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de Saint-Calliste (Roma sotterranea, II, p. 297). Pour donner une idée claire et précise de ces basiliques souterraines, nous reproduisons, d'après le P. MARCHI (Monumenti primitive), et d'après PERRET (Catacombes de Rome), le plan. et la coupe d'une de ces chapelles, découverte en 1842 au cimetière de Sainte-Agnès, et qui, selon toutes les probabilités, est antérieure au IIIe siècle.

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Plan d'une basilique souterraine, au cimetière de Sainte-Agnès.

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On arrive à la chapelle par deux galeries I et G. Ces deux entrées rappellent la discipline de l'Eglise touchant la séparation des sexes. L'ensemble de l'oratoire se divise en quatre

parties principales : le presbytère K, la salle J destinée aux hommes, la salle O destinée aux femmes, et enfin la salle H.

Le presbytère K était exclusivement reservé aux membres du clergé. Au centre s'élève, taillé dans le tuf de la paroi, le siége L, qui servait au pontife. De chaque côté du presbytère, des bancs M, également taillés dans le tuf (dans l'intérieur desquels on a pratiqué des loculi b pour la sépulture d'enfants) sont adossés aux parois et destinés aux assistants du pontife. L'autel se plaçait au milieu. Le presbytère contient trois arcosolia a; il est séparé de la salle J par deux colonnes c sculptées dans le tuf et revêtues de stuc.

La salle Jest divisée en deux parties égales par deux piliers supportant un arc doubleau; chacune de ces parties renferme deux arcosolia a.

La salle O, qui contient quatre arcosolia a, est divisée en deux parties presque égales par deux colonnes adossées aux parois et surmontées d'un arc. On voit, à l'endroit P, des vestiges d'un pavement en marbre.

La salle H a deux arcosolia a. Elle est divisée en deux parties par la galerie IG. C'était une sorte de vestibule destiné sans doute aux catéchumènes et aux pénitents.

Au-dessus de la galerie, au point d'intersection N de la galerie GI et des entrées des salles J et O, s'ouvre un luminaire, luminare cryptae. On appelle ainsi l'ouverture verticale ou oblique, d'environ un mètre carré, pratiquée dans la voûte et donnant sur la campagne, ou plutôt dans les jardins et les vignes possédés par des chrétiens. Cette ouverture servait à faire pénétrer l'air et le jour jusque dans les galeries. A l'extérieur elle était entourée d'un petit mur qui empêchait l'eau de pluie d'y entraîner des alluvions. On ne peut mieux comparer ces luminaires qu'à nos cheminées. Lorsqu'ils traversent des couches de tuf granulaire ou lithoïde, ils sont sans revêtement, s'ils rencontrent des couches sablonneuses, leurs parois sont retenues par un ouvrage de maçonnerie. Voyez à la page 53 la figure représentant la coupe d'une catacombe, à la lettre b.

Les chambres sépulcrales éclairées par un luminaire s'ap

pelaient cubicula clara. Dans les endroits qui ne recevaient pas de jour, on se servait de petites lampes destinées à guider la marche des fidèles et à éclairer les cérémonies religieuses qui se pratiquaient dans ces souterrains.

3o La troisième destination des catacombes était de servir de retraite au souverain pontife, au clergé et aux fidèles dans les temps de persécution.

Saint Alexandre y trouva un asile au commencement du deuxième siècle. Vers l'an 220, saint Calliste séjourna quelque temps dans le cimetière qu'il avait fait restaurer, et qui aujourd'hui porte encore son nom. Saint Etienne et saint Sixte II subirent le martyre dans les catacombes, le premier en 257, le second l'année suivante. Saint Caius s'y tint caché pendant environ huit ans.

Qu'on nous permette, en terminant ce paragraphe, de mettre sous les yeux du lecteur la description que saint Jérôme, dans son Commentaire sur Ezechiel, nous a laissée des catacombes; elle est encore en tout point exacte de nos jours : "Lorsque jeune encore je me trouvais à Rome, pour m'y instruire aux belles-lettres, j'avais coutume, le dimanche, de parcourir, avec des condisciples de mon âge, les tombeaux des apôtres et des martyrs; et souvent je descendais dans les cryptes. Ces excavations sont creusées dans le sol à une profondeur considérable. A droite et à gauche, dans les murs, se trouvent les sépultures. L'obscurité est si épaisse qu'on croirait presque à la réalisation des paroles du prophète les vivants descendent dans l'enfer (1) (Ps. LIV, 16). Quelques rares rayons de lumière tombent de l'orifice supérieur et adoucissent un peu l'horreur de ces ténèbres; on s'imaginerait que c'est bien plutôt une simple ouverture qu'une fenêtre, qui livre passage au jour. On n'y peut d'ailleurs avancer qu'à petits pas. Une nuit profonde règne de toutes parts et fait songer au vers de Virgile:

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Horror ubique animos, simul ipsa silentia terrent. (Aen., II, 755).

