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sous le nom de puceron; nous indiquerons ici, pour mémoire seulement, le nom des principaux. Ce sont particulièrement:

Les altises, petits insectes que l'on appelle vulgairement puces de terre, en raison de la faculté qu'ils ont de sauter. On les rencontre dans nos jardins sur les jeunes plants de choux, de colza, de navets, du chanvre, qu'ils attaquent surtout àl'époque de la germination. Ils rongent les jeunes feuilles, les percent de part en part, et leur donnent l'apparence d'un crible.

Les cynips sont de très-petits insectes dont la piqûre produit des excroissances ou galles, particulièrement sur les chênes, les pins, les saules, les osiers, les ormes, les érables, les rosiers, etc., etc.

Les coccus (cochenilles), sont de petits insectes qui affectent diverses formes selon leur état; on les observe sur le pêcher, le figuier, et surtout sur la vigne en treille. Cet animal épuise l'arbre qui le porte, sar lequel il se tient comme immobile, et recouvert d'un duvet épais blanchâtre, qui l'a fait souvent confondre avec l'oïdium de la vigne.

III.

Quant aux moyens destructeurs et préservatifs des diverses calamités que nous avons sommairement énumérées, nous le disons à regret, ils sont très-faibles, et réellement insuffisants pour la plus grande partie des végétaux. La quantité de recettes qu'on a conseillées sont

pour la plupart ridicules et rarement praticables. En effet, comment détruire tous ces millions d'insectes qui s'attaquent aux forêts, aux vignes, aux champs de colza, de fèves, etc., etc. ? Comment atteindre surtout ceux qui se couvrent, s'entourent de diverses substances conservatrices qui leur sont propres, comme les pucerons du peuplier et du hêtre, le puceron lanigère, quelques cochenilles, ainsi que les larves des criocères, du lis, etc., etc., puisqu'ils sont naturellement préservés contre les matières corrosives qu'on a vainement tenté de leur appliquer? Les odeurs fortes ne font que les écarter, mais ne les détruisent pas. Le seul moyen à employer, et celui qui a le mieux réussi jusqu'à ce jour sur ce genre d'insectes, c'est de laver, secouer, brosser les branches attaquées; et encore il ne peut, par le fait, être employé que sur de petites quantités.

Les fumigations de tabac ne sont applicables que dans les serres. Quelques jardiniers coupent des branches, mêmes des arbres entiers, et les jettent au feu. Ce serait un moyen assurément infaillible s'il était toujours praticable et surtout convenablement pratiqué.

Pour détruire les insectes qui ravagent les choux, le colza, les navets, les fèves, etc., on met à profit leur sensibilité pour les substances alcalines et salines; on répand sur les jeunes plantes et sur le sol, du plâtre, de la cendre, de la suie, et quand le plant est grand on enlève les pieds qui ont été attaqués.

Les pucerons, ainsi ainsi que les autres petits insectes qui nuisent aux végétaux, ont de nombreux ennemis parmi les insectes eux-mêmes et surtout dans les oiseaux

entomovores (1). Il semble même que c'est en raison de leurs moyens de propagation que ces parasites ont plus d'ennemis et que la nature ne les multiplie que pour les faire servir de nourriture à d'autres animaux plus élevés dans l'échelle zoologique; mais leurs plus puissants destructeurs sont les variations atmosphériques, telles que les hivers froids secs, les printemps froids et humides et les chaleurs intenses et continues des étés.

Quoique l'on connaisse en grande partie, depuis plus d'un siècle, les mœurs des pucerons, il se trouve toujours des alarmistes tout prêts à crier fort quand ils voient ces insectes se multiplier, mais qui, lorsque le fléau est passé, ne songent pas même à s'assurer de la cause de sa disparition. Tel est malheureusement, en effet, le sentiment de justice individuelle d'une grande partie du genre humain croire plus vite au mal qu'au bien, ou plutôt redouter le mal outre mesure et ne tenir aucun compte au suprême ordonnateur de toutes choses du bien qu'il nous envoie.

Pour faire comprendre ma pensée, je consignerai ici deux faits dont nous avons été tous témoins Il y a trois et quatre ans nous fùmes infestés de chenilles, dont les myriades semblaient menacer toute la végétation de nos haies, de nos peupliers d'Italic, de nos arbres à fruits et surtout de nos bois; quelques petits végétaux de nos cultures étaient aussi pillés affreusement par elles. A l'aspect de tous ces produits altérés, et bien que comp

(4) Voir notre Mémoire sur la destruction des oiseaux entomovores, dans les Ephémérides de la Société d'Agriculture du département de l'Indre (Châteauroux, 1855).

tant sur un hiver rigoureux qui, à la vérité, n'eût fait qu'engourdir les chenilles écloses dans leurs enveloppes, sans détruire les œufs, le cultivateur craignait l'approche de la belle saison. Alors chacun de se débattre pour détruire l'affreux insecte; les gardes-champêtres les gendarmes de forcer partout les propriétaires à exécuter les règlements sur l'échenillage, règlements qui, sans doute, atténuent le mal sur quelques points, mais dont l'effet sur l'ensemble est presque nul. Eh bien! en 1853, quand l'avenir de toute la végétation semblait perdu, il survint au printemps, à l'époque même de l'éclosion des chenilles, des pluies froides qui les détruisirent, non pas complètement, mais au moins en assez grande quantité pour faire cesser le fléau dévastateur. Aussi vit-on, depuis ce temps, nos arbres à fruits, nos haies, nos peupliers reprendre de la force, de la vigueur, et leur végétation trop longtemps affaiblie se réparer promptement. En 1854, il en a été de même pour les pucerons et pour beaucoup d'autres insectes. Leur multiplicité avait jeté l'effroi parmi les cultivateurs; mais le long hiver froid et sec de 1855 en a anéanti une immense quantité; de plus le printemps suivant, froid et humide, n'ayant pas été favorable à leur développement et à leur multiplication, nous avons eu, cette année, fort peu à nous en plaindre durant l'été et l'automne; la maladie du miellat, qui fut si grande chez nous en 1806, 1807, 1824 et 1854, a été presque nulle en 1855.

A la vérité, la compensation paraîtrait faible si l'on considérait que les pluies froides des printemps 1853

1855 ont fait beaucoup de mal à nos céréales, à nos prairies, à nos herbages, à nos vignes, etc.; mais en détruisant les chenilles, les pucerons et quantité d'autres insectes, ou en lès empêchant de se multiplier, ces mêmes pluies ne nous ont-elles pas délivrés d'un mal qui semblait devoir s'être implanté chez nous pour plusieurs années ?

Dieu a bien fait ce qu'il a fait. Les lois, les règles générales de conservation qui régissent la nature, lois, règles dont l'action nous reste souvent cachée, mais qui arrêtent souvent le mal au moment où il nous paraît le plus imminent, le plus prêt à lasser notre courage, notre patience; ces lois, ces règles, disons-nous, Dieu les a établies pour maintenir dans la sphère d'aetion qui lui est propre chacun des êtres qu'il a créés. Il a imposé à chacun de ces êtres, pour qu'il le remplisse ici-bas, un rôle spécial dont aucun ne doit ni ne peut s'écarter, sous peine de voir bientôt détruite l'harmonie de l'univers.

Tours, imp. LADEVÈZE. — 1856.

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