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copale pour les catholiques des Etats Néerlandais. Aussi ne pouvait-il pas s'imaginer que de la forme plus régulière donnée à l'Eglise catholique dans ce Royaume, en vertu de son droit reconnu, pût jamais naître le danger d'une influence moins avantageuse pour l'ordre. En effet, il est de notoriété publique que, d'une part, les catholiques sont obligés de respecter par devoir de religion, les autorités légitimement constituées, tandis que d'autre part le rétablissement de leur hiérarchie ne fait aux non-catholiques aucun tort dont ils puissent se plaindre raisonnablement.

Et pour donner plus de valeur à ces observations, il est opportun de faire remarquer ici, sans crainte de s'écarter de la vérité, que toute l'affaire en question se réduit finalement à un simple mode d'administration plus en harmonie avec l'existence spirituelle des catholiques et en même temps plus approprié aux nations civilisées, sans entraîner aucun changement important qui serait de nature à troubler les intérêts des autres communions religieuses. Les pasteurs assignés aux catholiques sont pour la plupart les mêmes qui jusqu'ici étaient déjà revêtus du caractère épiscopal et avaient exercé le même ministère pastoral sans une autre denomination. En général, les dispositions que le S. S. a prises à ce sujet ont été réglées dans une telle mesure de prudence et de précaution qu'elles tendent à enlever tout prétexte à des agitations malentendues. On peut donc croire, et le S. S. est bien persuadé que les clameurs suscitées dans les circonstances actuelles ne sauraient en aucune manière diminuer la confiance des catholiques dans la protection paternelle du Prince magnanime et de son gouvernement, qui certainement dans leur droiture ne priveraient pas cette partie fidèle de sujets du gage correspondant de la douce affection avec laquelle ils ont l'habitude de les considérer.

« Le soussigné ne croit pas pouvoir passer sous silence le passage de la Note où, après avoir fait mention d'une espèce d'enquête à instituer relativement au fait accompli, on ajoute qu'en pareille circonstance on aura aussi à examiner si tout ce qui concerne l'exécution et la conservation de la liberté garantie par la loi fondamentale aux différentes communions religieuses peut donner lieu à des questions différant de celles qui doivent être traitées dans le Royaume, et décidées par les autorités du pays sans - qu'on puisse tolérer qu'aucun prince ou pouvoir étranger s'y immisce et intervienne.

« L'opinion qu'a le soussigné de la haute sagesse dudit gouvernement ne lui permet pas de croire que par les expressions alléguées on ait voulu faire entendre que le Pape veut s'immiscer dans les affaires intérieures concer nant l'administration de l'Etat Néerlandais. Toutefois il ne croit pas inutile de faire bien remarquer ici qu'une pareille pensée n'entre pas dans l'esprit du S. S., qui reconnaît et respecte l'indépendance des gouvernements. Au reste la loi fondamentale ayant établi et la Note ministérielle du 24 mars 1852 ayant déclaré que l'Eglise des Pays-Bas avait la liberté de s'organiser comme elle l'entendait, il est naturel qu'elle se soit organisée d'après les lois ecclésiastiques, et que, faisant partie de l'Eglise universelle avec laquelle elle possède un chef commun dans la personne du Pontife Romain en vertu de la primauté qui lui appartient, il est naturel, disons-nous, qu'elle dépende de ce Pontife sous les rapports religieux.

« Le soussigné passant maintenant aux deux questions exprimées à la fin de la Note, doit faire observer à V. E. d'abord, que parmi les sollici tudes qui incombent aux évêques d'après la formule du serment que leur prescrit en général le rituel romain, il en est une qui de prime-abord pouvait faire naître quelques appréhensions dans l'esprit des gouvernements d'Etats de religion mixte. Mais elle ne doit point s'interpréter dans toute la rigueur des termes. L'injonction dont on veut parler ici, se réduit au fond à l'obligation des évêques de veiller à l'intégrité des saines doctrines, afin

d'empêcher, par des avertissements et des autres moyens moraux propres à leur ministère épiscopal, la séduction qui pourrait s'introduire parmi les fidèles soumis à leur gouvernement pastoral.

Au reste, le S. S. ayant l'habitude de régler les choses autant que possible selon les circonstances des lieux et des temps, s'est déja déterminé à introduire dans la formule précitée, vis-à-vis de plusieurs États, telles modifications qui pouvaient convenir aux différentes positions locales des pasteurs sacrés. C'est pourquoi le soussigné est à même de déclarer à V. E. que pour les Évêques des Eglises rétablies dans le Royaume des Pays-Bas on arrêtera la formule modifiée précisément dans cette partie que V. E. a en

vue.

