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1398). Durant cette période on rencontre, en 1376, un acte d'amortissement par le duc Robert de Bar, des donations faites à l'abbaye par Pierre de Fontaine, seigneur des Noyers et Gillette de Pinteville, sa femme. Nicolas de Condé mourut aux calendes de février en 1397, c'està-dire en 1398, selon le calendrier Grégorien.

Jean d'Alleu, appelé ailleurs Jean de Lillivert, est cité dans une charte d'échange entre Trois-Fontaines et Montiers, en 1398 et en 1405. Il fut enseveli dans le même tombeau que son prédécesseur. Sur la pierre on lisait cette inscription: « Sous cette tombe gisent deux abbés : Dom Nicolas de Condé, qui mourut en 1397, le 25 janvier, et Dom Jean d'Alleu, qui mourut en 1424, le 20 septembre. >>

Jean de Possesse se rencontre de 1425 à 1446. Il était de cette famille que nous avons vue alliée aux Dampierre et aux Garlande.

Il obtint des ducs de Bar des lettres confirmant les priviléges de l'abbaye au sujet des exemptions de taxe, de tailles et impositions, pour ses biens situés dans son duché.

Le gagnage du Temple, situé sur le territoire de Noirlieu, ayant été détruit pendant les guerres des Anglais, l'abbaye de Montiers, à laquelle il était dû un cens important fut obligé, en 1438, de faire aux chevaliers de SaintJean de Jérusalem, la remise des loyers échus et de prendre des arrangements pour l'avenir.

Lanson ou Lançon fit un traité important, en 1454, avec Varin de Trois-Fontaines, relatif à la cession de la cense de Bronne, par Montiers à Trois-Fontaines.

On lit encore son nom en 1458 et 1459. Cependant le chapitre général de Citaux délégua, en 1455, l'abbé Anseline pour arranger un différend entre Cheminon et

Trois-Fontaines, qui sont, comme on le voit, continuellement en lutte.

Pour expliquer cette difficulté, il faudrait, ce qui est possible, que Lanson eût siégé deux fois, comme Gervais, ou que Lanson et Anselme, ce qui est aussi possible, par suite d'une confusion de noms, fussent le même personnage.

Les éléments nous manquent pour résoudre le doute; les auteurs du Gallia Christiania, ne sont pas plus certains que nous de la vérité.

Il parait, toutefois, d'après les dates, y avoir une place suffisante pour deux périodes de l'administration de Lanson, entre lesquelles serait venu Anselme.

Il est remarquable que plus on approche de la fin de la liste des abbés réguliers, plus les documents font défaut et plus la chronologie est incertaine.

Nous citerons sans l'avoir vue, comme document pouvant éclaircir le débat, une charte du 3 mai 1472, qui existerait, paraît-il, aux archives de Sommeille. C'est la ratification, par l'abbé de Montiers-en-Argonne, d'une transaction avec les habitants de Sommeilles, au sujet d'une chaussée allant aux bois de l'abbaye, et des droits de la communauté des habitants.

Les mentions qui nous en ont été communiquées (1) ne citent point le nom de l'abbé qui a souscrit ce titre.

Nous sommes amené à penser qu'il a existé, dans ce temps, quelque perturbation survenue dans l'administration, ou que les titres de cette époque ont disparu.

Pierre Maillard Ier, avait été abbé de Haute-Fontaine. Or la liste des abbés de cette maison donne la date de 1484 comme la fin de son exercice; c'est donc la même

(4) Par M. Servais, de Bar-le-Duc.

date que nous prendrons pour son élection à Montiers. Il fit réviser les titres de propriétés d'une maison, terre et prés que l'abbaye possédait à Vitry en Perthois et d'une vigne à Merlaut. Il assista, le 15 décembre 1509, à l'assemblée du clergé, de la noblesse et autres possesseurs de fiefs du baillage de Vitry en Perthois, qui s'étaient réunis pour la publication des coutumes générales de ce baillage, accordées par le roi, dont l'enregistrement au Parlement eut lieu le 10 du même mois.

Son neveu et successeur, Pierre Maillard II, fut le dernier abbé régulier, de 1513 à 1538 environ.

