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dorique au-dessus d'un étage d'ordre ionique, corinthien ou composite; et si l'on emploie l'ionique et le corinthien, celui-ci est superposé au premier. Le colisée de Rome offre un exemple remarquable de cette ordonnance.

3o Dans les monuments anciens le fût des colonnes est le plus souvent taillé dans un seul bloc de pierre ou de marbre. Ces colonnes portent le nom de monolithes, c'est-à-dire composées d'une seule pierre (pos, seul, b, pierre), bien que le chapiteau et la base constituent des parties indépendantes. On trouve aussi des colonnes dont le fût est formé par deux, trois ou plusieurs blocs de pierre ou de marbre superposés. Les colonnes dont le fût est báti ou construit au moyen de moëllons de petite dimension et de briques, sont très rares; on en rencontre cependant dans les ruines de Pompéi. Ces colonnes bâties par assises étaient régulièrement revêtues de stuc. Les monuments construits dans le midi de l'Europe pendant l'époque de la Renaissance ont régulièrement des colonnes à fût monolithe; dans le nord, au contraire, parce que les matériaux de grande dimension y font défaut ou du moins ne peuvent s'obtenir qu'à grands frais, les fûts sont ordinairement bâtis avec du moëllon ou des briques, et recouverts de plâtrage pour masquer les joints. En Belgique, on ne trouve guère des colonnes monolithes qu'aux autels richement décorés de la période de la Renaissance.

4o Les architectes de la période de la Renaissance ont souvent fait usage de colonnes torses, c'est-à-dire dont le fût est contourné en forme de spirale. Ces fûts sont quelquefois ornés de feuillages rampant le long de la spirale. Rarement les fùts des colonnes des ordres classiques offrent des enlacements ou des bossages.

5o Les règles des ordres de l'architecture classique que nous venons d'exposer d'après les proportions et les données établies, au XVIe siècle, par Vignole, Palladio et autres, n'ont pas été observées dans les monuments anciens, grecs ou romains, d'une manière aussi servile que dans les édifices de l'époque de la Renaissance. On remarque, par exemple, dans le chapiteau corinthien de l'antiquité une très grande

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variété, qui cependant n'exclut pas l'observation des principes de l'ordre. Au contraire, les architectes modernes, dit M. De Caumont, en créant des types uniques sous la domination de chacun de ces ordres, en voulant tout ramener à ces types, se sont privés de combinaisons très élégantes, dont les Romains, qui n'étaient pas dénués de goût, avaient tiré un grand parti. Il est évident que les artistes romains voulaient la variété dans l'unité, tandis que l'école moderne a voulu l'invariabilité et, par suite, la monotonie dans l'unité des ordres. "

§ 3.

MATÉRIAUX DE CONSTRUCTION, APPAREILS DE MAÇONNERIE, ETC.

1. MATÉRIAUX. Les Grecs et les Romains se servaient de marbres, de pierres et de briques dans la construction de leurs édifices. Le marbre ne s'employait que pour l'ornementation des monuments, tels que les temples, les basiliques, les arcs de triomphe, etc.; les pierres et les briques étaient les matériaux ordinaires. On faisait usage de pierres de différentes dimensions, elles étaient tantôt grandes, tantôt petites; tantôt régulièrement taillées, tantôt irrégulières. Les briques des Grecs et des Romains diffèrent notablement des nôtres; elles ont ordinairement la forme carrée, et sont beaucoup plus grandes, et aussi beaucoup plus minces que celles dont on se sert de nos jours. Elles n'avaient guère que 4 1/2 centimètres d'épaisseur; leur longueur et leur largeur était de quatre ou cinq palmes (40 ou 50 centimètres environ); les premières portaient le nom de tetradoron (de tapes, quatre, et Sopor, palme), les dernières celui de pentadoron (de a, cinq, et dopov, palme) (1). On trouve aussi parfois des briques ayant la forme d'un rectangle ou d'un triangle. Les fabricants de briques avaient l'habitude de placer leur

Brique romaine.

