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étole, traversant les rues de la cité en chantant les litanics du sacerdoce. A la cathédrale, le clergé a pris place au milieu de la nef, dans une enceinte réservée. Un autel avait été dressé en avant du chœur. A sept heures Mgr l'évêque, assisté de ses deux archidiacres, MM. Crosnier et Sergent, a commencé la messe, à laquelle tous les prêtres ont communié, après avoir auparavant renouvelé, entre les mains du pontife, les promesses de leur cléricature.

Après la messe, Monseigneur est monté en chaire. Sa parole a été, comme toujours, vive et pénétrante. A la fin de son discours, il a annoncé que le synode allait commencer. C'était la première fois, depuis bien des années, que l'antique cathédrale voyait sous ses voûtes une assemblée synodale.

Les prières préparatoires achevées, l'archidiacre est monté à l'ambon, a lu le décret d'ouverture et proclamé les noms des ministres du synode. Le soir, un sermon du R. P. Petétot, annoncé pour cette circonstance, avait attiré un assez grand nombre de fidèles; l'objet de son discours a été de prouver que l'Eglise romaine possède seule les caractères de la véritable Eglise.

Nouvelles et Faits divers. ·

Le clergé belge et la ville de Bruxelles viennent de faire une perte qui, pour avoir été prévue depuis quelque temps, n'en est pas moins vivement ressentie. M. de Coninck, doyen et curé primaire de SS. Michel et Gudule, est mort à la suite d'une longue et douloureuse maladie, qui, vers la fin, s'était, dit-on, compliquée de gangrène. Ce digne ecclésiastique n'était âgé que de 55 ans, et les regrets de tous ceux qui l'ont connu, le suivront dans la tombe.

-Un jeune prêtre du diocèse de Lyon, dont plusieurs de nos amis avaient pu apprécier les vertus, M. l'abbé P. Bonjour, membre de la Congrégation dite les Missionnaires chartreux, fondée par le cardinal Fesch, vient de mourir à la maison de campagne de ses parents, au quartier de Montolivet. Né à Rive-de-Gier en 1826, élevé au sacerdoce depuis trois ans, son zèle dans l'accomplissement de ses devoirs et du ministère que lui avaient confié ses supérieurs avait été fatal à sa santé. Venu dans le Midi pour y trouver un climat plus doux, il a succombé trois jours après son retour des EauxBonnes, où les médecins l'avaient envoyé. Le R. P. Amédée, capucin, et le frère Saint-Césaire, de la nouvelle Congrégation de Notre-Dame de Bon Secours, ont passé la dernière nuit auprès du bienheureux, comme l'appellent les bons habitants de Montolivet; ce mot et les larmes que la triste nouvelle a fait répandre dans ce quartier sont le plus digne éloge du jeune et digne prêtre lyonnais.

L'artiste éminent auquel on doit la belle figure du Génie de la navigas tion, M. Daumes, de Toulon, vient de donner une preuve nouvelle de la flexibilité et de la rare énergie de son talent. Parmi les quatre groupes ́équestres qui ornent le pont d'Iéna, et qui ont été découverts tout récemment, on remarque celui qui doit rappeler le cheval de guerre des Romains; souplesse et force dans l'animal, ardeur contenue dans le personnage qui l'accompagne, l'artiste a su tout réunir dans sa noble composition.

– M. Visconti a été élu membre de l'Institut, section des beaux-arts, par 23 votants contre 12.

La commission supérieure d'encouragement et de surveillance des Sociétés de secours mutuels a été reçue dernièrement, en audience particulière, par l'Empereur.

Elle a été présentée par M. le ministre de l'Intérieur.

M. Rouher, vice-président de la commission, a lu le rapport annuel sur la situation morale et financière des sociétés de secours mutuels.

L'Empereur a félicité la commission du succès avec lequel elle remplit la mission dont il l'a chargée, et il a remis au rapporteur, M. le vicomte de Melun, la croix de la Légion d'honneur.

