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la brèche osseuse du Périgord, renfermant des ossements d'animaux mêlés avec des produits de l'industrie grossière encore des aborigènes, chasseurs de rennes. Au-dessus de ces quelques débris de la faune préhistorique, vous avez remarqué un certain nombre d'objets attestant la naissance de l'art chez les peuplades de l'âge du renne et de la pierre silex taillés de différents types, haches de pierre, couteaux, grattoirs, têtes de lances. Votre attention a été attirée surtout sur deux aiguilles très-fines en bois de renne, sur le fac-simile d'une représentation d'animal, gravée sur un fragment de bois de renne, trouvé dans une caverne du Périgord, enfin sur quelques flèches également en bois de renne, relevées de chaque côté de plusieurs barbes recurrentes et alternes.

A cette première collection en succède une autre de la Gaule indépendante. Ce sont des armes, en particulier l'épée gauloise à deux tranchants avec fourreau en fer battu, des fibules, des torques. Mais ce qui a excité vivement votre curiosité, c'est d'abord un magnifique bracelet en verre, trouvé et donné par M. l'abbé Ménuel; ce produit de l'industrie de nos pères nous est témoin qu'à cette époque reculée, les arts avaient déjà fait de notables progrès, puisqu'on y fondait et travaillait le verre c'est un certain nombre de fragments de vases funéraires, qui tendraient à prouver que si l'incinération des cadavres n'était pas commune chez les Gaulois, du moins elle n'y était pas inconnue.

puis,

A la Gaule indépendante succède l'époque gallo-romaine. Elle est représentée dans notre musée, surtout par des vases provenant des cimetières fouillés dans le départenient de la Marne; des urnes, des patères, des cruches, des assiettes, des plateaux et des tasses, tous se faisant remarquer par l'élégance et la légèreté de leurs formes.

Viennent ensuite les antiquités franques et du moyen âge. Les pièces principales sont des armes, des vases, des bracelets, des colliers en perles d'ambre et en verroterie; enfin un groupe de carreaux en terre cuite émaillée, des XIIe et XIIIe siècles.

On n'a pas oublié la numismatique, cette partie si intéressante, intimement liée à l'histoire et à la géographie des peuples. Vous y avez remarqué un certain nombre de pièces grecques et gauloises, plus de trois cents pièces romaines, des monnaies royales de France, au nombre de 160, plus de cinquante pièces de monnaies seigneuriales, suivies d'un assez grand nombre de médailles des papes, de médailles commémoratives, de jetons et méréaux avec quelques monnaies étrangères.

Nous tenons a déclarer que, sans parler des dons faits par M. Lartet, le premier bienfaiteur de ce musée, nous devons une bonne partie des pièces archéologiques et numismatiques à la générosité de M. l'abbé Ménuel, aumônier de l'Asile, à Châlons-sur-Marne; leur classement est aussi son œuvre. Nous devons aussi plusieurs objets à M. Morel, à M. l'abbé Lucot, supérieur des prêtres auxiliaires, et à M. Bédizié, curé de Vanault-le-Châtel. Du reste, vous l'avez vu, nous avons eu soin de relater les noms des donateurs sur chaque objet. Qu'il nous soit permis de leur offrir ici l'hommage public de notre reconnaissance.

Outre l'archéologie, notre musée renferme encore trois autres parties la minéralogie, la géologie et la paléontologie.

Les familles minérales y sont presque toutes représentées, les principales du moins, et en général, les échantillons sont assez gros pour que l'œil puisse en saisir tous les caractères cristallographiques, lorsqu'ils existent.

La partie géologique est assez étendue; elle comprend de très-beaux échantillons de la plupart des roches

connues.

La paléontologie n'est pas moins riche. Elle possède des espèces nombreuses et intéressantes. Parmi les céphalopodes, vous vous êtes plu à remarquer surtout les ammonites de grande taille des terrains jurassiques et crétacés, et parmi les reptiles, le grand crocodile du Mont-Aimé, près Vertus. De vastes et nombreux tiroirs renferment des coquilles de toutes espèces, distribuées selon l'ordre des terrains. D'autres tiroirs contiennent les coquilles des mollusques modernes.

