Page images
PDF
EPUB

existe des mardelles qui ont été certainement creusées dans le sol par des sources souterraines.

M. Fourdrignier raconte qu'ayant eu l'occasion d'explorer deux mardelles, l'une entre Fontaine et Avenay, l'autre entre Fleury-la-Rivière et Belval, il a constaté que le sol de ces excavations n'était pas de même nature que la terre qui en formait les parois. Au fond de ces mardelles, la terre était noirâtre et mêlée de cendres, et la première excavation contenait de plus quelques objets en fer, parmi lesquels se trouvait une pointe de flèche.

M. Chapiteau, curé de Saint-Loup, déclare qu'il existe de nombreux souterrains de refuge dans le canton d'Ecurysur-Coole, et qu'il en a visité un à Fontaine-sur-Coole qui avait au moins deux kilomètres de longueur et qui aboutissait à un endroit appelé la Tombelle.

Enfin, M. Pierrard émet l'opinion que des souterrains creusés primitivement par les Celtes ont pu être utilisés par d'autres habitants de la Gaule.

On passe ensuite à la 20° question.

Étudier les organisations

communales

des villes neuves, fondées en Champagne au XIIe siècle, par les seigneurs laïques ou ecclésiastiques.

Les villes neuves de la Champagne offrent-elles habituellement un plan régulier comme les bastides du midi de la France?

M. Garinet prétend qu'il existe des villes neuves en Champagne et qu'elles ont été fondées par des habitants du pays, qui se groupèrent autour de certains établisse

ments ecclésiastiques près desquels ils étaient venus chercher protection. Il cite le village situé auprès de l'abbaye de Monthiers.

M. Buvignier pense que dans le nord du département de la Meuse, du côté du Luxembourg, quelques villes neuves ont pris naissance par suite de chartes d'affranchissement données par les seigneurs féodaux à des peuplades placées sous leur domination.

M. de Verneilh pose catégoriquement la question suivante « Existe-t-il en Champagne des villes analogues aux bastides du Midi, c'est-à-dire construites tout d'une pièce, sur un plan très-régulier, avec place centrale, rues symétriques et murs d'enceinte, villes qui ont généralement reçu des noms très-élégants, Villefranche, Montréal, etc.? »

M. Julien Gréau répond qu'il en connait deux. La première est Villeneuve-sur-Yonne; son plan est trèsrégulier, et sur le milieu d'un des grands côtés de la place centrale s'élève une tour royale avec donjon. La seconde, moins régulière à la vérité que la première, est Villeneuve-au-Châtelot, près Pont-sur-Seine; elle possède une église qui a été fortifiée au XIIIe siècle.

Sur la 21° question :

Étudier les différents patois du département, spécialement sous le rapport étymologique.

M. Garinet dit que M. Lenormand, qui a été cinquante ans chirurgien à Courtisols, s'est beaucoup occupé de cette question, et qu'il était d'avis que le langage parlé á Courtisols ne constituait pas un patois proprement dit,

mais était simplement le résultat de la mauvaise prononciation des vieux mots français du pays. M. Garinet ajoute que le Congrès peut se faire une idée exacte du langage courtisien en consultant la version en ce langage de la parabole de l'enfant prodigue.

M. Buvignier est du même avis que M. Lenormand. Il se rappelle que quand ses parents l'envoyèrent au collége de Metz, il lisait et comprenait parfaitement un petit poëme composé en patois lorrain, tandis qu'il ne pouvait pas comprendre ce que disaient les paysans du pays, lorsqu'ils causaient entre eux.

M. Denis expose qu'il connait un ouvrage champenois où la parabole de l'enfant prodigue se trouve racontée en cinquante-six patois différents, et il ajoute que, dans son histoire de Suippes, il a présenté cette parabole, écrite dans un patois qui ne ressemble pas aux cinquante-six autres, ce qui porterait à cinquante-sept le nombre des patois champenois connus.

M. Chapiteau demande à faire connaître au Congrès un cinquante-huitième patois, en usage au village de SaintAmand. Il donne lecture à l'assemblée de la parabole de l'enfant prodigue, et fait remarquer que ce qui caractérise surtout ce patois, c'est le changement du G en Z, de l'S en G et du Z en J.

M. Buvignier signale que le patois de la Meuse ressemble beaucoup à celui de Saint-Amand; que l'S se prononce comme CH et même TCH, le J comine DJ et le Z comme C. Suivant lui le patois se modifie graduellement depuis Metz jusqu'à Paris, et si c'est le patois tourangeau qui a prévalu pour former la langue française, c'est parce que la littérature a pris un grand développement au moment où la cour habitait la Touraine. Il regrette que la langue française ne se soit pas plutôt

inspirée du patois lorrain, où les verbes se conjuguent plus régulièrement que dans le patois tourangeau.

M. de Felcourt déclare que le dialecte de Saint-Amand est trop répandu pour qu'on puisse le considérer comme un patois spécial, que ce n'est, en définitive, qu'une manière particulière de parler le vieux français, mais qu'il en est tout autrement du patois de Courtisols et de celui en usage à Noirlieu et dans les environs de Sainte-Menehould.

M. le comte de Mellet termine la discussion en engageant la Société d'Agriculture, Sciences et Arts de la Marne, à mettre au concours la question des patois champenois.

On aborde la 22° question du programme:

Quels sont les monuments religieux les plus remarquables du XIe au XVIe siècle, existant dans le département de la Marne.

Signaler leurs principaux caractères? A-t-on découvert dans ces monuments des peintures murales, mosaïques, carrelages et sculptures d'un certain intérêt ? Existe-t-il dans le département de la Marne des églises antérieures au xr siècle? Existe-t-il des églises à date certaine? Les monuments religieux du diocèse de Châlons offrent-ils des caractères particuliers au point de vue de l'architecture, de la statuaire et de l'ornementation sculpturale?

M. le comte de Mellet fait remarquer que la Champagne

est une des provinces les plus riches en fait de spécimens d'architecture ancienne, et qu'on y rencontre surtout beaucoup de monuments de style de transition, monuments dans lesquels l'arcade ogivale repose sur des chapiteaux de style roman. Nous n'avons rien, dit-il, à envier sous ce rapport à la Normandie et à l'Ile-de-France. Le x1° siècle se trouve représenté en Champagne par l'église Saint-Remy de Reims; le xir par Notre-Dame de Châlons; le XIII par la merveilleuse cathédrale de Reims qui est du gothique le plus pur, avec force exubérance d'ornementation; on peut encore citer, comme un des plus beaux types du XIIIe siècle, l'église de Rieux. A Notre-Dame-de-l'Épine on peut voir le gothique fleuri du XVe siècle dans toute sa beauté. Enfin les monuments de la Renaissance ne manquent pas non plus dans nos envi

rons.

M. l'abbé Boitel dit qu'il existe dans notre pays peu d'édifices antérieurs au x1" siècle, qu'en fait de monuments de ce genre il ne pourrait guère citer que la crypte de Baye, et encore cette crypte ne remonte-t-elle pas tout entière à une époque aussi reculée. Il ajoute qu'il a l'intention de décrire successivement toutes nos vieilles églises dans la Champagne monumentale, et il espère que MM. les archéologues pourront trouver là des renseignements précieux.

M. l'abbé Lucot reconnaît qu'il est extrêmement difficile de déterminer l'âge des monuments en général, lorsque ceux-ci sont antérieurs au xre siècle; la difficulté est cependant moindre pour les églises que pour les autres édifices des actes authentiques contiennent la date de consécration des plus importantes, et généralement on peut s'aider de cette date pour fixer l'époque de leur construction.

« PreviousContinue »