Une affiche signée du nouveau préfet de la Seine, annonce que l'adjudication définitive du château et du domaine de Neuilly aura lieu le 17 août. Cette propriété, qui fut pour ainsi dire le berceau de la royauté de Juillet, est morcelée en quatorze lots.

On lit dans l'Akhbar.

« Le R. P. Brumauld, directeur des maisons d'apprentissage de BenAknoun et de Bouffarick, vient d'inventer un système de noria qui promet d'être extrêmement avantageux par sa simplicité, son économie et ses rẻsultats. Toutes les personnes qui ont vu fonctionner ce système à BenAknoun et à Bouffarick en ont jugé ainsi. Plusieurs sont même d'avis qu'il y aurait lieu de prendre un brevet d'invention.

« Mais, dans la pensée du R. P. Brumaud, il y a quelque chose de mieux à faire c'est d'initier immédiatement et gratuitement les colons à ce secret, et nous sommes autorisés à annoncer que les personnes, et particulièrement les ouvriers mécaniciens, qui se présenteront dans les deux établissements ci-dessus, pour voir et examiner le système dont il s'agit, y seront bien accueillies.

« Dans un pays où l'eau est à la fois si rare et si précieuse et où l'administration encourage de tout son pouvoir l'établissement des norias, la déCouverte du P. Brumauld a un incontestable intérêt. C'est un service rendu à la colonie et qui vient s'ajouter à ceux dont elle est déjà redevable à l'habile et iniatigable fondateur de l'orphelinat de Ben-Aknoun. »

SALON DE 1853.

(Second et dernier article.)

Le temps a fui avec sa rapidité accoutumée: les deux mois de l'Exposition sont terminés. Deux mois, c'est bien peu pour les gens occupés qui n'ont à eux que le dimanche; c'est peu aussi pour les amateurs consciencieux qui veulent voir sans précipitation comme sans parti pris et faire à chacun la bonne mesure de l'impartialité. Hâtons-nous d'adresser notre adieu aux œuvres qui avaient éveillé notre attention et qui, même après l'heure où vient d'être dissous le parlement de l'Art, doivent nous laisser un souvenir.

Déjà nous avons fait parcourir à nos lecteurs le cercle des sujets religieux, el nous n'avons pas dissimulé le regret que nous éprouvons de voir la plus haute expression du génie artistique tombée au niveau de la médiocrité. Cependant la peinture dite d'Histoire offre peut-être des signes plus frappants de décadence. Au moins le genre religieux a-t-il la ressource précieuse de la fresque, qui nous a valu

les grands et consciencieux travaux des Orsel, des Adolphe Roger, des Perrin, des Hyppolite Flandrin, c'est-à-dire une rénòvation complète dans un sens profond et savant, tenant le milieu entre l'expression ascétique de Cimabué et la forme élégante de Raphaël. Mais, ce qu'on est convenu d'appeler l'Histoire s'en va de jour en jour,

D'abord, l'Histoire n'a jamais été très-catégoriquement classée : elle touche à des sujets très-divers, et s'entend surtout de ce qui a un caractère noble et relevé. Demandez à notre Ecole actuelle cette dernière qualité; vous risquerez fort de n'être pas satisfait. Nos mœurs modernes, la forme de nos maisons, la division des fortunes, tout nous entraîne vers les choses jolies, petites, un peu bourgeoises: le Genre, le Paysage et le Portrait ont détrôné l'Histoire. C'est qu'aussi l'Histoire demandait beaucoup de place, et qu'aujourd'hui l'on ne saurait guère où la loger. Si on aperçoit encore de vastes toiles, c'est en vertu d'une bienheureuse commande qui leur assi gne d'avance une muraille de refuge.

