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tières abandonnés et tombant en ruine, le pape Pascal I fut obligé de suivre l'exemple de Paul I. Le 20 juillet 817, on transporta à l'église de Sainte-Praxède les corps de 2300 · martyrs. Après ces translations solennelles, dit le chevalier de Rossi, les catacombes de Rome furent considérées à Rome même comme ne renfermant plus des reliques de grands saints. Cependant Sergius II et Léon IV en firent retirer encore les corps de martyrs très illustres, gisant au milieu des cimetières en ruine, dirutis in coemeteriis jacentia. Après ces deux pontifes, il n'est plus question que très rarement de recherches de reliques faites dans les catacombes. C'est certainement à cette époque qu'il faut rapporter la translation au Panthéon de plusieurs charriots d'ossements de martyrs, translation qu'il ne faut pas confondre avec l'envoi de reliques (1), fait à cette église par Boniface IV, longtemps avant qu'on eut touché aux tombeaux des catacombes. " Roma sotterranea, I, p. 221.

A partir du milieu du neuvième siècle, la nécropole souterraine des chrétiens tombe dans un oubli si complet, qu'à peine en est-il encore fait mention dans les écrits des auteurs. ecclésiastiques ou de ceux qui nous ont laissé des descriptions de la Ville Eternelle.

III. Le commencement de la période des explorations

(1) Aux premiers siècles de l'Eglise, on distinguait entre le corps et les reliques d'un saint. Par reliques on entendait surtout les brandea, les huiles prises dans les lampes brûlant devant les corps des saints, les vêtements et autres objets ayant été à leur usage. Les brandea étaient des morceaux d'étoffe qu'on avait appliqués sur les tombeaux des saints ou suspendus dans les lieux où reposaient leurs restes. Saint Grégoire le Grand établit clairement la signification du mot reliques à son époque dans une lettre adressée à l'impératrice Constantine: Cognoscat autem tranquillissima domina, dit-il, quia Romanis consuetudo non est, quando sanctorum reliquias dant, ut quidquam tangere praesumant de corpore; sed tantummodo in pixide brandeum mittitur, atque ad sacratissima corpora sanctorum ponitur. Quod levatum, in ecclesia, quae est dedicanda, debita cum veneratione reconditur. Et tantae per hoc ibidem virtutes fiunt, ac si illuc specialiter eorum corpora deferantur. Operum tom. II, p. 709. Voyez MURATORI, Anecdota ex Ambrosianae bibliothecae codicibus, II, pp. 195 et 599. Nous ferons remarquer que M. de Rossi, dans le passage cité, s'éloigne de l'opinion commune, qui attribue à Boniface IV la translation au Panthéon d'une grande quantité d'ossements de martyrs extraits des catacombes.

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scientifiques doit se placer en l'année 1578. Ce fut alors qu'un cimetière souterrain, découvert par le plus grand des hasards, attira l'attention de toute la ville de Rome à cause des peintures dont il était orné et des sarcophages qui y étaient déposés.

Nous n'ignorons pas que, dans le cours du quinzième et au commencement du seizième siècle, les catacombes ont été visitées par quelques personnes. Des inscriptions trouvées en plusieurs endroits sur les murailles attestent ce fait. Mais il est à remarquer qu'un sentiment de dévotion, ou peut-être même la seule curiosité, et non le goût de l'étude ou des antiquités chrétiennes, donna lieu à ces visites.

Le 31 mai 1578, des ouvriers occupés à extraire de la pouzzolane dans une vigne située sur la droite de la voie Salaria, à deux milles environ de la ville de Rome, mirent à découvert une ouverture qui aboutissait à un cimetière chrétien décoré de peintures, de sarcophages et d'inscriptions. La nouvelle de cette découverte imprévue se répandit aussitôt par toute la ville, et des personnes de tout rang accoururent pour admirer cette merveille, cette cité souterraine. Ce fut ce jour-là, dit M. de Rossi, que naquit la science et le nom de Rome souterraine. "

Dès ce moment il y eut des savants et des artistes qui se mirent à copier et à réunir les peintures des catacombes. Le premier qui se livra à ce genre de travail fut Ciacconius, de l'ordre de Saint-Dominique. Il forma un musée de fossiles, de marbres et de bronzes antiques, et réunit, dans un album, les dessins d'un grand nombre de monuments chrétiens et de peintures des catacombes.

