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num gloriæ crucifixissent(1) : « S'ils l'eussent connu, » ils n'eussent jamais crucifié le Seigneur de la » gloire » : nous, immortel et connu.

L'hérésie: elle croit figure: toi, c'est Jésus-Christ même, afin que, le voulant, le sachant, tu l'outrages.

La rémission des péchés, elle la nie: toi, tu en abuses pour t'autoriser dans ton crime; tu cherches à y être flatté, etc. Dénombrement.

Tu les justifies. Samaria dimidium peccatorum tuorum non peccavit (2). « Samarie n'a pas fait la » moitié des crimes que tu as commis ».

Le péché des chrétiens plus grand; des catholiques, des prêtres; et puisqu'il faut aussi prononcer ma condamnation de ma propre bouche, des évêques. Ergo et tu confundere, et porta ignominiam tuam (3). « Et toi aussi, sois confondu, et porte >>ton ignominie ».

Contre la honte de confesser ses péchés, la consolation et la gloire.

(1) I. Cor. 11. 8.

(2) Ezech. XVI. 51. - (3) Ibid. 54.

SERMON

POUR LE VENDREDI

DE LA IV. SEMAINE DE CARÊME,

PRÉCHÉ DEVANT LE ROI,

SUR LA MORT.

Combien les hommes sont peu soigneux d'en conserver le souvenir. Comment elle nous convainc de notre bassesse, et nous fait connoître la dignité de notre nature.

Domine, veni, et vide.

Seigneur, venez, et voyez. Joan. xr. 34.

ME sera-t-il permis aujourd'hui d'ouvrir un tombeau devant la Cour? et des yeux si délicats ne seront-ils point offensés par un objet si funèbre? Je ne pense pas, Messieurs, que des chrétiens doivent refuser d'assister à ce spectacle avec Jésus-Christ. C'est à lui que l'on dit dans notre Evangile : Seigneur, venez, et voyez où l'on a déposé le corps du Lazare: c'est lui qui ordonne qu'on lève la pierre, et qui semble nous dire à son tour: Venez, et voyez vous-mêmes. Jésus ne refuse pas de voir ce corps

mort, comme un objet de pitié et un sujet de miracle; mais c'est nous, mortels misérables, [ qui refusons] de voir ce triste spectacle, comme la conviction de nos erreurs. Allons, et voyons avec JésusChrist, et désabusons-nous éternellement de tous les biens que la mort enlève.

C'est une étrange foiblesse de l'esprit humain, que jamais la mort ne lui soit présente, quoiqu'elle se mette en vue de tous côtés, et en mille formes diverses. On n'entend dans les funérailles que des paroles d'étonnement, de ce que ce mortel est mort. Chacun rappelle en son souvenir depuis quel temps il lui a parlé, et de quoi le défunt l'a entretenu ; et tout d'un coup il est mort: voilà, dit-on, ce que c'est que l'homme; et celui qui le dit, c'est un homme; et cet homme ne s'applique rien, oublieux de sa destinée; ou, s'il passe dans son esprit quelque désir volage de s'y préparer, il dissipe bientôt ces noires idées et je puis dire, Messieurs, que les mortels n'ont pas moins de soin d'ensevelir les pensées de la mort, que d'enterrer les morts mêmes. Mais peut-être que ces pensées feront plus d'effet dans nos cœurs, si nous les méditons avec Jésus-Christ sur le tombeau du Lazare; mais demandons - lui qu'il nous les imprime par la grâce de son Saint-Esprit, et tâchons de la mériter par l'entremise de la sainte Vierge. Ave.

ENTRE toutes les passions de l'esprit humain, l'une des plus violentes, c'est le désir de savoir; et cette curiosité de connoître fait qu'il épuise ses forces pour trouver ou quelque secret inoui dans l'ordre de la

nature, ou quelque adresse inconnue dans les ouvrages de l'art, ou quelque raffinement inusité dans la conduite des affaires. Mais parmi ces vastes désirs d'enrichir notre entendement par des connoissances nouvelles, la même chose nous arrive qu'à ceux qui, jetant bien loin leurs regards, ne remarquent pas les objets qui les environnent : je veux dire que notre esprit s'étendant par de grands efforts sur des choses fort éloignées, et parcourant, pour ainsi dire, le ciel et la terre, passe cependant si légèrement sur ce qui se présente à lui de plus près, que nous consumons toute notre vie toujours ignorans de ce qui nous touche; et non-seulement de ce qui nous touche, mais encore de ce que nous sommes.

:

Il n'est rien de plus nécessaire que de recueillir en nous-mêmes toutes ces pensées qui s'égarent; et c'est pour cela, chrétiens, que je vous invite aujourd'hui d'accompagner le Sauveur jusques au tombeau du Lazare. Veni, et vide : « Venez, et voyez ». O mortels, venez contempler le spectacle des choses mortelles ô homme, venez apprendre ce que c'est que l'homme. Vous serez peut-être étonnés que je vous adresse à la mort pour être instruits de ce que vous êtes, et vous croirez que ce n'est pas bien représenter l'homme, que de le montrer où il n'est plus. Mais si vous prenez soin de vouloir entendre ce qui se présente à nous dans le tombeau, vous accorderez aisément qu'il n'est point de plus véritable interprète, ni de plus fidèle miroir des choses hu

maines.

La nature d'un composé ne se remarque jamais plus distinctement que dans la dissolution de ses par

ties. Comme elles s'altèrent mutuellement par le mélange, il faut les séparer pour les bien connoître. En effet, la société de l'ame et du corps fait que le corps nous paroît quelque chose de plus qu'il n'est, et l'ame quelque chose de moins : mais lorsque, venant à se séparer, le corps retourne à la terre, et que l'ame aussi est mise en état de retourner au ciel d'où elle est tirée, nous voyons l'un et l'autre dans sa pureté. Ainsi nous n'avons qu'à considérer ce que la mort nous ravit, et ce qu'elle laisse en son entier; quelle partie de notre être tombe sous ses coups, et quelle autre se conserve dans cette ruine; alors nous aurons compris ce que c'est que l'homme : de sorte que je ne crains point d'assurer que c'est du sein de la mort et de ses ombres épaisses, que sort une lumière immortelle pour éclairer nos esprits touchant l'éclat de notre nature. Accourez donc, ô mortels, et voyez dans le tombeau du Lazare ce que c'est que l'humanité : venez voir dans un même objet la fin de vos desseins, et le commencement de vos espérances; venez voir tout ensemble la dissolution et le renouvellement de votre être; venez voir le triomphe de la vie dans la victoire de la mort : Veni, et vide.

O mort, nous te rendons grâces des lumières que tu répands sur notre ignorance. Toi seule nous convaincs de notre bassesse : toi seule nous fais connoître notre dignité. Si l'homme s'estime trop, tu sais déprimer son orgueil; si l'homme se méprise trop, tu sais relever son courage; et pour réduire toutes ses pensées à un juste tempérament, tu lui apprends ces deux vérités qui lui ouvrent les yeux pour se bien

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