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naies des prélats portant le même nom, comme les deux Henry, archevêques de Reims, et les trois Guillaume, évêques de Châlons.

M. Nicaise place sous les yeux du Congrès sa carte archéologique de la Marne, et se livre à ce sujet aux considérations suivantes :

MESSIEURS,

Les statistiques et les cartes sont aujourd'hui au nombre des éléments les plus sérieux des études archéologiques, et des plus efficaces pour en håter le développement. L'ethnographie et l'anthropologie leur doivent depuis quelque temps des sources sérieuses de critique et d'induction, et si chacun de nos départements avait été l'objet d'une cartographie archéologique, comme quelques-uns le sont déjà, quels éléments d'investigations et de comparaisons profitables ces travaux n'eussent-ils point apporté à tous ceux qui s'occupent de paléoethnologie.

Nous avons l'honneur de présenter au Congrès la carte archéologique du département de la Marne, dressée par nous pour les époques de la pierre, du bronze, et pour les époques gauloise, gallo-romaine et mérovingienne.

Cette carte devant être d'un format commode, et étant destinée à figurer un jour à la suite d'un travail d'ensemble, dont nous nous occupons, sur les fouilles et découvertes faites dans le département de la Marne, nous avons choisi pour en rédiger la minute, la carte allemande de dimensions plus restreintes que les cartes françaises du dépôt de la guerre, et pour son exécution définitive, après

de dimensions plus restreintes que les cartes françaises du dépôt de la guerre, et pour son exécution définitive, après entente avec notre habile cartographe, M. Erhard, nous avons arrêté une combinaison entre la carte allemande et celle du département de la Marne, dite carte routière.

Nous avons d'abord délimité en violet l'espace occupé par notre département, puis attribué des couleurs différentes aux époques ou, divisions archéologiques qui suivent:

Nous avons marqué de jaune foncé les points où ont été rencontrés des vestiges ou des monuments de l'époque de la pierre, de rouge, l'époque gauloise, de bleu, l'époque gallo-romaine, de vert, l'époque mérovingienne, et de vert également, deux genres de monuments d'une époque encore peu déterminée dans notre département, nous voulons parler des tumuli et des nombreux souterrains de refuge reconnus dans la Marne.

Nous avons tracé en bleu les voies gallo-romaines, en rouge, l'unique voie gauloise reconnue jusqu'aujourd'hui. Elle se nomme la Barbarie, et va de Sézanne à Muizon, en suivant de près et en contournant tout le pâté montagneux que forment les coteaux champenois depuis son point de départ jusqu'à son lieu d'arrivée.

Nous avons tracé également en bleu, le parcours de l'aqueduc romain, qui amenait les eaux de la Suippes à Reims, en les prenant à Jonchery-sur-Suippes.

Cette carte note également sous les couleurs mentionnées plus haut:

1o Les sépultures, les ateliers, les stations, les trouvailles isolées de l'époque de la pierre.

2o Les sépultures et les découvertes des époques gauloise, gallo-romaine, mérovingienne.

Nous avons représenté les découvertes de l'époque du

XLII SESSION.

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bronze par un signe particulier, mais de la même couleur que les trouvailles de la pierre. Nous n'avons point consacré à cette époque, si importante dans d'autres départements, une couleur particulière pour ne pas multiplier les frais d'établissement de notre carte, et en nous fondant surtout sur ce que les signes de cette époque y sont peu nombreux, car les découvertes de l'époque du bronze proprement dite sont rares dans notre département. Nous n'avons même pu y noter l'épée en bronze de Courtavant, puisque ce gisement fait partie du département de l'Aube.

En effet, bien que les trouvailles d'objets en bronze gaulois, romains et francs, abondent dans notre département, les vestiges de l'époque du bronze, c'est-à-dire de celle où cet alliage de cuivre et d'étain était le métal uniquement employé à la confection des bijoux, des instruments et des armes, ces vestiges ont été rencontrés seulement en très-petit nombre dans la Marne.

