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du sacrifice, et on ne crcit guère à tous ces martyrs qui s'infligent un trône. Guillaume semblă ne pas sentir l'ambiguité de sa position; il mûrit longtemps son projet, il l'exécuta froidement, sans phrases, comme un homme décidé à vaincre. Un seul instant il rut troublé; Jacques à moitié abattu lui écrivit, la lettre était courte et rédigée en langue française dans les formes diplomatiques par un secrétaire : « J'ai reçu bien des lettres du roi, dit le prince d'Orange avec une émotion peu habituelle chez lui, mais elles étaient toutes écrites de sa main et en anglais; » puis l'émotion passa, et il rentra dans le silence comme dans son rôle.

M. Macaulay a raison: « C'est dans la haine que Guillaume por<«tait à la France qu'il faut chercher l'explication de sa conduite à l'égard de l'Angleterre. » Guillaume avait gémi de voir l'Angleterre indifférente au milieu de la conflagration du continent et enchaînée à ses rivages par la politique de Jacques II; et, comme sa grande affaire était de trouver des ennemis à Louis XIV, il résolut d'envahir l'Angleterre elle-même et de la lancer sur ces champs de bataille où il avait réuni toute l'Europe contre un seul homme.

Ajoutez à cela que la religion calviniste avait puissamment agi sur lui; il se croyait prédestiné, et les docteurs de la Haye et d'Amsterdam ne cessaient de lui répéter: Que le même pouvoir qui avait dési«gné Samson, dès avant sa naissance, pour être le fléau des Philistins << et qui avait arraché Gédéon aux travaux des champs pour châtier « les Madianites, avait aussi choisi Guillaume d'Orange pour êtres « le champion de toutes les nations libres et de toutes les Eglise « fidèles ». Doctrines dangereuses, et qui tendent à dépraver la conscience et à rabaisser la dignité de l'homme! La Réforme les avait propagées; elles faisaient le fond même du rigorisme inflexible de Calvin, et Luther avait débuté dans ses nouveautés par un traité sur le serf arbitre. Il est aisé de voir que, la prédestination une fois admise, la liberté de l'homme est en péril; la fatalité antique pèse sur ses actes, il n'a plus ni responsabilité ni mérite, il n'est plus qu'un instrument entre les mains de la nécessité qui le pousse. Comme toutes ces erreurs ont dans la pratique un contre-coup terrible, on mêle les inspirations du ciel à toutes les passions de la terre, les désirs de la haine ou les calculs de l'ambition deviennent les œuvres de Dieu, la sainteté du but justifie les moyens, et il arrive que l'homme, égaré par une vocation chimérique, met au sein de ses sophismes une sorte de conscience et trouve la sécurité dans le crime. Le prince d'Orange suivit invariablement sa ligne et ne rencontra pas le crime; il dut son innocence à la fuite de Jacques II.

Guillaume ne voulut pas être roi pour lui-même; une fois sur le trône, il ne cessa de regretter sa chère Hollande, et le séjour de Windsor lui semblait un exil quand il pensait à ses bois de Loo; J'ai pris avant hier un cerf dans la forêt avec les chains du Pr. de

« Deum., écrivait-il avec force fautes d'orthographe à son ambas«sadeur à Paris, et ay fait un assez jolie chasse, autant que ce vilain paiis Windsor le permet. » Il voulut être roi contre le roi de France.

Plusieurs partis divisaient la chambre des Lords et la chambre des Communes; deux, surtout, tenaient les esprits en suspens: Marie, fille de Jacques II et femme du prince d'Orange, serait-elle proclamée reine, son mari ayant le titre de roi tant qu'elle vivrait avec telle part de pouvoir qu'elle jugerait bon de lui conférer? ou bien serait-il lui-même appelé à la couronne conjointement avec elle? Guillaume refusait de s'expliquer. Lord Danby, partisan de la royauté de la princesse Marie, aborda un officier hollandais et lui demanda ce que pensait son maître. L'officier hésita; puis, pressé par son interlocuteur: « Je ne peux que deviner les sentiments de Son Altesse, dit-il; si vous voulez savoir ce que je devine, je devine que le prince n'aimera pas beaucoup la place de gentilhomme de la chambre de sa femme; du reste, je ne sais rien. - Mais moi, je sais quelque chose maintenant, dit Dauby, j'en sais assez, j'en sais trop mème... » Cependant la discussion durait toujours; spectacle mémorable que celui de ces Lords et de ces Députés d'Angleterre, Whigs et Tories, ne pouvant se résoudre à porter atteinte à la vieille Constitution de leurs pères et à faire un roi! Guillaume se lassa le premier; sa froide et impatiente ambition, poussée à bout par toutes ces lenteurs, se décida à rompre le silence. It fit appeler Halifax, Danby, Shrewsbury et quelques autres hommes importants, passa en revue les combinaisons proposées, examina cette espèce de viceroyauté qu'on parlait de lui donner sous la suzeraineté de sa femme, et la repoussa. « Il ne pouvait s'abaisser, dit-il, jusqu'à un pareil poste. Il avait pour la princesse autant d'estime qu'un homme peut en avoir pour sa feume, mais il n'accepterait pas même d'elle une position précaire et subordonnée dans le gouvernement; sa nature s'opposait à ce qu'il se laissât attacher aux cotillons, même de la meilleure des épouses. Il ne tenait pas à se mêler des affaires d'Angleterre; mais, s'il consentait à y jouer un rôle, il n'en voyait qu'un seul qu'il pût honorablement et utilement accepter. Si les Etats du royaume lui offraient la couronne, sa vie durant, il l'accepterait, sinon il retournerait sans se plaindre dans sa patrie. >>

