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chons-en ce qui appartient en entier à l'art ogival.

Sans hésitation, supprimons toute l'abside qui se compose de deux collatéraux extrêmes formant chapelles carrées, le sanctuaire, le collatéral qui le pourtourne, et les cinq chapelles rayonnantes, ainsi que les deux premières travées de la grande nef, qui joignent le portail aux deux premiers gros piliers.

Supprimons aussi l'ancien clocher nord (nouvellement reconstruit à son ancienne image), lequel, d'architecture romane, était postérieur à celui sud et relativement de beaucoup antérieur aux constructions ogivales élevées en 1170 par Pierre de Celles.

Au portail, démolissons la partie supérieure jusqu'en contre-bas de la rosace, enlevons les pieds-droits et les colonnettes de ses ouvertures, lesquelles étaient autrefois de très-petite dimension avec arcature plein cintre, tandis qu'elles sont aujourd'hui ogivales.

Supprimons tous les arcs en ogive et les voûtes de la nef, de ses bas-côtés et de ses galeries hautes, et toutes celles correspondantes du transept, ainsi que les colonnettes et le revêtement de style ogival appliqué à toutes ces parties.

Au portail sud retirons tous les éléments d'architecture flamboyante qui le couvrent.

Au pignon nord du transept, démolissons toute la partie supérieure jusqu'en contre-bas de la grande rosace, à l'exception des angles qui la relient aux murs des bras de croix.

Et enfin, à l'extérieur, enlevons les contre-forts avec les arcs-boutants qu'ils supportent.

Et l'église, dépouillée de tout ce que nous venons d'indiquer, présenterait une grande ruine qui ferait connaître ce qui reste des constructions qui existaient en 1049.

Du portail nous n'en verrions que le socle, et les massifs informes des trumeaux des deux étages inférieurs. Le clocher sud se présenterait en son entier.

Les deux murs de la grande nef s'élèveraient dans leur étendue jusqu'à la hauteur actuelle, à l'exception toutefois des deux premières travées qui furent démolies jusqu'à la base.

Nous verrions aussi les arcatures jumelles qui ornent les arcs des galeries.

Les deux gros piliers liant la nef au chœur paraîtraient dans leur entier, ainsi qu'une partie de l'ancienne construction qui était comprise entre le grand arc et les rampants du pignon qu'ils supportaient.

Les deux autres piliers de la croix, séparant le chœur du sanctuaire, existeraient dans leurs principales parties; seules celles qui étaient en avant-corps pour recevoir l'arc transversal feraient défaut, car elles ont été abattues lorsque ce grand arc plein cintre fut transformé en une ouverture ogivale de plus grande dimension. Au niveau des voûtes actuelles, une partie de l'ancien pignon oriental existe encore.

Les murs des deux bras de croix existeraient dans tout leur développement dans la hauteur qu'ils ont aujourd'hui, moins dans celle de ses corniches qui datent du XVI siècle.

Les bas-côtés des deux bras de croix (côté de la nef) se verraient tels qu'ils sont maintenant avec leurs voûtes en plein cintre.

Les deux chapelles circulaires avec les bas-côtés, qui les lient aux murs orientaux des bras de croix, existeraient dans la hauteur des deux étages, telles qu'elles sont aujourd'hui.

Le pignon sud du transept ne présenterait que des

massifs informes dans sa base et sur ses côtés seulement, ayant été modifié par incrustation lors de l'édification qui le transforma en portail.

La petite chapelle, adossée au bras de croix sud, côté oriental, paraîtrait telle qu'elle était à son origine.

Et à l'extérieur, les murs formant les bas-côtés de la grande nef, comme ceux en retour d'équerre formant les bas-côtés des deux bras de croix, se montreraient dans tout leur développement et dans la hauteur qu'ils ont aujourd'hui.

Telle serait la vue que présenteraient les restes des constructions qui faisaient partie de l'église en 1049.

Maintenant, examinons attentivement ces restes, et voyons si cette construction fut érigée en vue d'un même programme, d'un seul jet, et à la même époque.