Vers la même époque vint à Rome un gentilhomme de Louvain, nommé Philippe Van Winghe, neveu de l'antiquaire Antoine Morillon. Mis en rapport avec Ciacconius, il se lia bientôt d'amitié avec lui. Après avoir vu les dessins faits sous la direction du religieux dominicain, il se mit à parcourir les catacombes. Il reconnut aussitôt que le dessinateur de Ciacconius avait manqué de fidélité; c'est ce qui le décida à faire lui-même des copies plus exactes des sarcophages et des peintures murales. Il s'appliqua à rechercher

la signification symbolique des scènes représentées communément sur les parois des cimetières chrétiens, lorsqu'il fut enlevé subitement à la fleur de l'âge, se trouvant à Florence pour y faire des recherches (1).

En même temps que Van Winghe, se trouvait à Rome un autre Belge, appelé Jean L'Heureux, et plus connu sous le nom de Macarius. Né à Gravelines, en Artois, qui, à cette époque, faisait partie de la Belgique, il acheva ses études à l'université de Louvain et devint plus tard chanoine d'Aire, en France. Pendant un séjour de vingt ans qu'il fit à Rome, il s'adonna avec une véritable passion à l'étude des antiquités des premiers siècles chrétiens et composa sur cette matière. l'ouvrage intitulé: Hagioglypta sive picturae et sculpturae sacrae antiquiores praesertim quae Romae reperiuntur, explicatae a Joanne L'Heureux (Macario) (2).

(1) Les manuscrits de Van Winghe ont été vus et consultés à Rome par L'Heureux et par Bosio. En 1622, ils se trouvaient à Tournai entre les mains des frères Antoine et Jérôme Van Winghe. Rosweydus les mit à profit pour les notes dont il enrichit l'édition des œuvres de saint Paulin de Nole. Depuis lors on a perdu les traces de la collection principale formée par le jeune Louvaniste. Il ne nous est parvenu de ses écrits qu'un recueil d'inscriptions, conservé à la Bibliothèque royale de Bruxelles, section des manuscrits, nos 17872-17873, qui porte le titre suivant : Inscriptiones sacrae et prophanae collectae Romae et in aliis urbibus a Philippo de Winghe, Lovaniensi, Antonii Morillonii viri doctissimi e sorore nepotis, qui, dum totam lustrat Italiam, in ipso juventutis flore Florentiae occubuit, anno 1592.

(2) Ce savant travail, prêt à être mis sous presse, ne vit cependant pas le jour du vivant de son auteur. A sa mort, arrivée en 1614, L'Heureux légua ses manuscrits au collége des Trois-Langues, à Louvain. Miraeus, dans son Codex regularum et constitutionum clericalium (part. II, p.97), nous apprend qu'en 1638, l'imprimerie des Plantin se proposait de publier les Hagioglypta; mais rien ne fut fait. Le manuscrit passa de la bibliothèque du college des Trois-Langues dans celle des Bollandistes, où il se trouvait encore en 1825, au moment de la vente publique de ce riche dépôt littéraire. Il fut acquis par M. Lammens; celui-ci le céda plus tard à M. Le Glay, le savant archiviste de Lille, qui, en 1852, en publia la préface dans ses Nouveaux Analectes. En 1855, le comte de l'Escalopier, pressé par les instances du chevalier de Rossi, acheta à M. Le Glay le précieux manuscrit. Le P. Garrucci, ayant appris que l'ouvrage de L'Heureux se trouvait à Paris, s'adressa au comte et lui exprima le désir de pouvoir publier l'intéressant mémoire. L'autorisation demandée fut accordée, et les Hagioglypta, approuvés pour l'impression depuis plus de 250 ans, furent confiés aux presses de Firmin Didot et virent le jour en 1856, enrichis d'une préface et de notes dues aux PP. Garrucci, Cahier et Martin.

A L'Heureux revient la gloire d'avoir le premier tenté et consigné dans ses écrits l'explication des monuments figurés de l'antiquité chrétienne. Son ouvrage est des plus remarquables et renferme une foule d'explications et de renseignements dont nous pouvons, même après les immenses progrès qu'a faits la science archéologique, tirer un grand profit pour nos études.