La révolution de 1688 était consommée; les Etats du royaume, réunis à Westminster sous le nom de Convention, revendiquèrent dans la déclaration des droits les grands principes de la Constitution anglaise, et appelèrent Guillaume et Marie, prince et princesse d'Orange, à la succession royale.

La princesse Marie arriva de Hollande et entra à Whitehall; et, comme s'il fallait qu'il y eût partout une prise à la grande ironie de Pascal et qu'on retrouvât au milieu du bouleversement des empires

les faiblesses de l'humanité, «< on la vit montrer un plaisir enfantin « de se voir la maîtresse d'une si belle maison, courir de chambre « en chambre, fureter dans les cabinets, examiner le couvre-pied du lit de parade, sans avoir l'air de se rappeler par qui ces splendi« des appartements étaient habités naguère. » Jeux effrayants des révolutions! Oubli plus effrayant encore du cœur humain! c'était devant cette belle maison dont Marie était si fière de se voir maîtresse, que la tête de son aïeul était tombée, et son père venait d'échanger ce lit de parade contre la couche solitaire et dure de l'exil! La fille du roi bauni aurait dû se souvenir des paroles que Charles I, allant mourir, avait adressées dans ce palais de Whitehall au dernier de ses enfants, le duc de Glocester: «Ils vont couper la tête à ton père; << peut-être te voudront-ils faire roi; mais tu ne peux pas être roi « tant que tes frères aînés, Charles et Jacques seront vivants. » Sr.-H. MERCIER DE LACOMBE.

L'ouvrage de Charles Turner Cooke, médecin anglais, traitant des propriétés médicales de la graine de moutarde blanche, est des plus intéressanst. Ecrit par cet habile praticien en vue de rendre service à l'humanité, il relate tontes les observations qu'il a faites sur l'efficacité de ce remède; èn le lisant on comprend de quelle utilité est la Graine de moutarde blanche pour la santé en général et le bien-être que l'on peut en éprouver en l'employant convenablement, il ajoute quelques faits curieux qui prouvent que ce traitement a réussi dans des cas où tous les autres avaient échoué. Il est aujourd'hui à sa 7°dition, c'est dire la vogue qu'il obtient.

M. Didier, s'étant guéri d'une maladie jugée incurable, a fait traduire cet ouvrage en cinq langues. - - S'adresser, Galerie d'Orléans, 32, Palais-Royal. -Graine, 2 fr. le kilo; Ouvrage, 1 fr.; 1 fr. 25 c. franco.

- Magasin spécial de Thés de choix, à des prix très-modérés; Chocolat fabriqué à froid. Maison Caron, 8, rue de la Bourse.

BOURSE DU 30 AOUT 1853.

4 1/2, à terme, ouvert à 105 25 fermé à 105 30.

3 0/0, à terme, ouvert à 80

105 30

25

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plus haut, 105 30

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Au comptant, il reste à 105 20. plus haut, 80 25 plus bas, 80 20 - fermé à 80 25. Au comptant, il reste à 80 20. Valeurs diverses: Obligations de la Ville (1849), à 1,120 1,120 ».

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Fonds étrangers: Rome, 5 0/0 ancien, 97 »; nouveau, 98 gigne, 5 0/0, 98 )) - Espagne, 5 0/0, j. j. 1852, 40 On a coté le 4 0/0 à »

Actions de la Banque, 2,850 ».

PARIS

» (1852), à

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L'un des Propriétaires-Gérants, CHARLES DE RIAN CEY

→ IMPRIMERIE DE H. V. DE SURCY ET CRUE de sèvres, 37.

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L'AMI DE LA RELIGION.

Affaires religieuses de la Nouvelle-Grenade.

Depuis l'année 1849, où les idées socialistes et une malheureuse désunion dans le parti conservateur firent tomber le pouvoir entre les mains des démagogues, l'Eglise, dans la Nouvelle-Grenade, n'a cessé d'être soumise aux plus rudes épreuves.

