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M. Douchet informe la Société que la propriété de la maison de la rue des Vergeaux, dont la façade en pierre, dans le style de la renaissance, et qui fait l'admiration de tous les étrangers qui visitent la ville d'Amiens, est sur le point d'être vendue.

Après avoir entendu les explications de M. Dusevel, qui fait observer que le propriétaire consentirait à vendre seulement la façade, afin d'approprier la maison à la nouvelle destination qu'il veut lui donner, la Société décide qu'elle ne peut qu'inviter la ville à acheter cette maison, si ses moyens le lui permettent.

M. de Caumont rend compte de l'heureux résultat qu'ont obtenu les efforts tentés pour empêcher la destruction de la tour d'Harfleur (Seine-Inférieure); sur la nouvelle que les travaux de démolition étaient commencés, il avait offert d'acheter cette tour la sauver d'une ruine complète. pour " Heureusement l'autorité municipale a donné l'ordre de suspendre les travaux, M. Cochet, membre de la Société au Havre, a le mérite de cette conclusion; il a mis la plus grande activité, de concert avec M. David, également membre de la Société, pour faire les démarches qui ont obtenu la conservation de l'édifice.

M. de Caumont consulte ensuite la Société sur la question de savoir s'il ne serait pas opportun de de provoquer, de la part du Gouvernement, des mesures législatives pour assurer la conservation des monuments. Il y a plusieurs années que Société en écrivit au ministre de l'Intérieur.

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M. Le Serrurier fait observer qu'une loi sur cette matière ne pourrait pas toujours protéger les monuments publics. Cette loi, en supposant qu'elle fût suffisante pour les cas généraux, serait insuffisante pour une foule de cas particuliers; car, ajoute-t-il, on ne fait pas les lois pour les exceptions.

M. Pollet de Vitré pense que, sans provoquer des mesures législatives, on pourrait demander que le ministre exigeât que les fonds accordés pour la réparation des monuments historiques fussent toujours employés sous la surveillance de personnes éclairées.

M. de Grattier fait remarquer que le ministère n'accorde jamais de fonds que sur le vu des plans et des devis qui sont soumis à son approbation, et qu'il ne sanctionne qu'après avoir pris l'avis du Conseil des bâtiments civils.

M. Pollet de Vitré ajoute qu'il n'entend point faire porter son observation sur toutes les réparations en général. Le ministre, dit-il, n'exige des plans et des devis que pour les travaux importants, mais toutes les fois qu'il s'agit de réparations minimes, les fonds qu'il accorde à titre de secours, sont employés, sans qu'aucune précaution soit prise.

M. Le Serrurier signale comme un fait qui fait ressortir la justesse des observations de M. Pollet, les travaux de restauration des bas-reliefs de la cathédrale d'Amiens. Bien certainement ces réparations qui consistaient en travaux d'art ne pouvaient être précédés de plans ni de devis, quoique cependant ils eussent eu une certaine importance. Eh bien dans ce cas, M. le préfet de la Somme, pour apprécier le mérite de l'exécution, s'est entouré des conseils d'une commission, choisie dans le sein de la Société des Antiquaires de Picardie.

M. Chevereau fait observer qu'il n'y a pas partout des Sociétés d'antiquaires, gardiennes vigilantes de nos vieux monuments, mais que dans les départements qui en sont privés, on pourrait y suppléer en créant des commissions consultatives sans le concours desquelles aucun travail de restauration des édifices publics ne pourrait être accompli. Il signale à cette occasion les utiles résultats dont on est redevable aux commissions que les préfets de la Seine-Inférieure et de l'Eure ont instituées dans leurs départements.

M. le C. de Betz ne nie pas que les commissions d'antiquités dont parle M. Chevereau, n'aient, dans un grand nombre de cas, le pouvoir d'empêcher ces réparations mal entendues qui affligent si souvent les amis des arts. Mais il est aussi des circonstances où leur concours est inefficace. C'est par exemple lorsque des legs ou des dons précieux sont destinés à être appliqués à telle ou telle partie d'un édifice, et il se demande quel serait le moyen d'empêcher que ces libéralités eussent une aussi déplorable destination.

Le seul moyen, répond M. Le Serrurier, serait de ne pas accepter les donations.

