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nique de M. l'abbé Lequeux laissait une lacune dans l'enseignement des seminaires. La ressource des cahiers écrits et dictés était une voie longue et donnant beaucoup à l'arbitraire. L'annonce des deux ouvrages suivants nous paraît être d'un heureux secours pour l'enseignement théologique.

Après avoir annoncé la théologie dogmatique du P. Péronne et la théologie morale du chanoine Scavini publiées par M. l'abbé Gauthier, M. le directeur des Annales continue :

Quant à la philosophie, nous ne croyons pas qu'il en existe une qui soit conforme aux principes du concile d'Amiens, que nous venons d'exposer. On continuera donc à se servir de celles qui existent, en les corrigeant par des préliminaires, des suppléments et des corrections nécessaires, en attendant qu'on en fasse une conforme aux principes posés par le concile.

Grâces donc soient rendues aux Pères du concile d'Amiens; grâces soient rendues à la haute intelligence des éminents Cardinaux qui ont examiné ce concile; grâces surtout à l'infaillible sagesse du savant et saint Pontife qui a examiné, dirigé, approuvé tout ce qui s'est fait, dans toute cette affaire. Les bulles de Léon X et celles de Grégoire IX et de Grégoire XI, viennent d'être remises en vigueur, comme on le verra dans les extraits que nous publierons...

Nous croyons que, grâce à l'Encyclique de l'immortel Pie IX, grâce aux décisions du concile d'Amiens, une ère nouvelle va surgir pour la philosophie et pour la polémique catholiques. Les Annales peuvent s'attribuer le mérite, d'ailleurs facile, d'avoir indiqué ou provoqué ces questions. Elles n'auraient aidé qu'à faire rectifier un seul principe dans l'enseignement philosophique, que leurs travaux de 23 ans seraient assez récompensés; car rétablir une seule vérité dans ce moment, où les vérités ont été tant diminuées parmi les hommes, c'est un mérite peu apprécié, peu récompensé devant les hommes, mais très-grand devant Dieu.

Que nos lecteurs se souviennent bien que c'est à eux seuls qu'appartient le mérite de la longue existence des Annales, et qu'ils nous permettent ainsi de leur attribuer en grande partie le bien qui a pu en résulter. A. BONNETTY.

UNITÉ CATHOLIQUE:

Pourquoi donc actuellement en France, le Clergé est-il encore imbu de čes préjugés anti-romains? La cause en est uniquement aux mauvais enseignements des séminaires où il a été élevé. Est-il surprenant que les jeunes élèves aient retenu fidèlement ce qui leur a été appris dans les établissements où ils ont puisé toute leur science ecclésiastique? On leur a enseigné la théologie dans des auteurs qui sont aujourd'hui mis à l'index. Et Saint'Sulpice qui est le foyer du gallicanisme, se sert encore maintenant de mauvaises théologies qui ne diffèrent en rien de celles mises à l'index. Nous traiterons cette question importante dans le cours de notre revue. (1re livraison, p. 32.)

Comme le fameux Mémoire clandestin, qui vient d'être condamné, et qui est évidemment l'œuvre et la pensée de la congrégation de Saint-Sulpice, ce théologien renverse évidemment la pierre qui supporte, dans la personne du Pape, le principe même de toute certitude en ce monde : car il n'y a pas de vérité exprimée sur la terre, s'il n'y a pas quelque part un centre visible d'unité, confirmé par l'autorité de Dieu. La vérité en elle-même n'est

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pas le produit de la faible raison humaine. Elle est en dehors et au-dessus de cette raison qui n'est qu'une faculté pour aspirer, saisir la vérité et s'en bien pénétrer. La vérité, pour être immuable, doit venir de Dieu; elle nous est manifestée par celui que Dieu a établi pour en être l'organe, au milieu de cette Eglise qu'il a fondée avec son sang. ..

C'est donc là, Cans la Papauté elie même, appuyée par la plus constante tradition et soutenue par tou e la catholicité, hormis par une vingtaine d'Evéques français sulpiciens, qui résistent aujourd'hui, bien que mollement, aux manifestations unanimes de plus de mille Evèques que l'on compte dans le monde catholique, c'est là, daus la Chaire même de Saint-Pierre, que se trouvent toute vérité, toute autorité principale, toute puissance centrale ecclésiastique, toute certitude, toute unité réelle et visible, et par consé-, quent l'infaillibilité doctrinale....

