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RAPPORT

PRÉSENTÉ

A LA SOCIÉTÉ D'AGRICULTURE

D'INDRE - ET - LOIRE,

AU NOM DE LA COMMISSION D'EXAMEN

POUR LES PRIMES DE 1852,

Par M. Minangoin, Rapporteur.

Membres de la Commission: MM. de VONNES, président, de SLADE, CHARLOT, RESSY, ALLUOME.

Messieurs

Les primes que vous offrez aux agriculteurs du département ont excité parmi eux une louable émulation, et de nombreux concurrents ont présenté des titres sérieux à l'examen de la Commission que vous avez chargée de la répartition de vos récompenses: après avoir comparé consciencieusement les mérites relatifs de chacun d'eux, en parcourant le département dans tous les sens, elle vient soumettre à votre approbation le résultat de son travail.

Votre commission craindrait d'abuser de vos instants, Messieurs, en vous racontant tout ce qu'elle a vu dans sa course, en déroulant devant vos yeux tout

ce que l'agriculture de la Touraine lui a offert d'intéressant elle se contentera de vous signaler les faits les plus saillants, ceux qui lui ont paru dignes de vos encouragements; son rapporteur la remercie de la marque d'honneur et de bienveillance qu'elle a bien voulu lui accorder, en le désignant pour être son organe; il réclame votre indulgence pour une tâche toute nouvelle pour lui.

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Le fait capital pour l'agriculture du département d'Indre-et-Loire, c'est la conquête qu'elle fait chaque année d'une portion des landes qui couvrent encore une partie de son territoire. Vous ne l'ignorez pas, Messieurs, à côté des cultures si riches, si variées, si intelligentes qui sont l'ornement des vallées de la Touraine, de vastes plateaux siliceux ou argilo-siliceux sont encore couverts de bruyères et d'ajones, n'offrant qu'un pâturage misérable à de chétifs animaux; le voyageur que sa course entraîne à quelques kilomètres des cours d'eau, se trouve tout-à-coup dans un désert et se demande s'il est bien toujours dans cette belle Touraine, ce Jardin de la France. Non, Messieurs, ces landes ne sont pas condamnées à former éternellement avec vos vallées un aussi triste contraste; déjà, sous vos inspirations, sur de grandes surfaces le soc de la charrue a déchiré leur sein et en a fait surgir des moissons abondantes ou d'épaisses forêls.

PRIX D'HONNEUR: M. de Gaulier de la Celle. - Un des

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premiers, le premier peut-être, M. de Gaulier de la Celle s'est mis résolument à l'œuvre pour féconder sur une vaste échelle, ce sol improductif: la découverte de l'effet merveilleux et encore peu expliqué (1) du noir animal, employé à faible dose, est venu en aide au courage et à la persévérance de ce cultivateur aussi hardi que distingué, et cette mise en valeur des landes, qui était autrefois une opération longue et dispendieuse, car elle exigeait pour une première récolte deux ans et un grand nombre de labours, ne demande plus maintenant qu'un seul labour et 3 à 4 hectolitres de noir animal, mélangé au grain et semé avec lui. Déjà sur une étendue de 216 hectares les bruyères ont disparu devant les efforts de M. de Gaulier, pour présenter à votre commission des céréales, du colza, des vesces fourragères dignes des terres les plus fertiles: 24 hectares moins favorables à la culture ont été semés en bois. — A côté d'un pain il nait un homme, a dit avec raison un célèbre économiste : Honneur donc à l'homme qui consacre sa fortune au défrichement des terres incultes, en augmentant les ressources de l'humanité; il s'associe au travail du Créateur; il répand autour de lui l'aisance et la prospérité. Notre société est fière de compter au nombre de ses membres l'agriculteur dont nous vous entretenons; de concert avec votre Commission, elle sera heureuse de lui offrir une médaille d'honneur.

Il y a peu d'années, Messieurs, à l'occasion de la cherté des grains de 1846, quelques économistes s'a

(1) M. Brame a fait sur ce sujet aux sociétés d'agriculture de Tours et de Lille, plusieurs communications, mais elles n'ont pas été livrées à l'impression.

larmaient de l'accroissement de la population, et leurs calculs semblaient nous annoncer, avec une précision toute mathématique, l'instant peu éloigné où le sol de notre patrie ne pourrait plus nourrir ses enfants; mais lorsqu'on voit, au simple appel de l'homme intelligent, les moissons abondantes remplacer des bruyères inutiles, il est permis de rassurer les populations et de leur dire que le sol de la France contient encore, dans ses neuf millions d'hectares de landes incultes, de nombreuses sources d'aliments, mines de richesses inexploitées et qui ne le cèdent peut-être en rien aux mines d'or de la Californie.

Les soixante mille hectares de landes du département d'Indre-et-Loire offrent sur celles de beaucoup d'autres départements l'avantage d'un climat salubre, de débouchés avantageux, d'un défrichement facile. A un moment où le gouvernement se préoccupe de féconder la Sologne et l'Algérie, où déjà plusieurs centaines d'enfants trouvés ont été dirigés sur l'Afrique, la Société d'agriculture ne pourrait-elle pas appeler l'attention des hommes qui veillent aux destinées du pays sur pos landes de Touraine, dont la mise en valeur offrirait des difficultés moins sérieuses et des chances plus certaines de succès.

1er PRIX. M. Moulin, à Ceré. Les travaux de M. Moulin, dans sa terre de Razay, commune de Ceré, nous ont paru dignes de fixer l'attention de la Société et de mériter votre premier prix de défrichement. Profitant de l'indication que lui donnait la nature par la végétation vigoureuse des bois de chène anciennement plantés, il a pensé que c'était surtout à des boi

sements qu'il devait s'appliquer, d'autant plus que dans le pays qu'il habite, le voisinage des vignobles du Cher donne au bois une valeur élevée.

Sur 28 hectares 63 ares, des semis de chênes, avec mélange de pin pour protéger les premiers dans leur jeunesse, promettent d'ombrager bientôt des collines naguère encore arides et dénudées: 25 hectares de terres plus convenables à la culture sont couvertes de récoltes satisfaisantes; faisant application de la loi d'Angeville pour obtenir le passage de l'eau sur des propriétés voisines, M. Moulin a pu convertir en prairie arrosée une lande de 1 hectare 15 ares, et votre commission a pensé que cet exemple de l'emploi des eaux pour les irrigations, si rare dans le département, méritait surtout vos suffrages et vos encouragements.

2o PRIX: M. François Simon, à Athée. — Enfin, au milieu de cultures pauvres et sur un sol ingrat, les blés obtenus par François Simon, au Brandon, contrastent d'une manière frappante avec ceux de ses voisins. Cultivateur plein d'activité et d'intelligence, François Simon a introduit sur les landes qu'il a défrichées, l'emploi des cendres lessivées àla dose de 18 hectolitres à l'hectare: elles paraissent produire sur le défrichement un effet qui ne le cèderait en rien à celui du noir animal.

Ce fait nous a paru d'autant plus digne de fixer l'attention de notre Société que le département d'Indre-etLoire se laisse enlever chaque année une quantité considérable de cendres qui vont féconder la Bretagne. Cette exportation de sels minéraux si utiles à la vie des plantes présente, pour l'avenir du département, un

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