Ainsi, l'Ambroise Paré, de M. Matout, fera partie de la décoration du grand amphithéâtre de l'Ecole de Médecine; et, pour parler franchement, il y sera mieux placé qu'il ne l'était à l'Exposition des Menus Plaisirs. Cette représentation, sur des proportions si vastes, de la première application de la ligature aux artères après l'amputation pourra charmer les yeux des chirurgiens mais le public veut autre chose.

En fail de vastes compositions d'Histoire, nous préférons assurément celle de M. Signol: les Législateurs sous l'inspiration évangéli– que. Cette œuvre est attendue par le Sénat, et puisse-t-elle lui rappeler constamment la véritable source des bonnes lois. Oa comprend aisément tout ce qui s'attache de difficultés à un sujet qui doit rendre par des formes plastiques une idée abstraite et concentrer ce que les siècles ont éparpillé, comme, dans le cas dont il s'agit, tous les législateurs depuis Jésus-Christ. On le voit, le cadre est large, et il a fallu toute l'habileté de M. Signol pour trouver l'unité dans la multiplicité.

La place nous manque. Nous allons être obligé non de marcher mais de courir en jetant çà et là quelques observations.

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Pourquoi cette Agrippine de M. Duveau exécute-t-elle tellement à la lettre la fameuse phrase: Feri ventrem? Son geste a choqué le public. Il est à regretter que M. Duveau ait dépensé trop d'énergie en ce sens; car il compose bien et a du coloris. L'Ecole de sainte Elisabeth, par M. Glaize, ne satisfait pas : c'est que M. Glaize, en représentant la picuse reine de Hongrie, qui instruit elle-même de pauvres enfants, ne s'est point pénétré de la poésie et presque de la sainteté de son sujet. Ces enfants sont laids, mal posés, tapageurs; ils manquent de respect et de reconnaissance. Nous eussions préféré

voir la sainte assise et procédant avec calme à ses fonctions magistrales.- La Martyre chrétienne, de M. Etex, n'est pas un tableau religieux, malgré son titre. La martyre a peur pour son enfant : ceci est point exact. Au cirque, ces sublimes suppliciés ne songeaient que. Comme détail, nous ajouterons que le lion posé sur trois pattes et en l'air, contrarie les lois de la perspective. Est-ce par respect pour les traditions de l'Institut que M. Heim s'est noyé dans eet incommensurable tableau de la Défaite des Cimbres? Qu'est-ce que cette confusion qui n'a pas même le mérite d'être celle du champ de bataille? Ces gens-là ne se battent pas, ils s'entassent et s'enchevêtrent, voilà tout. Je vois des bras, des jambes tendus, tordus: mais de lutte sérieuse, mais de tuerie terrible, je n'en aperçois pas vestige. Passons.

Nous n'hésiterions pas à reconnaître le talent de M. Moreau, qui a représenté la Fuite de Darius, si M. Moreau n'avait le tort de calquer Delacroix. Mêmes poses, mêmes effets de couleur. C'est du daguerréotype. Gare à l'esprit quand la main copie ainsi. - La Mort de Victoria Colonna, par M. Leman, est une composition sage et sérieuse. Sur le beau visage de la marquise de Pescaire on croit retrouver le souffle poétique qui dicta tant d'admirables strophes; mais la pose de Michel-Ange manque d'aisance. - Il faut ranger parmi les obscénités la Cléopâtre de M. Picou. Quoi qu'on en ait dit quelquefois, la décence dans le choix du sujet n'est pas inutile. C'est une chose si importante que le sujet ! Et par malheur, soit légèreté soit insuffisance d'esprit, la plupart de nos artistes n'y songent pas assez. Qu'ils se mettent surtout en garde contre les peintures politiques et n'aillent pas, comme M. Verdier, par exemple, représenter la Jacquerie de 1851. M. Verdier a pu se convaincre luimême de l'éloignement du public pour son vaste tableau qui afflige. le regard par des groupes hideux, forcenés, et qui ne pouvait être vrai qu'à la condition d'être laid.

