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Quoique plusieurs antiquaires aient considéré les enceintes ou kromlechs comme des sépultures de famille, on les regarde généralement comme des temples. En effet, ces espèces de sanctuaires, qui écartaient la foule sans empêcher la vue de s'étendre au loin, étaient tout à fait appropriées aux idées des Gaulois, qui ne voulaient point enfermer la Divinité dans des murailles. Cette conjecture se trouve encore fortifiée par la présence de dolmens, et d'autres pierres qui paraissent avoir servi d'autels, placés au centre de plusieurs enceintes. Ces singuliers monuments seraient donc dans notre pays une modification des enceintes sacrées ou temenos, qui précèdent ou enveloppent complétement de leurs contours les monuments religieux de l'Orient (1). On croit aussi avec quelque fondement que les kromlechs n'avaient pas exclusivement une destination religieuse, et que, dans les grandes circonstances ils pouvaient servir pour les assemblées de la nation, soit pour délibérer sur les intérêts politiques, soit pour les élections, soit pour les inaugurations, soit encore pour y rendre solennellement la justice.

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Quelquefois les kromlechs, se repliant sur euxmêmes en spirales plus ou moins serrées dans leurs

(1) On peut voir de très-remarquables rapprochements faits entre les monuments druidiques et les premiers monuments religieux de l'Orient, dans deux art. de M. Th. Moore, publiés dans les annales de Philos. Chrét. Mai et juin 1840.

contours, forment alors des monuments complets, dont le centre ne peut être occupé par un autel, et dont le but est resté jusqu'à ce jour entièrement in

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Les pierres debout peuvent encore recevoir une autre disposition, non moins remarquable que les précédentes: groupées deux à deux, à des distances peu considérables, un troisième rocher, posé horizontalement, les reliait à leur sommet. De cet assemblage grossier résulte une sorte de porte rustique. On croit que c'était une espèce d'autel d'oblation. On en a trouvé plusieurs en Bretagne.

(1) Trilithe, étym. grec. Treis, trois, lithos, pierre. Lichaven, étym.

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Des pierres d'une masse énorme, posées en équilibre sur des bases solides, peuvent recevoir facilement un mouvement d'oscillation plus ou moins marqué; d'autres pierres tournent sur un pivot, c'est ce qu'on appelle pierres-branlantes, pierrestournantes et pierres-croulantes. On s'est toujours trouvé fortement embarrassé pour indiquer la destination de ces blocs singuliers. Les uns les ont regardés comme des pierres probatoires, dont on faisait usage pour prouver la culpabilité des accusés; on était convaincu du crime imputé lorsqu'on ne pouvait faire mouvoir la pierre-branlante. D'autres ont prétendu qu'ils servaient à transmettre la volonté des dieux par leur mouvement oscillatoire, ou bien encore qu'ils étaient employés à la divination, et que le nombre des oscillations indiquait la pro

tection ou la colère des dieux. Quelques auteurs ont imaginé que les druides pouvaient se servir de leur moyen, pour en imposer à la foule crédule et superstitieuse; enfin on a encore supposé que c'étaient des idoles.

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Nous passons maintenant à un ordre de monuments bien différents des premiers, et aussi beaucoup plus nombreux. Leur multiplicité porte à croire, avec fondement, que leur usage était plus commun et plus général. Les dolmens offrent un assemblage de pierres dont le nombre varie, mais dont la disposition est identique. Ce sont plusieurs

(1) Étym. Dol, table, maen, men, pierre.

pierres brutes verticalement implantées en terre qui en supportent une plus grande, également grossière, aplatie, en forme de table. On a généralement regardé les dolmens comme les autels druidiques, et on a observé, tant en France qu'en Angleterre, des espèces de cavités ou de rigoles peu profondes, crcusées sans art, communiquant souvent entre elles, et qu'on peut croire avoir été destinées à recevoir les libations ou le sang des victimes. La table de quelques dolmens se trouve perforée, de manière qu'en se plaçant dessous, on pouvait être arrosé de la liqueur des libations ou du sang des victimes : moyen de purification accrédité chez quelques peuples de l'antiquité, et qu'on a connu sous le nom de tauroboles et de crioboles.

Plusieurs auteurs n'ont pas voulu admettre l'opinion universellement reçue sur la destination des dolmens, et ont prétendu que c'étaient seulement. des monuments funéraires, des pierres tombales. En pratiquant des fouilles sous les dolmens, on a découvert, il est vrai, des ossements humains à demi consumés, mêlés avec des ossements d'animaux, et accompagnés d'instruments en silex et en bronze; mais ce fait n'est rien nfoins que décisif. Nous savons, par le récit de César dans ses Commentaires, que les sacrifices humains avaient lieu souvent dans les Gaules. Probablement qu'après l'effusion du sang, on jetait la victime sur un bûcher,

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