense que le motif qui a fait introduire cette division des fonts baptismaux est la cessa tion du baptême par immersion. Une des deux parties servait à contenir l'eau ; tandis que l'autre tenait lieu de piscine, et donnait écoulement à l'eau dont on s'était servi pour le baptême.

Y a-t-il beaucoup de fonts ayant leurs couvercles?

On ne cite que ceux de St--Riquier et de Folleville dont les couvercles sont en bois.

On passe aux anciennes sépultures.

Comment les cercueils en pierre les plus anciens étaientils disposés ? Comment les sépultures de l'époque Mérovingienne se distinguent-elles des sépultures gallo-romaines?

M. de Caumont indique, pour faire mieux comprendre cette question, les faits qu'il a recueillis sur les sépultures Mérovingiennes, et qu'il a consignés dans le 6o. volume de son Cours d'Antiquités : il parle des sabres courts tranchants d'un seul côté, des agraffes et des espèces de haches ou francisques qu'il a découvertes dans un grand nombre de sépultures présumées de l'époque Mérovingienne.

M. Rigollot signale des sépultures découvertes près d'Ebard, et dans lesquelles on remarquait de courtes épées et des médailles du bas-empire. M. Dusevel annonce qu'il fit insérer sur cette découverte un article dans le Glaneur, du 27 septembre 1838, dans lequel il paraissait penser que ces antiquités

remontaient au V. et VI. siècles. Une savante et lumineuse dissertation de M. Rigollot, démontra en effet que les caractères signalés dans ces sépultures indiquaient l'époque Mérovingienne, et non l'époque gallo-romaine, comme on l'avait pensé jusque-là.

M. Le Serrurier rappelle alors que les caractères signalés par MM. Rigollot ont été observés à Vendhuile, près St.Quentin, où l'on a découvert de nombreuses sépultures, mais à Vendhuile les corps avaient été renfermés dans des tombeaux de pierre en forme d'auge, et dont la partie supérieure était arrondie. Les sépultures de Vendhuile avaient été crues galloromaines jusqu'à ce que M. Rigollot eût éclairci ce point archéologique.

Quels sont les lieux de sépulture les plus anciens en Picardie?

M. Dusevel dit que le lieu de sépulture le plus ancien de la Picardie est St.-Acheul. M. Rigollot signale les tombeaux qui se trouvent encore dans cette ancienne abbaye, et M. Guidé dit qu'il en existe trois dans les caveaux de l'église.

M. l'abbé Goard fait mention de l'ancien cimetière de St.Denis, à Amiens, entouré d'une galerie en forme de cloître, et rappelant par sa disposition le Campo santo de Pise. L'ancien cloître des chanoines de la cathédrale présentait à peu près les mêmes caractères. La danse macabre y était sculptée. M. de Caumont termine la séance en faisant connaître les questions qui demain seront soumises à la Société.

Le Secrétaire,

E. DE BREDA, de Senlis,

Exploration de la cathédrale d'Amiens.

Le ro juillet, les membres présents à la séance du matin, se sont rendus, vers l'heure de midi, à la cathédrale, qu'ils ont examinée dans toutes ses parties et dans ses détails même les plus minutieux.

Les restaurations faites, depuis plusieurs années, sous la direction de M. Cheussey, architecte du département, qui poursuit activement son œuvre, font un sensible plaisir à la Société ; elle se plaît à déclarer que M. Cheussey a droit aux plus grands éloges, à l'occasion de ces travaux difficiles, qu'il a fait exécuter avec un soin, une exactitude et une économie bien rares; rien n'est négligé : les détails de l'antique sont scrupuleusement reproduits, l'exécution est d'un fini admirable, et la solidité des restaurations fait espérer que la vieille basilique, belle parmi les plus belles, pourra désormais encore défier les siècles.

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Passant ensuite à un examen plus détaillé, on remarque une fenêtre du transept, dans l'angle vers l'ouest, qui présente un pilier boutant, élevé pour la fortifier, mais tellement bien dissimulé, qu'on ne peut l'apercevoir à l'intérieur ; il présente de l'analogie avec les jambages qui appuient en dehors la rose du portail du nord, et l'on y voit les armes du chapitre avec la date de 1629. L'on s'est demandé si ce ne serait point à cette époque qu'on pourrait rapporter les restaurations opérées vers le nord, dans lesquelles on a eu la maladresse, bien excusable alors, de supprimer le sommet des frontons aigus qui décorent les fenêtres du choeur à l'extérieur. Ce genre de décoration est rare; il est observé que cependant on le retrouve à la cathédrale de Cologne. Ici l'on avait fait passer l'appui de la balustrade par-dessus ; mais dans les restaurations récentes

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on a eu le bon esprit de réparer cette mutilation, en rétablissant les frontons tels qu'ils étaient primitivement. Les arcsboutants de la partie orientale, dépourvus d'une partie des nervures de leurs ogives, selon l'opinion de plusieurs membres, ont peut-être été réparés aussi malheureusement à l'époqne fàcheuse, déjà signalée. M. Godde, architecte de Paris, présida, a plus de vingt ans, à la réparation de plusieurs piliers et arcs-boutants dans l'angle du côté du midi; les travaux ont été assez bien entendus, mais les ouvriers étrangers qu'il amena à Amiens, la complication d'immenses échafaudages en charpente, l'emploi d'un ciment rouge fort cher qui bariole désagréablement les murs, entraînèrent dans des dépenses aussi excessives que regrettables. De plus, il ne se conforma pas toujours au style de l'édifice dans les reconstructions des balustrades, et alla jusqu'à placer un acrotère de style grec dans celle du bas-côté, au sud du petit portail latéra! dit SaintChristophe. Dans une autre balustrade, à l'ouest, en retour à gauche du portail, auprès de la pyramide de la table ronde, le décors formait une espèce de créneau qui, vu de la rue BasseNotre-Dame, produisait l'effet le plus pittoresque ; cet ornement en rappelait un très-commun dans les églises d'Angleterre, et faisait pardonner le mauvais effet que produit le horsd'œuvre du pilier établi à la fin du XIV. siècle, pour remédier à l'ébranlement causé par les bourdons à la grande tour qui les contient il a disparu. Ces réparations, de mauvais goût comme tant d'autres, ont excité le blâme de plusieurs des membres de la commission, mais plusieurs membres ont cru devoir porter un jugement moins sévère; ces derniers ont fait remarquer qu'il ne fallait pas être impitoyable, se souvenir qu'il y a peu d'années encore, cette partie de notre architecture nationale était complètement négligée, pour ne pas dire flétrie, dans les cours d'études spéciaux, et enfin savoir gré

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