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lange de substances calcaires. Les 946 espèces se distribuant en 581 genres, le rapport moyen des genres aux espèces est à peine comme 1 est à 2 1/2, ce qui suffirait seul pour dénoter une Flore assez pauvre. Il est probable que plusieurs genres et 150 espèces au moins viendront s'ajouter aux genres et espèces que mentionne le catalogue; mais, dans ce cas même, la Bretagne ne posséderait pas une Flore riche et variée. Sa position géographique est pourtant fort bonne, et son vaste territoire, bien arrosé, très-accidenté, offre beaucoup de prairies, de terres incultes, de marécages, quelques dunes étendues et d'assez belles forêts. Mais, comme le fait observer madame Cauvin, le calcaire ne s'y trouve qu'en petite quantité. Le catalogue en question autorise aussi à penser que la division de la France en quatre régions botaniques, suivant les quatre aires de vents, est bien loin d'avoir quelque exactitude. En effet, on s'aperçoit, en étudiant l'ouvrage, que la Bretagne, province éminemment occidentale, ne produit guère dans son intérieur que des plantes communes à presque toute la France, et que celles de son littoral se retrouvent sur les plages de la Manche et de la Méditerrannée, ou du moins dans les provinces méridionnales. Les quatre ou cinq espèces rares, qui paraissent propres à la Bretagne, ne suffisent pas pour donner à sa Flore un caractère particulier.

Madame CAUVIN, dont le nom est cité avec éloge par le savant auteur de la Flore de la Sarthe et de la Mayenne, a le grand mérite d'indiquer avec exactitude les lieux où elle a recueilli ses plantes et la nature du sol qui les nourrissait. Elle entre quelquefois dans des détails très-intéressants: nous avons remarqué sa note sur la marche ou la dissémination du diplotaxis tenuifolia en France, ses observations sur les Primevères et sur quelques variétés de la Violette tricolore.

C'est avec doute, que madame Cauvin mentionne, auprès de l'Ajonc d'Europe, si utile aux cultivateurs bretons, l'Ajonc de Provence, Ulex provincialis, Lois. Nous pouvons dire qu'il existe en Bretagne, surtout près des côtes, un Ajonc auquel la description donnée par M. Loiseleur semble assez convenir. Il se place entre l'Ajonc d'Europe et l'Ajonc nain, non seulement par ses caractères organiques, mais encore par l'époque de sa floraison. C'est un arbrisseau de deux à trois pieds à rameaux, un peu diffus, à feuilles lancéolées-linéaires, légèrement velues, à écailles calicinales exactement appliquées. Le calice est presque glabre, à divisions inférieures tridentées. Les fleurs sont d'un jaune assez pâle; les ailes

sont plus longues que la carène et l'étendard échancré est presque plane.

En résumé, l'ouvrage de madame Cauvin ne peut manquer d'être utile aux botanistes qui s'occupent de la géographie des plantes, et sera très-utile au botaniste breton qui voudra composer une Flore de son pays. La lecture que nous en avons faite, n'a pas été pour nous sans profit.

Le reste de la séance est occupé en entier par deux lectures, l'une d'un Mémoire de M. le docteur BRAVAIS, médecin de l'Hôtel-Dieu d'Annonay, sur l'Inflorescence des Graminées. Ce travail est accompagné d'une planche explicative, que l'auteur a fait graver exprès. C'est un traité complet sur la matière : plein de vues élevées et d'observations importantes pour la science, il est dans le même genre et d'un mérite égal à celui du même savant sur la Disposition géométrique des feuilles dans les végétaux, qui fut entendu avec tant d'intérêt au Congrès de Clermont et imprimé en entier dans le compte-rendu de ses travaux. Sur la proposition de M. le Président, la Section vote des remerciments à M. Bravais, et prie M. de Marseul de les lui transmettre. Son Mémoire est renvoyé à la commission de publication.

L'autre, d'un Mémoire de M. BLISSON, trésorier-archiviste du Congrès et entomologiste distingué de notre ville, intitulé: Essai sur une méthode pouvant faciliter la recherche et l'étude des larves des Lepidoptères. Ce travail plein de faits intéressants sur les mœurs des chenilles, leur genre de nourriture, de rapprochements neufs entre leurs formes, leurs couleurs et les plantes au dépens desquelles elles vivent, de considérations sur les moyens dont la nature les a douées pour échapper à leurs ennemis, a été entendu avec le plus grand plaisir par la Section, qui, sur la demande de M. le Président et de quelques autres membres, en a voté l'impression.

NOTA. Ces deux mémoires étant imprimés à la suite des procès-verbaux de la première section, nous nous dispensons d'en donner ici l'analyse.

M. HUNAULT DE LA PELTERIE regrette que la course géologique proposée par M. Triger dans la séance d'hier, n'ait pas eu lieu. Il attendait le résultat de l'examen qui devait en être l'objet, pour soumettre à la Section des observations sur la consolidation des sables tertiaires, question qui a été débattue dans la séance précédente. M. Triger répond qu'il s'est rendu à l'heure fixée, malgré le mauvais temps, lequel sans doute avait arrêté tous ceux qui s'étaient proposé de l'accompagner, et que n'ayant trouvé personne, la course n'a pas pu se faire ; il renouvelle sa proposition.

L'ordre du jour de la prochaine séance est 1° la lecture du mémoire de M. Le Gall sur la Botanique; 2° la discussion de la 21° question du programme sur les puits artésiens.

La séance est levée à neuf heures.

