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« Il y a bien longtemps que j'ai eu l'idée d'assimiler la prétendue hache celtique à la catéia et d'en faire une arme de jet, mais à la condition que ce fût une sorte de flèche lancée par un arc, pour les plus petites, et par une machine balistique pour les plus grandes, que l'arme fut de bronze ou de pierre.

a M. Prévost, ajoute M. de Cougny, me donnait en cet endroit le dessin d'une flèche telle qu'il la comprend, armée à son extrémité d'une prétendue hache celtique, fixée à la hampe au moyen d'une ligature passant dans le petit anneau qui se trouve au-dessous de l'orifice de la douille, puis il ajoutait :

• Dans une arme ainsi faite, le centre de gravité est près de la tête qui doit frapper, le reste est en bois léger, terminé par des pennes qui assurent la direction de l'arme pendant tout le temps du trajet. On plaçait cette flèche sur l'arc, de manière à ce que ce tranchant fût à peu près horizontal. L'anneau facilitait une ligature plus solide pour relier le bronze au bois.

a On dut souvent préférer une tête en forme de tranche à une pointe de flèche, surtout aux époques où on ne savait pas encore assez bien tremper et écrouir le cuivre pour avoir des pointes de métal suffisamment résistantes.

« Pour les très-grosses haches de pierre ou de métal, je crois que c'étaient de véritables haches, et il n'est pas difficile d'empêcher un mode d'emmanchement convenable pour les éviter de tourner au moment du choc. »

La hache que nous avons l'honneur de vous présenter se placerait, par ses dimensions moyennes, dans la classe des instruments lancés avec le bras ou avec une machine balistique, si l'on en croit M. Bermans et le colonel Prévost, tandis qu'au contraire il résulte de son état d'usure, qu'elle a servi comme hache munie d'un manche coudé.

En effet, lorsqu'on frappe avec une hache emmanchée dans ces conditions, c'est toujours plutôt la moitié inféricure du tranchant qui supporte le choc, en s'usant et en se déformant, et la hache en question présente ce caractère bien évident. Elle n'a donc point servi comme arme de jet.

On s'est demandé souvent si l'anneau latéral de ces instruments, qui servait, au moyen d'une ligature, à rattacher la hache au manche, était placé en dessus ou en dessous, lorsque le manche était fixé à la hache.

Celle que nous présentons indique, par son tranchant usé dans la partie opposée au côté de la douille, où est fixé l'anneau latéral, que cet anneau était tourné en dessus, et on peut voir là un usage général et non un mode particulier au propriétaire de cet instrument, qui était aussi une arme.

On n'explique pas encore d'une manière satisfaisante et certaine l'usage des petites hachettes en bronze. Beaucoup d'archéologues ont pensé jusqu'aujourd'hui qu'elles étaient des armes votives, destinées à empêcher d'inutiliser des instruments de plus grande taille à une époque où le bronze était rare et d'un prix élevé.

Mais, récemment, M. Lebeuf, l'heureux fouilleur du cimetière des Crons de Bergères (Marne), et qui habite maintenant Avranches, a signalé douze petites hachettes découvertes dans le département de la Manche.

Onze d'entre elles n'ont servi à aucun usage qui consistât à tailler ou à frapper, car on remarque au tranchant ce qu'on appelle la bavure du moule; la douzième seulement montre, par la disposition de son tranchant et l'usure de la partie de l'instrument qui l'avoisine, que cette arme a été rebattue et a servi à trancher.

Il est regrettable que ce tranchant ait disparu, car,

d'après son état d'usure et le point où elle se serait manifestée, il eût été facile de constater de quelle manière on s'en était servi.

La hache que nous venons de vous présenter, donne, du moins pour celles de dimensions moyennes, des notions certaines sur l'usage de ces instruments.

Sur la onzième question :

Quelles sont les découvertes de monnaies, à quelque époque qu'elles appartiennent, faites dans le département de la Marne depuis 1861? Signaler et décrire celles de ces monnaies qui sont remarquables, rares ou inédites, notamment celles qui se rattachent à la numismatique de l'ancienne province de Champagne.

