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rempli par le temps, mesurait un mètre de profondeur et ses bords étaient taillés à 45 degrés. Nous avons déjà eu occasion de rencontrer ces sortes de fossés dans les sépultures gauloises de Pleurs, de Connantre, de Marson, et dans celle de l'âge du bronze à Courtavant (Aube). Le même fait a été constaté dans une sépulture de SaintJean-sur-Tourbe par un autre fouilleur. M. E. de Barthélemy a trouvé le même cercle à l'entour de la sépulture de Berru, qui renfermait un casque de bronze (Mémoire de la Société des Antiquaires de France, 1874). A Sillery, pareil fossé a été constaté en 1832; à l'endroit de la tombe d'un chef, on a signalé une tranchée circulaire de 30 mètres de diamètre, marquée dans la craie par une couche de terre noire qui en indique le pourtour.

On ne les trouve généralement qu'autour des sépultures de personnages importants. Nous ne voyons pas l'usage de ces fossés; serait-ce la fondation d'une haie ou clôture servant à protéger la sépulture, ou plutôt une marque de symbolisme?

Le cimetière de Somme-Bionne contenait trois ou quatre de ces fossés, mais malheureusement les fosses qui étaient au centre avaient été l'objet d'une violation de sépulture.

LE CHAR.

Nous ne pouvons indiquer de quelle forme était le char enfoui dans la fosse et sur lequel était le guerrier. Cette découverte n'est pas un fait isolé; le cimetière de SommeBionne avait dû contenir trois ou quatre autres chars. Le territoire de Saint-Jean-sur-Tourbe en a montré un, découvert le 14 mars 1868, aujourd'hui au musée de SaintGermain. D'autres fouilleurs en ont trouvé trois, plus ou

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moins complets, sur le territoire de Somme-Tourbe. On en a trouvé trois aussi à Bussy: l'un d'eux est au musée de Saint-Germain, et les deux autres dans la collection de M. Édouard de Barthélemy. C'est à l'Ahan-des-Diables, territoire de Suippes, qu'il a été trouvé quatre sépultures renfermant des débris de chars.

Parmi les nombreuses fouilles que l'on a fait opérer dans les environs du camp de Châlons, la sépulture du Piémont est celle qui présente le plus d'analogie avec la nôtre. On y a trouvé un guerrier sur son char, ayant une épée gauloise en fer, un umbo de bouclier en fer, deux lances, un javelot, une chaine de suspension en fer, et une dizaine de vases dont trois seulement étaient intacts. Cette fosse était aussi entourée d'un large fossé; les chevaux avaient été enterrés en place ayant encore à la bouche les mors en fer.

Cette riche sépulture renfermait avec le corps d'une femme, un splendide vase étrusque en bronze de forme ovoïde, à large pied et surmonté d'un coq. C'est en voyant ce vase que l'empereur Napoléon III n'a pu s'empêcher de dire à ceux qui le lui apportaient : « Ce vase est splendide, il n'a pu appartenir qu'à un roi. »

Les mémoires de la Société d'Agriculture, Sciences et Arts de la Marne, année 1859, contiennent un rapport, du regretté M. Savy, faisant connaître qu'on a trouvé à Sillery une fosse carrée, profonde de 2 mètres, dans laquelle gisaient pêle-mêle, avec de grands vases de terre, une lame d'épée de 0-60, non compris la soie et les débris des roues d'un char.

Ces débris consistaient dans les cercles en fer des roues, et dans des rondelles également en fer, mais doublées en cuivre travaillé au repoussé et avec clavettes également en cuivre, destinées à retenir les roues sur l'essieu.

Les Gaulois se servaient avec grand succès de chars de guerre, dont l'usage se perdit plus tard et qu'au temps de César on ne retrouve plus que chez les Bretons (1).

Nous lisons dans les Comptes-rendus de la Société de numismatique et d'archéologie, tome IV, année 1873, que la Société historique et archéologique de Château-Thierry, avait acquis la maison de Jean de Lafontaine, notre grand fabuliste, pour en faire un musée où étaient réunis les souvenirs du poëte; malheureusement, pendant la guerre de 1870-71, l'établissement d'une caserne allemande fut cause que tout fut pillé et dispersé. Or, ce que l'on doit le plus regretter, au point de vue archéologique, ce sont les débris d'un char gaulois en bronze, plus complet que ce que possède en ce genre le musée de Saint-Germain.

