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une seconde fois l'effort auquel ils ont cédé déjà une première.

Sur ces divers points, nous concluons qu'il n'y a lieu qu'à des réparations ou des restaurations respectueuses.

Il n'en est pas de même des contre-forts, des arcs-boutants.

Ces parties importantes des constructions extérieures ont besoin d'une restauration générale. Plusieurs arcsboutants doivent évidemment être reconstruits. Un examen attentif des autres et les conséquences mêmes de la restauration peuvent nécessiter la reconstruction d'une grande partie des arcs-boutants supérieurs, qui sont les plus endommagés; mais, quant à les supprimer, contrairement à la conception première de l'édifice; quant à démolir les arcs-boutants du premier rang et tous leurs contre-forts, c'est autre chose; les raisons avancées par le rapport ou n'existent pas ou sont fort exagérées. La conservation des murs de la nef, admise dans les plans, démontre que le péril n'est pas, même aux yeux des architectes diocésains, aussi grand qu'ils l'ont affirmé, et qu'il ne peut être question d'une reconstruction totale des œuvres hautes.

La question est donc ramenée simplement à la restauration ou reconstruction des arcs-boutants et des contreforts, à savoir s'il est possible de les restaurer, sinon de les reconstruire tels qu'ils sont depuis le xv° siècle, sauf, en ce dernier cas, à leur donner un appareil mieux unifié. La seconde hypothèse est bien évidemment acceptable, même pour les défenseurs de la cathédrale, et nous croyons que là se trouve la fin de la discussion et la vraie solution du différend.

Il est impossible, en terminant, de ne pas penser à la cathédrale de Bayeux, condamnée par les architectes,

défendue énergiquement par la population, et finalement sauvée de la démolition et parfaitement restaurée.

Cet exemple montre que l'intervention des archéologues et du public n'est pas toujours inutile, et qu'elle peut encore avoir pour résultat la conservation d'un monument condamné par les hommes de l'art. La cathédrale d'Évreux n'est pas en péril. M. Viollet-le-Duc a fait placer des étais et des tirants provisoires qui éloignent toute crainte d'accident, et permettent d'attendre qu'une étude sérieuse et impartiale ait démontré la nécessité des reconstructions s'il fallait s'y résoudre, ou la possibilité des restaurations devenues urgentes par la négligence et le défaut d'entretien.

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Délibération du Conseil de la Société nationale des Architectes, adoptée en séance, le 17 juin 1874.

Le Conseil,

Après avoir pris connaissance des diverses pièces ci-après énoncées :

1° Lettre de M. Raymond Bordeaux à M. le Ministre es Cultes, en date du 17 juin 1873;

2o Rapport de M. l'abbé Lebeurier, chanoine de la cathédrale d'Évreux et archiviste du département de l'Eure, à M. le Préfet de l'Eure, en date du 11 avril 1873;

3o Notice lue à la Société libre de l'Eure, le 15 mars 1874, par M. l'abbé Lebeurier;

4o Pétition de cinq cents notables habitants de la ville d'Évreux, transmise au Ministre par M. Raymond Bordeaux, en mars 1874;

5o Réponse de M. le Ministre, en date du 28 mars 1874; 6° Observations soumises au Ministre, le 9 avril 1874, par M. l'abbé Lebeurier;

7o Rapport de M. Viollet-le-Duc au Comité des inspecteurs diocésains, le 27 janvier 1874.

Vu également l'examen critique du projet de reconstruction de la cathédrale d'Évreux, inséré dans le numéro 9 du journal l'Architecte;

Considérant,

Que l'intervention de l'État pour la surveillance et la conservation des monuments publics a pour objet principal leur entretien et leur restauration;

Qu'une restauration ne peut justifier son titre que si elle est faite avec un respect absolu des formes et du style de l'édifice;

Qu'il est dangereux de vouloir substituer aux formes anciennes des formes peut-être meilleures théoriquement, mais qui, étant modernes, sont, à priori, en désaccord avec la pensée des créateurs d'un monument ancien, et peuvent en dénaturer le caractère historique et artistique;

Que le rapport de M. Viollet-le-Duc proposant la reconstruction totale des œuvres hautes est en contradiction avec les plans et devis présentés à l'adjudication d'après lesquels les murs sont conservés;

Que ce même rapport ne donne aucun motif pour la

démolition entière et la réfection à neuf du comble et de la couverture;

Qu'il n'est pas démontré que la cathédrale d'Évreux soit en état de péril imminent;

Émet le vœu :

Que les travaux projetés soient strictement limités à la restauration générale de l'édifice, avec les réfections partielles indispensables, mais en reproduisant respectueusement le style et les dispositions anciennes.

Délibéré et adopté en Conseil, le 17 juin 1874.
Étaient présents et ont signé :

Eug. LANDEVILLE, président;
Alex. RENEAU, vice-président;

V. NAVEAU, secrétaire du Conseil;

JOBIN, W. HAUSEN, TRIBOULET, E. FLAMANT;
H. SABINE, secrétaire général.

No 10.

INSTRUCTIONS DONNÉES PAR M. LE MINISTRE AUX TROIS COMMISSAIRES, MM. DOUILLARD, BARTHÉLEMY ET VAUDREMER, QUI ONT VISITÉ LA CATHÉDRALE LE 12 SEPTEMBRE 1875.

Paris, le 19 août 1874.

MONSIEUR,

Des difficultés graves se sont élevées au sujet de la réparation de la cathédrale d'Évreux. Des avis très-divers ont été émis et sont vivement soutenus par Mgr l'évêque et par différents membres du Conseil général de l'Eure.

Avant de prendre aucune décision sur cette grave question, je crois devoir faire une enquête afin de connaître à ce sujet l'opinion d'hommes expérimentés et compétents.

En conséquence, j'ai décidé qu'une commission de trois membres, choisis parmi les architectes diocésains, serait chargée d'examiner les travaux projetés et de vérifier : si on peut restaurer la nef de la cathédrale d'Évreux sans toucher à la voûte; si on peut opérer cette restauration en conservant le style primitif, c'est-à-dire en conservant les contre-forts sous leur forme actuelle et leurs deux arcsboutants.

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J'ai l'honneur de vous informer que je vous ai appelé, avec MM..., à faire partie de cette commission. Je vous prie de vouloir bien me faire savoir si vous acceptez cette mission et, dans ce cas, de vous entendre immédiatement avec vos collègues afin que cette question puisse être étudiée et résolue dans le plus bref délai possible.

Veuillez agréer, etc.

Le Ministre de l'Instruction publique, des Cultes et des Beaux-Arts,

Signé A. DE CUMONT.

No 11.

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NOTE SUR L'ÉTAT ACTUEL DE LA QUESTION DE
LA CATHÉDRALE D'ÉVREUX.

Après l'intervention de plusieurs députés, M. de Cumont, ministre des Cultes, parut nous être favorable et promit une nouvelle enquête. Malheureusement M. Ballu ayant,

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