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Sur un autre tombeau de Ravenne, j'ai trouvé des palmiers chargés de fruits, des agneaux, des colombes, le monogramme du Christ, etc.

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Le phénix et le paon sont un emblême d'immortalité et de résurrection que j'ai vu sur plusieurs sarcophages; la couronne, un signe funéraire de la plus haute antiquité.

Le dauphin est souvent représenté sur les tombeaux, parce que ce poisson est réputé l'ami des hommes, et que le corps de saint Lucien fut retiré des ondes par un dauphin et porté au lieu de sa sépulture.

COUVERCLE D'UN SARCOPHAGE EN MARBRE,

A ST.-HYLAIRE DE POITIERS.

Tous les sujets représentés sur les sarcophages sont analogues à ceux qui se trouvaient en bas-relief ou en peinture dans les catacombes de Rome.

On peut citer, à cause de sa forme qu'on rencontre dans beaucoup d'autres, un magnifique sarcophage en marbre d'une conservation parfaite, muni de son couvercle, qui existe au musée de Bordeaux.

Ce beau sarcophage provient des caveaux de l'église St.-Seurin, dans lesquels on en trouve encore d'autres du même style.

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Ce sarcophage offre un évasement sensible depuis sa base jusqu'à son ouverture; plusieurs autres cercueils chrétiens affectent la même forme. Le devant de ce beau cercueil est divisé par des pi'astres en trois parties principales: le panneau central est occupé d'abord par le monogramme du Christ, encadré dans une espèce de couronne ou de guirlande, puis par des guirlandes de pampres chargés de fruits, sortant de deux vases et remplissant tout l'espace compris entre le monogramme et les pilastres; les deux autres compartiments sont ornés chacun de deux rangs de cannelures disposées en zig zag et séparés l'un de l'autre par une bordure.

Le couvercle en retrait sur le cercueil, prismatique et à bouts rabattus, est aussi divisé en trois compartiments. Au centre, on y a répété le monogramme du Christ avec les lettres A et ; des rameaux à feuilles en forme de cœur remplissent les deux autres compartiments : l'autre côté du toit, qui ne devait pas être en vue, n'offre que des feuilles imbriquées.

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Beaucoup de cercueils qui, comme le précédent, ne sont point décorés de personnages, sont couverts de cannelures en spirale qu'on appelle des strigiles, parce qu'elles ressemblent par leur forme à l'in

strument dont les Romains se servaient pour ôter la sueur qui couvrait leur corps et pour se nettoyer la peau dans le bain.

L'étude des sarcophages n'est-elle pas importante pour l'histoire de l'art?

Très-importante. Nous y voyons d'ailleurs les premiers pas du génie chrétien dans la sculpture, et quoique cette école ne fût pas encore dégagée des traditions païennes, elle nous offre cependant des types hiératiques bien arrêtés et une symbolique déjà compliquée. L'étude des sarcophages est donc d'une grande importance et d'un immense intérêt. Vous parlez souvent du monogramme du Christ, expliquez-nous cette figure?

Ce monogramme est celui que Constantin avait fait tracer sur le labarum: il se décompose en P (Ro) et X (chi), et se traduit par Christos; en grec, le Christ. Les lettres A et qui accompagnent ordinairement le monogramme, sont placées pour indiquer que J.-C. est le commencement et la fin, suivant les paroles rapportées dans l'Apocalypse de saint Jean: Ego sum alpha et omega, principium et finis. Tertulien a donné l'explication de ces deux lettres mystiques.

Qu'appelez-vous tombeaux arqués?

Les catacombes de Rome renferment beaucoup de tombeaux sous des

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arcs semi-circulaires; on en fit de pareils dans les murs des cryptes et des églises ce furent les plus ordinaires, je crois, dans la plupart des villes de France durant les premiers siècles du moyen-âge.

Les tombeaux arqués ont-ils été décorés de sculptures ?

Le plus souvent ils étaient très-simples et sans sculptures, sauf de rares exceptions.

Le couvercle du tombeau de Frédégonde, conservé dans les cryptes de St.Denis, ou il a été transporté, prouve que l'on a quelquefois représenté l'image du défunt en mosaïque.

Cette mosaïque se compose d'une infinité de fragments d'émaux de différentes nuances, disséminés dans un mastic préparé et coulé sur une pierre de liais. Les draperies, le contour des ornements, en un mot, tout ce qui est trait dans cette figure est formé avec des filets de cuivre incrustés : les places de la tête, des pieds et des mains sont unies, et la pierre du couvercle est restée à nu dans ces parties, mais il est évident que les pieds, les mains et la tête avaient été modelés en métal. L'usage de représenter le défunt en mosaïque s'est prolongé jusqu'au XII. siècle.

Pourquoi reste-t-il si peu de tombeaux · mérovingiens?

Parce que les églises qui en renfermaient ont été reconstruites plusieurs fois.

Les tombeaux apparents ont aussi presque tous disparu par suite de la nécessité où l'on se trouva dès le VIII. siècle de les cacher audessous du pavé des églises, où ils étaient devenus extrêmement nombreux : c'est ce que nous apprend l'un des capitulaires de Théodulphe, évêque d'Orléans, dans lequel nous lisons :

« C'est une ancienne coutume en ce pays d'enterrer les morts dans « les églises, de sorte qu'elles deviennent des cimetières. Nous défendons « d'y enterrer personne à l'avenir, si ce n'est un prêtre ou un autre « homme distingué par sa vertu. On n'ôtera pas, toutefois, les corps • qui sont dans les églises, mais on enfoncera les tombeaux et on les « couvrira de pavé, de sorte qu'ils ne paraissent point, »

Quels changements eurent lieu après le VI. siècle dans l'ornementation des tombeaux apparents?

J'ai décrit et figuré avec soin dans mon Cours d'antiquités (tome VI, p. 242 et suiv.) les tombeaux très-curieux qui existent dans la crypte de Jouarre, et dont plusieurs doivent remonter au VII. siècle; on peut consulter les figures que j'ai données dans mon Cours, on verra qu'ils ne ressemblent plus, quant aux ornements et aux sujets, aux sarcophages du Ve. et du VI. siècle.

Dans le cours du VIII. siècle, du temps de Charlemagne et de ses successeurs immédiats, les tombeaux apparents offrirent à peu près les mêmes formes qu'au VII. siècle je n'en connais guère à citer de cette époque; mais nous avons un certain nombre d'inscriptions tumulaires qui étaient vraisemblablement incrustées dans les murailles voisines des cercueils et qui ont été conservées après la destruction des tombeaux.

A en juger par celles que j'ai pu examiner, on ne gravait plus que rarement sur ces tablettes le monogramme du Christ : les inscriptions carlovingiennes que j'ai rencontrées ne sont point accompagnées des figures symboliques, que nous avons vues aux Ve., VI. et VII. siècles (les colombes, les paons, etc., etc.).

Voici deux sarcophages qui paraissent antérieurs au X. siècle, et qui donneront des spécimens de l'ornementation usitée alors.

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Sur l'un sont des espèces de roues ou de croix encadrées.

Sur l'autre on voit une croix encadrée, des arcatures, des enla

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