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TYMPAN DE L'ÉGLISE DE LA-LANDE-DE-CUBZAC (GIRONDE).

TONES VI ECCLIIS IVESVNTIN

Je ne pourrais, en si peu de mots, indiquer tous les sujets qui forment ce qu'on peut appeler l'Iconographie romane: je voudrais seulement familiariser avec le style de cès sculptures.

Voici d'autres sujets qui se rencontrent quelquefois :

Un homme affourché sur un lion dont il déchire la gueule de ses deux mains représente Samson. On sait que Samson a été pris par les Pères pour l'emblême du Christ; que sa victoire sur le lion (1) a été regardée comme la figure de la victoire que J.-C. devait remporter plus tard sur les idolâtres.

Dans le Poitou, on remarque sur les façades de plusieurs églises des cavaliers de grandeur naturelle qui occupent les arcades les plus apparentes de l'édifice (Civray, St.-Hilaire-de-Melle, Airvault, Vieux, Parthenay, Benet, Aulnay, etc., etc.), et qui soulent un personnage aux pieds de leur cheval.

Il s'est élevé déjà de longues discussions pour savoir ce que représentent ces personnages à cheval ; et comme ils sont presque tous brisés et qu'il ne reste souvent d'entier que le cheval, il a été jusqu'ici fort difficile de se prononcer. Le cavalier le mieux conservé que j'aie vu se trouve à Parthenay-le-Vieux (Deux-Sèvres).

MM. Jourdain et Duval, d'Amiens, ont publié une note sur ce sujet : peut-être serait-ce, disent ces savants iconographes, un des cavaliers de l'Apocalypse, le premier mentionné qui portait une couronne et était armé d'un arc; cavalier dans lequel les interprètes reconnaissent une figure de J.-C.

Peut-être encore serait-ce la reproduction du fait attesté par les Ecritures, liv. 2 des Machabées, chap. 3, à l'occasion de la tentative faite par Séleucus, roi d'Asie, pour s'emparer des richesses du temple.

Héliodore, chargé par le roi de cette entreprise, était entré dans le temple, et prêt à forcer le trésor, quand lui et les siens virent paraître un cheval sur lequel était monté un homme terrible habillé magnifiquement, et qui, fondant avec impétuosité sur Héliodore, le frappa en lui donnant plusieurs coups des pieds de devant.

D'autres enfin persistent à voir un saint Martin dans ce cavalier; quelques-uns en ont fait le fondateur de l'église, mais cette opinion est à peu près abandonnée. Depuis qu'on s'en occupe la question est restée indécise. La statue mutilée, sur laquelle des opinions très-divergentes ont été émises, et qui se trouve incrustée dans le mur de St.-Etienne-le-Vieux,

(1) On sait que Samson ayant un jour rencontré un lion le prit par la gueule et le mit en pieces.

à Caen, statue que je crois du XII. siècle, représentait le même sujet.

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Je l'ai retrouvé sur un des chapiteaux de la cathédrale d'Autun,

et je ne doute pas que ces figures ne soient beaucoup plus répandues qu'on ne l'avait pensé d'abord.

Ne voit-on pas diverses sculptures symboliques dans les églises des XI. et XII. siècles?

L'antagonisme entre le bien et le mal n'est pas seulement exprimé par la condamnation des méchants et la récompense des bons; on retrouve l'opposition de ces deux principes indiquée dans beaucoup d'autres sculptures. Par exemple, on voit quelquefois les vertus terrassant les vices. Les vertus, sous la figure des femmes, le casque en tête, portent des boucliers au bras gauche, et tiennent de la main droite une épée à deux tranchants qu'elles plongent dans la gueule des figures qui représentent les vices et qu'elles ont terrassées. Ce sont ordinairement des femmes qui représentent les vertus; Durand, évêque de Mende, en indique le motif dans son Rationale divinorum officiorum. Les vertus, dit-il, sont représentées sous la figure de femmes parce qu'elles touchent et nourrissent (mulcent et nutriunt).

L'image des vices se reproduit de différentes manières. L'une de ces représentations symboliques les plus singulières est celle de la femme

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UN CHAPITEAU DE L'ANCIENNE ÉGLISE SAINT-NICOLAS D'ANGERS.

dont les mamelles sont dévorées par des serpents enlacés, quelquefois par des crapauds ou d'autres reptiles (Montmorillon, Ste.

Croix de Bordeaux, St.-Cernin de Toulouse, St.-Sauveur de Dinan, St.-Jouin de Marnes, etc., etc.).

Il parait que ces images hideuses se rapportent plus particulièrement aux passions de la chair, déréglements, adultères, etc., etc. (1). Le sphinx, la chimère et le griffon, dont on voit des représentations

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si nombreuses sur nos églises byzantines, avaient été adoptés par les chrétiens comme doués du pouvoir d'éloigner les esprits malins. C'est vraisemblablement cette croyance qui a fait placer à l'entrée des églises de France, ces lions dont j'ai déjà parlé, et auxquels on supposait le pouvoir d'éloigner les ennemis invisibles ou de paralyser leur mauvais vouloir.

On peut consulter sur les idées mystiques qui se rapportaient à certains animaux, les bestiaires ou commentaires écrits au moyenâge sur ce sujet. MM. Martin et Cahier en ont publié plusieurs dans leurs Mélanges d'archéologie, et M. Hippeau vient de publier, sous le titre Bestiaire divin, un volume in-8°. qui renferme un très-grand nombre de recherches savantes sur le même sujet.

Le basilic a par devant la forme d'un coq, par derrière celle d'un serpent, habet caudam ut coluber, residuum verò corporis ut gallus,

(1) Les reptiles et surtout le serpent, étaient considérés comme l'emblême du vice; aussi, d'après leurs légendes, les premiers évêques ont-ils presque tous vaincu des serpents monstrueux; allégorie par laquelle on a voulu peindre le triomphe de la foi sur la superstition.

Saint Marcel, évêque de Paris, délivra aussi cette ville d'un serpent qui était venu d'une forêt des environs, et qui, selon la légende, avait creusé la fosse d'une dame de haute naissance, accusée d'adultère, pour dévorer une partie de son corps.

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