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être était-elle encore plus répandue que ne le pense l'auteur. Ainsi, il ne cite pas le Berry au nombre des provinces envahies. Or, près d'Issoudun, par exemple, existait une maladrerie, qui n'était pas un hôtel-Dieu dans le sens général du mot, mais probablement un asile de lépreux. SaintLadre est situé aux portes de la ville, et saint Roch y est toujours en grande vénération.

La deuxième partie du livre de M. de Rochas est consacrée aux Bohémiens, qu'il a eu occasion d'étudier dans le pays Basque, le Roussillon et l'Espagne. Les Bohémiens n'ont rien de commun avec les Cagots. Ceux-ci, séquestrés par mesure d'hygiène ou par préjugé, ont été les victimes de la société au sein de laquelle ils commencent seulement à rentrer aujourd'hui. Les autres, étrangers par les mœurs et par le langage, sont des déclassés qui ont été mis au ban de la société et qui, jusqu'à un certain point, en sont restés les ennemis. M. de Rochas pense que les Bohémiens sont sortis de l'Hindoustan longtemps après la conquête aryane, puisqu'ils parlent un dialecte néo-indien dérivé du sanscrit. Il termine son ouvrage en donnant un vocabulaire comparatif gitano et tsigane qui établit la communauté d'origine des Bohémiens espagnols et des Bohémiens allemands. Ludovic MARTINET.

Essai sur la signification du cæcum, par M. le docteur Louis Bureau
(Thèse inaug., Paris, 1877).

Le cæcum, cette partie du gros intestin, renflée en forme de bourse, dans laquelle se déverse le contenu de l'intestin grêle, est, chez l'homme, un organe rudimentaire; il est construit sur le type du gros intestin; on n'y trouve, en effet, ni valvules conniventes, ni villosités, ni plaques de Peyer, ni épithélium à plateau.

Chez les mammifères, la continuation directe de l'intestin grêle avec le gros intestin, avec absence de cæcum, est une disposition fort rare, et l'on ne peut en citer qu'un petit nombre d'exemples. Dans ce cas sont, parmi les carnassiers : les plantigrades (ours, ratons, coatis, gloutons, blaireaux, etc); les marsupiaux carnivores (thylacine, dasyure, phascogale); tous les cheiroptères; presque tous les insectivores (hérisson, taupe); un rongeur, le loir. Parmi les édentés : les paresseux et la plupart des ratons; quelques cétacés, tels que le marsouin, le dauphin, le narval, l'hypéroodon.

Chez les singes anthropomorphes, la disposition du cæcum est la même que chez l'homme, et il existe un appendice cæcal; chez les autres quadrumanes il n'y a pas d'appendice vermiforme. Le cæcum est, en général, gros et court chez les singes de l'ancien continent, tandis qu'il est plus long et plus grêle chez ceux du nouveau continent.

Le cæcum des animaux carnassiers est rudimentaire et construit sur le même type que celui de l'homme, tandis que chez les herbivores il acquiert une importance considérable. Il forme alors, non plus une simple dilatation du gros intestin, mais un vaste réservoir ne communiquant avec l'iléon et le côlon que par d'étroits orifices. Son volume occupe la majeure partie de la cavité abdominale, et sa capacité peut être plus de deux fois supérieure à celle de l'estomac. Sa structure chez ces animaux n'est plus

celle du gros intestin; elle peut offrir, avec la structure de l'intestin grêle, la plus parfaite analogie. Chez le lapin, par exemple, on y voit des valvules analogues aux valvules conniventes, des villosités, des plaques de Peyer, un épithélium à plateau.

Le développement du cæcum et de l'appendice cæcal présente, chez les animaux carnassiers, non point une marche ascendante, mais une marche rétrograde, c'est-à-dire que ces organes, notablement développés au début de la vie, diminuent progressivement de volume pour devenir rudimentaires, ces organes ne remplissant plus alors de rôle physiologique. Chez les animanx herbivores, chez lesquels le cæcum doit servir de réservoir aux substances alimentaires, il en est tout autrement : loin de s'atrophier, le cœeum de ces animaux prend, pendant toute la période intra-utérine, un développement graduel. Il y a done une marche inverse dans le développement du cæcum des animaux carnassiers et des animaux herbivores.

Chez les oiseaux, le développement des cæcums est également parallèle au régime. Ces organes sont nuls ou rudimentaires chez les rapaces, tandis qu'ils acquièrent un développement prodigieux chez ceux qui, comme les gallinacés et certains palmipèdes, puisent leur nourriture dans le règne végétal. Les rapaces nocturnes forment une curieuse exception à la régle générale: ils possèdent des cæcums assez développés, mais il est important d'ajouter, comme l'a fait remarquer Cuvier, que cette disposition est en relation avec la brièveté de leur intestin.