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(1) Dans le langage des Livres saints le mot enfer, infernus et inferi, signifie le plus souvent tombeau. C'est en ce sens qu'il est employé dans l'endroit cité par saint Jérôme.

§ II.

ORIGINE DES CATACOMBES.

Dans tous les temps, la sépulture des chrétiens a été un acte religieux, accompagné des prières de l'Eglise. Mais c'est surtout dans la primitive Eglise que l'ensevelissement des corps des martyrs et des fidèles était considéré comme un des plus stricts devoirs que les vivants avaient à remplir envers leurs frères trépassés.

Du temps de saint Cyprien, les prêtres de Rome, s'adressant au clergé de Carthage, insistent sur cette obligation : Ceux qui sont chargés, écrivent-ils, d'ensevelir les martyrs et les fidèles manquent gravement, si par leur faute les corps des chrétiens viennent à étre privés de sépulture. Saint Ambroise enseigne qu'il est permis de briser, fondre et vendre les vases sacrés dans le but de subvenir à l'ensevelissement des restes mortels des fidèles. Pour procurer même aux plus pauvres une sépulture convenable, on avait formé des associations. dont les membres payaient chaque semaine leur obole; la somme recueillie était affectée à la célébration des funérailles de ceux qui manquaient de ressources.

Ce respect pour les morts était basé sur la foi vive du dogme de la résurrection de la chair; il avait pour motif, non pas une importance. exagérée que les fidèles auraient attachée aux restes mortels de leurs frères, mais la pensée que ces corps appartiennent à Dieu, et qu'un jour ils doivent être rendus à la vie, transformés, glorieux et immortels.

Les premiers chrétiens abhorraient la coutume des païens qui brûlaient les cadavres et les profanaient par des cérémonies superstitieuses. Dès qu'un chrétien avait rendu le dernier soupir, ses proches parents lui fermaient les yeux et la bouche. Ensuite on lavait le corps et, pour le préserver de la corruption, on l'oignait avec de la myrrhe et d'autres aromates. L'onction faite, on enveloppait le cadavre d'un linceul qui s'attachait avec des bandelettes, soit pour que les

aromates adhérassent plus parfaitement aux chairs, soit pour empêcher le contact de l'air extérieur avec le corps. Très souvent on étendait une couche de chaux sur toute la surface du corps. Cet enduit faisait autour du cadavre une sorte de cercueil artificiel qui empêchait l'odeur résultant de la putréfaction de s'échapper au dehors.

L'esprit de charité et d'union qui régnait parmi les premiers fidèles, et qui faisait qu'ils se considéraient tous comme frères en Jésus-Christ, les porta dès le principe à se créer des cimetières communs, entièrement distincts des cimetières païens.

C'est dans les honneurs rendus aux restes mortels des défunts, dans les sentiments de fraternité qui animaient les premiers chrétiens et dans le désir de soustraire les tombeaux aux regards et aux profanations des gentils, que nous trouvons la raison de l'existence des cimetières souterrains ou catacombes:

Si l'on excepte l'Afrique où, dès les premiers siècles, on trouve des areae ou sépultures chrétiennes à fleur de terre, tous les pays convertis au christianisme offrent des nécropoles creusées sous terre, qui portaient le nom de cryptae et quelquefois aussi celui d'arenaria ou arenariae. Il en existe encore aujourd'hui à Rome, à Naples, à Chiusi, à Milan et à Alexandrie d'Egypte (1). Il y en avait autrefois en Sicile, à Messine et à Syracuse; en Espagne, à Elvire, à Saragosse et à Séville; dans les Gaules, à Agaune, à Cologne et à Trèves.

Nous ne nous occuperons que des catacombes de Rome, parce qu'elles sont les principales, les mieux explorées et les plus illustres par les souvenirs historiques qui s'y rattachent. En effet, on peut les appeler sans exagération aucune le berceau du christianisme.

La première question qui se présente à notre examen est celle-ci Les catacombes de Rome sont-elles l'œuvre ex

(1) Voyez la description d'une catacombe découverte à Alexandrie, dans le Bulletino di archeologia cristiana, publié par le chev. DE ROSSI, 1865, pp. 57-64.

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