Nous possédons en outre un riche herbier, dû aux connaissances et aux patientes recherches de M. Royer, receveur de l'Asile, à Châlons-sur-Marne. Qu'il reçoive également ici l'hommage de notre profonde reconnaissance.

Enfin, Messieurs, vous avez terminé la visite de notre musée du Grand-Séminaire par l'examen d'une tombe en pierre assez remarquable et très-bien conservée. Cette tombe est un don de M. Morel, qui l'a trouvée dans le cimetière franc de Bréban.

Je crois, Messieurs, que s'il existe des musées particuliers plus riches sur une branche particulière de la science, il en est peu en province qui soient plus complets dans leur ensemble. Aussi, espérons-nous qu'il remplira pleinement le but de son fondateur, et rendra de véritables services à la religion et à la science.

A la suite de la lecture du rapport de M. l'abbé Hémard, M. le président émet le vœu qu'un cours d'archéologie soit fondé dans les écoles normales, dans le but d'apprendre aux instituteurs d'abord à apprécier et à classer les objets trouvés soit à la surface du sol, soit dans les

fouilles et travaux qui n'ont aucun caractère archéologique, et ensuite à protéger contre l'ignorance de nombreux vestiges d'un grand intérêt pour la science. Les instituteurs pourraient exciter et habituer leurs élèves à ces sortes de recherches.

M. le président cite l'exemple du frère Huisseau, instituteur dans l'un de nos départements du centre, qui a vu une initiative de ce genre prise par lui couronnée d'un véritable succès, car elle a provoqué dans sa commune la création d'un intéressant musée formé par les trouvailles de ses élèves.

Le Congrès s'associe à l'unanimité à ce vœu.

Rapport verbal de M. de Dion sur la visite faite par le Congrès à l'église NotreDame.

M. de Dion, invité par le Président à rendre compte de la visite faite le matin à l'église de Notre-Dame, commence par déclarer que sa tâche serait bien facile s'il ne s'agissait que de faire l'éloge de ce monument, la principale gloire de la ville. La puissance de sa construction, la noble simplicité de ses formes saisissent dès le premier abord; on ne se lasse jamais de le revoir. Chaque province ne peut en offrir qu'un ou deux aussi beaux et qui ont une pareille importance pour l'histoire de l'architecture. Dans un autre ordre d'idées, il aimerait à parler du dévouement de feu M. l'abbé Champenois, auquel on doit la courageuse et intelligente réparation de cette église; mais il laisse à des voix plus autorisées à raconter les

difficultés de cette entreprise et à glorifier ceux qui les ont surmontées. Il craindrait de commettre des erreurs en parlant de faits qu'il ne connaît qu'imparfaitement.

Son but est d'attirer l'attention sur la date de construction des différentes parties du monument. Là, comme il a été dit dans une séance précédente, à propos de la cathédrale, nous trouvons des textes qui sont ou paraissent être en discordance avec les observations archéologiques, et il faut interpréter ceux-ci à l'aide de celles-là.

Après avoir lu dans l'Histoire de Châlons, de M. Barbat, que l'église de Notre-Dame, construite en bois, croula le 7 janvier 1157, on est tout étonné de voir qu'une grande partie de la construction, on pourrait dire sa principale masse est antérieure à cette date. Il faut donc réduire la catastrophe de 1157 à l'effondrement des charpentes. Sans vouloir engager plus qu'il ne faut l'opinion du Congrès, voici l'histoire du monument telle qu'il nous l'a raconté lui-même.

Au XIe siècle, il existait une première église, totalement disparue, dont l'abside moins vaste que le chœur actuel et sans déambulatoire était serrée entre deux tours selon le plan rhénan; nous ignorons ce qu'était la nef. C'est l'existence de ce chœur ancien, qui n'a été détruit que longtemps après la construction de la nef et seulement lorsqu'on voulut le remplacer au commencement du XIIIe siècle par le choeur actuel, qui rend compte de la singulière irrégularité de plan de cette partie de l'église. A la fin du XIe siècle, ou au commencement du XIIo, sous le règne de Philippe Ier, on entreprit la reconstruction de l'église Notre-Dame sur un plan grandiose auquel on n'a apporté depuis que peu de modifications. On commença par les tours qui accompagnent le chœur et l'œuvre poussée avec vigueur était terminée bien avant 1157. Voyons

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