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manière à les classer chronologiquement et à en publier une statistique complète ?

Quels sont les ouvrages déjà publiés sur ce sujet?

A quelle époque remonte la connaissance des faits sur lesquels repose la classification des monuments! En d'autres termes à quelle époque a-t-on commencé à s'occuper d'études

monumentales en Picardie?

Connaît-on dans le pays des églises anthentiquement antéFieures au X. siècle? Que sont-elles? Que présentent-elles?

Quel est, en Picardie, le caractère distinctif de l'architecture au XIe siècle et au XII.? Etait-elle en grand progrès dans ce pays? Quel système de décoration prévalait alors?

M. Garnier qui a visité un grand nombre des monuments du département de la Somme, ne les connaît pas encore assez pour les classer chronologiquement et en publier une sta'istique complète. Mais les nombreux dessins de M. Duthoit pourront, suivant M. Rigollot, servir pour cette classification. Ces dessins étaient destinés à un voyage pittoresque dans l'ancienne Picardie.

M. de Caumont voudrait que l'on décrivit au moins sommairement toutes les églises, même celles dont l'architecture semble n'offrir aucun intérêt; car une statistique monumentale doit embrasser le tableau de tous les monuments, quel que soit l'âge auxquels ils appartiennent.

M. Rigollot s'empresse d'informer M. de Caumont que la Société des Antiquaires d'Amiens a fait une question de concours de ce point intéressant.

M. Dusevel ajoute qu'il a, dans un mémoire couronné il

y a quatre ans par l'Institut, proposé une classification des monuments du moyen âge en Picardie. Ce mémoire est encore inédit; mais il l'a reproduit en partie et avec de nouveaux développements dans un second mémoire qu'il a envoyé postérieurement à M. le Ministre des cultes.

Sur la question relative aux monuments religieux qui seraient antérieurs au X. siècle, M. Dusevel cite, en en communiquant un dessin, l'église de St.-Germain-sur-Bresle. Malgré la tradition qui attribue à ce monument une aussi ancienne origine, M. Dusevel pense qu'il a été bâti beaucoup plus tard, mais toutefois antérieurement au tombeau du saint qui remonte au XVe siècle.

M. Garnier appelle l'attention de la Société sur l'église de Berthaucourt elle paraît de construction bien ancienne, et les détails de son architecture ne sont pas à dédaigner. On pense que le portail a été achevé au commencement du XI siècle.

M. Rigollot partage l'opinion qui attribue au XI. siècle l'église de Berthaucourt; l'auteur de la Gallia Christiana lui assigne cette date; M. Rigollot communiquera à la Société les dessins des principales figures et d'une partie de ce curieux monument dont M. Bouthors possède le plan; il ajoute que ce serait faire un utile emploi des fonds dont dispose la Société que d'en appliquer une partie à la restauration de cet édifice. L'église de Lacheux dont l'abside est à pans coupés paraît à M. Dusevel avoir tous les caractères qui feraient reporter sa construction au X. ou au XI. siècle, et peut-être même à une époque plus reculée. Les chapiteaux en sont très-lourds et paraissent plus anciens que ceux de l'église de Berthau

court..

Après quelques développements donnés par M. de Caumont, M. Dusevel expose que dans les monuments du XI. siècle,

en Picardie, les dentelures sont très-communément employées. On remarque ce caractère dans l'église de Berthaucourt et dans celle de Roye.

Au XII. siècle au contraire les dentelures cessent d'être en usage; elles disparaissent complètement.

M. Graves fait observer qu'en général les églises de Picardie aux XI. et XIIa. siècles sont peu ornées, à la différence de celles de la même époque qui existent encore en Normandie.

L'église Notre-Dame d'Airaines est aussi citée par MM. Garnier et Rigollot comme un des plus anciens monuments de la contrée. Elle est d'autant plus remarquable que sa conservation est parfaite; sa nef, ses bas-côtés sont intacts; seulement ses colonnes sont peu élevées, sans chapiteaux, et l'église est de 7 ou 8 pieds au-dessous du sol. On remarque dans cette église un baptistère, publié par M. Dusevel et dont le dessin sera communiqué à M. de Caumont.

