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A-t-on découvert de nouveaux éléments matériels ou historiques qui puissent servir à déterminer le lieu où se donna la bataille de 451, dans laquelle Attila fut vaincu?

M. Julien Gréau signale un manuscrit découvert à Copenhague, il y a environ deux ans, œuvre d'un continuateur de Prosper d'Aquitaine ou de quelque autre écrivain contemporain, dans lequel se trouvent un nombre de renseignements.

M. Nicaise, de son côté, dit que M. Nétaudin, dans son Étude sur la Cheppe et ses environs, a écrit une notice sur le mont Piémont; les recherches faites sur cet emplacement ont fait découvrir une magnifique sépulture renfermant tous les attributs de la richesse et du commandement. Autour de cette sépulture royale, se trouvaient disposées d'autres sépultures renfermant des armes et ornements moins riches, mais indiquant le grade élevé des inhumés; enfin en s'éloignant toujours du centre ou du grand chef, les sépultures des officiers inférieurs et autres guerriers. Mais il n'existe encore aucun élément assez sérieusement étudié pour faire la base d'un document historique.

M. Nicaise constate les immenses travaux qui ont été exécutés pour l'établissement du camp dit d'Attila, ce qui rend impossible la supposition d'un travail fait à la hâte et pour peu de temps. Dans sa pensée, ainsi que dans celle de plusieurs membres, ce n'est autre chose qu'un oppidum gaulois.

M. Counhaye, à l'appui de cette opinion, dit que toutes les médailles trouvées à l'intérieur du camp sont gauloises.

M. de Laurière présente deux statues trouvées sur l'emplacement du camp d'Attila.

L'une représente un Mercure dont l'origine romaine est indiscutable, l'autre un enfant d'une origine douteuse.

La séance est levée à 10 heures trois quarts.

2o SÉANCE DU MERCREDI 25 AOUT.

PRÉSIDENCE DE M. LE COMTE DE MELLET.

Siégent au bureau: MM. l'abbé Lécot, Barbat de Bignicourt, de Cessac et Buvigner.

M. Simon remplit les fonctions de secrétaire.

La parole est à M. Palustre pour rendre compte de la visite faite, dans la matinée, par les membres du Congrès à la cathédrale de Châlons.

Après avoir établi l'origine rhénane de l'édifice qui primitivement possédait un sanctuaire dépourvu de bascôtés, l'honorable membre se demande si les transepts allongés que nous remarquons encore, flanqués à l'Orient de deux chapelles carrées, de deux petits sacraires et de tours, ne devaient pas se répéter à l'autre extrémité, si en un mot la cathédrale de Châlons, bâtie dans le même esprit que celle de Verdun, au moins quant au plan des parties les plus rapprochées du sanctuaire, n'était pas destinée à avoir, dans la suite, une seconde abside oppo

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sée à la première et précédée par des transepts analogues à ceux que nous connaissons. Cette question a déjà été soulevée par M. Viollet-le-Duc, qui penche pour l'affirmative. Toutefois, dit-il avec raison, si la cathédrale de Châlons-sur-Marne rappelle, dans le plan de son chevet, celle de Verdun, qui est entièrement rhénane, les détails, le système de construction et l'ornementation se rapprochent de l'école de Reims. C'est là un monument exceptionnel, sorte de lien entre deux styles fort différents, mais qui se réduit à un seul exemple (1). »

L'influence de l'école de Reims se manifeste surtout, poursuit M. Palustre, dans l'ornementation du portail septentrional, qui heureusement est demeuré encore à l'abri de toute restauration. Certains détails sont évidemment empruntés à la grande cathédrale voisine et nous serions tenté de croire que le même architecte a travaillé aux deux monuments. Nous ne parlerons pas du portail méridional, reconstruit il y a une trentaine d'années; à tout prendre, nous aimerions mieux encore la grande façade occidentale, œuvre des premières années du XVIIe siècle, ainsi que les deux dernières travées de la nef. Mais, chose singulière, tandis que dans la façade en question l'architecte a franchement adopté le style alors pratiqué, dans la nef, il s'est efforcé de reproduire les formes en honneur trois siècles auparavant. Aussi, ce pastiche ne saurait-il tromper un œil exercé qui, dans les bases des colonnes, dans le galbe des chapiteaux, dans les ornements jetés autour des fenêtres, reconnaît facilement une main habituée à sculpter les lourdes décorations du temps de Louis XIII. Au reste, nulle part ailleurs, plus qu'à la cathédrale de Châlons, on n'a cherché à se faire imitateur.

