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prophetia scripturæ propria interpretatione non fit (1). Elle est trop fidèle gardienne du dépôt sacré, pour abandonner la vérité du Seigneur, qui doit à jamais demeurer immuable (2), à toutes les variations, à toutes les incertitudes. à toutes les illusions du sens privé. Mais, si l'Eglise seule a reçu la puissance d'ouvrir les Ecritures et d'en fixer le sens, afin que les esprits ne flottent pas à tout vent de doctrine (3), il n'est pas moins vrai que cette divine parole est la lumière qui éclaire, qui console, qui fortifie, et qu'il convient de la distribuer aux chrétiens dans la mesure que comportent les besoins, et, si nous pouvons ainsi parler, le tempérament des âmes. Vous la présenterez aux petits et aux faibles réduite à ce qui est le lait de la doctrine, et vous la donnerez aux forts comme une nourriture plus solide et plus substantielle. Mais, pour les uns comme pour les autres, cette divine parole, en passant par votre bouche, conservera toute la pureté de son origine céleste, parce qu'elle sera toujours l'expression fidèle de l'enseignement traditionnel de l'Eglise.

En relevant, N. T.-C. Coopérateurs, les avantages de l'explication des livres, saints faite devant l'assemblée des fidèles, nous tenons à dire cependant qu'on aurait tort de ne rompre jamais le pain de la parole que de cette manière. Il faut, au contraire, le faire sous des formes variées et de plusieurs façons, ainsi que Dieu lui-même parlait autrefois : Multifariam, multisque modis olim Deus loquens patribus (4). La prédication ordinaire sur un sujet déterminé de la doctrine chrétienne ne saurait être négligée. Elle est nécessaire pour mettre dans tout son jour un point de morale ou de dogme, ou pour présenter, dans une suite de sujets liés les uns aux autres, l'ensemble des vérités de la religion, que l'on ne trouve qu'éparses dans les pages saintes, et qui sont quelquefois indiquées plutôt que clairement, exprimées. Si donc il est utile de scruter les Ecritures, parce qu'elles rendent témoignage de Jésus-Christ (5), il n'est pas possible de réduire à la seule explication du texte sacré toutes les instructions qu'on adresse aux fidèles.

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Notre désir est donc que chaque curé dans sa paroisse choisisse pendant le cours de l'année, l'époque qui lui paraîtra le plus convenable pour précher devant son peuple une suite de dix à douze conférences sur l'Ecriture sainte, selon le plan et le modèle de celles du P. Finetti. Si le succès répond à toutes nos espérances, nous pourrons plus tard offrir à notre clergé la traduction des Conférences du même auteur sur l'Ancien Testament, qui ne sont pas moins intéressantes que celles qui ont pour objet l'exposition des faits évangéliques. Quel vaste champ, en effet, ouvrent à l'orateur chrétien les grands événements de l'ancien monde la création, la chute de l'homme, le déluge, la vocation d'Abraham, les patriarches, Joseph, en Egypte, la délivrance du peuple de Dieu, son établissement dans la Terre promise, les juges, les rois, les prophètes, etc. ! Que de sujets de nobles et touchants récits! Quelle source inépuisable de saintes émotions et de réflexions édifiantes ! Vous pourrez, dès à présent, recueillir cette moisson si abondante, en appliquant vous-mêmes à l'histoire de l'Ancien Testament la méthode suivie par le P. Finetti. Des conférences sur les faits qui ont précédé la venue du Messie sont aussi nécessaires, car ces faits sont généralement moins connus des fidèles que l'histoire évangélique.

(1) 11 Pet., 1, 20. (2) Et veritas Domini manet in æternum. Psal. 116, 2. (3) Ut jam non... circumferamur omni vento doctrinæ. Ephes, 4, 14. (4) Hebr. 1, 1. (5) Scrutamini scripturas.... illæ sunt, quæ testimonium perhibent de me. Joan. 5, 39.