Il est midi; la séance est levée ; la seconde séance aura lieu à trois heures.

Le Secrétaire,

LE SERRURIER.

Seconde séance du lundi 8 juillet 1839.

Présidence de M. GRAVES, inspecteur des monuments historiques du département de l'Oise.

A trois heures de l'après-midi, la Société Française pour la conservation des monuments historiques s'est réunie en séance ordinaire, dans la salle du Conseil municipal de l'Hôtel de Ville, à Amiens. L'assemblée était composée des membres cités dans le précédent procès-verbal.

Sur l'invitation de M. de Caumont, M. Graves occupe le fauteuil de la présidence.

M. de Caumont rappelle qu'il a été convenu précédemment que chaque séance de l'après-midi serait principalement consacrée aux délibératións administratives; il donne lecture d'un projet de pétition au Ministre de l'Intérieur, qui expose, 1°. Qu'il est urgent de faire rempiéter les contreforts du grand bâtiment de la Merveille de l'abbaye du MontSt.-Michel, dégradés dans leur base: dépense qui ne dépasserait pas la somme de 3 à 4,000 fr.; 2°. Qu'il est encore urgent de renforcer les arcades qui supportent la tour centrale de ce même monument par l'établissement d'une voûte. M. l'abbé Lecourt, aumônier de la prison du Mont-St.Michel, qui unit au dévoûment et aux vertus de son état, les connaissances d'un habile architecte, dirigerait volontiers ce travail et par là la tour qui couronne si bien la masse imposante des bâtiments se trouverait assise sur une base parfaitement solide.

Après une courte discussion à laquelle prennent part MM. de Clinchamps, Pollet de Vitré et de Caumont, la pétition est prise en considération et adoptée dans les termes mêmes du projet dont M. de Caumont vient de donner lecture. Elle est à l'instant signée par les membres composant l'assemblée.

Le directeur annonce que la Société va s'occuper d'examiner les titres des personnes qui ont des droits à la médaille promise, à l'architecte ou à l'ami des arts qui a le plus contribué à la réparation et à la conservation des monuments historiques.

M. Le Serrurier met sous les yeux de l'assemblée les plan et coupe dressés par M. Van-Clemputh, architecte du département de l'Aisne, à l'appui du proje! par lui présenté pour la réparation de la cathédrale de Laon, et donne lecture d'une

notice bistorique sur cette ancienne basilique, rédigée par le même architecte, et dans laquelle il s'attache à démontrer que ce beau monument du style ogival de transition est antérieur aux premières années du XII. siècle ; que l'édifice auquel on suppose que la cathédrale actuelle a succédé n'a pu être détruit entièrement par l'incendie de 1112, puisqu'il résulte du témoignage des historiens contemporains, que l'église nouvelle aurait été complètement achevée en moins de deux ans, la dédicace ayant eu lieu en 1114; que tout porte à croire au contraire que son origine est antérieure.

M. Graves, pensant que le mémoire de M. Van-Clemputh soulève une question trop grave, dans l'histoire de l'art architectural, prie ceux des membres qui ne partageraient pas les convictions de l'auteur de la notice, de vouloir bien développer leur opinion.

M. l'abbé Arthur Martin dit qu'il est impossible de faire remonter jusqu'au règne du roi Lothaire, un monument ayant des formes architectoniques aussi prononcées; que, selon toutes les probabilités historiques, le style ogival a eu pour berceau la Sicile, où il ne fut implanté que dans le courant du XI. siècle seulement; qu'il n'est pas sans exemple que des édifices en pierre aient été complètement calcinés par l'incendie en une seule nuit, témoin l'église Saint-Paul de Rome.

M. Goard répond qu'il concevrait très-bien la destruction de l'église Saint-Paul de Rome, par l'effet de l'incendie, parce qu'il y avait dans cette église beaucoup de bois; mais qu'il ne conçoit pas qu'un édifice en pierre, d'une élévation aussi considérable que la cathédrale de Laon, pût, par l'embrasement de sa toiture, concentrer assez de chaleur pour opérer la calcination de toutes ses parties.

Après avoir entendu de nouveau, sur cette question, les observations de M. Arthur Martin, M. Le Serrurier a donné

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