« Quant à l'autre question, le soussigné croit qu'on peut suffisamment déduire de ce qui précède, la difficulté dans laquelle le S. S. se trouverait s'il fallait adhérer à des projets de changements dans la hiérarchie épiscopale déjà instituée dans certains endroits dudit Royaume. V. E. a, dès à présent, signalé de tels projets en les appliquant particulièrement au cas de l'établissement effectif d'un siége archiepiscopal et d'un siége épiscopal dans les villes d'Utrecht et de Harlem, eu égard aux conséquences qui pourraient en résulter par la susceptibilité des non-catholiques qui, dans ces villes, forment la majorité de la population. Cependant après avoir établi et reconnu que les catholiques ont la liberté de s'organiser en ce qui concerne leur culte comme il leur convenait, il est naturel que l'organisation ait obtenu son effet dans les lieux où en d'autres temps les siéges épiscopaux se trouvaient constitués. D'ailleurs, ainsi qu'il a déjà été dit, la constitution régulière de l'Eglise catholique ne peut occasionner aucun dommage aux non-catholiques dans le pays qu'ils habitent; car le cas présent ne renferme aucun élément capable d'altèrer en quoi que ce soit la position dont les non-catholiques jouissent pour leur part et quant à leur culte, grâces aux lois du Royaume.

« Au reste, il est bon de faire observer ici combien le S. S. a su considérer la nature du pays d'habitants de religion mixte, en ayant eu soin de faire parvenir, dès le commencement, aux cinq évêques, des instructions que la prudence semblait prescrire. Ainsi, pour ce qui concerne particulièrement la résidence, le S. S. a autorisé les évêques à fixer provisoirement leur résidence ailleurs que dans le chef-lieu de leur diocèse, dans le cas que des motifs de prudence le rendraient utile. Ce qui a eu lieu en effet par rapport à la première des deux villes susmentionnées. Sa Majesté le Roi et son gouernement reconnaîtront sans doute dans ces prévoyantes dispositions une preuve évidente que le S. P. s'efforce non-seulement à seconder autant qu'il le peut, mais à prévenir même leurs désirs respectables.

En priant V. E. de porter à la connaissance de son illustre gouvernement les considérations que renferme la présente Note, le soussigné rappelle avec plaisir les sentiments de sa considération distinguée.

(Signe) G. CARD. ANTONELLI. »

Nous lisons dans le Nieuwe Noord-Brabander:

« On dit que les Évêques de la Néerlande se réuniront sous peu de jours pour rédiger une protestation énergique et une adresse respectueuse et ferme contre la loi destructive de la liberté des cultes; la première est destiné au gouvernement et la seconde aux deux chambres des Etats-Généraux.

« On nous apprend qu'il se forme sur plusieurs points de cette

province des comités pour organiser un pétito nnement général contre la loi sur les communions religieuses. Nous applaudissons de toutes nos forces à cet excellent plan, et nous sommes convaincus qu'il aura le ferme appui et les sympathies de tous les bons citoyens. >>

Couronnement de la Sainte-Vierge à Notre-Dame des-Victoires.

La cérémonie du couronnement solennel de la Vierge à Notre-Dame-desVictoires a été célébrée samedi 9 juillet, comme nous l'avions annoncé. On sait que cette fête vraiment nationale devait avoir lieu le 2 juillet, jour anniversaire de la Visitation de la sainte Vierge et de la rentrée de Pie IX à Rome. Un contre-temps inattendu a empêché cette coïncidence que désirait vivement le Saint-Père par un motif dont tout le monde a senti la touchante délicatesse.

Pour être différée de huit jours, la solennité du couronnement n'a rien perdu de son éclat et de sa haute signification.

L'église de Notre-Dame-des-Victoires avait été ornée avec une grande magnificence. Des tentures de velours rouge la couvraient à l'extérieur; du haut des frises pendaient l'image de la Vierge, les armes du Pape ainsi que celles du chapitre de Saint-Pierre et de Mgr Pacca, son délégué.

