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avoir distribué, par la voie de la poste, la déclaration de Mgr le comte de Chambord. La cour de cassation (chambre criminelle) cassa l'arrêt de la cour de Douai. La cour d'Amiens, saisie par le renvoi de la cour de cassation de l'appel relevé par M. de Thieffries du jugement de Valenciennes, réforma çe jugement et acquitta M. de Thieffries. M. de Gastambide, procureur-général à la cour d'Amiens, s'est pourvu contre cet arrêt, et a, dans un très-long mémoire, déduit les moyens de cassation.

L'affaire revenait le 1er julllet devant la cour suprême. M. Bresson, avocatgénéral, a déclaré qu'il s'en référait aux conclusions et au mémoire de M. de Gastambide. M. Béchard, avocat de M. le comte de Thieffries, n'a pas jugé nécessaire de prendre la parole pour combattre un pourvoi qu'il a considéré comme insoutenable. La cour a, en effet, maintenu sa jurisprudence, et rejeté le pourvoi de M. le procureur général près la cour d'Amiens.

Par arrêté de M. le ministre de l'instruction publique et des cultes, en date du 28 juin, les vacances des bibliothèques publiques de Paris ci-après désignées sont fixées ainsi qu'il suit pour l'année 1853: bibliothèque SainteGeneviève, du 1er septembre au 15 octobre; bibliothèque Mazarine, du 15 septembre au 1 novembre; bibliothèque de l'Arsenal, du 1er août au 15 septembre; bibliothèque de la Sorbonne, du 11 juillet au 25 août. Les vacances de la Bibliothèque impériale, qui ne figure pas dans cet arrêté, ont lieu chaque année, du 1 septembre au 1" octobre.

Ont été nommés par de récents décrets :

Préfet du département de l'Aube, M. Belurgey de Grandville; préfet de la Lozère, M. Janvier de la Motte; préfet de la Charente, M. d'Andigné.

Une chaire de paléontologie est substituée à la chaire de botanique rurale actuellement vacante au Muséum d'histoire naturelle, qui est et demeure supprimée. M. Alcide d'Orbigny, docteur ès-sciences, est nommé à cette chaire.

On est en train de sculpter le pilier qui coupe en deux la porte centrale du portail de Notre-Dame. Dans ce pilier est ménagée une niche qui va recevoir la statue de la Ste Vierge.

C'est de ce pilier que sont mesurées toutes les routes impériales qui vont de Paris jusqu'aux extrémités de la France.

-On lit dans le Courrier de l'Ain :

Dans la nuit du 5 au 6 juin, un incendie dont les suites ont été des plus funestes, éclatait au presbytère de la commune de Charles-la-Montagne, canton d'Isernore. La servante du curé, âgée de cinquante-huit ans et malade, a péri dans les flammes.

Voici le récit de ce triste événement:

Vers trois heures du matin, M. Rocheray, curé de cette paroisse, fut réveillé par un bruit qui lui parut venir de la cuisine où couchait cette domestique, Benoite Ravet, malade depuis six mois. Il se lève et s'aperçoit que le rez-de-chaussée est en feu. L'escalier lui paraît assez solide encore pour descendre; il se précipite pour sauver la servante. Mais, à l'ouverture de la cuisine, les flammes, sortant par cette issue, prennent une telle activité, qu'il est obligé de se retirer au plus tôt en fermant la porte, ayant déjà les cheveux et les sourcils brûlés. Il appelle au secours.

Les habitants accourent, guidés par le maire, plusieurs escaladent la fenêtre du premier étage où le feu se propageait et atteignait déjà le plancher; enfin, grâce à l'activité des secours et à la proximité de l'eau, vers

cinq heures on étalt maître du feu. Lorsqu'on pénétra dans la cuisine, on trouva le corps de la malheureuse servante presque consumé et n'ayant plus une forme humaine. Cette femme, au lieu d'une veilleuse, conservait chaque nuit une chandelle allumée auprès de son lit; le feu s'est sans doute communiqué pendant son sommeil aux rideaux du lit; elle se sera réveillée, mais trop tard pour fuir.