Beaucoup d'entre eux ont été peut-être mis au jour dans des travaux et des fouilles qui n'avaient qu'un caractère d'utilité, mais leurs possesseurs ou inventeurs, ignorant la valeur et l'intérêt qu'ils pouvaient présenter, les ont livrés au creuset. C'est là certainement une des causes qui, surtout dans le centre de l'Europe, rendent plus rares les objets de l'âge du bronze conservés jusqu'à nos jours; car, à toutes les époques qui lui ont succédé, ce métal, dont l'oxydation n'altère pas la valeur, a été refondu et employé à la confection de nouveaux objets, tandis que le fer qui s'oxyde plus profondément, n'est dans cet état propre à aucun usage.

Notre carte est donc spécialement destinée à l'étude de ces cinq époques; elle présente cet intérêt et cet ensemble, que des documents de cette nature peuvent

seuls offrir à l'archéologue, en lui permettant de voir d'un coup d'œil la répartition et le groupement, à ces différentes époques, de populations habitant une même région.

En effet, en tenant même compte dans cet ensemble, et pour les classer à part, des agglomérations de sépultures qui sont le résultat d'un combat et non les dépouilles des populations habitant le lieu même, il reste encore à l'observateur des indications nombreuses sur la manière dont étaient reparties sur notre sol les peuples de ces cinq époques.

Sur cette carte, les signes archéologiques abondent dans les plaines, le long des grandes voies et sur les coteaux qui bordent les rivières, tandis qu'ils sont rares au contraire ou manquent complétement dans les parties montagneuses et boisées du département. Cela tient probablement à deux causes :

D'abord, bien que cette région ait été sans doute habitée, elle est depuis un temps immémorial couverte d'épaisses forêts, elle ne renferme que peu d'espaces cultivés, par conséquent, peu de points où le sol ait livré par hasard les vestiges qu'il renfermait. Ensuite les recherches y sont difficiles, l'œil perçoit avec peine des indices sur ce sol recouvert annuellement de détritus végétaux, d'herbes et de broussailles; la nature du terrain y rend les sondages impossibles ou inutiles. Il faut y procéder par tranchées, moyen coûteux et long.

C'est à ces causes, Messieurs, que vous devez attribuer la nudité et le silence de notre carte dans cette région. Nous espérons que ce travail pourra être consulté avec quelque fruit par les archéologues et les touristes. Il renferme sans doute des erreurs et des lacunes. L'ardeur de trouver et d'étudier est telle dans notre département, ainsi

que le constatent les communications faites au Congrès, que déjà sans doute un certain nombre d'indications nouvelles manquent encore à l'ensemble que nous vous présentons. Mais avant que cette carte soit livrée à la publicité, nous aurons soin d'y ajouter les nouvelles découvertes dont la notion nous parviendra.

Tel est le sort de pareil travaux, de ne pouvoir être jamais aussi complets le lendemain que la veille. Nous devons donc sans découragement en prendre notre parti, et nous terminons, Messieurs, cette communication en vous disant :

Quod potui, feci; faciant meliora potentes.

M. de Cougny félicite M. Nicaise de son beau travail qui permet de classer toutes les découvertes faites et à faire. Il attire l'attention du Congrès sur ce que M. Nicaise vient de dire d'un tumulus allongé en forme de baleine. On en a signalé de semblables au Mexique, mais celui dont il est question paraîtrait être le premier de ce genre décrit en Europe.

M. Buvignier demande à faire quelques observations. M. Nicaise, dit-il, vient de parler des poteries dites samiennes. Ces belles poteries rouges, à grain très-fin, se fabriquaient tout près du département de la Marne, dans la vallée de l'Aire et dans les environs. En rencontrant à Avocourt, et entre Boureuiller et Neuvilly, des amas considérables de débris de ces poteries, M. Buvignier se demandait quel accident aurait pu les réunir aussi abondamment, s'il n'y avait pas eu là des fabriques. Toute incertitude a été levée en trouvant dans les deux dernières localités, non-seulement des masses de fragments, mais encore des amas de poteries brûlées et roulées ensemble par une cuisson trop vive.

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