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10. Le vase de sang. Parmi les signes certains du martyre le principal est sans contredit le vase de verre ou d'argile ayant servi à recueillir le sang du martyr et placé à l'intérieur du tombeau ou scellé à l'extérieur dans la paroi voisine. Ces vases ont différentes formes. En voici deux exemples:

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Fioles ayant servi à conserver le sang des martyrs.

Les premiers chrétiens recueillaient soigneusement le sang des martyrs soit avec des linges, soit avec des éponges, qu'on exprimait ensuite dans des vases 'destinés à être conservés dans l'endroit même où le corps était enseveli. Quelquefois les éponges et les linges imprégnés de sang ont été, après plusieurs siècles, retrouvés intacts dans les vases fixés aux tombeaux.

La présence de la fiole de sang est une preuve certaine que le chrétien, enseveli dans le tombeau auquel elle est fixée, a subi le martyre. C'est sur cette preuve qu'on se fonde dans la reconnaissance des corps des martyrs extraits des catacombes.

Par un décret du 10 avril 1668, la sacrée Congrégation des Indulgences et des Reliques déclara que la palme et la fiole teinte de sang sont des indices certains du martyre. La palme seule, comme nous l'avons dit, n'est pas un indice suffisant. Mais en est-il de même de la fiole? Les savants ne sont pas d'accord sur la réponse à donner à cette question. Quelques-uns évoquent presque entièrement

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que de

en doute la valeur de ce signe; d'autres, comme Mabillon, pensent que, dans le cas où il est bien constaté que les vases ont servi à renfermer, non pas des essences, de l'eau bénite ou autres choses semblables, mais du véritable sang, ils fournissent une preuve certaine du martyre; enfin, il en est qui disent que la présence du vase indique toujours la sépulture d'un martyr. Benoit XIV affirme " " son temps ceux qui présidaient aux fouilles des cimetières " se basaient, dans la récognition des corps des martyrs, " non sur la présence de la palme, mais uniquement sur celle " du vase teint de sang." Après Benoît XIV la même pratique a été constamment observée par les personnes chargées successivement par le Saint-Siége de présider aux exhumations des corps dans les catacombes.

La publication d'un traité intitulé: De phialis rubrica tis (1) donna occasion, en 1855, à une controverse assez animée sur la valeur des ampoules scellées dans les parois des tombeaux chrétiens des catacombes. Vivement ému par ces discussions, Sa Sainteté Pie IX chargea une commission spéciale de l'examen de cette controverse, qui est d'une si haute importance pour la reconnaissance des reliques des martyrs. Sur l'avis de cette commission, composée d'hommes versés dans les antiquités chrétiennes, la sacrée Congrégation des Rites publia, le 10 décembre 1863, un décret approuvé par le Souverain Pontife, où elle déclare que les fioles de verre ou les vases en terre, teints de sang, que l'on trouve dans les niches sépulcrales des catacombes, doivent étre regardées comme un signe de martyre.

11. Instruments et emblèmes de profession. Sur les épitaphes des païens on voit souvent figurer comme symboles les instruments de la profession du défunt. Les chrétiens des premiers siècles adoptèrent également cet usage. Ainsi, par exemple, un marteau, un ciseau et un coin indiquent la

(1) Cet opuscule, sorti de la plume d'un savant bollandiste, a été imprimé à Bruxelles en 1855. L'auteur ne nie pas que le vase de sang soit un indice certain du martyre, mais il s'attache à prouver qu'on trouve dans les catacombes un grand nombre de vases ayant servi à d'autres usages, et qu'il est difficile de ne pas les confondre avec les fioles ensanglantées.

sépulture d'un sculpteur; une pioche ou une lampe, celle d'un fossoyeur; des tablettes de cire, un style et un faisceau de roseaux (fig. 1), celle d'un écrivain public; une trousse, celle d'un chirurgien. Quelquefois aussi le personnage luimême est représenté dans l'exercice de sa profession, comme dans l'exemple suivant (fig. 2), emprunté à une épitaphe du Fig. 1.

Fig. 2.

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cimetière de Saint-Calliste, où l'on voit un forgeron chauffant le fer qu'il va battre sur l'enclume.