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Nous dirons à chacun de vous en finissant, Nos Très-Chers Coopérateurs, ce que le Seigneur disait au prophète : Clama ne'cesses, quasi tuba exulta vocem tuam (1). Les vérités sont tellement diminuées dans l'esprit des enfants des hom-. mes (2), qu'il nous faut presque recommencer l'œuvre des premiers Apôtre et vaincre peut-être de plus grands obstacles; car il est très-difficile, selon saint Paul, que les peuples qui ont été une fois éclairés, qui ont goûté le don du ciel, et sont tombés, reprennent une vie nouvelle dans le baptème de la pénitence (3). Il faut donc agiter sans cesse sur les âmes le flambeau divin de la parole évangélique. Les études que vous ferez sur les saintes Écritures, pour les expliquer aux fidèles, vous mettront sur la voie de cette méthode large et féconde d'exposition, que les Pères employèrent avec tant de succès, et dont ils nous ont laissé de si magnifiques modèles. Exposer l'enseignement de la religion, c'est en quelque sorte l'imposer, la vérité exerçant sur l'âme naturellement chrétienne une puissance qui l'entraîne et la subjugue.

La lecture de l'ouvrage du P. Finetti vous sera d'un grand secours pour la préparation des conférences que vous aurez à adresser aux peuples confiés à votre sollicitude. Nous vous exhortons à vous procurer ce livre, qui vient d'être publié, et à mettre en usage dans vos paroisses cette forme d'instruction, dont nous espérons beaucoup de fruit pour la sanctification de vos ouailles.

+J. HIPPOLYTE, Evêque de Viviers.

Fondation d'une Eglise catholique à Athènes.

Il s'est passé récemment en Grèce un fait considérable dont les circonstances et les résultats sont tout à l'honneur de la Religion catholique, du gouvernement du roi Othon et de la France. Nous devons le mentionner avec quelque détail.

Le 3 mai, la première pierre d'une Eglise catholique romaine a été posée à Athènes. Cette Eglise est dédiée à Saint-Denys l'aréopagite, premier évêque de l'illustre cité. La cérémonie a été célébrée par Mgr Alberti, évêque catholique de Syra, en présence de plusieurs hauts dignitaires de l'Etat, notamment de M. Vlakos, l'un des membres du cabinet hellénique.

On sait combien les Grecs ont gardé de défiances et d'hostilités envers l'Eglise; et il faut dire que toutes les questions qui s'agitent en Orient, dans le moment actuel, sont de nature à raviver les anciennes animosités. On sait de plus combien, dans la pratique, les schismatiques ont témoigné de leur esprit d'intolérance et d'oppression. Récemment encore, nous avons dû déplorer amèrement la condition imposée à l'héritier présomptif de la couronne de professer le schisme de Photius; condition qu'à la honte de notre temps et au mépris de la liberté de conscience, les trois grandes puissances protectrices de la Grèce, n'ont pas rougi d'accepter et de garantir, et qui mettra un des princes de la catholique Bavière dans cette al

(1) Isai. 18. 3. (2) Quoniam diminutæ sunt veritates a filiis hominum. Psal. 11.2. (3) Impossibile est enim, eos qui semel sunt illuminati, gustavernnt etiam domum cœleste.... et prolapsi sunt; rursùs renovari ad pœnitentiam. Heb. 6. 4. 6.

ternative odieuse, ou de refuser un trône, ou de renier sa foi.

Heureusement pour nos frères répandus sur la surface de l'Hellénie, il leur rest deux garanties précieuses et tout s puissantes, s'ils savent les invoquer avec courage et persévérance: ce sont les stipulations de la Constitution et les engagements de la France.

La Constitution proclame le libre exercice des cuites. « Les cérémonies de chaque culte, dit cette loi fondamentale, peuvent se faire sans obstacle sous la protection des lois. » C'est à l'abri de ce principe que les catholiques de la Grèce se sont placés, et c'est en réclamant sa rigoureuse exécution qu'ils sont parvenus déjà à obtenir des avantages considérables, que leur zèle saura développer de jour en jour.