- Le préfet du département de la Nièvre a pris un arrêté ainsi conçu: Vu notre arrêté sur la police des cabarets, du 14 avril dernier; vu les rapports administratifs parvenus à la préfecture de divers points du département;

■ Considérant que d'anciens usages locaux, passés en quelque sorte dans les mœurs de ce pays, ont consacré parmi les populations des campagnes l'habitude de traiter de leurs affaires à l'issue de la grand'messe;

« Qu'il résulte de cet usage, par une espèce de convention tacite, un point de réunion qui facilite les relations commerciales et la solution des questions d'intérêt privé, avons arrêté et arrêtons ce qui suit:

Art. 1". A dater de ce jour, dans les chefs-lieux de canton et dans les communes au-dessus de 1,000 âmes seulement, les débits de boissons de toute nature pourront rester ouverts les dimanches et fêtes pendant toute la journée, excepté le temps de la grand'messe, jusqu'à l'heure indiquée par ledit arrêté pour la fermeture de ces débits.

■ Art. 2. La présente disposition deviendra applicable à toutes les communes du département, sans distinction, les jours d'apports seulemeut.

Art. 3. Bien que l'heure de la fermeture soit indiquée dans ledit arrêté, MM. les maires pourront toujours, dans l'intérêt même de leur administrés, faire fermer les établissements susénoncés avant cette heure. En aucun cas elle ne pourra être dépassée.

■ Fait à Nevers, eu l'hôtel de la préfecture le 21 juin 1853.

« Le préfet de la Nièvre, Vicomte H. DE VOUGY. »

- Le gouvernement de Sa Majesté Britannique vient d'accorder aux capitaines Labatut et Gillet, commandant les navires de commerce français le Kémith et la Clémentine, une médaille en argent pour avoir sauvé en pleine mer et avoir ramené au Havre les équipages de la barque anglaise Dady Rowenɑ et du navire Forager.

-On écrivait de Vienne, le 15 juin:

Le départ de M. le comte de Karnicki, ambassadeur d'Autriche auprès de la Confédération helvétique, est fixé au 1o juillet. M. Steiger, chargé d'affaires de la Suisse auprès de la cour d'Autriche, a donné l'assurance que les réfugiés politiques dans le canton du Tessin en seraient éloignés. Alors le blocus sera levé et l'ordre de choses qui existait avant le 6 février dernier sera rétabli. »

- Mme Hennequin, veuve de l'illustre avocat de ce nom, décédé, il y a quelques années, vient de mourir dans un âge avancé. Mme Hennequin était le modèle de toutes les vertus chrétiennes; elle laissera parmi ceux qui l'ont connue d'inconsolables regrets. Ses deux fils, M. Victor Hennequin, ancien membre de l'Assemblée législative, et M. Amédée Hennequin, auteur de plusieurs ouvrages d'économie politique très-remarquables, assistaient leur mère à ses derniers moments.

Les obsèques de Mme Hennequin ont eu lieu à Montmorency, où elle est décédée.

On a pu voir, cette semaine, dans les rues de Marseille, un ecclésiasti→ que appartenant à la race nègre qui attirait les regards et la sympathie res pectueuse de tous ceux qui le rencontraient. On a vu, de plus, cet ecclésiastique faire au sanctuaire vénéré de Notre-Dame-de-la-Garde le pèleri nage dont se dispensent bien peu d'étrangers, et qu'à plus forte raison ne manquent jamais d'accomplir les ministres du culte de passage à Marseille. Nous apprenons que ce prêtre de race africaine est M. Moussa, attaché à la mission du Sénégal, et qu'il se rend à Rome auprès du Saint-Père pour les affaires de sa mission.

-La restauration de la grande galerie du Louvre peut être considérée aujourd'hui comme achevée. On vient de découvrir le grand fronton brisé élevé sur le pavillon dans lequel se trouve placée la bibliothèque. Dans le tympan sont sculptées en demi-relief les armes de France unies à celles de Navarre, et dans les angles les figures allégoriques de la Science et de l'Art, Tous les accessoires de sculpture sont en parfaite harmonie avec la richesse d'ornementation répandue avec tant de profusion sur toutes les parties de cette galerie par les architectes et les sculpteurs de la fin du seizième siècle.