Dans le compte-rendu de la sépulture antique, découverte à Berru, laquelle a beaucoup d'analogie avec celle dont nous donnons la description, M. E. de Barthélemy affirme avoir trouvé, dans l'angle à droite, à la tête du squelette, un fragment de cercle de roue en fer qui n'a pu être conservé. (Société des antiquaires de France 1874, tome XXXV.)

Si nous portons nos regards en dehors du département, nous voyons que le tertre de Sainte-Colombe, près MagnyLambert (Côte-d'Or), a livré en 1862, avec des débris de chars, des boucles d'oreilles et des bracelets en or qui sont au nombre des plus précieux joyaux du musée de SaintGermain.

Les Mémoires de l'Académie des Inscriptions, XXV, pages 109 et 116, parlent d'une découverte d'épée en

(4) Voir Alex. Bertrand. - Les Gaulois, extrait de la Revue archéologique.

bronze trouvée avec une roue et d'autres pièces de harnais. Les tombelles d'Anet (canton de Berne) ont montré un homme enterré sur son char, dont les nombreux débris purent être conservés par M. le baron de Bonstetten.

Le tumulus de Graucholtz, fouillé par le même, et qui a fourni un seau à côtes en bronze, renfermait en outre des cercles et des débris de roues de chars. (Tumulus gaulois, par Alex. Bertrand.)

Le compte-rendu du Congrès international d'anthropologie et d'archéologie antéhistorique de Paris (1867, page 291), parle d'une découverte faite en Angleterre consistant en boucles, casque émaillé, des épées en fer avec fourreaux de bronze, des mors et pièces de harnachement, avec des roues de chars. Le musée de Berlin possède la garniture d'un char provenant du tumulus de Gallscheid (Prusse Rhénane).

Dans les tombes celtiques de l'Alsace, publiées par M. Max. de Ring, nous voyons que l'un des tumuli de la forêt de Hatten, fouillé par M. Zaepffel, a fait voir les restes de deux chars de guerre dans la sépulture d'un riche guerrier. L'auteur constate que cette apparition de chars dans les tumuli celtiques de l'Alsace se présente ici pour la première fois, mais il ajoute que M. de Bonstetten en a trouvé dans les fouilles d'Anet et de Tiefenau, en Suisse; que dans le Doubs, M. Castan en a trouvé dans les fouilles du massif d'Alaise, et M. Jahn dans les tumuli ouverts à Græchwyl, entre Berne et Aarberg, tumuli qu'il regarde comme appartenant à l'époque étrusque.

Le char dont nous allons essayer de décrire les débris qui nous restent, ne devait pas être gaulois, attendu que l'écartement entre les roues était de 135, ainsi que nous l'avons constaté par la présence de l'oxyde de fer des roues marqué sur la craie, tandis que le char gaulois

n'avait que 105 et n'était traîné que par un seul cheval, ainsi que l'a si judicieusement remarqué notre collègue M. Peigné-Delacour.

Les débris du char que nous avons trouvé ne nous permettent pas d'en indiquer la forme, attendu que le bois et le cuir out disparu et que nous n'avons pu recueillir que les parties métalliques. Nous ne savons si c'était le char de guerre (currus) ou le carpentum, voiture à deux roues recouverte d'une capote.

Le char de guerre était une voiture à deux roues, où l'on entrait par derrière, mais qui était fermée sur le devant et découverte, ne débordant pas en hauteur la croupe des chevaux. On ne pouvait guère que s'y tenir debout, mais il y avait place pour deux personnes; l'usage constant était que l'un conduisait les chevaux pendant que l'autre combattait. Aucun monument ne nous montre nettement les parties détaillées de ces sortes de chars.

Notre guerrier ayant été trouvé inhumé, nou assis, mais étendu naturellement, nous en concluons qu'une fois descendu dans la fosse, la banquette de devant du char aura été enlevée pour plus de facilité.

Les roues étaient en bois, recouvertes chacune d'un cercle de fer d'une seule pièce de 003 de largeur sur 001 d'épaisseur et 092 de diamètre.

Les cercles qui étaient encore debout, brisés chacun en quatre morceaux inégaux, étaient rattachés au bois par six clous également espacés, dont les tètes oblongues faisaient saillie au dehors; un seul est encore adhérent et mesure 005 de long, bien qu'il paraisse avoir été brisé vers son milieu. Ces cercles de roues ont longtemps servi, car ils ne sont plus plats mais bombés par l'usure, ce que les carrossiers appellent tuilés. L'un d'eux a conservé sa

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