Rien n'avait été épargné pour la décoration intérieure de l'église. On avait placé le long des murs des écussons aux armes papales. L'église, ornée de riches draperies, resplendissait de dorures. Au-dessus du maître-autel un pavillon de soie aux couleurs du Souverain-Pontife, jaune et blanc, soutenait de riches draperies de velours. Autour du chœur brillait en lettres d'or ce verset du Magnificat si heureusement choisi: Fecit mihi magna qui potens est et sanctum nomen ejus. Au-dessus de la statue de la Vierge le pavillon et les draperies étaient de gaze tissue d'or. L'autel de l'Archiconfrérie avait complétement disparu sous des gradins chargés de lumières et de fleurs et s'élevant jusqu'aux pieds de la statue de la sainte Vierge.

A 10 heures, Mgr Pacca, protonotaire apostolique, chanoine de l'insigne basilique du Vatican, ce même prélat qui avait été chargé par le pape Grégoire XVI d'apporter en France la barrette cardinalice à Mgr de La Tour d'Auvergne, a été reçu à la porte de l'église avec le cérémonial d'usage, par M. le curé et son clergé et conduit à la place d'honneur qui lui avait été préparée devant les couronnes envoyées par le vénérable chapitre dont il est membre, au nom de N. S. P. le pape Pie IX.

Les couronnes d'un or pur et mat, ornées d'émaux et de pierres fines, sont d'une magnificence qui surpasse de beaucoup l'idée, cependant si haute, qu'on s'en était faite.

La grande couronne destinée à la Sainte-Vierge a 21 centimètres de diamètre au bandeau, 34 centimètres dans la grande largeur et 37 centimètres de hauteur, y compris le petit globe et la croix qui la surmontent. Le bandeau porte douze étoiles en émail blanc environnées de petites pierres précieuses, et douze grandes pierres, émeraudes, saphirs, topazes, hyacinthes, aigue-marines, environnées de petites perles, en souvenir des principaux priviléges et des admirables vertus de Marie. Le bandeau est surmonté de

sept têtes d'anges qui supportent les sept pans de la couronne, flanqués de sept écussons en émaux, ornés de pierres fines, et sur lesquels se trouvent, au milieu, les armes de N. S. P. le pape Pie IX, et, de chaque côté, les armoiries du chapitre de Saint-Pierre. Sur les quatre autres écussons on lit: Salve regina. — Honorificentia populi nostri. Mortis hora Ab hoste protege. suscipe. Le globe est ceint d'une bande disposée de haut en bas, sur laquelle on lit: Decreto Capituli Vaticani coronata anno MDCCCLIII. Enfin, la croix se compose de onze diamants d'une assez forte dimension.

La couronne de l'enfant Jésus a un peu plus de hauteur proportionnellement. Le diamè ́re du bandeau est de 18 centimètres, le grand diamètre porte 27 centimètres, et la hauteur totale 33 centimètres. Lc bandeau supporte, en l'honneur des douze apôtres, douze croix antiques en émail rouge et douze grandes pierres fines, le tout environné de perles. Au-dessus du bandeau est placée avec grâce une rangée de petites perles soutenues par des dents pointues. Cette couronne n'a que six pans au lieu de sept, sans têtes d'anges. Sur les six écussons en émail se trouvent les mêmes armoiries que dans la première couronne, et sur les autres écussons on lit: Auctor seculi - Ortus est sol — Gralia in labiis tuis. Le globe est également ceint d'une bande indiquant le décret du chapitre du Vatican et la croix se compose de dix diamants.

Le prix des deux couronnes est évalué à 65,000 fr.

Aurivé à la place d'honneur qui lui avait été préparée, Mgr Pacca a lu l'indult du Pape, qui, à l'occasion du couronnement de la sainte Vierge, accorde des indulgences aux fidèles; il a ensuite, au nom du chapitre de Saint-Pierre, remis les couronnes à M. le curé et aux autres représentants de l'église Notre-Dame-des-Victoires. Le procès-verbal de cette tradition a été lu et signé ; Mgr Pacca est allé déposer les couronnes aux pieds de la statue de la sainte Vierge; elles y sont restées pendant toute la cérémonie.

La grand'messe a été célébrée par Mgr l'archevêque de Paris, assisté de MM. Buquet et Lequeux, ses vicaires généraux. S. E. le cardinal de Reims, Mgr le Herpeur, évêque de Port-de-France (Martinique); Mgr Pallegoix, évêque de Siam; Mgr Kobès, évêque de Modon, assistaient à l'office. Il manquait au milieu de cette sainte cérémonie ce digne représentant du Souverain-Pontife, dont les fidèles associés de l'Archiconfrérie avaient reçu si souvent les paternelles bénédictions. La nonciature apostolique y était représentée par le fidèle et inconsolable ami de Mgr Garibaldi, le confident de ses pensées et de ses travaux, Mgr Vecchiotti, aujourd'hui chargé d'affaires du Saint-Siége. La messe a été chantée en musique avec beaucoup de goût, et surtout de gravité et de recueillement.