En second lieu, la liberté spéciale du catholicisme a été l'une des conditions essentielles de l'établissement du nouveau royaume de Grèce, et c'est à la France, c'est à la monarchie très-chrétienne, c'est au gouvernement de la Restauration, que les catholiques doivent ce bienfait. Comme aussi, c'est la France qui est demeurée caution du bon et loyal accompl'ssement des clauses qu'elle a si noblement soutenues et imposées. L'Europe s'est empressée d'accéder sur ce point si important à ses justes réclamations, et les ministres plénipotentiaires de la schismatique Russie et de la protestante Angleterre, ont apposé leur sceau à la déclaration de l'envoyé du roi Charles X, parlant au nom du Protectorat séculaire de notre patrie en Orient. Voici le protocole, en date du 3 février 1830, qui constate ce grand acte:

• Lc prince Léopold de Saxe-Cobourg ayant été appelé par les suffrages réunis des trois cours de l'alliance, à la souveraineté de la Grèce, le plénipotentiaire français a réclamé l'attention de la conférence sur la situation particulière dans laquelle son gouvernement se trouve relativement à une partie de la population grecque.

« Il a représenté que, depuis plusieurs siècles, la France est en possession d'exercer, en faveur des catholiques soumis au Sultan, un patronage spécial que Sa Majesté Très-Chrétienne croit devoir déposer aujourd'hui entre les mains du futur souverain de la Grèce, quand à ce qui concerne les provinces qui doivent composer le nouvel Etat; mais en se dessaisissant de cette prérogative, Sa Majesté Très-Chrétienne se doit à elle-même, et elle doit à une population qui a vécu si longtemps sous la protection de ses ancêtres, de demander que les catholiques de terre ferme et des îles trouvent, dans l'organisation qui va être donnée à la Grèce, des garanties capables de suppléer à l'action que la France a exercée jusqu'à ce jour en leur faveur.

« Les plénipotentiaires de la Grande-Bretagne et de la Russie ont apprécié Ja justice de cette demande, et il a été arrêté que la religion catholique jouira dans le nouvel Etat du libre et pubic exercice de son culte, que ses propriétés lui seront garanties, que ses Evêques seront maintenus dans l'intégrité des fonctions, droits et priviléges dont ils ont joui sous le patronagə du roi de France; et qu'enfin, d'après le même principe, les propriétés ap

partenant aux anciennes missions françaises ou établissements français seront reconnues et respectées.

• Les plénipotentiaires des trois cours alliées, voulant donner en outre à la Grèce une nouvelle preuve de la sollicitude bienveillante de leurs souverains à son égard, et préserver ce pays des malheurs que la rivalité des cultes qui y sont professés pourraient y susciter, sont convenus que tous les sujets du nouvel Etat, quel que soit leur culte, devront être admissibles à tous les emplois, fonctius et honneurs publics, et traités sur le pied d'une entière égalité, sans égard à la différence des croyances dans leurs rapports religieux, civils et politiques. « Signé : ABERDEEN, MONTMORENCY-LAVAL, LIEVEN. » C'est donc appuyés à la fois et sur les principes de leur loi fondamentale et sur la protection de la France, que les catholiqnes, usant de la plus précieuse des libertés, ont voulu construire une église dans la capitale même du royaume hellénique. La cérémonie, quia eu lieu à cette occasion, a eu un grand retentissement. Si elle a été accueillie par la population avec calme et avec respect, elle a soulevé dans les journaux des discussions assez vives. Nous sommes loin de nous en plaindre, parce que ces débats ont fait ressortir la justice de la cause catholique.

En principe, il n'y avait pas de doute possible: le droit d'ériger une simple église ne pouvait être dénié à nos frères sans une violation flagrante de la Constitution grecque. Aussi n'est-ce pas sur ce ter in que la luite a été portée. On a demandé pourquoi l'Evêque catholique de Syra était venu à Athènes accomplir avec pompe la cérémonie de la pose de la première pierre. Of a demandé pourquoi quelques-uns des ministres avaient assisté à cette cérémonie. On a demandé pourquoi ces actes n'avaient pas été précédés d'un concordat avec le Saint-Siége.