Il fit faire au cloitre et à la chapelle des réparations considérables.

Il eut l'heureuse idée de faire réunir en un seul volume, dont nous avons donné la description, les chartes et priviléges de Montiers en Argonne, et fit remettre en ordre tous les titres du chartrier. Ce cartulaire porte la date de 1533.

Nous attachons d'autant plus de prix à ce travail que Pierre Maillard II fut le dernier abbé résidant. Les abbés commendataires qui succédèrent aux réguliers n'eussent certainement point laissé à l'histoire un document aussi précieux, occupés qu'ils étaient uniquement à tirer de leur bénéfice le plus de revenu possible, et à s'engraisser comme les frelons du butin des abeilles, suivant l'expression d'un mémoire contemporain.

IX.

CAUSES DU

CHANGEMENT SURVENU DANS LE RÉGIME

DE L'ABBAYE, AU XVI SIÈCLE.

Nous sommes arrivés au XVI siècle, qui a modifié tant de choses, qui s'est appelé, dans le monde, le siècle de la Renaissance, mais que les maisons religieuses peuvent considérer comme l'époque de la perte de leur indépendance et de leur liberté.

Le régime des commendes modifia profondément les mœurs et les usages monastiques déjà fort relâchés.

Un simple prieur y conserva l'autorité religieuse, mais le titre d'abbé devint un bénéfice qui fut donné avec la plus forte partie des revenus, à des favoris, à des hommes de cour, souvent à un soldat, et quelquefois à des hommes d'une immoralité notoire; nous ne parlons pas du cumul, sur la même tête, d'un grand nombre de bénéfices, c'est ce qu'on appelait la commende (commendare, confier aux soins).

Aussi, chaque jour les religieux devinrent moins nombreux dans les abbayes; le goût des grandes choses s'y perdit et les hommes de valeur furent de plus en plus rares, car désormais on ne travaillait plus pour Dieu, mais pour un homme.

Était-ce la faute des religieux eux-mêmes?

La discipline avait considérablement fléchi et plusieurs moines levaient la tête; des ambitieux, se donnant pour des réformateurs, avaient secoué le joug de la règle et prêché la révolte contre l'autorité du Pape et des Conciles.

Les passions s'étaient enflammées de part et d'autre; des

violences du discours on en était venu aux voies de fait et aux sévices réciproques, et la politique attisant la discorde, suivant l'intérêt des meneurs, on ne tarda pas à se faire une guerre où la religion ne fit que servir de prétexte aux partis déchaînés.

Mais revenons à notre abbaye de Montiers en Argonne, qui ne fut pas plus à l'abri que les autres des fléaux de la guerre et des incursions des bandes protestantes.

Charmont et les villages voisins renfermaient quelques réformés, mais ils étaient contenus par leur petit nombre; des prêches étaient établis à Saint-Mard, à Heiltz-leMaurupt, à Epense, où ont prêché les Spifane, les Ourier, les Morel, les Fournier, qui ont eu dans le pays une certaine notoriété comme ministres de la réforme.

Les chartes ne nous apprennent rien de précis sur ce qui s'est passé au monastère à cette époque. Nous croyons, cependant, trouver des indices du fléau de la guerre dans diverses énonciations des titres; d'ailleurs on peut affirmer, par les traces de pillage et d'incendie qu'elles ont laissées dans les pays circonvoisins, le passage des armées de Charles-Quint allant de Saint-Dizier à Sainte-Menehould, en 1545, lors du siége et de la destruction de Vitry, et celui des impériaux de Philippe II pendant la Ligue. M. Henri, ancien professeur au lycée de Reims, parle des incursions, dans cette contrée, du prince de Château-Porcien et de Claude Pioche, seigneur de Warmériville, chefs des huguenots. En suivant leur itinéraire, on voit qu'ils ne durent point oublier de faire main basse sur la riche abbaye qui était sur leur chemin; il est question, dans les titres de cette époque, de ruines de l'église et du couvent « causées par les guerres ».

Les armées de la Fronde qui ont sillonné ces contrées et détruit, avec toutes les censes entre Charmont et

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