C'est toujours en invoquant des droits particuliers, des priviléges spéciaux on de très-louables coutumes, que des Evêques et des théologiens entendent lutter contre le pouvoir souverain et législatif des Vicaires de Jésus-Christ... (Id., p. 51-52.)

Mais Saint-Sulpice qui a longtemps professé, comme Bossuet et M. Prompsault, que le gallicanisme est la seule opinion raisonnable, en cherchant à l'élever à la hauteur d'une croyance, a cédé sur ce point depuis quelques années à la réaction des laïques catholiques de France, qui repoussent en masse une pareille erreur. Or, cette Congrégation n'ose plus être aussi tranchante. Elle est donc descendue au-dessous de Bossuet et de M. Prompsault. Elle ne sait plus ce qu'il faut affirmer ou croire sur la constitution du pouvoir suprême dans l'Eglise. Elle en fait une pure question d'opinion incertaine, et elle en abandonne la solution à la fluctuation des esprits de ses nombreux élèves. On ne peut pas tomber plus bas, dans l'impuissance avouée de résoudre une question de si haute importance. (5o livraison, p. 207-208.)

CONCLUSION.

1° La congrégation de Saint-Sulpice, toute vénérable dans ses membres qu'elle puisse être, professe un enseignement particulier absolument contraire à celui du Saint-Siége et à celui reconnu dans toute la catholicité.

2° Elle repousse, en fait et par cela même qu'elle en modifie à son gré le sens naturel, toute la force des dogmes sur lesquels s'appuie l'Eglise catholique romaine, savoir: Tu es Petrus, et super hanc petram ædificabo ecclesiam meam, etc... El tibi dabo claves regni cœlorum, etc (1). Ego rogavi pro te ut non deficiat fides tua (2)... Pasce agnos meos et oves meas (3)... Fiet unum ovile et unus Pastor (4).

3° Elle donne à tous ces textes un sens qui transporte à l'Episcopat la plus haute partie des prérogatives que Jésus-Christ a conférées au chef de son Eglise, qui est son Vicaire, et dont la foi ne peut défaillir; puisque d'après Bossuet dont elle adopte les principes, elle enseigne ouvertement par plusieurs de ses professeurs gallicans connus, que le jugement du Pape n'est pas ››

(1) Math., xvi, 18-19.

(2) Luc, XXII. 32.
(3) Johan., xxi. 15-17.
Idem, x. 16.

irréformatle, à moins que le consentement de l'Eglise (c'est-à-dire des Evêques) n'intervienne.

4 Elle repousse, conséquemment, les jugements rendus par le Saint-Siége contre la déclaration de 1682, œuvre de Bossuet, ou les explique dans un sens qui ne puisse pas porter atteinte aux principes contenus dans cette déclaration.

5° Tout son enseignement incertain, incohérent et variable tend à affaiblir la croyance aux dogmes qui sont la base de la constitution de l'Eglise, pour établir, à leur place, de pures opinions libres, soit les maximes de la déclaration de 1682 qui ne sont au fond que de simples opinions, sans valeur ni autorité quelconque, soit un mélange d'opinions discordantes, contradictoires, pour et contre, à la fois, les doctrines romaines et les doctrines gallicanes; de telle sorte que ses propres élèves, bien que divisés entre eux, comme leurs maîtres, sur les bases de la constitution du pouvoir dans l'Eglise, solent obligés de se tolérer mutuellement dans leurs erreurs respectives, puisque tous ils doivent accepter ce faux principe commun, que le pouvoir papal dans l'Eglise n'est pas fondé sur le dogme catholique, mais sur de pures opinions humaines.

6° Il résulte de cet enseignement de Saint-Sulpice, qu'en ébranlant le dogme de l'autorité suprême, pour lui substituer l'opinion pour base, tous les autres dogmes sont plus ou moins ébranlés à la fois. C'est donc dire que cette congrégation, en s'attachant aux principes de l'école de Bossuet dont elle est toujours véritablement idolâtre, a porté dans son enseignement cette incertitude, ce doute, qui est un des caractères de toute opinion humaine. Elle propage donc un dangereux principe qui n'est autre que l'élément rationaliste et protestant, que Bossuet a introduit en 1682 dans l'Eglise de France.