A toutes ces questions, la presse, même hellénique, a répondu avec une impartialité et une force qui l'honorent.

En premier lieu, on a répliqué que. les catholiques élevant un édifice consacré, rien 'était plus naturel et plus légitime de leur part que de demander l'intervention de leurs premiers pasteurs pour célébrer les cérémonies que prescrit la liturgie de leur Eglise.

Secondement, on a dit qu'il était parfaitement convenable que cet Evêque, ou tout autre personnage chargé de l'ordonnance de la fête, y invitât les hommes les plus distingués de la capitale; qu'à ce titre, les ministres du roi pouvaient être compris dans les invitations et qu'il eût été étrange qu'ils n'y répondissent pas. On a ajouté même que, quant au ministre des cultes, M. Vlakos, chargé d'étendre la protection de l'Etat sur les actes extérieurs et libres de tous. les cultes, sa place paraissait désignée naturellement dans une sem

blable réunion.

Et, a ce sujet, il n'est pas sans intérêt de faire remarquer que l'Evêque qui présidait à la pompe religieuse, Mgr Alberti, avait de

mandé et obtenu sa reconnaissance officielle comme Evêque catholi- . que par le gouvernement. Une ordonnance royale l'a reconnu comme « Evêque de l'Eglise catholique de Syra et de tous les autres lieux du royaume où il ne se trouve pas d'Evêque de la même Eglise. >>

Or, cette reconnaissance, qui s'allie avec la liberté des cultes, qui ne comporte aucune immixtion du pouvoir temporel dans l'institution et l'autorité spirituelle du prélat, cette reconnaissance se fonde et sur les termes de la Constitution et sur les traités qui ont consacré l'indépendance hellénique et la fondation du royaume grec. Elle est l'application et l'exécution fidèle des conventions contenues dans les protocoles du 3 février et 1er juillet 1830, en vertu desquels «S. M. Très-Chrétienne, ayant déposé entre les mains du futur souverain de la Grèce le patronage spécial que la France est, depuis plusieurs siècles, en possession d'exercer en faveur des Catholiques Romains,» il a été stipulé que la Religion catholique jouirait dans le nouvel Etat du libre et public exercice de son culte, et que ses Évêques seraient maintenus dans l'intégrité des fonctions, droits et priviléges dont ils ont joui sous le patronage du roi de France.

Le gouvernement grec n'a donc fait que ce que le droit constitutionnel et le droit des gens l'obligeaient à accomplir.

Enfin, quant à la nécessité préalable d'un concordat avec le SaintSiége, on a déclaré que d'abord l'espoir de la conclusion d'un traité de cette nature ne devait pas être une raison ou un prétexte pour retarder ou suspendre l'exercice des droits des Catholiques, et que le gouvernement grec ne pouvait être fondé à leur dire: Nous négocions avec la cour romaine; d'ici à ce que les négociations soient terminées, les Catholiques ne construiront point d'églises, les Evêques n'en béniront pas les premières pierres, la reconnaissance du titre et des prérogatives de ces prélats n'aura point lieu. Une telle conduite ne serait ni loyale, ni légale.

Au fond, le gouvernement grec attache un grand prix à la conclusion d'un concordat. Il avait chargé M. Maurocordatos d'une mission spéciale à ce sujet, et si ce ministre n'y a pas encore donné suite, c'est qu'il a été appelé à Paris pour les discussions du traité sanitaire et de la convention postale.

Telles sont les réponses que la presse quasi-officielle d'Athènes a données aux objections des esprits forts et des fanatiques qui se rencontrent là comme partout ailleurs.

Nous avons dû les consigner parce qu'elles témoignent d'un esprit de conciliation et d'un respect pour la liberté qui sont choses peu communes par le temps qui court.

Nous les avons rappelées surtout parce qu'elles fournissent de précieux renseignements sur la protection si élevée et si généreuse que

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