Le Journal de Rome publiait dernièrement le texte de la convention postale conclue entre le gouvernement pontifical et celui de France, par le cardinal Giacomo Antonelli, secrétaire d'Etat du Saint-Père, et M. le comte Alphonse de Rayneval, ambassadeur de S. M. Napoléon III, empereur des Français, près le Saint-Siége. Entre l'administration des postes pontificales et l'administration des postes de France, il y aura lieu à un échange quotidien de lettres, de journaux, d'imprimés de toute sorte par voie de terre. La transmission de la correspondance de l'armée d'occupation par la voie de Toulon et de Civita-Vecchia et vice-versa, continuera de se faire suivant les règles établies, tant que dureront les circonstances exceptionnelles qui y ont donné lieu, etc.

Dernières nouvelles.

Hier, au milieu de la foule qui se trouvait à la porte du théâtre de l'Opéra-Comique, où assistaient LL. MM. l'Empereur et l'Impératrice, la police a arrêté dix à douze individus, appartenant à d'anciennes sociétés, qui essayaient de troubler l'ordre. La justice est saisie. (Patrie.)

Politique de la Restauration en 1822 et 1823, PAR LE COMTE DE MARCELLUS, ANCIEN MINISTRE PLÉNIPOTENTIAIRE. (Suite et fin. Voir le no 5,546.)

Les lettres de M. de Marcellus n'empruntent pas seulement leur intérêt à la question d'Espagne: elles courent du Foreign-office à mille sujets divers, et entremêlent de piquantes anecdotes ou de scènes finement tracées le récit politique. « N'oubliez pas que le roi aime les détails, les historiettes, les noms propres,» lui avait écrit M. de Châteaubriand. M. de Marcellus répond merveilleusement au conseil : le Parlement, l'aristocratie, l'opposition, les intri

gues de la Bourse, les violences des journaux, les fêtes, les meetings, les soirées littéraires de Miss White, les aventures de M. Bankes les bals par souscription de lady Jersey en l'honneur des Cortès, les hommes et les choses, tout se succède et s'anime sous la plume du chargé d'affaires. Ses lettres sont une chronique élégante et vive de la société de Londres en 1823. On y voit passer, comme dans une galerie, les principales figures de l'Angleterre, chacune marquée d'un trait qui la désigne et qui la peint. Au premier rang se tient Georges IV.

Ce prince, homme d'esprit, souffrait mal ses ministres : il n'avait pas oublié la part que M. Canning avait prise au procès de la Reine. Si, pour obéir aux nécessités constitutionnelles, il le laissait faire au conseil, il prenait sa revanche en public, et redevenait Roi par l'épigramme. Un soir, il y avait bal à la cour. M. de Canning, toujours à ses préoccupations politiques, avait entraîné M. de Marcellus loin du salon de danse, et recommençait ses prophéties sur la guerre d'Espagne. Le Roi les aperçoit, et s'approchant: «Ah! mon cher Marcellus, s'écrie-t-il, les choses ont bien changé de face depuis que nous ne nous sommes vus. Vous triomphez en Espagne, et j'en suis ravi.... Mais on prétend que le Roi Ferdinand a repris pour ministres, à Cadix, les gens qui l'ont déposé à Séville : c'est une faiblesse que je n'imiterai jamais. On a voulu, quant à moi, me faire passer pour fou, et vous en savez mieux que personne l'oc casion et la cause. Mais je le disais tout à l'heure à lord Liverpool. Si mes ministres venaient à déclarer ma folie, je pourrais bien reprendre mon bon sens, mais jamais mes ministres... » puis, redoublant d'ironie, il prenait à partie le gouvernement anglais, et accablait, chemin faisant, le premier ministre de sa verve impitoyable. On se figure l'embarras de M. Canning: il ne retrouva son esprit, que lorsque le Roi se fut retiré : « Le gouvernement représentatif, dit-il vivement à M. de Marcellus, est encore bon à une chose que Sa Majesté a oubliée. Il fait que des ministres essuient sans répliquer les épigrammes d'un roi, qui cherche à se venger ainsi de son impuissance...»

