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Les statues qui ornaient l'église de l'abbaye, d'abord transférées, comme les tombeaux de saint Drausin et de saint Voué, au musée des Petits-Augustins, ont été restitués à la ville de Soissons, à l'exception des statues de Catherine et de Marie de Bourbon, tantes de Henry IV, L'effigie de Catherine de Bourbon aurait, suivant M. Lenoir, été brisée en 1793; l'autre fut sauvée. Elle est placée aujourd'hui dans la partie méridionale des cryptes de l'église abbatiale de Saint-Denis, vis-à-vis le tombeau. de René d'Orléans-Longueville. Les mains ayant été brisées, ont été refaites en plâtre, Marie de Bourbon est à genoux sur un coussin; elle porte une couronne, une coiffe et un collier enrichi de pierreries, une double robe et un surcot garni d'orfèvrerie et de pierres précieuses, une fraise élégamment plissée, un manteau à col et doublure d'hermine. Le travail de sculpture est gracieux et facile. Le socle de la statue se compose, en majeure partie, d'un fragment de l'arcature du tombeau des d'Orléans dont le style ni la forme ne pouvaient cependant avoir aucun rapport. Les deux sœurs avaient une même épitaphe gravée sur marbre noir en lettres dorées, Cette épitaphe, de 1 mètre 80 centimètres de longueur sur 40 centimètres de largeur, a été conservée et encastrée dans le mur, au-dessus de la figure de Marie de Bourbon.

Cy gisent les corps de très-illustres princesses mes» dames Marie et Catherine de Bourbon, sœurs et tantes » du roi Henri quatriesme, filles de très-illustre prince › Charles de Bovrbon, duc de Vandosme, et de Françoise › d'Alençon, leur mère. La dite dame Marie movrvt > estant fiancée à Jacqve sinquiesme dv nom roy Descosse, > et la dite dame Catherine après avoir esté cinquante et › vn an abbesse de labbaye de céans, passa de ce monde » le septiesme avril 1594. Priez Dicu pour leurs âmes. »

Les autres, au nombre de cinq, sont aujourd'hui dans la cathédrale de Soissons. Deux en marbre blanc représentant l'Annonciation forment l'accompagnement du maître autel. Deux autres statues d'un fort beau style, Henriette de Lorraine d'Elbeuf et Catherine-Marie de Larochefoucauld sont placées à l'entrée de la nef principale sur un soubassement élevé en pierre blanche. En voici la description:

Henriette de Lorraine est aussi représentée à genoux, les mains jointes devant un prie-Dieu sculpté des armes de sa famille et sur lequel est étendu son livre d'heures. Elle ne porte pas le costume religieux, mais bien celui des grandes dames de son temps, le frontal, la triple gorgerette et le grand rosaire attaché à sa ceinture. A la vue du moelleux et de la souplesse des vêtements de cette gracieuse ondulation de la robe, on s'étonne, avec raison, que le marbre ait pu emprunter aussi facilement jusqu'aux nuances et aux ombres d'une draperie qui semble s'agiter. On lit, sur la bande de marbre noir, en lettres dorées, cette épitaphe :

• Ici repose le corps de très-haulte, très-puissante et > très-illustre madame, Henriette de Lorraine d'Elbeuf, > abbesse de ce royal monastère qu'elle a gouverné > vingt-six ans. Elle était fille de Charles de Lorraine › d'Elbeuf et de Marguerite de Chabot. La sincérité de › sa foy et l'étendue de sa charité l'ont rendue plus re› commandable que sa naissance. Quelque magnifiques

qu'aient été les augmentations qu'elle a faites dans › cette maison, ses vertus contribueront encore davan⚫tage à éterniser sa mémoire; elle décéda le 24 janvier a 1669, âgée de 77 ans. Requiescat in pace. >

La statue de Catherine-Marie de Larochefoucauld est revêtue de la grande chape de choeur en marbre noir et

laisse apercevoir en dessous des vêtements blancs; elle est à genoux sur un coussin. On lit, sur le socle, Guillein dict de Cambray F. Au-dessous est l'inscription suivante, gravée aussi sur une bande de marbre noir, en lettres dorées :

< Ici repose le corps de très-haute et très-illustre prin› cesse dame, madame Gabrielle-Marie de La Rochefou»cauld, fille de François de La Rochefoucauld et de › dame Gabrielle Duplessy de Liancourt qui, après avoir › été abbesse du Paraclet durant vingt-neuf ans, fut › nommée par le roy Louis XIV à cette abbaye royale > qu'elle a gouvernée neuf ans et demi; elle a fait faire ⚫ le grand autel de cette église, toutes les chapelles, > le petit chœur pour chanter l'office la nuit durant › l'hiver, le gros horloge de l'église, et en dedans de la » maison, quantité d'embellissements pour la commodité > de ses religieuses. Elle décéda le 23 novembre 1693, › âgée de 71 ans. Priez Dieu pour son âme.