(1) Dictionnaire raisonné, t. II, p. 353.

La nef entière, au premier abord, semble construite d'un seul jet, et il faut quelques moments de réflexion pour s'apercevoir que si le XIIIe siècle a élevé la plupart des hautes colonnes monocylindriques qui donnent à tout l'ensemble un aspect si majestueux, les XIV, XV et XVIe siècles ont successivement travaillé aux parties supérieures qui çà et là trahissent la main de leur auteur.

Au reste, sur ce point, on est généralement d'accord tandis que la construction des chapelles qui entourent le chœur a donné lieu, depuis quelques années surtout, à d'interminables discussions. Les uns, et M. Viollet-leDuc en tête, veulent reconnaître en elles une œuvre du XIVe siècle (1), les autres tiennent absolument à en faire honneur au règne de Louis XIV, comme s'il était admissible que le mème architecte ait pu construire les chapelles dont nous parlons en style ogival secondaire, tandis qu'il adoptait franchement dans le collatéral les données en vigueur vers 1670. N'est-il pas plus vraisemblable, à tous égards, qu'à l'époque où la nef fut allongée de deux travées, on ait songé à donner à la partie orientale de l'édifice une importance en rapport avec le reste du monument? Seulement comme le chœur était alors fermé, que, de longues baies à lancettes, décorées de magnifiques vitraux se voyaient à la place des hautes arcades ouvertes aujourd'hui sur le collatéral, on pouvait attendre facilement que les travaux poursuivis à l'extérieur fussent entièrement achevés, pour établir une communication entre les constructions nouvelles et celles qui existaient depuis quatre siècles environ. Dans cet état de choses les chapelles furent élevées comme un monument parfaitement isolé et le besoin d'argent se faisant

(4) Dictionnaire raisonné, t. V, p. 182.

sentir on n'hésita pas à suspendre les travaux pendant un demi-siècle tout au moins. Il fallut une véritable catastrophe, la chute de la belle flèche élevée sur la tour nord par l'évêque Gilles de Luxembourg et l'incendie du chœur de la cathédrale, pour ramener les esprits vers l'exécution. du projet indiqué. C'était le moment ou jamais d'opérer la jonction voulue, aussi se mit-on rapidement à l'œuvre, et tout à la fois on substitua au mur qui pourtournait le sanctuaire de hautes colonnes monocylindriques, et on jeta sur le collatéral tracé d'avance la singulière voûte qu'admiraient peut-être les contemporains du grand roi, mais qui ne saurait obtenir nos suffrages. Les temps n'étaient plus les mêmes qu'à l'aurore du xvIIe siècle, et on eût frémi à l'idée seule de reproduire des formes réputées barbares par les architectes et les littérateurs. On aima mieux faire de la fantaisie et construire à grands frais ce que nous voyons.

En résumé, les chapelles absidales de la cathédrale de Châlons-sur-Marne ont été construites sous Louis XIII, dans les premières années du XVIIe siècle, mais en style ogival secondaire, par les mêmes architectes qui ont élevé les deux dernières travées de la nef. Quant au collatéral, il est d'un demi-siècle plus jeune environ et ne saurait être antérieur à la catastrophe de 1668. De la sorte se trouve expliquée la différence de styles que l'on remarque dans cette partie de l'édifice, différence qui ne nous semble pas avoir assez vivement frappé ceux qui se sont occupés jusqu'ici de la cathédrale de Châlons (1).

(4) M. Palustre n'a résumé ici qu'une partie des arguments qu'il compte faire valoir en faveur de sa thèse. Mais, en attendant que le travail considérable qu'il prépare sur les chapelles absidales de la cathédrale de Châlons ait vu le jour, il sent le besoin

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