La mobilité de M. Canning faisait fort à sa renommée. M. Brougham, « le grand moqueur (1), » lui reprochait un jour ses tergiversations dans une question particulière, et ce seul mot avait soulevé des orages au sein du Parlement : c'est qu'un tel reproche était la plus cruelle injure qu'on pût adresser à un homme politique. Il fallait tout le talent de M. Cânning pour braver l'heureuse déconsidération qui s'attachait en Angleterre aux changements de partis, et préservait ce pays de ces scandaleuses apostasies trop fréquentes ailleurs. Les lettres de M. de Marcellus font naître naturellement la comparaison entre M. Canning et son collègue, le duc de Wellington, (1) Châteaubriand.

les deux caractères les plus opposés : l'un, qui ne sait pas se dominer, qui tour à tour recule, avance, recule pour avancer encore au delà même de sa pensée; l'autre, tout d'une pièce, parlant peu, mais d'un mot jetant la lumière, plein de mesure à la fois et de résolution, suivant sa ligne à travers les partis, et demeurant, parmi leurs emportements, comme sur le champ de bataille, toujours de sangfroid.

La communauté des goûts littéraires resserrait les liens d'amitié de M. Canning et de M. de Marcellus. Ils conversaient ensemble de l'étude des lettres et des jouissances de la retraite : c'élait pour M. Canning un délassement aux déplaisirs du pouvoir. Parfois, rappelant avec tristesse les stériles agitations de sa vie, les amertumes cachées au fond des grandeurs et le silence où va se perdre tout ce bruit, il se prenait à répéter ces beaux vers:

Hi motus animorum atque hæc certamina tanta
Pulveris exigui jactu compressa quiescent (1).

Réflexions d'un moment! elles n'allaient pas plus loin que de son jardin de Glocester-Lodge à Westminster, et la pensée d'un triomphe oratoire effaçait Virgile ou Shakespeare,

Les souvenirs de l'antiquité se mêlent à la correspondance de M. de Marcellus avec M. de Châteaubriand, comme à ses entretiens avec M. Canning. Le grand écrivain apparaissait toujours sous le ministre des affaires étrangères. Sans parler de ces traits étincelants qui se retrouvent, par habitude de génie, jusque dans ses dépêches, M. de Châteaubriand aimait ces retours vers les Muses, et personne n'était plus à même que M. de Marcellus de lui en offrir l'occasion. Apprenant la réorganisation des agences consulaires dans le Levant, M. de Marcellus lui rappelle les îles chantées par Homère, Naxos hérissée d'écueils, Lesbos la divine, Lemnos d'un difficile abord, et l'humide Samos. Ces noms éveillent M. de Châteaubriand à ses premiers enthousiasmes: «... Vous dites vrai, la Grèce apparaît toujours comme un de ces cercles éclatants qu'on aperçoit en fermant les yeux... O ubi campi !... Quand retrouverai-je les lauriers-roses de l'Eurotas et le thym de l'Hymette? Là je n'entendais que le bruit des vagues du Pirée vers le tombeau détruit de Thémistocle, et le murmure des lointains souvenirs!... Voilà le poëte, inséparable de l'homme d'Etat, et trompant les soucis des affaires par les réminiscences du passé. Voici maintenant l'homme privé.

M. de Marcellus pressait depuis longtemps M. de Châteaubriand de régler les comptes de son ambassade... « Il me semble que vous les avez réglés, soldés, et que je n'ai plus rien à y voir, » lui répond enfin le ministre, s'imaginant toujours qu'on lui parle de dettes.

(1) Tous ces grands débats, tous ces mouvements des esprits et des cœurs, un peu de poussière qu'on jette les étouffe, et en voilà pour jamais.

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