Nos lecteurs connaissent les actes d'oppression par lesquels l'élu des socialistes grenadins, le général Lopès, a travaillé à émanciper l'Eglise catholique et à déraciner la théocratie. Après l'avoir dépouillée de ses biens, le président, de concert avec le congrès, l'a gratifiée de trois mesures qui, disait-on, devaient à jamais garantir la dignité, l'indépendance et la liberté de ses ministres. D'un côté, le choix du clergé paroissial fut abandonné au suffrage universel et direct; de l'autre, on supprima l'immunité ecclésiastique et on chargea les tribunaux civils de juger et de punir les prêtres soupçonnés de faire un mauvais usage de leurs fonctions ecclésiastiques, et les prélats accusés d'erreurs commises dans l'exercice de leur ministère (1); puis, toujours sous prétexte de consacrer la plénitude de la liberté individuelle, on proserivit toutes les communautés religieuses fondées sur le secret, sur la délation mutuelle et sur l'obéissance passive (2). Cette dernière loi supprimait en fait la liberté d'association pour les religieuse catholiques; mais la Compagnie de Jésus était seule proscrite en termes exprès. Là aussi, elle a eu l'honneur de compter les ennemis de la société au premier rang de ses adversaires.

Ces mesures eurent pour résultat immédiat de provoquer les protestations des six Evêques de la Nouvelle-Grenade et de leur inétropolitain, Mgr de Mosquera, l'illustre archevêque de Bogota. Le gouvernement y répondit par la confiscation et l'exil, et tous ces prélats, à l'exception d'un seul, vieillard octogénaire, que ses infirmités ont préservé de l'ostracisme, ont dû quitter leurs diocèses et se réfugier sur une terre étrangère.

Cet état de choses était trop violent pour pouvoir être durable. Le gouvernement de la Nouvelle-Grenade a semblé le comprendre, et le congrès démocrate de ce malheureux pays a voté, le 10 juin dernier, un ensemble de nouvelles mesures qui témoignent d'un commencement de réaction contre les lois injustes adoptées en 1851. Malheureusement, comme on va le voir, la réparation est loin d'être suffisante et de donner satisfaction complète aux justes récla mations des Evêques et des catholiques. Voici la traduction de cette

(1) Lois votées les 14 et 27 mai et 1er juin 1851.

Loi du 9 mai 1851.

L'Ami de la Religion, Tome CLXI.

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loi dont le Freeman's-Journal de Now-York, a publié le texte dans son numéro du 4 août :

Le Sénat et la Chambre des Représentants de la République de la Nouvelle-Grenade, assemblés en congrès, décrètent :

Art. 1o. A dater au 1er septembre prochain, toute intervention cessera de la part des autorités nationales et municipales, pour élire ou présenter les candidats destinés à remplir les bénéfices ecclésiastiques. Il en sera de même pour le règlement des affaires concernant la pratique du culte catholique, ou la pratique de tout autre culte qui pourrait être adopté par lés habitants de la Nouvelle-Grenade, conformément à la liberté de conscience qui leur est garantie par la section 5 de l'art. 5 de la Constitution.

Art. 2. Il est interdit de lever des contributions forcées, pour le soutien d'aucune religion ou pour l'entretien de ses ministres. Mais les engagements qui pourront à l'avenir être contractés volontairement par les sectateurs d'un culte quelconque, au bénéfice de ce culte et de ses ministres, seront considérés comme étant de la nature des engagements individuels, Let les autorités de la République veilleront à leur observation de la manière prévue par la loi.

« Art. 3. Les prélats ecclésiastiques, les ministres ou les fonctionnaires de quelque religion ou quelque culte que ce soit, sans distinction de rang, de condition et de dignité, demeurent sujets aux lois de la République, tant en juridiction civile que criminelle, et ils sont amenables devant la même autorité judiciaire et soumis à la même procédure que les Grenadins appartenant à l'ordre des laïques.

«Art. 4. Les églises de paroisse, les cathédrales et les biens et revenus qui leur sont maintenant attachés seront dorénavant la propriété des habi• > tants catholiques du district respectif du diocèse correspondant, avec la seule exception des églises qui ont un patron spécial en vertu de leur fondation.

« Art. 5. Aucune corporation religieuse n'a un caractère officiel dans Nouvelle-Grenade.

Art. 6. Aucun acte de coërcition ne pourra être pratiqué à l'avenir, 'de la part des ministres d'un culte ou des membres d'une communauté, en violation des libertés garanties aux Néo-Grenadins par l'art. 5 de la Constitution; et les fonctionnaires publics respectifs feront cesser une pareille violation aussitôt qu'elle parviendra à leur connaissance.

Art. 7. Le pouvoir exécutif ne recevra aucun agent du gouvernement pontifical, à moins qu'il n'ait un caractère purement diplomatique, et dans ce cas, pour traiter uniquement des affaires internationales.

Art. 8. Comme exception à cette loi, la prohibition pour les Pères de la Compagnie de Jésus d'entrer sur le territoire de la République demeure pleinement en force et en vigueur.

«Art. 9. Les pénalités mentionnées dans les art, 202, 203, 204, 207 et 209 de la loi n° 4, vol. 2 du Code général, sont applicables non-seulement aux offenses commises contre le libre exercice du culte catholique, mais aussi aux offenses commises contre le culte ou les ministres de toute autre rellgion, dans les cas et les circonstances déterminés par la loi.

Art. 10. A dater du 1 septembre de la présente année, il sera interdit de recouvrer, dans aucun district ou village de la République, aucune contribution obligatoire pour le soutien de la religion et de ses ministres ; toutes

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