Nous croyons que notre recueil, dont le but avoué est d'éclairer sur le faux enseignement de Saint-Sulpice-ct d'en obtenir la réforme complète, ne doit pas se lasser d'agiter ces importantes questions. Les moyens de réforme sont entre les mains de nos vénérables Evêques qui comprennent certainement que cette réaction de la presse religieuse laïque contre un enseignemeut qui n'est pas celui du Saint Siége, ni celui de la catholicité hors de France, ne peut qu'être favorable à hâter cet heureux temps, où il n'y aura partout qu'une inébranlable foi à l'unité catholique.

Il nous suffit pour le moment d'avoir établi, comme une vérité incontestable, que l'erreur radicale du gallicanisme de la congrégation de Saint-Sulpice n'est rien moins que la néation du DOGME même qui est la base de la constitution de l'Eglise catholique. (6a livraison.) —H, DE RÉGNON.

Le docteur Manning et l'archidiacre Hare.

Il existe dans l'Eglise anglicane un parti allemand qui s'efforce d'introduire en Angleterre le Rationalisme d'Outre-Rhin. A la tête de ce parti se trouvent le prince Albert, le chevalier Bunzen et l'archidiacre Hare. Ce dernier est l'oracle du parti. C'est par ses avis qu'agit le prince Albert. C'est lui que Bunzen consulte et à qui il a dédié son dernier ouvrage, Hippolytus and his age, condamné par la S. Congrégation de l'Index. Il paraît que dès l'origine de cette nouvelle secte, le prince Albert et le chevalier Bunzen, dans l'ardeur

de prosélytisme qui les animait, auraient composé un livre de prières à l'usage de l'Eglise établie. Ce nouveau rituel, destiné à inoculer aux fidèles anglicans le poison des doctrines rationalistes, fut soumis à l'archidiacre Hare. Celui-ci en fut tellement,effrayé qu'il conseilla au prince de le supprimer dans l'intérêt de sa sûreté personnelle et de la tranquillité publique.

Or, ce même archidiacre Hare faisait dernièrement aux fidèles de son archidiaconé un discours qui nous est transmis d'Angleterre et que nous nous empressons de mettre sous les yeux de nos lec

teurs.

Cette instruction pastorale est un exemple de plus des contradictions auxquelles l'hérésie anglicane condamne ses partisans, et une preuve des alarmes que leur inspire la puissance de la vérité catholique. Le langage de l'archidiacre Hare, en dépit des ́expressions consacrées quand il est question de l'Eglise romaine, révèle une foi bien faible dans la cause qu'il défend.

Ainsi il est forcé de rendre un hommage éclatant à l'intelligence supérieure, à la sagesse céleste du docteur Manning, à la sainteté de ses mœurs, à la pureté de ses intentions; il avoue que tous ces dons de Dieu, que toutes ces vertus n'ont pu le préserver de tomber dans le sein de l'Eglise romaine; il exhorte même son auditoire à ne pas juger précipitamment ceux qui se convertissent à la foi catholique et à ne pas supposer sur ce simple fait qu'ils soient complétement dépourvus de science, de jugement et de vertu. Et de tout ce raisonnement, il conclut que celui qui est debout doit prendre garde de tomber, et que l'Eglise romaine est une peste terrible contre laquelle ne peuvent rien ni les qualités de l'esprit, ni la sainteté de la vie, ni la droiture des intentions, ni le désir sincère de connaître la vérité et de s'y attacher sans retour. C'est-à-dire que, d'après ces principes, l'homme ici-bas n'a pas de moyens pour connaître la vérité religieuse; qu'il peut s'égarer dans une affaire d'où dépend son salut éternel, sans qu'il y ait de sa faute, et en suivant fidèlement le sentier de la vertu. Quelle doctrine désolante!

Et c'est là ce qu'on nous représente comme le christianisme primitif, comme la véritable religion fondée par Jésus-Christ!

