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Elle est connue, en effet, sous ces deux noms

Marine et Marguerite. Margerie, on le sait, du reste, vient de Marguerite. C'est le nom de cette sainte qui a été donné au pays, jadis appelé Sainte-Marguerite.

M. l'abbé Lucot entretient ensuite le Congrès du suaire de sainte Hélène, tissu de lin brodé en demi-chaînette et présentant des aigles et des lions alternés. Cette pièce précieuse est aujourd'hui à l'église Saint-Jean de Châlons. M. l'abbé Lucot en présente une copie exacte aux membres du bureau; on s'accorde à voir dans cette broderie un ouvrage de la fin du xre siècle.

Ayant appris que M. l'abbé Pierron, curé de NotreDame de l'Épine, se proposait de faire démolir le jubé que l'on remarque dans la magnifique église de ce village, afin de démasquer le chœur et le sanctuaire M. Charles Givelet prie le Congrès d'intervenir pour sa conservation.

Il fait remarquer que ce jubé est d'une grande délicatesse, il est contemporain de la construction de l'église.

M. Lucot fait observer que ce jubé n'a pas été, dès le principe, fait pour l'église de l'Épine, mais qu'il vient de l'église abbatiale des chanoines réguliers de Toussaint (extra-muros) de Châlons, église démolie en 1542 à l'approche de Charles-Quint, et pour faciliter la défense de la ville.

M. le président approuve le vœu de M. Ch. Givelet, et dit que tout en conservant le jubé on pourrait faire disparaitre les deux autels établis sous les deux arcatures latérales et qui n'ont pas de raison d'être, n'étant en rapport ni avec le style de l'église ni avec celui du jubé. De cette façon on remédierait en grande partie à l'inconvénient signalé par M. l'abbé Pierron, tout en conservant un monument intéressant au point de vue de l'art et de l'archéologie.

M. Auguste Nicaise propose aussi de transporter la statue de la Vierge sur l'autel de la chapelle qui lui est consacrée.

Ce vœu est pris en considération, et la proposition suivante est soumise à l'approbation du Congrès :

«Le Congrès archéologique propose de conserver le jubé de l'église de Notre-Dame de l'Épine, tout en faisant disparaître les deux autels qui se trouvent au-dessous, en transportant la statue de la Vierge sur l'autel qui lui était primitivement destiné. »

Ce vœu est adopté à l'unanimité.

M. le colonel de Sailly rend compte d'une visite qu'il a faite chez MM. Mohen et Garinet. Il a remarqué surtout la collection de photographies du premier. Celui-ci a réuni, dans une série d'albums, les églises les plus curieuses du département.

M. Denis fait observer qu'il ne s'agit point de photographies, mais de dessins lavés, ce qui augmente encore la valeur du travail.

M. Poisel, considérant combien on est peu soucieux de conserver l'originalité des églises, émet le vœu que des plans cotés et des photographies des principaux nonuments soient déposés dans un musée, soit diocésain, soit départemental.

M. Varnier lit une Note sur les retables de la Champagne :

MESSIEURS,

Aucune contrée, croyons-nous, ne peut montrer une collection de retables aussi remarquable que celle qui se trouve réunie en Champagne, dans le seul arrondisse

ment d'Épernay. Trois de ces précieux monuments surtout méritent d'attirer votre attention. L'un d'eux, le plus ancien, se voit dans l'église de Mareuil-en-Brie, le second à Colligny, où vous avez pu l'admirer avant-hier, et le dernier à Fromentières, entre Champaubert et Montmirail.

Je ne parlerai pas du second, qui a été décrit par M. le curé de Colligny, mieux que je ne pourrais le faire, et quant aux deux autres, les photographies que j'ai l'honneur de placer sous vos yeux, suppléeront à ce qui pourrait manquer à mes explications.

Le retable de Mareuil-en-Brie date, je crois, de la première moitié du XIVe siècle, ce qui en rehausse singulièrement la valeur. Son état de conservation est très-satisfaisant, bien qu'il soit mutilé dans quelques parties.