Nous devous un tribut d'éloges à la composition sage de M. Ziégler la Paix d' Amiens; à la Visite du Doge chez Paul Véronèse, par й. Hamman, bon reflet de Véronèse lui-même; à la Solennité platonicienne, par M. Mussini; aux Deux Foscari, de M. Alexandre Hesse, qui reste un grand coloriste, bien qu'un peu dur de contour. Mais ce qui nous a charmé comme une surprise, c'est le retour que fait M. Robert-Fleury qui, après avoir tant exercé son imagination sombre contre le catholicisme, lui rend hommage dans les Derniers moments de Montaigne. Le célèbre philosophe est dans son lit; il a fait appeler les gentilshommes du voisinage; un autel a été dressé dans la chambre d'agonie, le prêtre célèbre le saint sacrifice et en est à l'élévation... La foi se fait jour sur le visage de Montaigne... Par ces quelques lignes, on peut juger de l'effet de ce tableau ; ajoutons que es enfants de chœur sont très-finement touchés.

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On pourrait dire que par son talent correct et raisonnable, M. Gallait, cet artiste belge qui depuis plusieurs années s'est tant signalé dans nos Expositions, appartient à la France. Mais il est peutêtre plus exact de donner pour patrie à M. Gallait l'école de Delaroche. Ce sont les mêmes procédés honorables, loyaux, patients; la même recherche de l'effet par la composition, le dessin soigné et la sobriété bien entendue de la couleur. Mais c'est aussi une certaine manière qui, nous le regrettons, sent un peu la mise en scène théâtrale. Ce d'Egmont éclairé par les premiers rayons du jour, tandis que son confesseur, l'évêque d'Ypres, reçoit sur son visage vénérable le reflet d'une lampe mourante, c'est saisissant ; et l'impression qu'on éprouve serait assurément plus forte sans le trop grand luxe d'arrangement qui se laisse deviner ici. Du reste, nous aimons à reconnaître combien la tête de d'Egmont est belle.

Dernière remarque à l'adresse de M. Gallait..... ou de ses compatriotes. Est-ce qu'il ne serait pas un peu temps de ne plus recommencer cette éternelle histoire de d'Egmont et de Horn? On pourrait finir par s'imaginer que les annales de la Flandre n'ont jamais eu d'autres grands noms à enregistrer.

Du même artiste, il y a encore le Tasse dans sa prison. - Pauvre Torquato! son visage est dans l'ombre, comme sa raison..... Le jour avare de la lucarne glisse sur les mains croisées et amaigries du poëte, sur ces doigts qui écrivirent tant d'octaves sublimes. Un escabeau, un livre rongé, des habillements usés et troués, tels sont les accessoires qui accompagnent la figure qu'on ne peut regarder sans un douloureux attendrissement.

Nous en finirons avec l'Histoire en mentionnant une œuvre trèsdistinguée la Dissolution du Parlement en 1665, par M. Charles Bazin. Louis XIV, en costume de chasse, vient, entouré de ses courtisans, mettre à la raison les turbulents parlementaires. Son attitude est fière et absolue les groupes qui expriment soit la menace, soit l'étonnement et la crainte, nous ont paru disposés avec une trèshabile entente. Ailleurs, nous avons retrouvé M. Charles Bazin comme sculpteur, comme graveur, et c'est un triple éloge que nous aimons a lui décerner.

Le GENRE est aujourd'hui le terrain sur lequel triomphe notre Ecole. C'est dans ces petites compositions faciles, agréables, que l'esprit français, et surtout l'esprit moderne, se retrouve lui-même. Ajoutons que les sympathies du public sont aussi un grand sujet d'encouragement. Tel passera devant une page d'Histoire ou un tableau religieux, qui s'arrêtera devant la Ronde d'enfants, de M. Antigna. C'est que pour goûter cette Ronde, il ne faut ni science, ni études préparatoires, mais seulement des yeux et du cœur. Charmante image, du reste, de la vie enfantine et champêtre; les types

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