SÉANCE DU 20 SEPTEMBRE 1839.

Présidence de M. DUMAS.

Le procès-verbal de la 7° Séance est lu et adopté. M. HUNAULT DE LA PELTERIE, au nom de la commission chargée de faire une enquête sur les personnes les plus dignes, par leurs travaux scientifiques, de la médaille mise à la disposition de la Section, fait un rapport verbal à ce sujet. Il propose de la décerner à M. Triger, qui a bien mérité du pays pour les services rendus par lui aux études géologiques, et en particulier pour la Carte Géologique du département de

la Sarthe, qu'il publie en ce moment; il propose en outre d'accorder deux mentions honorables, l'une à M. Desportes, conservateur du Musée, pour sa Flore du Maine, si remarquable pour sa synonymie et l'indication précise des localités, et l'autre à Mme Cauvin, pour ses travaux et ses recherches sur la botanique. La Section adhère aux conclusions de M. le Rapporteur.

M. LE GALL lit la notice suivante, sur une Fumeterre dont quelques fleurs ont les deux pétales extérieurs éperonnés :

« On trouve en abondance aux environs de Rennes, et dans plusieurs parties de la Bretagne, une Fumeterre qui diffère de la Fumeterre officinale (Fumaria officinalis. L.), par sa tige plus flexible, longue de 2-3 pieds; par ses pétioles accrochants, faisant l'office de vrilles; par ses feuilles moins décomposées, à folioles ou segments ovales cunéiformes; par ses fleurs plus grandes, et par ses pédicelles généralement courbés vers la terre après la floraison.

Les parties de la fleur offrent aussi des caractères qui n'appartiennent pas à la Fumeterre officinale : les sépales se touchent par leurs bords inférieurs; le pétale éperonné est un peu redressé vers le haut; l'autre pétale externe, assez étroit et linéaire, ne reste pas connivent avec les pétales internes ou latéraux, mais retombe en formant un arc. Enfin le style, au lieu d'être coudé près du sommet, se trouve courbé dans sa moitié supérieure. Les fleurs sont ordinairement carnées, rarement rougeâtres, plus rarement encore d'un blanc tirant sur le jaune; une tache d'un pourpre noir se fait remarquer au sommet des pétales. La saveur de la plante est âcre, tandis que la saveur de la Fumeterre officinale est seulement amère. Notre plante croît parmi les moissons, dans les haies et contre les vieux murs.

S'il existe dans les provinces méridionnales de la France une Fumeterre principalement caractérisée par des sépales à bords entiers, par des fleurs jaunâtres, par des fruits parfaitement lisses, et si la dénomination de Fumeterre grimpante, Fumaria capreolata Lin. ne convient qu'à cette plante, la nôtre doit être rapportée à la Fumeterre intermédiaire, Fumaria media. Lois. ; mais, si l'espèce méridionale n'existe pas en réalité, si elle ne se trouve que dans les livres, notre plante doit être alors regardée comme la véritable Fumeterre grimpante du botaniste Suédois.

En cueillant quelques échantillons de cette Fumeterre, au printemps de l'année 1858, dans un champ dépendant de la Prévalaie près de Rennes, j'en pris un dont le premier épi, bien développé, présentait sept fleurs conformes au type ordinaire et sept autres qui s'éloignaient de ce type par une corolle à double éperon. Dans quatre de ces dernières fleurs, les deux pétales éperonnés étaient semblables; dans trois, ces pétales différaient, parceque l'un des éperons se trouvait moins développé. On distinguait à la base dé quelques uns des sépales, à leur point d'attache, un mamelon ou petite corne de couleur verte, et ces mêmes sépales avaient deux nervures rapprochées qui devenaient divergentes vers le sommet et se prolongeaient chacune en une petite pointe blanche. Les deux pétales éperonnés, droits dans leur partie supérieure, couvraient presqu'entièrement les deux pétales internes, avec lesquels ils restaient connivents. Le style n'était plus courbé.

La position des pétales par rapport à l'axe de l'épi se trouvait aussi changée : les pétales externes n'étaient plus, l'un supérieur, l'autre inférieur ; ils étaient latéraux, et, par conséquent, l'un des pétales internes se trouvait placé en haut, l'autre en bas. L'observation de ce fait confirme une opinion émise par M. Moquin-Tandon, dans son excellent Mémoire sur les irrégularités des corolles dans les dicotylédones. Ce botaniste pensait que le pétale éperonné des fumeterres ne devenait supérieur que par suite d'un défaut d'équilibre,occasionné par l'avortement de l'un des éperons. Comme dans le genre Diclytra, qui appartient à la famille des Fumariacées, les deux pétales extérieurs sont éperonnés, M. Moquin priait les botanistes d'examiner, à l'occasion, dans les espèces comprises sous ce genre, la position relative de la corolle. L'examen de cette position sur une Fumeterre, offrant à la fois des fleurs ordinaires et des fleurs à double éperon, lui semblera sans doute on ne peut plus satisfaisant.

En terminant cette notice, je fais observer qu'il n'existe aucune différence sensible entre les fruits produits par les fleurs à simple ou à double éperon, et que les androphores et les anthères sont tout-à-fait semblables dans ces deux sortes de fleurs. »

M. LE GALL a commnniqué aux membres de la Section l'échantillon de Fumeterre, objet de la notice cidessus. Malgré la dessication, la différence des fleurs. est très-remarquable.

L'ordre du jour est la discussion de la vingt-troisième question du programme: Est-il possible de faire des

«

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