Mais voici le discours de l'archidiacre Hare. Il en dit plus que tous les commentaires. L'abbé J. Cognat.

<< Lorsque dans ce diocèse nous avons, cette année, à vous entretenir de ceux qui ont abandonné leur Mère spirituelle pour se livrer au Papisme, nous ne vous parions pas d'étrangers; nous ne vous parlons pas d'hommes qui nous soient personnellement indifférents. Hélas! par un mystérieux décret dont mes yeux s'efforcent en vain de pénétrer l'épais mystère, nous avons à gémir sur la défection et la désertion d'un homme que, depuis longtemps, nous avions été habitués à honorer, à révérer, à aimer; d'un homme chez qui l'éclat de la vision spirituelle semblait une garantie de la pureté du cœur; d'un homme chez qui la sainteté des intentions ne pouvait

être mise en doute par aucun de ceux qui le connaissaient. Comme j'ai été officiellement avec lui en relations particulières, et que j'ai trouvé une des plus grandes douceurs de ma charge dans cette association habituelle qui nous fit entreprendre ensemble tant de travaux et qui me permettait de recueillir de sa bonté et de sa sagesse tant d'encouragement et de force; comme, malgré des différences notables et même tranchées entre nos opinions, nous pouvions prendre conseil l'on de l'autre et marcher en frères dans le sentier du Seigneur; je ne pws qu'exprimer mon étonnement devant la volonté insondable par laquelle un tel bomme a été amené à échouer contre un écueil si honteux et si destructeur, et répéter simplement ces paroles à mes amis et à moi-même : « Que celui qui croit pouvoir se tenir « debout prenne garde de tomber. » L'Eglise tout entière ne peut que s'affliger de la perte d'un de ses fils les plus saints, d'un de ceux qui semblaient avoir reçu un don particulier pour gagner les âmes à Dieu. La pensée qu'un tel homme, dont on pouvait à bon droit espérer qu'il serait garanti à la fois par les dons de la nature et ceux de la grâce contre l'aveuglement, qui livre la raison et la conscience à la corruption et à la tyrannie de Rome; la pensée, dis-je, qu'un tel homme est devenu victime de cette pestilence qui est venue se répandre jusque sur notre Eglise; en nous apprenant combien doit nécessairement être terrible le pouvoir de cette pestilence, nous empêchera en même temps de juger trop sévèrement ceux qui avec lui nous ont quittés. Que cet exemple augmente en nous l'horreur de la pestilence elle-même, qu'il fortifie la conviction de la nécessité de nous mettre en garde contre sa fureur menaçante; mais, en tous cas, qu'il nous apprenne que nous ne devons pas attribuer de mauvais desseins ou une absurdité absolue à ceux qui sont tombés dans les mêmes erreurs où est tombé Henri Manning, »

Bulletin politique de l'Etranger.

Affaires d'Orient, Il est important aujourd'hui de suivre le mouvement de la presse étrangère dans la question d'Orient. On voit les feuilles allemandes se réunir peu à peu aux intérêts russes et prendre à partie la Turquie en l'accusant d'avoir, par un entêtement et un orgueil coupables, retardé une solution qu'on croyait prochaine, de s'être pour ainsi dire soustraite volontairement aux bons offices de la diplomatie, d'avoir en un mot fait un coup de tête en voulant modifier l'œuvre concertée en sa fayeur par les Puissances représentées à Vienne.

C'est dans ce sens que nous paraît s'exprimer la Correspondance auțrichienne, organe semi-officiel qu'il convient de citer en présence de la phase nouvelle où est entré le différend turco-russe :

« Si le gouvernement impérial russe déclare qu'il considérera le différend comme terminé si la Porte ottomane accepte le projet de Vienne sans modification, et si par conséquent il dépend entièrement de la Turquie de terminer le différend avec ses suites, pourvu qu'elle se soumette à la sentence arbitrale de l'Europe, nous voyons en cela une preuve irréfragable de l'amour de la paix. Dans cette situation, la Porte ottomane se mettrait en contradiction avec les intentions connues de toutes les grandes puissances européennes, si elle persistait dans son refus d'accepter le projet de note.

« Nous ne doutons pas que les ambassadeurs des grandes puissances eu

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