M. Pollet fait une proposition qui tend à supplier les évêques de nommer dans leurs diocèses des commissions composées d'ecclésiastiques éclairés, sans le concours desquelles les conseils de fabrique ne pourraient faire exécuter aucune espèce de réparation aux édifices religieux.

Cette proposition donne lieu à une discussion approfondie dans laquelle on entend successivement MM. Goard, de Clinchamps, de Givenchy, de Cayrol et de Clermont-Tonnerre, qui s'attachent à démontrer par des exemples multipliés combien l'influence des curés et de l'autorité, est stérile pour protéger les monuments religieux, contre les réparations que les Conseils de fabrique leur font subir.

M. l'abbé Martin, s'emparant de l'idée qui a dicté la proposition de M. Pollet, croit que pour agir efficacement, les commissions de surveillance devraient être nommées par le ministre.

par

M. de Cayrol fait observer que déjà des conservateurs ont été nommés le ministre et que ces conservateurs n'empêchent ni les mutilations ni les badigeons déplorables qui s'accom. plissent journellement sous nos yeux.

M. Pollet combat la proposition de M. l'abbé Martin, par

le motif que l'autorité diocésaine est la plus efficace. Il est convaincu que si les évêques prêtaient leur appui à la mesure par lui proposée, elle obtiendrait des résultats satisfaisants.

M. Chevereau croit que le meilleur moyen d'assurer la conservation des monuments, c'est de former des antiquaires de tous les ecclésiastiques, et de créer des cours d'archéologie dans tous les séminaires.

M. Le Serrurier résume la discussion sur l'une et l'autre proposition dont il fait ressortir les avantages et les inconvénients. Toutefois il pense qu'en adoptant la proposition de M. Pollet et en l'étendant on pourrait libeller ainsi la proposition à faire.

« La Société, par l'organe de M. de Caumont, invitera « M. le ministre de l'Intérieur et M. le ministre des Cultes à « se concerter avec MM. les préfets et les évêques, pour la << nomination de comités consultatifs dont l'avis devra être « donné toutes les fois qu'il s'agira de la reconstruction ou « des réparations dans les édifices religieux. »

« Dans les départements où les Sociétés archéologiques sont « instituées, cette commission sera, au moins en partie, composée des membres de ces sociétés en y adjoignant les ecclé<< siastiques éclairés et connus par leur amour pour les arts. » M. Pollet déclare adhérer à cette proposition.

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La proposition de M. Le Serrurier est mise aux voix. Elle est adoptée.

Le Secrétaire-général,

BOUTHORS.

311

Séance publique du 9 juillet 1839.

Présidence de M. DE CAUMONT.

La séance est ouverte à six heures et demie du soir, sous présidence de M. de Caumont. Le bureau est composé comme à la séance d'ouverture.-M. Garnier remplit les fonctions de secrétaire-général. Les membres précédemment nommés siègent à leurs places ordinaires. Le reste de la salle est occupé par divers notables habitants de la ville d'Amiens.

M. Le Serrurier lit, au nom de M. Léon de La Sicotière, un mémoire sur les stalles de l'église de Mortain (Manche), qui sera imprimé dans le compte-rendu des travaux de la Société.

M. Dusevel fait remarquer qu'il y aurait lieu a d'intéressantes comparaisons entre les stalles de Mortain décrites par M. de La Sicotière et celles de l'église cathédrale d'Amiens. Il pense que dans les figures et sujets grotesques qui forment la décoration des stalles, l'artiste a eu pour but de se venger de certaines corporations, d'attaquer les vices de ces institutions, mais surtout les vices de la société.

M. Rigollot lit un fragment d'un mémoire sur la statuaire, la sculpture et la peinture en Picardie.

La partie de ce mémoire qui doit paraître dans le prochain volume de la Société des Antiquaires de cette province est relative au XII. et au XIII. siècles.

II met sous les yeux de la Société des dessins qui doivent orner son ouvrage et qui sont une reproduction fidèle des objets qu'il décrit.

M. de Caumont remercie, au nom de la Société qu'il préside, M. Rigollot d'avoir bien voulu douner communication d'un travail inédit d'un si haut intérêt; il invite l'auteur à donner

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