Bosio, surnommé à juste titre le Christophe Colomb de Rome souterraine, vivait en même temps que L'Heureux; ils étaient liés par une étroite amitié, fondée sur la conformité des goûts et la poursuite du même but. Bosio consacra trente-cinq ans de sa vie et des sommes considérables à fouiller les catacombes dans tous les sens. Au moment où il commença ses explorations, à peine quatre ou cinq cimetières étaient connus en partie; il en découvrit environ trente, parmi lesquels il s'en trouvait de très vastes. Il les parcourut et se mit à les étudier, passant parfois des jours et des nuits entières sous terre. Aussi fit-il une abondante moisson de documents, parmi lesquels les copies des peintures et des inscriptions tiennent, sans contredit, le premier rang. Mais ce ne sont pas les seuls mérites de Bosio. Les recherches qu'il fit dans les ouvrages des anciens sur les antiquités chrétiennes sont tout aussi remarquables que ses découvertes dans les catacombes.

Ce fut avec ces matériaux qu'il entreprit le grand travail qui renferme la description de tous les hypogées connus de son temps sous le sol de la campagne romaine. Ce monument incomparable, qui sera toujours une des mines les plus riches pour l'étude des antiquités chrétiennes, ne fut publié que cinq ans après la mort de Bosio († 1629) sous le titre de Roma sotterranea (1). Les exemplaires de ce livre furent recherchés avec tant d'avidité qu'on songea bientôt à en . donner une traduction latine. Severano, qui avait surveillé

(1) Le frontispice de la Roma sotterranea de Bosio porte la date 1632. Cependant un bref du Souverain Pontife du 6 octobre 1634, placé à la fin de la table des chapitres, prouve que l'impression ne fut pas terminée avant cette époque.

l'édition de l'ouvrage posthume de Bosio, en fit une version très fidèle, qui cependant n'a jamais vu le jour. En 1651 parut à Rome, en 2 volumes in-folio, une traduction due à Paul Aringhi, intitulée : Roma subterranea novissima post Antonium Bosium et Joannem Severanum. Bien que ce titre semble promettre une édition revue et augmentée, la publication d'Aringhi n'est, en aucune façon, préférable à l'œuvre originale de Bosio.

Voici rangés par ordre chronologique les principaux ouvrages publiés sur les catacombes depuis l'apparition de la Roma sotterranea d'Aringhi jusqu'à nos jours. Nous nous contentons d'en transcrire les titres et d'indiquer, en peu de mots, le jugement qu'il faut porter sur leur valeur :

1o BOLDETTI, Osservazioni sopra i cimiteri de' SS. Martiri ed antichi cristiani. Roma, 1720, 3 tom., ordinairement reliés en un volume in-folio.

Fruit de plus de trente années d'études dans les cimetières chrétiens, le livre de Boldetti contient la description de plusieurs souterrains découverts depuis la publication de l'ouvrage de Bosio. Il est à regretter que l'auteur n'y ait pas mis un peu plus d'ordre et de soins. Boldetti publia ses Osservazioni pour répondre à l'accusation que quelques érudits faisaient peser sur les explorateurs des catacombes, de procéder sans discernement dans la reconnaissance des reliques des martyrs extraits des catacombes.

2o BOTTARI, Sculture e pitture sagre estratte dai cimiteri di Roma, pubblicate già dagli autori della Roma sotterranea ed ora nuovamente date in luce colle spiegazioni. Roma, 17371754, 3 vol. in-fol.

Ce savant commentaire sur les planches de Bosio, connu aussi sous le nom de Roma sotterranea, ne s'occupe que de l'interprétation des monuments figurés, tirés des catacombes de Rome. Les plans des différents cimetières sont accompagnés d'une explication générale; l'origine, la dénomination, la situation et l'histoire des différents hypogées sont entièrement passés sous silence. Enfin, de toutes les découvertes faites depuis le temps de Bosio, il n'en est pour ainsi dire aucune qui soit mentionnée dans l'ouvrage de Bottari.

3° MARCHI, SOC. JESU, Monumenti delle arti cristiane primitive nella metropoli del cristianesimo disegnati ed illustrati. I. Architectura della Roma sotterranea cristiana. Roma, 1844 et suiv., in-4°.

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