MÉMOIRES

COMPLETS ET AUTHENTIQUES

Louis de Rouvroy

DU DUC

DE SAINT-SIMON

SUR LE SIÈCLE DE LOUIS XIV ET LA RÉGENCE,

PUBLIES SUR LE MANUSCRIT ORIGINAL ENTIÈREMENT ÉCRIT DE LA MAIN

AVERTISSEMENT

SUR CETTE NOUVELLE ÉDITION.

Les Mémoires du duc de Saint-Simon sont peutêtre le seul ouvrage qui, longtemps promis à la curiosité publique, ne soit point resté en dessous de ce qu'elle en espérait. Après une longue attente, ils ont fondé à leur auteur une des plus grandes renommées posthumes qui existent chez nous; ils lui ont assuré une place hors de ligne parmi nos historiens.

Avant ses intéressantes révélations, nous ne connaissions guère le siècle de Louis XIV que par les panégyriques de Voltaire, ou les niaises relations de Dangeau. Observateur fin et profond, et parfaitement placé pour exercer ses talents en ce genre, SaintSimon nous a fait voir le dessous des cartes du grand règne. Seul homme d'honneur admis ensuite dans

l'intimité du régent, il a, le premier, flétri cette scandaleuse époque de nos annales, en se bornant à raconter ce qu'il avait vu dans cette cour où les fêtes étaient des orgies, dans ces conseils où présidait Dubois.

Peu empressé de faire jouir la postérité du legs précieux qu'il lui laissait, Saint-Simon avait, par son testament, ajourné à un demi-siècle la publication de ses Mémoires. Le gouvernement d'alors, qui probablement ne l'eût jamais autorisée, du moins en entier, avait pris prétexte d'une mission diplomatique jadis remplie par le duc, pour ordonner le dépôt de son manuscrit aux archives des affaires étrangères du royaume. Ce ne fut qu'en 1788, et à la veille de la révolution, que l'abbé Soulavie obtint la permission d'en tirer quelques extraits, et d'en donner des fragments; un supplément, qu'il y ajouta en 1789, fut suivi plus tard de quelques autres publications également tronquées.

En 1829 seulement, le vif désir qu'elles avaient inspiré de connaître, dans son intégrité, cette œuvre si remarquable, fut satisfaite par une édition complète des Mémoires, en vingt volumes in-8°. Malgré son prix élevé, elle fut rapidement épuisée, et c'était un de ces ouvrages capitaux dont la reproduction n'est que l'accomplissement l'un vœu général.

L'édition nouvelle et véritablement complète sous