Le troisième cæcum des oiseaux n'est pas un organe digestif; c'est un reste de la vie embryonnaire, le vestige du pédoncule de la vésicule ombilicale.

La consciencieuse monographie que nous venons d'analyser rapidement se termine par l'étude physiologique des fonctions du cæcum dans les divers groupes d'animaux, et l'auteur a fait à ce sujet de nombreuses expériences. Comme on devait le prévoir, l'absorption joue un rôle insignifiant au point de vue de la nutrition dans le cæcum des carnassiers, tandis qu'elle est d'une importance extrême dans le cæcum des herbivores.

Dr E. SAUVAGE.

REVUE DES JOURNAUX

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REVUE FRANÇAISE.

Bulletins de la Société d'anthropologie de Paris, année 1876.

Durant le cours de l'année qui vient de s'écouler, la laborieuse activite de la Société d'anthropologie ne s'est pas ralentie. Dans les divers ordres d'études que son vaste programme comprend, les travaux originaux, au contraire, ont abondé.

Depuis la discussion du sens à attacher à son titre même, jusqu'à la détermination du mécanisme qui préside aux réactions réciproques de la force sur la matière, et à la définition du mouvement, il n'est guère de sujet qui n'ait été l'occasion de considérations neuves, de discussions animées ou d'investigations dignes d'intérêt.

Nous allons essayer d'en donner l'aperçu.

Quel sens propre convient-il d'attribuer au mot ethnologie, et, par la même occasion, à ceux d'anthropologie et d'ethnographie? Telle est la question que M. Topinard a cru devoir se poser.

L'histoire de l'homme, pour lui, se partage en deux branches. La première s'occupe du groupe humain et des races humaines à un point de vue exclusivement zoologique; elle s'appuie immédiatement sur les caractères physiques, physiologiques et pathologiques, et se borne à emprunter à la seconde branche des renseignements. C'est l'anthropologie proprement dite, c'est-à-dire l'histoire naturelle de l'homme comparé avec les animaux et des espèces ou variétés humaines comparées entre elles. De là deux divisions, l'une s'attachant au groupe en totalité, l'autre à ses divisions naturelles et primordiales.

La seconde s'occupe des peuples, tels que les événements les ont formés dans le présent et dans le passé, de leur histoire, de leur langue, de leurs mœurs, de leurs ressemblances et différences. Examine-t-on ces divers points de vue en général, cherche-t-on à les grouper par familles, en se basant sur la linguistique surtout, à retracer les relations qu'ils ont eues, à suivre l'évolution de leurs institutions, de leurs usages, on fait de l'ethnologie. Prend-on chaque peuple à part, on fait de l'ethnographie.

L'étymologie répond à cette manière de voir; ovo veut dire peuple, et si M. Edwards a créé ce mot dans le sens de science des races, c'est qu'il n'avait en vue que des races, comme les Kymris, les Celtes, qui, à proprement parler, ne sont que des peuples de l'histoire.

Être ethnologiste et être anthropologiste n'est donc nullement synonyme. Les deux se prêtent secours, mais ont chacun leur domaine propre. Cette communication de M. Topinard a soulevé dans le sein de la Société

d'anthropologie une discussion à laquelle prirent part MM. Broca, Dally, de Quatrefages, Hovelacque, Geniller, Bataillard, Bertillon, Gaussin, Lagneau, Coudereau et Mme Clémence Royer.

Pour la résumer en peu de mots, disons que les idées qui ont paru prévaloir sur la signification rigoureusement scientifique des trois termes en question sont celles qui furent développées par M. Broca. L'anthropologie est l'histoire naturelle de l'homme. Elle est fondée sur la connaissance des caractères morphologiques et anatomiques, de même que sur les manifestations fonctionnelles de toutes sortes de l'être humain. Histoire naturelle de l'homme et anthropologie sont synonymes. « Le titre d'anthropologie est préférable, parce que l'étude du groupe humain n'exige pas seulement l'emploi des procédés de recherche usités par les naturalistes ; elle exige, en outre, des informations d'une tout autre nature empruntées à l'histoire, à l'archéologie, à la linguistique, à la mythologie, à la psychologie, etc., et elle acquiert par là une extension dont le titre d'histoire naturelle de l'homme ne donnerait peut-être pas une idée suffisante. Mais, en fait, l'anthropologie est une science naturelle. C'est la partie de la zoologie qui concerne le genre homo. »

Générale, elle envisage le genre humain dans son entier et établit entre les autres groupes de l'animalité et le sien un parallèle méthodique. L'anthropologie zoologique n'en est qu'un chapitre, celui qui concerne la comparaison de l'homme avec les animaux.

Spéciale, elle a trait aux variétés connues sous le nom de races humaines et constitue cette branche de l'anthropologie à laquelle la désignation d'ethnologie, du radical evo; exprimant l'idée de race et de la désinence logic exprimant l'idée de science, peut être affectée logiquement.