On rencontre fréquemment dans les catacombes des peintures représentant des fo soyeurs (1). Tout le monde connaît la fresque de Diogène le fossoyeur, qui a été reproduite dans

un grand nombre d'ouvrages traitant des catacombes, entre

autres dans Fa

biola, roman

historique du

'cardinal Wise

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man. Nous don

Fossoyeur au cimetière de Saint-Calliste.

nons ci- contre

un exemple de

fossoyeur qu'on voit au cimetière de Saint-Calliste.

12. Les monstres marins et les dauphins n'étaient pas rares dans la peinture décorative des anciens; on les ren(1) Voyez ce que nous avons dit des fossoyeurs ci-dessus, p. 53, note.

contre également dans les plus anciennes fresques chrétiennes. "Jusqu'aujourd'hui, dit le chevalier de Rossi, je n'ai trouvé les monstres marins isolés et n'ayant aucun rapport avec l'histoire de Jonas que dans les peintures des plus anciens cubicula, inédites jusqu'aujourd'hui. Ces hippocampes et ces taureaux marins, servant à l'ornementation, furent souvent employés dans les fresques païennes des meilleurs temps de l'Empire... Les peintres chrétiens continuèrent, dès le principe, de s'en servir comme d'un motif de décoration; mais, lorsque plus tard ils eurent commencé à les reproduire dans les scènes de Jonas, ils ne les répétèrent plus dans les parties ornementales." Roma sott., II, p. 247. On me demandera, dit encore le même auteur, si l'on ne doit pas voir une intention symbolique dans l'emploi de ces peintures décoratives. Je réponds que j'ai toujours été très éloigné d'exagérer la pensée symbolique, et de vouloir en chercher et trouver les traces dans toutes les figures accessoires. Mais il est également vrai qu'il est difficile de croire que le souvenir des symboles n'ait eu aucune part dans le choix de certains motifs de décoration." Ibid., II, p. 358. Après les paroles que

Dauphin enlacé autour d'un trident.

nous venons de citer, le chevalier de Rossi ajoute qu'on peut voir dans la reproduction des monstres marins une allusion plus ou moins cachée au poisson symbolique.

On trouve au cimetière de Saint-Calliste une peinture représentant un dauphin enlacé autour d'un trident. C'est probablement encore là une des formes dissimulées de la croix.

13. Le monogramme du Christ. Ce signe mystérieux, qui servait à rappeler aux chrétiens leur Sauveur et leur Maître, consiste dans la combinaison du X et du P, les deux premières lettres du mot grec XPICTOC. Les diverses formes de ce chrisme peuvent se réduire à deux principales. Dans l'une,

;

les deux lettres grecques sont liées de la manière suivante dans l'autre, la lettre X prend la forme d'une croix †, et la boucle ou courbe du P s'attache à la ligne perpendicu laire supérieure dé cette croix : +. Les deux formes ont été employées en Occident; la dernière, qu'on appelle monogramme cruciforme ou bien aussi croix monogrammatique, parait avoir prévalu en Orient. Jusqu'ici le seul a été découvert sur les monuments égyptiens; c'est aussi là le seul monogramme qui se voie dans les bibles écrites à Alexandrie aux premiers siècles de notre ère.

Le monogramme du Christ est souvent flanqué des deux lettres A et, qui contiennent une allusion incontestable aux passages de l'Apocalypse où Dieu s'appelle l'Alpha et l'Oméga, le principe et la fin (Apoc. I, 8; XXI, 6 et XXII, 13). Ces lettres sont jointes indifféremment à l'un et à l'autre monogramme (fig. 1 et 2); dans celui de la seconde forme, elles paraissent suspendues aux bras de la traverse horizontale. Dans quelques monogrammes le X admet une traverse horizontale (fig. 3). D'autres fois la boucle du P est tournée du côté opposé; voyez la gravure de la page 98.

Dans les Gaules le monogramme est souvent entouré d'une couronne (fig. 4) ou de palmes (fig. 5) pour marquer la victoire remportée par Jésus-Christ sur ses ennemis. Une signification analogue s'attache au monogramme cruciforme, quand il se trouve fixé au milieu de la lettre N (fig. 6.); ce qu'on ne saurait interpréter que par XPICTOC NIKA, c'est-à-dire Le Christ est vainqueur. Voici les principales formes du monogramme :

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A quelle époque le monogramme commença-t-il à être en usage? -Les auteurs ne sont pas d'accord sur la réponse à donner à cette question. Presque tous ceux qui ont écrit

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