La parole est à M. Buvignier, qui demande si on possède dans la Marne des documents sur le traité monétaire, qui à dù intervenir entre Alberon de Chicey, évêque de Verdun, et l'évêque de Châlons. L'évêché de Verdun et le Barois étaient encombrés de contrefaçons à très-bas titres des deniers d'Henry l'Oiseleur, deniers dont le type, prétend-on, s'était immobilisé à Verdun; mais qui plutôt y avait été perpétué pendant deux siècles par des faux-monnayeurs puissants; peut-être d'abord par les deux bénéficiaires eux-mêmes, qui, jaloux de la puissance impériale, cherchaient à la faire oublier en écartant du pays les monnaies des empereurs régnants et profitaient du bénéfice illégal qu'ils faisaient sur des monnaies, en apparence, antérieures à leur gouvernement, et plus tard par les

comtes de Bar. Ces monnaies, en effet, étaient plus abondantes dans le Barrois que dans le Verdurois. En tous cas, il est inexact de dire que ces deniers s'étaient immobilisés à Verdun, puisque pendant les deux siècles où ils ont circulé, on a frappé à Verdun des monnaies de bon aloi, aux noms des Othon, des ducs Gozelon et Godefroi, des évêques Heimon, Rambert, Richard, Thiéry, Richer, Henry I et Adalberon de Chicey. Ces deux dernières et celles de leurs contemporains de Metz, et de Toul, ont été trouvées à Dieulouard et mélangées avec les faux deniers d'Henry l'Oiseleur.

Or, Albéron dans les premières années de son épiscopat, racheta de ses deniers ces fausses monnaies, Moneta depravata, dit Laurent de Liége, qui inondaient le pays, et, défendant de frapper monnaie à Verdun, décida qu'on y emploierait à l'avenir la monnaie de Châlons.

Il est probable, et on peut dire certain, que ce prélat ne renonça pas gratuitement, au profit de l'évêque de Châlons, au bénéfice que les seigneurs retiraient de la fabrication de la monnaie. Il a dû y avoir, à cette occasion, un traité entre les deux évêques. On ne connaît à Verdun que le fait cité brièvement par Laurent de Liége. M. Buvignier demande si on connaît dans la Marne quelque document relatif à l'arrangement qui a dû avoir lieu à ce sujet.

On a dit que le motif qui avait déterminé Albéron à choisir la monnaie de Châlons, pour remplacer celle qu'il supprimait, était la bonne renommée que les grandes foires de Champagne avaient donnée aux monnaies de Châlons. Il y a eu peut-être une autre considération qui a déterminé ce choix; j'en juge, dit M. Buvignier, par les figures des monnaies de Châlons données par M. Denis et par une pièce que j'ai vue dans la collection de l'hono

rable M. Garinet. Il y aurait une grande analogie de module et d'aspect entre les faux deniers d'Henry l'Oiseleur et les monnaies des évêques de Châlons. Le mot EPS et plus tard le mot PAX qui se trouve dans le champ de ces pièces, représentent assez bien la dégénérescence du mot REX inscrit dans le champ des premiers. On cite même quelques-uns de ceux-ci qui porteraient le mot PAX. Ils auraient été trouvés dans le Barrois; ce qui confirmerait l'hypothèse que ces pièces provenaient des comtes de Bar, qui, en dernier lieu, auraient adopté ce mot PAX pour les faire circuler plus facilement dans l'évêché de Châlons.

M. Buvignier demande encore si l'on connaît dans la Champagne des traités d'association monétaire analogues à celui qui fut conclu à Verdun, entre Jean l'aveugle et Henry de Bar, qui s'engagèrent à frapper monnaie à frais communs pour leurs comtés de Luxembourg et de Bar, monnaie dont on connaît plusieurs variétés avec les noms et les armes des deux comtes, et la légende MONETA SOCIORUM. Il a dû exister un traité analogue entre l'archevêque Henry II de Reims et le comte Thibaud IV de Champagne. Une pièce de la collection de M. Buvignier porte d'un côté le mot HENRICVS dans le champ, avec la légende circulaire ARCHIEPISCOPVS, presque exactement comme sur la figure 11, planche V, de la numismatique rémoise de M. Maxe-Werly. L'autre côté TEBAV COMES, est identique à la face des deniers de ce prince, frappés à Provins, et qui portent au revers le nom de cette ville et le peigne de Champagne.

Le nom du comte qui se trouve ici nous ôte toute incertitude sur l'archevêque auquel appartient ce type; ce ne peut être que Henry II.

M. Denis parle de la difficulté de reconnaître les mon

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