Quant à l'ethnographie, indissolublement liée à l'ethnologie, elle lui fournit ses matériaux, mais elle n'appartient qu'indirectement à la famille des sciences naturelles. Elle se propose l'étude des groupes artificiels, accidentels, passagers, que forment et que rompent les nécessités sociales et politiques, et qui, devant l'histoire, constituent les peuples. Les connaissances ethnographiques ne sauraient d'autre part être exclues du domaine anthropologique, car, pour parvenir à la science des races, c'est de la science des peuples qu'il faut procéder.

Cependant, si l'ethnographie, ainsi que le fit remarquer M. Hovelacque, est la description particulière des populations, l'ethnologie en est l'étude beaucoup plus générale. Ces deux sciences sont distinctes dans une certaine mesure, mais les ethnologues doivent être familiarisés avec la première s'ils veulent donner à leurs recherches générales un solide fondement.

Dans l'exposé d'une Méthode de biologie humaine appliquée à l'étude du systéme osseux, et qu'il propose d'appliquer également aux recherches anthropologiques, M. Delaunay s'est évertué à mettre en évidence le fait suivant: Tout, en anatomie, en physiologie et en pathologie, est en raison directe ou en raison inverse de la nutrition et de l'évolution.

Les recherches du genre de celles auxquelles M. Delaunay s'est livré ont un écueil: la tendance parfois trop facile à rattacher aux faits constatés des considérations étrangères sans lien direct d'affinité. Elles ont un

incontestable avantage, celui d'évoquer, en vue d'en tirer toutes les applications possibles, un principe général d'investigation.

Considérations sur la forme du crâne au moment de la naissance et pendant la première semaine qui suit l'accouchement. Cette question, déjà soulevée dans le sein de la Société, en 1866, par M. Shaaffhausen, et en 1870 par M. Le Courtois, a été reprise pendant le cours de l'année 1876 par M. Budin, ancien interne de la Maternité.

Les mensurations ont été prises à l'aide d'un compas d'épaisseur trèsprécis, fabriqué ad hoc, et de lames de plomb très-souples, qui ont permis à l'auteur d'obtenir les tracés des différentes têtes sur lesquelles a porté

son examen.

Les recherches de M. Budin l'ont conduit aux conclusions que voici : Si l'on mesure les diamètres antéro-postérieurs après l'accouchement, on peut trouver diamètre occipito-mentonnier, 12,0; occipito-frontal, 11,0; sous-occipito-bregmatique, 9,0; sus-occipito-mentonnier, 13,5. Vingt-quatre ou quarante heures plus tard, la même tête donnerait : diamètre occipitomentonnier, 12,5; occipito-frontal, 11,5; sous-occipito-bregmatique, 9,5; sus-occipito-mentonnier, 13,0. Donc trois des diamètres crâniens augmentent dans les jours qui suivent la naissance; le quatrième diminue, mais ce quatrième diamètre (sus-occipito-mentonnier) reste le diamètre maximum. Lorsque, au lieu d'être fléchie et de présenter le sommet, la tête est défléchie et présente la face, le crâne subit encore, pendant l'accouchement, des déformations; mais ces déformations diffèrent totalement des précédentes. En pareil cas la tête se trouve aplatie verticalement de haut en bas. La mensuration des divers diamètres peut donner alors les résultats comparatifs suivants : diamètre occipito-mentonnier, 13,0; occipito-frontal, 12,0; sous-occipito-bregmatique, 9,0; sus-occipito-mentonnier, ou diamètre maximum, 13,2. Quarante-huit heures après, sur la même tête, on trouverait: diamètre occipito-mentonnier, 12,5; occipitofrontal, 11,5; sous-occipito-bregmatique, 9,5; sus-occipito-mentonnier, 13,5. Donc, dans les présentations de la face, les diamètres occipito-mentonnier et occipito-frontal diminuent peu de jours après l'accouchement. Il est, en conséquence, plausible d'admettre que pendant le travail ils avaient augmenté.

Au point de vue anthropologique, il y a à inférer des recherches de M. Budin que les déformations subies par le vertex pendant le travail de la parturition répondent à un type générique constant.

Les mensurations crâniennes ont été, de la part de M. Topinard, l'objet de recherches réitérées. Son attention s'est portée en particulier sur les proportions de l'angle pariétal imaginé par M. de Quatrefages, selon la race, chez l'enfant, sur des crânes pathologiques et dans différentes espèces de singes anthropoïdes.

En voici les conclusions sommaires :

Cent vingt-quatre crânes répartis en onze séries de races distinctes ont été mesurés en prenant pour point de repère en haut le stéphanion, en bas le point le plus divergent des arcades zygomatiques.

La mensuration de l'angle pariétal, pratiquée suivant ce procédé, a donné sur :

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