Il présente, sous la forme d'un rectangle de 3 mètres de largeur sur 2 mètres environ de hauteur, trois rangs de sujets superposés, contenant chacun neuf panneaux, ce qui porte le chiffre total à vingt-sept. Il était complétement doré, et le champ de chaque panneau garni de plaques métalliques, qui servaient de chatons à des pierres précieuses de toutes formes et de toutes dimensions, enlevées depuis longtemps par des mains sacriléges. La décoration architecturale de l'époque entoure chaque panneau, et en fait un petit ensemble de l'effet le plus heureux.

Voici, en commençant de droite à gauche, les sujets qui le composent :

1. et 2. Entrée de Jésus à Jérusalem. 3. Le Festin chez Simon le pharisien. 4. Le Couronnement de la Vierge.

5. La Sainte Trinité.

6. La Résurrection des morts.

7. La Descente du Saint-Esprit sur les apôtres.

8. L'Ascension de Notre-Seigneur.

9. L'Incrédulité de saint Thomas.

10. Le Lavement des pieds.

11. Le Christ au jardin des Oliviers.

12. Le Paiement de Judas.

13. La Trahison de Judas.

14. Le Crucifiement.

15. La Descente de croix.

16. Le Christ entre à Emmaüs.

17. Jésus s'évanouit devant les disciples d'Emmaüs. 18. Jésus donne les clefs du paradis à saint Pierre.

19. Le Christ tourmenté et bafoué par les Juifs. 20. La Flagellation.

21. Jésus devant Hérode.

22. Le Couronnement d'épines.

23. Le Portement de Croix.

24. La Résurrection.

25. Les Saintes Femmes au tombeau du Christ.

26. Descente du Christ aux enfers.

27. L'Apparition du Christ à Marie-Magdeleine.

Le second retable dont j'ai à vous entretenir est celui de Fromentières, qui, bien que présentant une richesse inouïe de détails, est moins important par son style d'abord, et par la quantité beaucoup moins grande de ses sujets. Cependant la parfaite exécution des personnages, la ravissante disposition de l'ornementation ogivale de la fin du xve siècle, qui le caractérise, en fait aussi un meuble digne d'appeler votre attention. Le sujet central est le Crucifiement; le second, à droite, la Descente. de croix; le troisième à gauche, le Portement de croix. Au-dessous, à gauche, la Flagellation; au milieu, le Cou

ronnement d'épines; à droite, la Mise au tombeau; audessous encore, et en retraite sur ces six sujets, on en remarque encore trois autres :

1. A gauche, la Nativité.

2. Au milieu, la Circoncision, qui présente ce détail, que le grand-prêtre a des lunettes.

3. L'Adoration des Mages.

On est navré à la vue de l'état de délabrement de ce beau retable, dont tous les personnages revêtus de riches costumes, rappelaient par leur éclat les plus belles miniatures; les niches couronnées de dais d'une légèreté admirable, qui contenaient primitivement une foule de petits sujets, sont vides depuis longtemps, et oserai-je vous le dire, Messieurs, servent parfois à soutenir des lampions pour les offices du soir, et notamment le jour de Noël, à la messe de minuit. Les élégants volets qui fermaient le retable, et qui sur leurs deux faces étaient délicieusement peints, ont été arrachés violemment, et après avoir servi à figurer quelques stations du chemin de croix, ont été définitivement relégués dans un coin, où ils devront pourrir d'ici peu, si la main intelligente et conservatrice de la Société n'y vient mettre bon ordre.

Il y a quelques années, lorsque j'ai photographié ces retables, j'en ai offert la dédicace à Mgr l'évêque, appelant sur leur délabrement son attention bienveillante. Monseigneur voulut bien me remercier, et me dire que des mesures seraient prises pour leur conservation, mais malheureusement, aucune suite n'a été donnée à cette promesse. Je signale énergiquement, Messieurs, à votre zèle et à votre dévouement, l'urgente restauration de ces deux beaux objets, et je vous supplie, au nom de l'art chré

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