Sapientiam habens, obtulit sacrificium, consummationem templi. II. Mach. 2. V. 9.

La cinquième, cataloguée au musée des monuments français sous le n° 370, gît oubliée dans un réduit ignoré, derrière l'autel du transept nord (1) de la cathédrale.

(1) Nous avons déjà exprimé plusieurs fois combien nous serions heureux de voir replacée, dans la cathédrale, cette statue trop légèrement endommagée pour être confondue avec les objets de rebut. Nous nous sommes adressés autrefois au président de la fabrique pour le prier, au nom de la piété et de la justice, d'assigner enfin une place tout à la fois digne et convenable à ce monument soissonnais. Nous n'en avons reçu aucune réponse, et rien n'a été fait pour satisfaire à une réclamation aussi légitime. Nous allons renouveler nos démarches, espérant qu'enfin notre voix sera entendue, et qu'on donnera prochainement à cette statue oubliée, ainsi qu'au sarcophage de saint Drausin qu'il faudrait aussi réclamer de nouveau, un droit d'asile et de cité dans notre grave et intéressante basilique. Fiat! fal!...

Cette statue représente Armande-Henriette de Lorraine, aussi à genoux, couverte du manteau et du capuchon de marbre noir, portant la crosse abbatiale entre ses bras. Les chairs sont en pierre tendre, ce qui a occasionné la mutilation du nez et le bris des mains. On pourrait, à peu de frais, la replacer dans la cathédrale, non loin des autres religieuses dont l'une, Henriette de Lorraine, fut sa tante. La table de marbre qui porte l'inscription a été fracturée en deux, mais sans lui causer un véritable dommage; il suffit d'en rapprocher les morceaux. On y lit:

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Ici repose le corps de très-illustre et très-puissante ⚫ princesse Armande Henriette de Lorraine, fille de › Henry de Lorraine, comte d'Harcourt et de Marguerite › du Cambout. Elle fut élevée à la piété dans cette maison royalle où elle fut faite religieuse à quinze ans, coad> jutrice à dix-sept, et abbesse à vingt-neuf. Et s'estant > attirée l'admiration de tout le monde encore plus par › ses vertus chrétiennes et religieuses que par ses autres › qualités, après avoir fait bâtir le chapitre, le logis ab> batial et fait faire les orgues, elle mourut le 19 de may › de l'année 1684, âgée de 44 ans.

Priez Dieu pour son âme. ›

Il existait encore plusieurs autres inscriptions et épitaphes, entre autres celle de madame Louise de Lorraine d'Aumale, sa parente. Elle était ainsi conçue :

« A l'honneur de Dieu et la mémoire de très haute et › très-illustre princesse madame Louyse de Lorraine, › abbesse de cette abbaye.

› Passant, arrête ici tes yeux et ta pensée. Ce tombeau › renferme le corps d'une princesse grande par sa naissance et plus grande encore par ses vertus. Sache › qu'elle sortit du monde aussitôt qu'elle y fut entrée, et

D

qu'elle en eut horreur avant que de le connaître. De > quatre-vingt- une années qu'elle a vécu, elle en a › donné quatre-vingts à Dieu dans cette sainte maison » qu'elle a gouvernée cinquante ans avec une prudence > extraordinaire. Pendant sa vie, elle a donné trois cents livres de rente à cette communauté de religieuses » pour faire célébrer, à perpétuité, un obit au jour de › son décès qui est arrivé le 25 août 1643.

Passant, honore sa mémoire, et prie Dieu pour son » âme, »

Le comte d'Harcourt et la comtesse, sa femme, y avaient aussi chacun une épitaphe, gravée sur des plaques en cuivre attachées aux boîtes de plomb qui renfermaient leurs cœurs.

« C'est icy le cœur de très-haut et très-puissant et » très-illustre Prince Henry de Lorraine, Comte d'Har» court, d'Armagnac, de Brionne, de Marsan, de Charny, › Seigneur de Conliège, Neublant, etc., Pair et Grand › Escuyer de France, Chevalier des Ordres du Roy, grand › Seneschal de Bourgogne, Gouverneur de la Haute et › Basse-Alsace et de la province d'Anjou, Général des ar

mées de Sa Majesté, et cy-devant Vice-Roy en Catalo⚫gne, dont l'histoire parle amplement à cause de ses > actions héroïques et de ses exploits mémorables qui > lui ont acquis le nom du grand comte d'Harcourt. I fut né le 20 may 1601, environ midy, et décéda le › 25 juillet 1666 en l'abbaye royale de Royaumont (où › gist son corps), (1) appartenant à messire Alphonse

(1) Nous apprenons à l'instant, et avec un véritable bonheur que la Société d'archéologie de Lorraine ayant eu connaissance de l'abandon déplorable où se trouvaient dans l'ancienne abbaye de Royaumont, devenue propriété particulière, les trois cercueils en plomb de Henri de Lorraine, celui de Louis, son fils, mort en 1718 et celui de François-Armand de Lorraine, abbé de Royaumont,

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