Voyons d'abord les moulures et les sculptures du clocher sud et celles de la petite chapelle du bras droit du transept, et nous trouverons que ces détails, signes distinctifs de toute époque ont un caractère connu, classé, appartenant à l'art roman, tandis que les mêmes signes des piliers de la nef, de ceux carrés et ronds du transept n'ont pas d'équivalent connu jusqu'alors au moins, et par conséquent n'ont pu être classés.

D'où nous concluons que si les signes distinctifs d'architecture du clocher sud et de la petite chapelle sont de l'époque si bien fixée de 1049, ceux différents de la grande nef et du transept sont d'une époque antérieure.

Ces différences de style pour les moulures, et de caractère pour les sculptures, n'offrent, il est vrai, qu'une preuve d'appréciation; mais poursuivons nos recherches et nous verrons que le Saint-Remi de 1049 a été, pour ainsi dire, enté sur celui qui le précédait.

Nous avons dit que les murs de la grande nef et du

transept s'élevaient, en 1049, à la hauteur qu'ils ont aujourd'hui, lorsque l'église était couverte par un plancher, au lieu de l'être par les voûtes ogivales qui furent érigées en 1170.

La preuve en est que la surface des murs de la grande nef et des bras de croix, comprise entre la pénétration des voûtes et les corniches actuelles, est encore en partie recouverte d'un enduit fort épais, badigeonné en rose avec filets blancs, représentant un appareil régulier.

Et il est bien évident que cet enduit a été fait antérieurement aux voûtes, car il se trouve arraché tout au pourtour de leur pénétration.

Au-dessus des mêmes voûtes, les parties encore existantes des anciens pignons, supportés par les quatre grands arcs qui liaient les gros piliers de la croix, ont conservé des traces de la même décoration, laquelle, du reste, a été appliquée à l'ensemble de l'église de 1049.

Mais ces murs de la nef et des bras de croix qui étaient décorés d'un appareil tracé au pinceau dans toute la hauteur qu'ils ont aujourd'hui et qu'ils avaient en 1049, lorsque l'église était couverte d'un plafond, s'élevaient-ils originairement à la mème hauteur?

C'est ce que nous allons examiner.

Dans l'intérieur de la nef, sur toute son étendue et sur ses deux côtés, on aperçoit, en contre-bas des jours circulaires, une démarcation plus ou moins régulière qui donne à penser qu'il y a eu surélévation des murs.

Co doute devient presque certitude lorsqu'à l'extérieur, au niveau de la démarcation remarquée à l'intérieur, on voit le changement de matériaux employés dans la composition des murs.

Jusqu'au niveau de cette démarcation, la maçonnerie des murs est faite de petits moellons de pierre dure, taillés

et bien réglés dans leur pose, tandis que leur surélévation est faite de blocaille rouge de ton, non taillée et posée sans méthode.

Au reste, cette surélévation, existante en 1049, comme nous l'avons démontré, ne peut être interprétée comme modification dans l'emploi des matériaux. Elle ne faisait pas partie du programme des constructions primitives, puisqu'il existe encore au-dessus des voûtes, dans les massifs restants de l'ancien arc qui supportait le pignon séparant la nef du chœur, deux parties de rampants de pignon qui indiquent exactement la limite du comble primitif et son inclinaison.

Ces fragments de rampants sont visibles des deux côtés à 40 ou 50 centimètres au-dessus de la démarcation produite par la surélévation, espace correspondant à peu près à ce que pouvait avoir la corniche primitive, naturellement enlevée lors des modifications de 1049.

Voilà donc une nouvelle preuve irrécusable que les murs de la nef ont été élevés à deux époques différentes. Primitivement la corniche était placée à la hauteur de la ligne de démarcation, en contre-bas des jours circulaires.

Et en 1049 ils furent soulevés à la hauteur actuelle et des jours circulaires furent établis dans cette surélévation.

Passons maintenant à l'examen des murs des bras de croix, afin de savoir si leur ordonnance corrobore ou dément la preuve citée plus haut en faveur de l'idée émise que le Saint-Remi primitif n'est pas celui constaté de 1049.

Nous avons reconnu que les murs des bras de croix, comme ceux de la grande nef, atteignaient en 1049 la hauteur qu'ils ont aujourd'hui, par la preuve qu'en

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