(1) Voyez VITRUVE, De architectura, lib. II, cap. III.

nom ou empreinte sur la brique. Ce nom est souvent au génitif, tantôt précédé ou suivi des lettres OF, O (officina), MANU ou d'un simple M, pour signifier que la brique provient de l'officine ou fabrique de celui dont elle porte le nom. Lorsque le nom du fabricant se trouve au nominatif, on y ajoute quelquefois les lettres F ou FE, par abréviation pour fecit. Les briques cuites pour la construction des camps romains portent la marque de la légion. L'impression ou estampillage du nom était aussi en usage dans la fabrication des tuiles et des poteries. On a donné à ces marques le nom de sigles figulins (1). Le musée archéologique de Namur possède un nombre très considérable de tuiles, poteries et autres objets en terre cuite de la période gallo-romaine (2), portant les signatures des fabricants. Nous reproduisons ci-dessous, p. 32, fig, 1, une tuile romaine provenant des fouilles faites à Anthée (Namur) et portant le sigle HAMSIT.

Le mortier ou ciment des Romains était composé de chaux et de sable. A ce mélange on ajoutait ordinairement de la brique pilée ou des tuiles concassées en assez grande quantité. Aussi la présence de la brique pilée dans le mortier fournit-elle souvent à elle seule un argument décisif pour pouvoir attribuer une construction à la période romaine. On trouve cependant quelques rares monuments où le ciment n'offre pas ce mélange, par exemple, les restes de l'enceinte romaine de Tournai et de l'amphithéâtre de Trèves.

2. APPAREILS. On donne le nom d'appareils aux différents modes d'assemblage des matériaux employés dans la construction des murs des édifices.

Il existe un grand nombre d'appareils qu'il est essentiel de bien connaître; car la simple inspection de l'appareil

(1) Voyez sur les sigles figulins le mémoire de M. Schuermans, publié dans les Annales de l'Académie d'archéologie de Belgique, XXIII, pp. 5–293.

(2) La période gallo-romaine s'étend depuis l'occupation de la Gaule par les Romains, à la suite de la conquête de Jules César (58 ans environ avant l'ère chrétienne) jusqu'à l'invasion des barbares au ve siècle. Plusieurs villes furent bâties en France pendant cette période; la Belgique eut aussi quelques établissements importants. Voyez SCHAYES, Histoire de l'architecture, I, pp. 23-27.

fournit souvent à l'archéologue, sur l'âge auquel appartient un monument, des données qu'il chercherait vainement ailleurs.

Les appareils dont se servaient les Romains étaient beaucoup plus variés que les nôtres. Voici les principaux :

1° L'appareil irrégulier, appelé aussi blocage, consiste

Appareil irrégulier.

dans une construction faite avec des pierres de grosseurs et de configurations diverses, telles qu'on les extrait de la carrière, et posées en remplissage les unes à côté des autres, sans ordre ni rang d'assises. Ce mode

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de bâtir est le plus souvent employé pour les fondements et les parties inférieures des murs. Les Romains donnaient à cet appareil le nom d'opus incertum ou antiquum, et aussi celui de caementicia antiqua ou incerta.

2° L'appareil réticulé ou losangé, opus reticulatum, est celui dont les pierres, taillées en carrés, losanges ou polygones, sont disposées de manière à ce que les lignes de jointure imitent par leurs enlacements les mailles d'un réseau ou filet.

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Appareil réticulé.

3° L'appareil en épi, opus spicatum, qu'on appelle aussi appareil en aréte de poisson ou en feuille de fougère, se compose de pierres plates de dimensions égales, posées en biais les unes sur les autres, et laissant entre elles un angle plus ou moins ouvert. Ces pierres formant parement par leur

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Appareil en épi, en arête de poisson ou en feuille de fougère.

épaisseur simulent un épi, une arête de poisson ou une feuille de fougère.

4° L'appareil en remplissage, emplecton ou diamicton, est

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Emplecton.

brutes ou moël

lons noyés dans un bain de

chaux.

L'em

plecton diffère

We Will du diamictonen

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ce que ses parements étaient reliés, à intervalles réguliers, par de très grandes pierres, traversant le mur dans toute son épaisseur. Ces pierres a, appelées parpaings, en latin diatoni, étaient employées pour consolider la construction et en lier les parties.

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