Après l'Evangile, M. l'abbé James, chanoine de la Métropole, a lu en chaire une lettre circulaire de Mgr l'archevêque de Paris au clergé de son diocèse à l'occasion du couronnement de la statue de Notre-Dame-des-Victoires, et proclamé les diverses indulgences que le Saint-Père a daigué accorder aux fidèles qui assistaient à la cérémonie et à ceux qui visiteront l'église pendant l'octave.

Après la messe, aussitôt que Mgr l'Archevêque a eu changé ses ornements, Mgr Pacca a procédé au couronnement solennel de la sainte Vierge pendant que l'on chantait l'antienne Regina cœli.

Mgr l'Archevêque avec ses assistants est alors monté devant l'image couronnée, et lui a offert l'encens, puis a entonné le Te Deum.

Après la cérémonie, M. Lagrevol, notaire, a constaté par un acte régulier, ayant pour témoins les principaux personnages qui assistaient à la cérémonie, la remise des couronnes à leur destination. Cet acte se termine ainsi :

« M. Desgenettes et MM. les membres du conseil de fabrique et les autorités constituées de la paroisse ont prêté serment devant Mgr l'acca et devant nous notaire et les témoins, de conserver précieusement et fidèlement les couronnes qui leur ont été confiées, de ne jamais les aliéner, ni en changer la destination. »

Un cierge splendidement orné et pesant quatre kilogrammes, a été offert par M. le maire qui avait assisté à la cérémonie avec les autorités civiles du 3 arrondissement. Ce cierge a été allumé devant la sainte image par M. le curé, et doit y brûler pendant l'octave.

Les pompes de la religion sont toujours éloquentes, mais celle dont nous avons été témoin à Notre-Dame-des-Victoires, par les motifs qui l'ont produite et les circonstances qui l'ont accompagnée, avait un caractère particulier et une signification plus touchante.

Pour en comprendre la portée, il suffisait de jeter les yeux sur les places occupées par les officiers et les soldats de notre armée revenus de Rome et décorés par le Saint-Père. Avec quel attendrissement les regards du clergé se tournaient vers ces courageux enfants de la fille aînée de l'Eglise! Leur foule pressée, leur attitude recueillie attestaient la fidélité de leurs souvenirs, et faisaient revivre dans la mémoire de tous, ces événements si graves et si glorieux pour la France où nos drapeaux ont été mêlés aux destinées de Pie IX! Quel spectacle que celui de nos soldats se faisant un honneur d'assister au couronnement de la reine des victoires et de renvoyer ainsi, avec le saint Pontife qu'ils ont replacé sur son trône, le succès de leurs armes à celle que l'Eglise appelle le secours des chrétiens!

Qui eût pensé, il y a dix ans, nous disait un des curés les plus anciens et les plus vénérables de Paris, tout ému encore de ce qu'il venait de voir, qui eût pensé que dans cette paroisse autrefois désolée, de Notre-Dame-des-Victoires, il nous serait donné d'assister à un tel spectacle? Qui eût osé prédire qu'une députation de notre vaillante armée devrait mériter, par un de ses plus glorieux succès et remplir avec un si louable empressement, une place marquée dans un couronnement de la Sainte Vierge, et qu'un maire de Paris viendrait, ceint de son écharpe, offrir un cierge à l'image couronnée, aux yeux d'une foule immense et attendrie de la nouveauté de ce spectacle? Puis il nous citait ces paroles de Bossuet, le sublime historien de la Providence, que nous sommes heureux de rappeler, en terminant, à nos lecteurs :

«< Considérez, chrétiens, ces grands et puissants génies; ils ne savent tous ce qu'ils font ne voyons-nous pas tous les jours manquer quelque ressort à leurs grands et vastes desseins, et que cela ruine toute l'entreprise ? L'événement des choses est ordinairement si extravagant et revient si peu aux moyens que l'on y avait employés, qu'il faudrait être aveugle pour ne pas voir qu'il y a une puissance occulte et terrible qui se plaît de renverser les desseins des hommes, qui se joue de ces grands esprits qui s'imaginent remuer tout le monde, et qui ne s'aperçoivent pas qu'il y a une raison supe

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